II. La Renaissance
Étampes port fluvial. — Fêtes et deuils. — La municipalité et les officiers
du roi. — Le maire et la maison de ville.
— Le tribunal. — Les belles favorites. — Travaux, réformes
et progrès. — Les établissements
hospitaliers. — Le collège et ses vicissitudes.
— L’Arquebuse et l’Arbalète. — La coutume d’Étampes.
— Sage administration et douloureux destin.
L’autorité et l’adresse de Louis
XI avaient enfin ramené la paix et l’ordre dans le royaume. Mais
il y avait bien des ruines à relever, en particulier dans notre
région. La belle énergie de notre race y sera déployée
avec une telle vigueur que la prospérité ne tardera pas à
renaître. Redevenu libre de disposer du comté d’Étampes,
Louis XI en fit don presque aussitôt à Jean de Foix, comte
de Narbonne, qui était digne de cette faveur. Il s’attacha ses nouveaux
sujets en leur accordant un important privilège, qui devait contribuer
au relèvement économique du pays, le droit de port. La navigation
existait depuis longtemps sur quelques rivières d’Étampes
et les chevaliers de Saint-Jacques de l’Épée avaient construit
un port, derrière leur commanderie qui occupait l’emplacement
de l’abattoir actuel et dont la rivière, non détournée
alors, était toute proche; mais il appartenait au commandeur,
qui, bien entendu, percevait des droits élevés. Déjà
Louis XI, sur le conseil du prévôt des marchands de Paris,
avait ordonné aux habitants d’Étampes de rendre navigable
la rivière d’Étampes, afin d’assurer par eau le transport
des blés de Beauce jusqu’à Paris. De grands travaux furent
entrepris; on détourna les ruisseaux qui se perdaient dans les prairies
pour les réunir à la rivière d’Étampes qu’on
canalisa et le nouveau port, [p.24] autorisé
par Jean de Foix, fut construit près des murailles. Mais de longues
années passèrent avant qu’il pût fonctionner régulièrement,
car de nombreuses difficultés surgirent, d’abord l’opposition
du commandeur de Saint-Jacques qui ne voulait pas être dessaisi
de ses droits, puis, les frais considérables d’entretien dus aux
risques d’assèchement et à la nécessité de
curages fréquents, surtout en deux points, improprement appelés
alors des gouris, où s’accumulaient des amas détritiques
amenés par ruissellement. Il s’ensuivit des requêtes sans
nombre auprès du roi ou devant le Parlement. Mais ces difficultés
vaincues ou au moins aplanies, la navigation connut un succès grandissant;
elle était lente, certes, le halage ne pouvant guère se faire
qu’à bras d’hommes et les écluses étant nombreuses
à cause des moulins, mais elle était beaucoup plus sûre
que la route terrestre, infestée de brigands. Ce fut pour notre
ville, jusqu’au milieu du XVIIe siècle, un précieux élément
de vie et de richesse. Il n’en reste aujourd’hui qu’un nom, celui du beau
mail ombragé qui occupe l’emplacement du port du XVIe siècle.
Les marchés d’Étampes augmentèrent d’importance
avec la création du port. Pendant la guerre de Cent Ans, le marché
Saint-Gilles avait été transféré place
Notre-Dame pour des raisons de sécurité, l’église
Notre-Dame ayant été en partie entourée de fossés.
La paix revenue, les habitants du quartier Saint-Gilles soucieux de
retrouver les avantages de leur marché, obtinrent du roi en 1478
qu’il fût tenu de nouveau place Saint-Gilles et bientôt
après, un arrêt du Parlement interdisait aux habitants des
quartiers Notre-Dame et Saint-Basile d’acheter ou de vendre du blé,
du vin, des draps, du bétail, en dehors du jeudi place Saint-Gilles.
Ces restrictions soulevèrent de vives protestations, des ventes
s’organisèrent place Notre-Dame malgré l’arrêt,
un huissier envoyé par le Parlement, pour en assurer l’exécution,
fut battu, blessé «d’une plaie en la teste et lui fut osté
un anneau d’or» et des procès furent entamés, dont
nous ignorons l’issue. Une transaction dut intervenir, puisqu’au XVIe
siècle, on sait qu’il se tenait deux marchés par semaine,
le samedi, place Notre-Dame, pour «les menues victuailles, beurre,
œufs, fromages, fruits et autres choses», le jeudi, place Saint-Gilles,
pour le blé, le vin et le bétail. Ce dernier marché
fut reporté un peu plus tard au samedi, sans doute parce que les
bateaux du port d’Étampes partaient ce jour-là, pour arriver
à Paris le mercredi, et ainsi le blé, comme les autres marchandises,
pouvait être embarqué aussitôt. On voit que la répartition
actuelle de nos marchés est restée sensiblement la même.
C’est également Jean de Foix qui permit aux boulangers d’Étampes
ainsi qu’aux «brenassiers», c’est-à-dire ceux qui
fabriquaient du pain de son ou de «bren», d’avoir chez eux
«des fours pour cuire le petit pain et d’autres pour cuire le gros
, moyennant une taxe [p.25] annuelle
de 6 sols parisis, alors qu’auparavant ils étaient obligés
d’aller cuire au four banal.
Jean de Foix mourut à Étampes en 1500, après avoir
combattu en Italie avec Charles VIII et Louis XII, et fut enterré
en grande pompe dans le chœur de l’église Notre-Dame. Son fils
Gaston, le héros des guerres d’Italie, ne devait posséder
le comté d’Étampes qu’un court espace de temps, puisqu’il
fut tué glorieusement en 1512 à Ravenne, de quinze coups
de lance au visage «montrant bien, le gentil prince, qu’il n’avait
pas tourné le dos». Sa jeunesse, sa séduction, ses
brillantes qualités, lui avaient gagné le cœur des habitants
d’Étampes qui lors de son entrée solennelle dans la ville,
en 1506, lui firent un accueil triomphal, dont le souvenir s’est conservé.
Deux cents cavaliers suivis de six cents petits garçons portant
des banderolles aux armes du comte allèrent au devant de lui; les
échevins le reçurent à la porte Évezard «aux
fanfares des trompettes et au son des violons et des hautbois, accompagnés
de mille cris de joie d’une multitude innombrable de personnes et qui
le suivit jusques au logis qui lui avait été préparé,
devant lequel une vache dorée jetait par ses cornes du vin, suffisamment
pour éteindre la soif de tous ceux qui assistaient à cette
cérémonie». Les frais de cette réception
furent considérables, tant pour l’achat d’écussons, de
rubans, de drap pour les robes des échevins, de taffetas pour
les bannières, de vin, tartes, pâtés et galettes,
que pour la fabrication des nombreuses pièces d’orfèvrerie
offertes au prince et la location des trompettes et ménétriers
et les travaux de peinture et de montage des échafauds, etc.
Sept ans après, c’était la reine Anne de Bretagne qui,
nouvelle comtesse d’Étampes, faisait dans la ville une entrée
moins solennelle, selon le désir qu’elle en avait exprimé.
Mais on aménagea pour elle le château, où elle devait
loger, en commandant des travaux «aux maçons, charpentiers,
pionniers et autres manouvriers»; les habitants reçurent
l’ordre « de curer les rues et ôter les fiens et de mettre des
feuilles et jonchées par les dites rues». La reine trouva
«le paysage si agréable et l’air du château si bon
qu’elle y séjourna un temps assez considérable, au grand
contentement des habitants». Mais dès l’année suivante,
en 1514, la pauvre reine mourait au château de Blois. Son corps,
pour être inhumé à Saint-Denis, fut accompagné
sur toute la route d’un long cortège, composé des princes
et princesses du sang montés sur des mules noires, des dames d’honneur,
sur des haquenées conduites par des valets de pied, des archers
du roi, qui marchaient en tète pour écarter la foule et
enfin, des Suisses de la garde, qui faisaient la haie de chaque côté,
la hallebarde sur l’épaule. Le convoi quitta Blois le 4 février
pour n’arriver que le 12 à Paris. Au passage d’Étampes, les
échevins, en robes et chaperons de deuil, les officiers de justice [p.26] et tout le peuple l’attendaient
à la porte Saint-Martin. En outre, se joignirent au cortège
des hommes qui portaient un millier de torches armoriées, quatre
cents aux armes de la reine, quatre cents aux armes d’Étampes;
les deux cents autres étaient aux armes du fameux Eudes le Maire,
de Châlo-Saint-Mard, dont nous parlerons plus loin, parce qu’elles
étaient portées par des chevaliers descendants de lui et
que leur charge consistait à venir au devant des princes morts,
de passage à Étampes, et à veiller leur corps. Le
char funèbre, qui était traîné par six grands
chevaux, houssés de velours noir croisé de satin blanc de
sorte qu’on ne leur voyait que les yeux, fut dirigé vers l’église
Notre-Dame et reconduit, après la célébration du service,
jusqu’à la sortie de la ville du côté de Paris, avec
la même pompe.
La fille aînée d’Anne de Bretagne, Claude, alors âgée
de 15 ans, devenait comtesse d’Étampes en vertu de l’acte de
la donation faite par Louis XII à la reine. Elle était
fiancée au duc de Valois, le futur François Ier, et le
mariage eut lieu quatre mois après la mort d’Anne de Bretagne,
qui, disait-on, n’y était pas favorable. Dès l’année
1515, Louis XII mourait à son tour et la nouvelle comtesse d’Étampes
montait sur le trône. Bientôt après, elle se démit
de son comté en faveur d’Arthus de Gouffier, sire de Boissy,
grand maître de France, qui porta le titre de comte d’Étampes.
Il vint dans notre ville et «pour le remercier de quelque grâce»,
on lui offrit une coupe d’argent «bien dorée d’or»,
qui avait coûté plus de cent livres et avait été
faite à Paris, et à son barbier, un étui garni
de deux rasoirs et ciseaux dorés, d’un peigne, d’un miroir et
d’un cure-oreilles d’argent. Arthus de Gouffier mourut en 1519 et Claude
de France reprit possession de son bien. Cette «bonne reine»,
comme elle fut appelée, aussi modeste, douce, effacée, que
son mari était audacieux, belliqueux et galant, n’a guère
laissé dans l’histoire que le souvenir discret de ses vertus domestiques
et c’est surtout par la prune savoureuse qui porte son nom qu’elle est
connue de la plupart de nos contemporains. Cependant, les marques de sa
bonté envers Étampes ne furent pas tout à fait négligeables.
C’est grâce à son intervention auprès de Louis XII
que notre municipalité acquit quelque indépendance à
l’égard des officiers du roi. Ceux-ci, pour la plupart, étaient
à la fois des administrateurs et des juges. Ils comprenaient d’abord
le bailli, qualifié en même temps de capitaine et gouverneur,
qui devait toujours être un gentilhomme, puis, ses lieutenants, le
lieutenant général et le lieutenant particulier, qui étaient,
le plus souvent, docteurs ou licenciés en droit, le procureur
et l’avocat du roi, dont les attributions consistaient à défendre
les intérêts de la couronne, et le receveur, chargé
seulement de l’administration des finances. A côté d’eux,
le prévôt, très ancien fonctionnaire puisqu’il existait [p.27] déjà
sous Robert le Pieux, faisait partie du conseil de bailliage, mais il avait
la préséance sur le procureur, l’avocat et le receveur
et jugeait, aussi bien en appel qu’en première instance. Il était
assisté également d’un lieutenant et les charges du garde
du scel, du greffier et du tabellion, toutes trois affermées et
consistant à percevoir des droits, étaient rattachées
à son office. Enfin, les notaires et les sergents royaux étaient
sous les ordres des officiers bailliagers et prévôtaux. En
face de ces nombreux officiers qui dépendaient du roi, la municipalité
était réduite jusqu’alors à quatre syndics, qualifiés
d’échevins sans en avoir toutes les prérogatives, élus
pour trois ans par les habitants; l’élection était présidée
par le lieutenant général du bailliage, chacun pouvait
voter, mais le conseil de bailliage, auquel étaient adjoints six
notables de la circonscription, avait le choix en dernier ressort. Il
n’y avait pas de maire alors que son existence est prouvée sous
le règne de Philippe-Auguste, comme nous l’avons vu, il ne semble
pas avoir été rétabli en même temps que l’organisation
communale au XIIIe siècle. Il n’y avait pas non plus d’hôtel
de ville; les réunions et les élections avaient lieu dans
la salle des plaids, au-dessus de la halle de la boucherie, ou bien «en
un autre lieu». Les échevins avaient pour principale fonction
d’administrer les deniers communs de la ville, mais ils ne pouvaient disposer
d’une somme supérieure à 20 sols parisis, sans une ordonnance
de justice. Ces deniers communs, comme leur nom l’indique, ne pouvaient être
utilisés que pour la communauté. Ils provenaient alors uniquement
des droits de barrage, octroi perçu aux portes de la ville sur les
chariots char gés, les bêtes de somme et le bétail, et
des droits payés sur le sel vendu au grenier d’Étampes; plus
tard, il s’y ajouta, quand il y j eut une maison de ville, le montant de
la location des greniers de cette maison, puis, le droit de courtepinte,
prélevé sur les vins. Ces deniers communs devaient servir d’abord
à l’entretien du pavé et des chemins de la ville, entretien
fort onéreux en raison de la circulation très active, puis,
aux réparations de l’enceinte et des portes et enfin, aux frais du
séjour des rois et des princes, égale ment fort élevés,
comme on a pu le voir. Le contrôle de l’emploi des deniers communs
était fait par les agents royaux et la Chambre des comptes.
Les échevins d’Étampes, supportant avec peine que la
ville d’Orléans eût acquis de nombreux privilèges
et possédât un hôtel de ville, demandèrent
aux bourgeois d’Orléans une copie des lettres qui lui accordaient
ces avantages afin de s’en inspirer pour une requête auprès
du roi. Un bourgeois d’Orléans vint à Étampes leur
apporter ladite copie et comme il ne voulut point accepter d’argent en retour,
ils lui offrirent quatre pintes de bon vin et du gibier. Et ils obtinrent
du roi Louis XII, moyennant finances d’ailleurs, le [p.28] jour du mariage de sa fille
Claude avec François, duc de Valois, une charte, qui les autorisait
à nommer un maire et à construire ou acheter une maison
commune, où ils pourraient mettre en sûreté leurs titres,
et s’assembler quand bon leur semblerait C’est ainsi que fut élu,
en 1517, le premier maire dont nous connaissions le nom, Jean de Villette,
qui était lieutenant particulier du bailliage. Cette charte donna
lieu à un procès parce qu’elle rencontra aussitôt l’opposition
du lieutenant général, du prévôt, du procureur
du roi, tous craignant l’extension des pouvoirs de la municipalité
à leur détriment. Elle accordait, cependant, peu de chose,
en fait. Louis XII avait passé adroitement sous silence toutes les
questions qui pouvaient devenir litigieuses. Les échevins désiraient
être élus sans l’intervention des officiers du bailliage:
ils ne l’obtinrent pas. Leurs ressources restaient à peu près
ce qu’elles étaient. Ils ne pouvaient prendre d’initiatives importantes
sans l’avis des officiers du roi, qu’ils eurent ainsi intérêt
à se concilier: l’élection du lieutenant du bailliage, Jean
de Villette, comme maire, est significative à cet égard.
Louis XII, comme tous les rois, voulait la collaboration de ses fonctionnaires
avec la municipalité et sa charte ne promettait rien qui y fît
obstacle. C’est ainsi qu’elle fut enregistrée finalement en 1518
et les échevins purent acheter une maison de ville, avec une somme
de 2.000 livres tournois, qu’ils furent autorisés par François
Ier à prendre sur les octrois royaux.
C’est également Claude de France qui accorda aux officiers royaux
d’Étampes l’autorisation de tenir leurs audiences dans son palais
du Séjour afin de leur donner un siège «plus convenable»
que la salle de la boucherie. L’inauguration du nouvel auditoire eut
lieu le 28 novembre 1518, en présence des officiers de toutes les
justices du bailliage et des notables de la ville. C’est là que
se trouve encore notre tribunal depuis plus de quatre siècles.
Au XVIe siècle, les assises s’y tenaient deux fois par an, sous
la présidence du lieutenant général du bailliage,
pendant une semaine, et les plaids avaient lieu tous les jours, sauf le
jeudi, le prévôt jugeant trois jours de la semaine, et les
officiers du bailliage, deux jours, ce qui montre les habitudes processives
de l’époque.
A la mort prématurée de la reine, en 1524, le comté
d’Étampes rentra dans le domaine royal. En 1526, François
Ier le donnait à Jean de la Barre, premier gentilhomme de sa chambre,
pour les bons services qu’il lui avait rendus, particulièrement
à la bataille de Pavie «en laquelle il ne l’abandonna jamais».
Cette donation, très large, puisqu’elle accordait au donataire
la perception de tous les revenus, même ceux du grenier à
sel, et le pouvoir de nommer à tous les offices vacants, rencontra
une vive opposition à la Chambre des comptes. Le roi dut faire un
commandement exprès. La Chambre ne céda que sur la question
des offices. Mais Jean de la Barre [p.29] reçut
directement de Francois Ier une part des revenus du grenier à sel
d’Étampes. Par une autre marque de la faveur royale, il fut maintenu
dans la possession de son comté jusqu’à sa mort en 1533,
en dépit d’un acte promulgué par le roi en 1531, qui révoquait
toutes les donations de terres qu’il avait consenties. Mais cet acte, comme
on pouvait le prévoir, eut toujours des applications inconstantes.
François Ier était alors sous l’empire de sa passion pour
une ancienne fille d’honneur de sa mère, Anne de Pisseleu, la
plus belle des savantes et la plus savante des belles, qui l’avait
conquis dès son retour de captivité par sa beauté
et son esprit. Elle avait épousé Jean de Brosses, issu
de la vieille famille féodale des vicomtes de Limoges, mais complètement
ruiné et ainsi fort impatient de reconstituer sa fortune par
ce rôle de mari complaisant. Tous deux obtinrent du roi, en 1534,
le comté d’Étampes, qui moins de deux ans après
était érigé en duché. Dans l’acte qui établit
cette nouvelle prérogative, François Ier déclare
qu’«il considère
que le comté d’Étampes est de belle et grande étendue,
et de bon et gros revenu, tenu et réputé une des plus notables
et anciennes maisons du royaume, dont dépendent plusieurs beaux
fiefs et arrière-fiefs et seigneuries et il veut pour la décoration
dudit royaume élever ledit comté en plus haut titre et
degré». Ces mentions flatteuses, qui contenaient certes
une part de vérité, cherchaient à masquer l’insigne
faveur que le roi accordait à sa maîtresse et l’ascendant
qu’elle possédait sur lui. Ambitieuse, avare, vindicative, elle
sut en user pour acquérir un important domaine, ruiner ses ennemis,
favoriser ses partisans et surtout les membres de sa famille, fort nombreux
puisque, son père s’étant marié trois fois, elle n’avait
pas moins de trente frères et sœurs. Aussi ne fut-elle guère
aimée de ses contemporains qui l’appelaient «la méchante»,
encore qu’elle encourageât les lettres et les arts et qu’elle eût
beaucoup de courtisans intéressés. La ville d’Étampes
ne peut lui être reconnaissante d’aucune libéralité
et la trace de la possession de son duché aurait presque entièrement
disparu, si son nom n’était demeuré attaché à
une maison charmante, au coin de la place de l’Hôtel-de-Ville et
de la rue Sainte-Croix. La date de 1538 gravée sur l’encadrement
d’une fenêtre et un buste mutilé, qui semble représenter
François Ier, ont permis cette attribution. L’édifice
et sa décoration sont bien certainement de l’époque de
la favorite. En 1547, François Ier mourait à Rambouillet
et le jour même de sa mort, Anne de Pisseleu était bannie
de la cour et le duché d’Étampes lui fut enlevé.
Mais son propre mari lui ayant intenté un procès en reddition,
c’est à lui seul que le nouveau roi Henri II confirme la donation
du duché «en considération et contemplation des bons,
grands et recommandables services qu’il a ci-devant et par longtemps faits [p.30] au feu roi et à
lui pareillement». Cependant, Henri II ne tarda pas à le retirer
à Jean de Brosses pour l’offrir à la belle duchesse de Valentinois,
Diane de Poitiers, qu’il aimait déjà dauphin, bien qu’elle
eût environ vingt-cinq ans de plus que lui. Cette favorite «si
belle, dit Brantôme, que je ne sache cœur de rocher qui ne s’en fût
ému», douée, en outre, de toutes les grâces de
l’esprit, protectrice et inspiratrice de tous les arts, mais sèche,
âpre, intrigante, exerçait sur Henri II une véritable
fascination et seule la mort brutale du roi en 1559, devait lui arracher
presque tous les biens immenses qu’elle avait su obtenir. En vertu de l’édit
de révocation des dons royaux, publié de nouveau par François
II dès son avènement, son duché lui fut enlevé.
Elle fut chassée de la cour avec infamie, par Catherine de Médicis
et sous l’influence des Guise, auxquels elle était cependant alliée.
Mais le roi était mort.
Cette courte
possession du duché d’Étampes par Diane de Poitiers nous
a valu au moins l’élégante demeure qui est aujourd’hui celle
de la Caisse d’Épargne. Plusieurs faits permettent de croire qu’elle
a bien été construite et ornée pour la favorite la
date de 1554, gravée sur une fenêtre de la plus jolie partie
de cet hôtel, alors que le titre de duchesse d’Étampes lui
fut accordé par Henri II en 1553, la décoration, où
l’on retrouve ça et là les armoiries de France mêlées
aux armes de Diane et au croissant, les lettres H et D entrelacées,
enfin la présence, assez insolite, à Étampes cette
même année 1554, authentiquement prouvée par une
pièce des Archives nationales, de Jean Goujon lui-même,
le sculpteur du roi. Ce dernier fait paraît démonstratif,
car on ne s’expliquerait guère le séjour à Étampes
de Jean Goujon, si ce n’est parce qu’il était chargé d’y
embellir une habitation de la duchesse, comme il venait précisément
de le faire au château d’Anet. La pièce d’archives qui le
concerne nous apprend qu’il fut emprisonné à Étampes,
pour une raison qui demeure ignorée.
Au cours du XVIe siècle, d’autres travaux furent accomplis dans
notre ville et beaucoup d’améliorations furent apportées
à l’administration de ses biens. La porte Saint-Jacques fut construite
en 1512. Une très médiocre, mais bien curieuse peinture,
conservée au Musée, nous la montre coiffée d’un
comble aigu en ardoises et bastionnée de deux tours, avec la ligne
de murailles qui ceignait la ville. Mais nous n’y voyons point l’état
ruineux de cette enceinte, conséquence des sièges qu’elle
avait eu à subir. Elle s’étendait tout le long du boulevard
Henri IV actuel depuis la ruelle d’Enfer, puis, au delà, jusqu’à
la petite place de notre monument aux Morts, descendait comme la rue
des Remparts, suivait la rivière d’Étampes au sud et rejoignait
le boulevard Henri IV par la rue du Filoir. En outre, les faubourgs eux-mêmes
étaient fortifiés, Il y avait quinze portes, dont les huit
principales, défendues par deux tours
[p.31] et munies de ponts-levis, étaient la porte
Saint-Martin, la porte Dorée, la porte des Lions ou du Châtel,
la porte Saint-Jacques, la porte Évezard, la porte Saint-Pierre,
la porte Saint-Fiacre et la porte Saint-Gilles. A chacune, étaient
perçues des taxes, de péage pour le roi et de barrage pour
la municipalité, dont le montant élevé prouve l’importance
commerciale d’Etampes à cette époque. Mais la valeur défensive
de la fortification délabrée était presque nulle. Or,
les brigandages aussi bien que les guerres constantes rendaient nécessaires
les enceintes fortifiées. François Ier alors en lutte avec
Charles-Quint, qui venait de ravager la Provence et menaçait de s’avancer
jusqu’à Paris, prescrivit aux habitants d’Étampes, par des
lettres datées de Lyon, 1536, de réparer leurs murs. Les habitants
furent aussitôt assemblés et l’on reprit un projet de restauration
du XIVe siècle, qui s’appliquait d’abord aux tours de la porte Évezard,
puis, à la courtine jusqu’à la porte Saint-Fiacre et qui comprenait,
entre l’enceinte et les terrains particuliers, des boulevards, qui devaient
faciliter l’organisation de la défense. On devait, en outre, garnir
de ponts-levis toutes les portes. Les frais de l’exécution de ce plan
seraient pris sur les deniers communs et même sur une taxe nouvelle,
s’ils n’y suffisaient pas. La prompte adhésion des habitants à
ces projets montre qu’ils sentaient l’urgence de la restauration des
murs qui les protégeaient. Et cependant, c’est l’obstination d’un
petit groupe d’entre eux qui y mit obstacle. Car il fallait raser quelques
maisons. L’un des propriétaires en question, un bourgeois riche,
nommé Martin Auper, gagnant d’abord à sa mauvaise cause
les officiers royaux, réussit, sans doute par corruption, à
obtenir de la Chancellerie elle-même l’ordre de cesser les travaux.
Les échevins ne se tinrent pas pour battus, ils en appelèrent
au roi, qui désigna le bailli d’Orléans pour juger du différend.
Ce fut le lieutenant général de ce bailli qui décida,
en l’hôtel du Cheval bardé, à Étampes, que
Martin Auper et ses commettants recevraient, pour les dommages qui seraient
causés à leurs biens, une indemnité à dire
d’experts. Il semblait que toutes les difficultés fussent aplanies
et que les travaux pour raient être poursuivis Il n’en fut rien.
L’on se heurta à un obstacle insurmontable les ressources de la
ville étaient trop modestes pour faire face aux indemnités
en même temps qu’aux frais de la restauration de l’enceinte. Quand
survinrent les guerres de religion, on n’avait rien pu contre cet état
de choses et notre malheureuse ville se trouva sans défense. Malgré
les efforts des échevins et de la majorité des habitants,
quelques intérêts particuliers l’avaient emporté sur
l’intérêt général.
Nous avons vu que la municipalité
avait été autorisée par Louis XII à construire
ou acheter une maison de ville et par François Ier à
y consacrer 2.000 livres. L’Hôtel de Ville ne fut pas construit, [p.32] comme il a été
dit, mais acheté pour cette somme, en 1514, à Jacques Doulcet,
conseiller du roi, qui le tenait de Jeanne Doulcet, femme du grenetier
d’Étampes à la fin du XVe siècle. C’était
un bel hôtel, qui ne dut pas nécessiter d’aménagements
pour sa nouvelle affectation.
La fondation de l’Hôtel-Dieu d’Étampes doit remonter à
la fin du XIIe siècle, sans qu’on ait plus de précision
à cet égard. Auparavant, si l’on s’en rapporte à
une tradition, les lits des malades pauvres étaient installés
dans l’église même de Notre-Dame, à l’extrémité
de la nef. L’incommodité de ce procédé fit décider
la construction d’un bâtiment séparé, dans la cour
des chanoines, à l’emplacement de l’hôpital actuel. Il s’appela
d’abord l’aumônerie de Notre-Dame. Au XVIe siècle, on y
adjoignit un dortoir des pauvres, converti plus tard en une chapelle,
qui nous a été conservée.
A la même époque, des changements furent apportés
à l’administration de l’Hôtel-Dieu, qui laissait fort à
désirer. Elle était confiée à un prêtre,
désigné comme maître et administrateur par l’archevêque
de Sens. C’était, en 1537, un nommé Jacques de la Vallée,
dont l’incurie avait entraîné la mort de plusieurs pauvres
dans les rues, faute de secours. Les habitants adressèrent à
l’archevêque des plaintes qui ne restèrent pas sans effet.
Une transaction s’ensuivit, par laquelle l’administration du revenu temporel
de l’Hôtel-Dieu appartiendrait désormais au maire et aux
échevins, qui donneraient un traitement et une maison près
de l’hôpital au dit Jacques de la Vallée et à ses
successeurs. Dès ce moment, il fut établi, pour le service
des malades, des religieuses de l’ordre de Saint-Augustin qui furent
d’abord des filles d’Étampes.
Il existait encore à cette époque plusieurs autres établissements
hospitaliers dans notre ville. Leur administration fut désormais
surveillée par le maire et les échevins, qui devaient
élire deux administrateurs tous les trois ans, en vertu d’un édit
de Charles IX, de 1561, motivé par les désordres et les
malversations qui s’exerçaient partout. L’hôpital Saint-Jean-au-Haut-Pavé
était la plus ancienne de ces fondations, de par sa situation
même dans la vieille ville, rue du Haut-Pavé, un peu avant
la rue Saint-Jean. En outre, nous savons par une charte de 1085 que Philippe
Ier en fut le bienfaiteur.
La commanderie ou l’hôpital de Saint-Jacques de l’Épée
avait été fondée par des chevaliers de cet ordre,
sur l’emplacement de l’abattoir actuel, à une date que nous ignorons:
un acte de François Ier de 1518 confère cette commanderie
à un nommé Pierre Dance, par un acte qui ne doit pas être
confondu, comme il l’a été par certains historiens d’Étampes,
avec un acte de fondation. L’ordre de Saint-Jacques de l’Épée
fondé en Espagne dès le XIIe siècle, pour enrayer
les troubles causés par les Maures aux pèlerinages [p.33] de Saint-Jacques de Compostelle,
avait établi en France des refuges pour les pèlerins,
principalement sur la route de Saint-Jacques, et c’est ainsi qu’ils
en créèrent un à Étampes, à une époque
certainement bien antérieure à l’acte de François
Ier, puisque son existence est mentionnée dans le droit de port
accordé par Jean de Foix en 1490. En 1580, cet hôpital et
ses dépendances furent donnés par le roi à des capucins,
qui y entreprirent divers travaux, mais sans que son affectation en fût
modifiée, ni son administration soustraite à la surveillance
du maire.
La maladrerie de Saint-Lazare, sur la route de Paris, avait reçu
dès le XIIe siècle des donations importantes des rois
Louis VI et Louis VII, et plus tard, de nombreux autres bienfaiteurs.
Mais au début du XVIe siècle, elle était administrée
d’une manière déplorable. Les fonds étaient détournés,
les lépreux, ne recevant plus de soins, mendiaient dans la ville
et risquaient de propager leur mal. Cette situation n’étant pas
spéciale à Étampes, François Ier, en 1543,
avait chargé les baillis de surveiller les léproseries et
de destituer les administrateurs coupables. Mais les abus persistaient,
en particulier à la maladrerie de Saint-Lazare, où les lépreux,
en 1544, n’étaient plus que quatre. Une part des revenus étaient
employés par un administrateur, Jacques Yvon, à poursuivre
un procès pour conserver sa charge. Ses successeurs ne furent pas
plus honnêtes et s’efforçaient de corrompre les officiers royaux,
si bien qu’en 1560, un bourgeois d’Étampes fut désigné
comme administrateur et à partir de 1561, le bienfaisant édit
de Charles IX fut appliqué là comme dans les autres établissements.
Enfin, l’hôpital
Saint-Antoine, qui existait dès le début du XIIIe siècle,
était destiné à loger «des passants valides».
Il était situé en face de l’ancien collège, c’est-à-dire
à l’emplacement du collège actuel, et comprenait une
chapelle pour cette double raison, il fut donné au début
du XVIIe siècle, aux Pères barnabites qui venaient d’être
appelés à la direction du collège comme nous allons
le voir.
La première mention des écoles d’Étampes nous est
donnée par une bulle du pape Luce III en 1183, qui accordait au
chapitre de Sainte-Croix le droit d’instituer un maître des écoles.
Mais aussitôt les chanoines de Notre-Dame, qui étaient précisément
alors en lutte ouverte avec ceux de Sainte-Croix, firent opposition à
ce privilège. Ils réussirent à l’enlever à
leurs rivaux, en 1191, par une sentence des juges ecclésiastiques
qu’avait désignés le roi pour régler les nombreux
points contestés entre les deux chapitres. Mais cet enseignement
n’avait pas de siège; il était donné tout simple
ment dans la maison du maître, auquel on ne sait s’il était
alloué un bénéfice de l’église en paiement
de sa tâche. C’est seulement en 1515 que nous voyons les habitants
d’Étampes se préoccuper [p.34]
d’avoir une maison d’école et des «maîtres
gagés» pour instruire gratuitement leurs enfants. Il demandent
à François Ier l’autorisation de consacrer une partie des
deniers qui avaient été affectés aux fortifications
de la ville à l’achat ou à l’édification «d’une
maison commode pour y tenir les écoliers, estimant que leur ville
serait mieux défendue par des citoyens bien instruits aux bonnes
lettres, avec la connaissance desquelles l’on acquiert aussi la prudence,
que par des murailles et autres fortifications». On voit que nos bourgeois
d’Étampes étaient pleins d’illusions sur l’usage que font
les hommes de la science qu’ils ont acquise, reflet de cette belle époque
de la Renaissance, où la supériorité des choses de
l’esprit s’imposait à tous.
Le roi accorda son autorisation, mais on ne sait quand ni par qui fut
donnée à la ville, pour en faire un collège, la
maison sise à l’angle de la rue Saint-Antoine et de la rue du
Pont-Quesneaux, aujourd’hui rue Magne, en face du collège actuel.
Elle était en mauvais état et nécessita dès
1561 des réparations urgentes, en vue des quelles François
II, tout en accordant 600 livres, ordonna une visite des maçons
et charpentiers experts, sous la foi du serment. L’expertise eut lieu
en présence du bailli, Nicolas Petau, du lieu tenant de la prévôté,
du maire, des échevins et d’un grand nombre d’habitants. La conclusion
fut qu’il fallait «abattre la dicte mai son et la rebastir de nouvel»,
les murailles étant crevées, le bout du logis pourri,
les planchers rompus... Grâce à une somme de 1200 livres,
octroyée en deux fois, par le roi Charles IX, la ville put acheter
en 1564 une maison contiguë à l’ancienne et la faire aménager.
Mais il fallait d’autres ressources pour l’entretien des maîtres.
Une prébende du chapitre de Notre-Dame d’un revenu annuel de 300
livres étant vacante par le décès de son titulaire,
Louis Guibour, le maire et les échevins obtinrent du roi, en 1566,
qu’elle leur fût concédée pour cet objet. Mais dès
1569, elle leur était enlevée par un arrêt du Parlement
en faveur d’un frère de Louis Guibour, qui, en vertu des provisions
qu’il avait reçues de cette prébende, avait poursuivi le maire
et les échevins. Ceux-ci ne se découragèrent point
cependant. Ils savaient que le revenu de la maladrerie de Saint-Lazare dépassait
ses besoins, les lépreux n’y étant plus qu’en très
petit nombre: ils se firent accorder par le roi en 1575 une rente de 300
livres sur ce revenu. C’est ainsi qu’un principal, Nicolas Charrier, prêtre
et maître ès-arts de l’Université de Paris, fut enfin
appelé à la direction des «grandes écoles d’Étampes».
Il avait la charge d’instruire et faire instruire les enfants d’Étampes
et des environs «ès bonnes mœurs et vie suivant l’institution
de l’Eglise catholique, en la connaissance des lettres et A B C, lire,
écrire, jeter comptes tant au jet qu’à la plume, en la grammaire
et les premiers rudiments de la langue latine et lettres [p.35] humaines». Le
principal était assisté de deux régents, qu’il devait
loger et entretenir sur les trois cents livres de revenu, et, en outre,
il était tenu de loger, nourrir et instruire gratuitement deux enfants
pauvres, appelés déjà boursiers, qui étaient
chargés de nettoyer les classes et de «faire autre service
honnête sans être distrait de leur étude». Le collège
semble avoir bien fonctionné pendant une cinquantaine d’années,
puisqu’il comptait plus de cent élèves en 1626. Mais le
désordre y fut alors introduit par un principal incapable, presque
toujours absent, Claude Vuaflard, et dès 1628, il n’y avait plus
que douze élèves. Vuaflard fut révoqué par
le maire et les échevins, auxquels le bailli, puis, le Parlement
donnèrent raison. Mais ils rencontrèrent encore des difficultés
avec un nouveau principal et c’est alors qu’ayant reçu dans l’intervalle
une somme de 8000 livres léguée au collège par le
lieutenant général du bailliage, Jacques Petau, ils firent
appel aux Pères barnabites, établis depuis peu à Montargis.
Leur administration, qui devait durer plus d’un siècle, ne s’écoula
pas sans nuages, contrairement à ce qu’on eût pu espérer.
Ils ne tinrent pas l’engagement qu’ils avaient pris, pour satisfaire aux
clauses du testament de Jacques Petau, de construire un nouveau bâtiment
et laissèrent l’ancien tomber en ruines. Ils ne résidèrent
pas au collège, mais dans l’hôpital Saint-Antoine, qui ne
leur avait été donné qu’en attendant l’édification
du nouveau bâtiment et d’une chapelle. Enfin, leur enseignement laissait
tant à désirer qu’un mémoire dressé contre
eux par le maire et les échevins signale, entre autres griefs,
que «c’est un hasard quand quelqu’un des pensionnaires apprend
le latin» et qu’un des régents est un Suisse «qui a
toutes les peines du monde à s’exprimer eu français».
En dépit de nombreux mémoires semblables causés par
«l’état affreux du collège» et consécutifs
aux plaintes réitérées des habitants, les barnabites
furent maintenus à la direction du collège jusqu’en 1779,
après quoi ils ne demeurèrent qu’en petit nombre à
Étampes.
Parmi les améliorations qui furent apportées à
notre ville au XVIe siècle, il faut compter encore l’organisation
de la police les ravages des pillards et des assassins s’ajoutaient,
en effet, à ceux des gens de guerre et il devenait urgent de «purger»
toute la région. Un prévôt des maréchaux
et un lieutenant criminel assisté d’un lieutenant, d’un greffier
et d’abord de quatre, puis de six archers, en furent chargés.
En 1563, Étampes était devenue le centre d’une maréchaussée,
qu’elle conserva après la répression des désordres.
A la même époque, les habitants d’Étampes, désireux
d’épargner aux jeunes gens les dangers de l’oisiveté et
«l’occasion d’aller fréquenter les tavernes et jeux scandaleux»,
obtinrent du roi Henri II l’autorisation d’organiser des jeux d’arbalète
et d’arquebuse, avec un concours et l’exemption d’impôts durant
un an pour [p.36] les vainqueurs.
Le concours eut lieu chaque année le 1er mai sur une place d’Étampes
celui qui abattait le «papegaut», l’oiseau de bois monté
sur un mât, du trait de son arbalète, était proclamé
roi des arbalétriers, et celui qui triomphait de même en
tirant à l’arquebuse, roi des arquebusiers. L’un et l’autre recevaient
un mouton d’or ou quarante sols tournois. L’hôtel de l’Arquebuse,
où se faisaient les exercices, longtemps situé rue Saint-Jacques,
fut transféré au XVIIIe siècle sur le Port, à
l’emplacement du casino actuel; il était alors le siège
d’une compagnie nombreuse de chevaliers, au somptueux costume, dont un
portrait conservé au musée d’Étampes nous donne quelque
idée. Ils se réunirent pour la dernière fois le 15
août 1790 et firent la remise de leurs drapeaux, qui furent suspendus
à la voûte de Notre-Dame.
Enfin, c’est encore au XVIe siècle, en 1556, que fut rédigée
«la coutume d’Étampes» c’est-à-dire l’ensemble
des usages locaux en matière de droit, grâce à laquelle
les jugements pourraient s’inspirer des mœurs et des traditions du lieu.
Jusqu’alors, on suivait la coutume de Paris qui avait été
rédigée en 1510. A cet effet, les trois états du
bailliage furent convoqués à l’auditoire d’Étampes
et les officiers royaux établirent des cahiers préparatoires,
qui furent ensuite discutés en la présence de Christophe
de Thou, premier président au Parlement de Paris et de deux conseillers.
La rédaction fut publiée dès 1557. Le procès-verbal
de cette réunion des trois ordres est un document précieux
par les noms et l’état des personnes qu’il nous fait connaître
à cette date.
Cet examen des travaux et des progrès réalisés
dans notre ville au cours de ce siècle nous montre qu’elle était
assez sagement administrée, aussi bien par les officiers royaux
que par la municipalité, comme l’avait voulu le prudent Louis
XII. La municipalité eut, en effet, le bon sens d’accepter sa subordination,
au lieu d’engager de stériles querelles, et l’habileté
de se rendre presque toujours favorables les fonctionnaires du roi et
ainsi le roi lui-même. Elle n’en fut ni moins vigilante, ni moins
dévouée aux intérêts de la cité et
c’est ainsi que peu à peu son rôle grandit. Elle ne réussit
pas, cependant, à faire d’Étampes une ville heureuse, comme
le montre trop bien le triste ensemble des plaintes, des suppliques des
requêtes, des procès. Mais cela tenait à deux causes
indépendantes de sa volonté, qui réagirent constamment
l’une sur l’autre, et non pas seulement dans la période que nous
venons de considérer: d’abord la fréquence des guerres, civiles
ou étrangères, puis, le déplorable état des
finances, entretenu précisément par les frais de guerre.
Les institutions financières présentaient à Étampes
la même complexité que dans les autres villes du royaume et
nous n’entreprendrons pas de les exposer ici. On sait que les impôts,
qu’ils fussent le cens, les aides, la taille ou la gabelle accablaient [p.37] tous les non-privilégiés
d’un véritable fardeau, encore aggravé par le détestable
système de l’affermage des taxes à percevoir et par les
malversations des receveurs. Notre région constituait «l’élection
d’Étampes», en tant que circonscription financière,
vieille dénomination conservée du temps oit le peuple choisissait
les hommes, dits «élus», qui levaient ensuite les impôts
sur un ordre du roi. Elle fut spécialement atteinte par ces abus
et ces charges, pour diverses raisons: sa réputation de contrée
riche, en dépit de sa faible étendue, l’impôt étant
arbitrairement réparti, le grand nombre de ses habitants exemptés
de taxes et en fin, les ruines qu’y avaient accumulées tantôt
les guerres, dont elle fut si longtemps le théâtre même,
tantôt le passage dévastateur des troupes et des pillards. [p.38]
|
II. La Renaissance
(éditions comparées
de 1938 et de 1964)
1938
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|
1964
|
L’autorité et l’adresse de Louis XI avaient enfin ramené
la paix et l’ordre dans le royaume. Mais il y avait bien des ruines à
relever, en particulier dans notre région. La belle énergie
de notre race y sera déployée avec une telle vigueur que
la prospérité ne tardera pas à renaître. Redevenu
libre de disposer du comté d’Étampes, Louis XI en fit don
presque aussitôt à Jean de Foix, comte de Narbonne, qui était
digne de cette faveur. Il s’attacha ses nouveaux sujets en leur accordant
un important privilège, qui devait contribuer au relèvement
économique du pays, le droit de port. La navigation existait
depuis longtemps sur quelques rivières d’Étampes et les
chevaliers de Saint-Jacques de l’Épée avaient construit
un port, derrière leur commanderie qui occupait l’emplacement
de l’abattoir actuel et dont la rivière, non détournée
alors, était toute proche; mais il appartenait au commandeur,
qui, bien entendu, percevait des droits élevés. Déjà
Louis XI, sur le conseil du prévôt des marchands de Paris,
avait ordonné aux habitants d’Étampes de rendre navigable
la rivière d’Étampes, afin d’assurer par eau le transport
des blés de Beauce jusqu’à Paris. De grands travaux furent
entrepris; on détourna les ruisseaux qui se perdaient dans les
prairies pour les réunir à la rivière d’Étampes
qu’on canalisa et le nouveau port, [p.24] autorisé
par Jean de Foix, fut construit près des murailles. Mais de longues
années passèrent avant qu’il pût fonctionner régulièrement,
car de nombreuses difficultés surgirent, d’abord l’opposition
du commandeur de Saint-Jacques qui ne voulait pas être dessaisi
de ses droits, puis, les frais considérables d’entretien dus aux
risques d’assèchement et à la nécessité de
curages fréquents, surtout en deux points, improprement appelés
alors des gourts, où s’accumulaient des amas détritiques
amenés par ruissellement. Il s’ensuivit des requêtes sans
nombre auprès du roi ou devant le Parlement. Mais ces difficultés
vaincues ou au moins aplanies, la navigation connut un succès grandissant;
elle était lente, certes, le halage ne pouvant guère se faire
qu’à bras d’hommes et les écluses étant nombreuses
à cause des moulins, mais elle était beaucoup plus sûre
que la route terrestre, infestée de brigands. Ce fut pour notre
ville, jusqu’au milieu du XVIIe siècle, un précieux élément
de vie et de richesse. Il n’en reste aujourd’hui qu’un nom, celui du beau
mail ombragé qui occupe l’emplacement du port du XVIe siècle.
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L’autorité et l’adresse de Louis XI avaient enfin ramené
la paix et l’ordre dans le royaume, Mais il y avait bien des ruines à
relever, en particulier dans notre région. La belle énergie
de notre race y sera déployée avec une telle vigueur que
la prospérité ne tardera pas à renaître. Redevenu
libre de disposer du comté d’Etampes, Louis XI en fit don presque
aussitôt à Jean de Foix, comte de Narbonne, qui était
digne de cette faveur. Il s’attacha ses nouveaux sujets en leur accordant
un important privilège, qui devait contribuer au relèvement
économique du pays, le droit de port. La navigation existait depuis
longtemps sur quelques rivières d’Etampes et les chevaliers de Saint-Jacques
de l’Epée avaient construit un port, derrière leur commanderie
qui occupait l’emplacement de l’abattoir actuel et dont la rivière,
non détournée alors, était toute proche mais il appartenait
au commandeur, qui, bien entendu, percevait des droits élevés.
Déjà Louis XI, sur le conseil du prévôt des
marchands de Paris, avait ordonné aux habitants d’Etampes de rendre
navigable la rivière d’Etampes, afin d’assurer par eau le transport
des blés de Beauce jusqu’à Paris. De grands travaux furent
entrepris on détourna les ruisseaux qui se perdaient dans les prairies
pour les réunir à la rivière d’Etampes qu’on canalisa
et le nouveau port, autorisé par Jean de Foix, fut construit près
des murailles. Mais de longues années passèrent avant qu’il
pût fonctionner régulièrement, car de nombreuses difficultés
surgirent, d’abord l’opposition du commandeur de Saint-Jacques qui ne voulait
pas être dessaisi de ses droits, puis, les frais considérables
d’entretien dus aux risques d’assèchement et à la nécessité
de curages fréquents, surtout en deux points, improprement appelés
alors des gourts, où s’accumulaient des amas détritiques
amenés par ruissellement. Il s’ensuivit des requêtes sans nombre
auprès du roi ou devant le Parlement. Mais ces difficultés
vaincues ou au moins aplanies, la navigation connut un succès grandissant
elle était lente, certes, le halage ne pouvant guère se faire
qu’à bras d’hommes et les écluses étant nombreuses à
cause des moulins, mais elle était beaucoup plus sûre que la
route terrestre, infestée de brigands. Ce fut pour notre ville, jusqu’au
milieu du XVIIe, siècle, un précieux élément
de vie et de richesse. Il n’en reste aujourd’hui qu’un nom, celui du beau
mail ombragé qui occupe l’emplacement du port du XVIe siècle.
|
Les marchés d’Étampes augmentèrent d’importance
avec la création du port. Pendant la guerre de Cent Ans, le marché
Saint-Gilles avait été transféré place
Notre-Dame pour des raisons de sécurité, l’église
Notre-Dame ayant été en partie entourée de fossés.
La paix revenue, les habitants du quartier Saint-Gilles soucieux de
retrouver les avantages de leur marché, obtinrent du roi en
1478 qu’il fût tenu de nouveau place Saint-Gilles et bientôt
après, un arrêt du Parlement interdisait aux habitants des
quartiers Notre-Dame et Saint-Basile d’acheter ou de vendre du blé,
du vin, des draps, du bétail, en dehors du jeudi place Saint-Gilles.
Ces restrictions soulevèrent de vives protestations, des ventes
s’organisèrent place Notre-Dame malgré l’arrêt,
un huissier envoyé par le Parlement, pour en assurer l’exécution,
fut battu, blessé «d’une plaie en la teste et lui fut osté
un anneau d’or» et des procès furent entamés, dont
nous ignorons l’issue. Une transaction dut intervenir, puisqu’au XVIe
siècle, on sait qu’il se tenait deux marchés par semaine,
le samedi, place Notre-Dame, pour «les menues victuailles, beurre,
œufs, fromages, fruits et autres choses», le jeudi, place Saint-Gilles,
pour le blé, le vin et le bétail. Ce dernier marché
fut reporté un peu plus tard au samedi, sans doute parce que les
bateaux du port d’Étampes partaient ce jour-là, pour arriver
à Paris le mercredi, et ainsi le blé, comme les autres marchandises,
pouvait être embarqué aussitôt. On voit que la répartition
actuelle de nos marchés est restée sensiblement la même.
|
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Les marchés d’Etampes augmentèrent en importance avec la
création du port. Pendant la guerre de Cent Ans, le marché
Saint-Gilles avait été transféré place Notre-Dame
pour des raisons de sécurité, l’église Notre-Dame
ayant été en partie entourée de fossés. La
paix revenue, les habitants du quartier Saint-Gilles soucieux de retrouver
les avantages de leur marché, obtinrent du roi en 1478 qu’il fû
tenu de nouveau place Saint-Gilles et bientôt après, un arrêt
du Parlement interdisait aux habitants des quartiers Notre-Dame et Saint-Basile
d’acheter ou de vendre du blé, du vin, des draps, du bétail,
en dehors du jeudi place Saint-Gilles. Ces restrictions soulevèrent
de vives protestations, des ventes s’organisèrent place Notre-Dame
malgré l’arrêt, un huissier envoyé par le Parlement,
pour en assurer l’exécution, fut battu, blessé «d’une
plaie en la teste et lui fut osté un anneau d’or» et des procès
furent entamés, dont nous ignorons l’issue. Une transaction dut
intervenir, puisqu’au XVIe siècle, on sait qu’il se tenait deux
marchés par semaine, le samedi, place Notre-Dame, pour «les
menues victuailles, beurre, œufs, fromages, fruits et autres choses»,
le jeudi, place Saint-Gilles, pour le blé, le vin et le bétail.
Ce dernier marché fut reporté un peu plus tard au samedi,
sans doute parce que les bateaux du port d’Etampes partaient ce jour-là,
pour arriver à Paris le mercredi, et ainsi le blé, comme les
autres marchandises, pouvait être embarqué aussitôt.
On voit que la répartition actuelle de nos marchés est restée
sensiblement la même.
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C’est également Jean de Poix qui permit aux boulangers d’Étampes
ainsi qu’aux «brenassiers», c’est-à-dire ceux qui
fabriquaient du pain de son ou de «bren», d’avoir chez eux
«des fours pour cuire le petit pain et d’autres pour cuire le gros
, moyennant une taxe [p.25] annuelle
de 6 sols parisis, alors qu’auparavant ils étaient obligés
d’aller cuire au four banal.
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C’est également Jean de Foix qui permit aux boulangers d’Etampes
ainsi qu’aux «brenassiers», c’est-à-dire ceux qui fabriquaient
du pain de son ou de «bren», d’avoir chez eux «des fours
pour cuire le petit pain et d’autres pour cuire le gros», moyennant
une taxe annuelle de 6 sols parisis, alors qu’auparavant ils étaient
obligés d’aller cuire au four banal.
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Jean de Foix mourut à Étampes en 1500, après avoir
combattu en Italie avec Charles VIII et Louis XII, et fut enterré
en grande pompe dans le chœur de l’église Notre-Dame. Son fils
Gaston, le héros des guerres d’Italie, ne devait posséder
le comté d’Étampes qu’un court espace de temps, puisqu’il
fut tué glorieusement en 1512 à Ravenne, de quinze coups
de lance au visage «montrant bien, le gentil prince, qu’il n’avait
pas tourné le dos». Sa jeunesse, sa séduction, ses
brillantes qualités, lui avaient gagné le cœur des habitants
d’Étampes qui lors de son entrée solennelle dans la ville,
en 1506, lui firent un accueil triomphal, dont le souvenir s’est conservé.
Deux cents cavaliers suivis de six cents petits garçons portant
des banderolles aux armes du comte allèrent au devant de lui; les
échevins le reçurent à la porte Évezard «aux
fanfares des trompettes et au son des violons et des hautbois, accompagnés
de mille cris de joie d’une multitude innombrable de personnes et qui le
suivit jusques au logis qui lui avait été préparé,
devant lequel une vache dorée jetait par ses cornes du vin, suffisamment
pour éteindre la soif de tous ceux qui assistaient à cette
cérémonie». Les frais de cette réception furent
considérables, tant pour l’achat d’écussons, de rubans,
de drap pour les robes des échevins, de taffetas pour les bannières,
de vin, tartes, pâtés et galettes, que pour la fabrication
des nombreuses pièces d’orfèvrerie offertes au prince et
la location des trompettes et ménétriers et les travaux
de peinture et de montage des échafauds, etc.
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Jean de Foix
mourut à Etampes en 1500, après avoir combattu en Italie
avec Charles VIII et Louis XII, et fut enterré en grande pompe dans
le chœur de l’église Notre-Dame. Son fils Gaston, le héros
des guerres d’Italie, ne devait posséder le comté d’Etampes
qu’un court espace de temps, puisqu’il fut tué glorieusement en
1512 à Ravenne, de quinze coups de lance au visage «montrant
bien, le gentil prince, qu’il n’avait pas tourné le dos». Sa
jeunesse, sa séduction, sis brillantes qua lités, lui avaient
gagné le coeur des habitants d’Etampes, qui lors de son entrée
solennelle dans la ville, en 1506, lui firent un accueil triomphal, dont
le souvenir s’est conservé. Deux cents cavaliers suivis de six cents
petits garçons portant des banderolles aux armes du comte allèrent
au devant de lui les échevins le reçurent à la porte
Evezard «aux fanfares des trompettes et au son des violons et des
hautbois, accompagnés de mille cris de joie d’une multitude innombrable
de personnes et qui le suivit jusques au logis qui lui avait été
pré paré, devant lequel une vache dorée jetait par
ses cornes du vin, suffisamment pour éteindre la soif de tous ceux
qui assistaient à cette cérémonie». Les frais
de cette réception furent considérables, tant pour l’achat
d’écussons, de rubans, de drap pour les robes des échevins,
de taffetas pour les bannières, de vin, tartes, pâtés
et galettes, que pour la fabrication des nombreuses pièces d’orfèvrerie
offertes au prince et la location des trompettes et ménétriers
et les travaux de peinture et de montage des échafauds, etc.
|
Sept ans après, c’était la reine Anne de Bretagne qui,
nouvelle comtesse d’Étampes, faisait dans la ville une entrée
moins solennelle, selon le désir qu’elle en avait exprimé.
Mais on aménagea pour elle le château, où elle devait
loger, en commandant des travaux «aux maçons, charpentiers,
pionniers et autres manouvriers»; les habitants reçurent
l’ordre « de curer les rues et ôter les fiens et de mettre
des feuilles et jonchées par les dites rues». La reine trouva
«le paysage si agréable et l’air du château si bon qu’elle
y séjourna un temps assez considérable, au grand contentement
des habitants». Mais dès l’année suivante, en 1514,
la pauvre reine mourait au château de Blois. Son corps, pour être
inhumé à Saint-Denis, fut accompagné sur toute la
route d’un long cortège, composé des princes et princesses
du sang montés sur des mules noires, des dames d’honneur, sur des
haquenées conduites par des valets de pied, des archers du roi, qui
marchaient en tète pour écarter la foule et enfin, des Suisses
de la garde, qui faisaient la haie de chaque côté, la hallebarde
sur l’épaule. Le convoi quitta Blois le 4 février pour n’arriver
que le 12 à Paris. Au passage d’Étampes, les échevins,
en robes et chaperons de deuil, les officiers de justice [p.26] et tout le peuple l’attendaient
à la porte Saint-Martin. En outre, se joignirent au cortège
des hommes qui portaient un millier de torches armoriées, quatre
cents aux armes de la reine, quatre cents aux armes d’Étampes; les
deux cents autres étaient aux armes du fameux Eudes le Maire, de Châlo-Saint-Mard,
dont nous parlerons plus loin, parce qu’elles étaient portées
par des chevaliers descendants de lui et que leur charge consistait à
venir au devant des princes morts, de passage à Étampes,
et à veiller leur corps. Le char funèbre, qui était
traîné par six grands chevaux, houssés de velours noir
croisé de satin blanc de sorte qu’on ne leur voyait que les yeux,
fut dirigé vers l’église Notre-Dame et reconduit, après
la célébration du service, jusqu’à la sortie de la
ville du côté de Paris, avec la même pompe.
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Sept ans après, c’était la reine Anne de Bretagne qui, nouvelle
comtesse d’Etampes, faisait dans la ville une entrée moins solennelle,
selon le désir qu’elle en avait exprimé. Mais on aménagea
pour elle le château, où elle devait loger, en commandant
des travaux «aux maçons, charpentiers, pionniers et autres
manouvriers» les habitants reçurent l’ordre «de curer
les rues et ôter les liens et de mettre des feuilles et jonchées
par les dites rues». La reine trouva «le paysage si agréable
et l’air du château si bon qu’elle y séjourna un temps assez
considérable, au grand contentement des habitants». Mais dès
l’année suivante, en 1514, la pauvre reine mourait au château
de Blois. Son corps, pour être inhumé à Saint-Denis,
fut accompagné sur toute la route d’un long cortège, composé
des princes et princesses du sang montés sur des mules noires, des
dames d’honneur, sur des haquenées conduites par des valets de pied,
des archers du roi, qui marchaient en tête pour écarter la foule
et enfin, des Suisses de la garde, qui faisaient la haie de chaque côté,
la hallebarde sur l’épaule. Le convoi quitta Blois le 4 février
pour n’arriver que le 12 à Paris. Au passage d’Etampes, les échevins,
en robes et chaperons de deuil, les officiers de justice et tout le peuple
l’attendaient à la porte Saint-Martin. En outre, se joignirent au
cortège des hommes qui portaient un millier de torches armoriées,
quatre cents aux armes de la reine, quatre cents aux armes d’Etampes les
deux cents autres étaient aux armes du fameux Eudes le Maire, de Châlo-Saint-Mard,
dont nous parlerons plus loin, parce qu’elles étaient portées
par des chevaliers descendants de lui et que leur charge consistait à
venir au devant des princes morts, de passage à Etampes, et à
veiller leur corps. Le char funèbre, qui était trame par
six grands chevaux, houssés de velours noir croisé de satin
blanc de sorte qu’on ne leur voyait que les yeux, fut dirigé vers
l’église Notre-Dame et reconduit, après la célébration
du service, jusqu’à la sortie de la ville du côté
de Paris, avec la même pompe.
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La fille aînée d’Anne de Bretagne, Claude, alors âgée
de 15 ans, devenait comtesse d’Étampes en vertu de l’acte de
la donation faite par Louis XII à la reine. Elle était
fiancée au duc de Valois, le futur François Ier, et le
mariage eut lieu quatre mois après la mort d’Anne de Bretagne,
qui, disait-on, n’y était pas favorable. Dès l’année
1515, Louis XII mourait à son tour et la nouvelle comtesse d’Étampes
montait sur le trône. Bientôt après, elle se démit
de son comté en faveur d’Arthus de Gouffier, sire de Boissy, grand
maître de France, qui porta le titre de comte d’Étampes.
Il vint dans notre ville et «pour le remercier de quelque grâce»,
on lui offrit une coupe d’argent «bien dorée d’or»,
qui avait coûté plus de cent livres et avait été
faite à Paris, et à son barbier, un étui garni de
deux rasoirs et ciseaux dorés, d’un peigne, d’un miroir et d’un
cure-oreilles d’argent. Arthus de Gouffier mourut en 1519 et Claude de
France reprit possession de son bien. Cette «bonne reine»,
comme elle fut appelée, aussi modeste, douce, effacée, que
son mari était audacieux, belliqueux et galant, n’a guère
laissé dans l’histoire que le souvenir discret de ses vertus domestiques
et c’est surtout par la prune savoureuse qui porte son nom qu’elle est
connue de la plupart de nos contemporains. Cependant, les marques de sa
bonté envers Étampes ne furent pas tout à fait négligeables.
C’est grâce à son intervention auprès de Louis XII
que notre municipalité acquit quelque indépendance à
l’égard des officiers du roi. Ceux-ci, pour la plupart, étaient
à la fois des administrateurs et des juges. Ils comprenaient d’abord
le bailli, qualifié en même temps de capitaine et gouverneur,
qui devait toujours être un gentilhomme, puis, ses lieutenants, le
lieutenant général et le lieutenant particulier, qui étaient,
le plus souvent, docteurs ou licenciés en droit, le procureur
et l’avocat du roi, dont les attributions consistaient à défendre
les intérêts de la couronne, et le receveur, chargé
seulement de l’administration des finances. A côté d’eux,
le prévôt, très ancien fonctionnaire puisqu’il existait [p.27] déjà
sous Robert le Pieux, faisait partie du conseil de bailliage, mais il avait
la préséance sur le procureur, l’avocat et le receveur
et jugeait, aussi bien en appel qu’en première instance. Il était
assisté également d’un lieutenant et les charges du garde
du scel, du greffier et du tabellion, toutes trois affermées et
consistant à percevoir des droits, étaient rattachées
à son office. Enfin, les notaires et les sergents royaux étaient
sous les ordres des officiers bailliagers et prévôtaux. En
face de ces nombreux officiers qui dépendaient du roi, la municipalité
était réduite jusqu’alors à quatre syndics, qualifiés
d’échevins sans en avoir toutes les prérogatives, élus
pour trois ans par les habitants; l’élection était présidée
par le lieutenant général du bailliage, chacun pouvait
voter, mais le conseil de bailliage, auquel étaient adjoints six
notables de la circonscription, avait le choix en dernier ressort. Il
n’y avait pas de maire alors que son existence est prouvée sous
le règne de Philippe-Auguste, comme nous l’avons vu, il ne semble
pas avoir été rétabli en même temps que l’organisation
communale au XIIIe siècle. Il n’y avait pas non plus d’hôtel
de ville; les réunions et les élections avaient lieu dans
la salle des plaids, au-dessus de la halle de la boucherie, ou bien «en
un autre lieu». Les échevins avaient pour principale fonction
d’administrer les deniers communs de la ville, mais ils ne pouvaient disposer
d’une somme supérieure à 20 sols parisis, sans une ordonnance
de justice. Ces deniers communs, comme leur nom l’indique, ne pouvaient être
utilisés que pour la communauté. Ils provenaient alors uniquement
des droits de barrage, octroi perçu aux portes de la ville
sur les chariots char gés, les bêtes de somme et le bétail,
et des droits payés sur le sel vendu au grenier d’Étampes;
plus tard, il s’y ajouta, quand il y j eut une maison de ville, le montant
de la location des greniers de cette maison, puis, le droit de courtepinte,
prélevé sur les vins. Ces deniers communs devaient servir d’abord
à l’entretien du pavé et des chemins de la ville, entretien
fort onéreux en raison de la circulation très active, puis,
aux réparations de l’enceinte et des portes et enfin, aux frais du
séjour des rois et des princes, égale ment fort élevés,
comme on a pu le voir. Le contrôle de l’emploi des deniers communs
était fait par les agents royaux et la Chambre des comptes.
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La fille aînée d’Anne de Bretagne, Claude, alors àgée
de 15 ans, devenait comtesse d’Etampes, en vertu de l’acte de la donation
faite par Louis XII à la reine. Elle était fiancée
au [p.28] duc de Valois, le
futur François Ier et le mariage eut lieu quatre mois après
la mort d’Anne de Bretagne, qui, disait-on, n’y était pas favorable.
Dès l’année 1515, Louis XII mourait à son tour et
la nouvelle comtesse d’Etampes montait sur le trône. Bientôt
après, elle se démit de son comté en faveur d’Arthus
de Gouffier, sire de Boissy, grand maître de France, qui porta le
titre de comte d’Etampes. Il vint dans notre ville et «pour le remercier
de quelque grâce», on lui oint une coupe d’argent «bien
dorée d’or», qui avait coûté plus de cent livres
et avait été faite à Paris, et à son barbier,
un étui garni de deux rasoirs et ciseaux dorés, d’un peigne,
d’un miroir et d’un cure-oreilles d’argent. Arthus de Gouffier mourut en
1519 et Claude de France reprit possession de son bien. Cette «bonne
reine», comme elle fut appelée, aussi modeste, douce, effacée,
que son mari était audacieux, belliqueux et galant, n’a guère
laissé dans l’histoire que le souvenir discret de ses vertus domestiques
et c’est surtout par la prune savoureuse qui porte son nom qu’elle est
connue de la plupart de nos contemporains. Cependant, les marques de sa
bonté envers Etampes ne furent pas tout à fait négligeables.
C’est grâce à son intervention auprès de Louis XII
que notre municipalité acquit quelque indépendance à
l’égard des officiers du roi. Ceux-ci, pour la plupart, étaient
à la fois des administrateurs et des juges. Ils comprenaient d’abord
le bailli, qualité en même temps de capitaine et gouverneur,
qui devait toujours être un gentilhomme, puis, ses lieutenants, le
lieutenant général et le lieutenant particulier, qui étaient,
le plus souvent, docteurs ou licenciés en droit, le procureur et
l’avocat du roi, dont les attributions consistaient à défendre
les intérêts de la couronne, et le receveur, chargé seulement
de l’administration des finances. A côté d’eux, le prévôt,
très ancien fonctionnaire puisqu’il existait déjà sous
Robert le Pieux, faisait partie du conseil de bailliage, mais il avait la
préséance sur le procureur, l’avocat et le receveur et jugeait,
aussi bien en appel qu’en première instance. Il était assisté
également d’un lieutenant et les charges du garde du scel, du greffier
et du tabellion, toutes trois affermées et consistant à percevoir
des droits, étaient rattachées à son office. Enfin,
les notaires et les sergents royaux étaient sous les ordres des officiers
bailliagers et prévôtaux. En face de ces nombreux officiers
qui dépendaient du roi, la municipalité était réduite
jusqu’alors à quatre syndics, qualifiés d’échevins
sans en avoir toutes les prérogatives, élus pour trois ans
par les habitants; l’élection était présidée
par le lieutenant général du bailliage, chacun pouvait voter,
mais le conseil de bailliage, auquel étaient adjoints six notables
de la circonscription, avait le choix en dernier ressort. Il n’y avait pas
de maire: alors que son existence est prouvée sous le règne
de Philippe-Auguste, comme nous l’avons vu, il ne semble pas avoir été
rétabli en même temps que l’organisation communale au XIIIe
siècle. Il n’y avait pas nos plus d’hôtel de ville les réunions
et les élections avaient lieu dans la salle des plaids, au-dessus
de la halle de la boucherie ou bien «en un autre lieu». Les échevins
avaient pour principale fonction d’administrer les deniers communs de la
ville, mais ils ne pouvaient disposer d’une somme supérieure à
20 sols parisis, sans une ordonnance de justice. Ces deniers communs, comme
leur nom l’indique, ne pouvaient être utilisés que pour la
communauté. Ils provenaient alors uniquement des droits de barrage,
octroi perçu aux portes de la ville sur les chariots chargés,
les bêtes de somme et le bétail, et des droits payés sur
le sel vendu au grenier d’Etampes; plus tard, il s’y ajouta, quand il y eut
une maison de ville, le montant de la location des greniers de cette maison,
puis, le droit de courtepinte, prélevé sur les vins.
Ces deniers communs devaient servir d’abord à l’entretien du pavé
et des chemins de la ville, entretien fort onéreux en raison de la
circulation très active, puis, aux réparations de l’enceinte
et des portes et enfin, aux frais du séjour des rois et des princes,
également fort élevés, comme on a pu le voir. Le contrôle
de l’emploi des deniers communs était fait par les agents royaux et
la Chambre des comptes.
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Les échevins d’Étampes, supportant avec peine que la
ville d’Orléans eût acquis de nombreux privilèges
et possédât un hôtel de ville, demandèrent
aux bourgeois d’Orléans une copie des lettres qui lui accordaient
ces avantages afin de s’en inspirer pour une requête auprès
du roi. Un bourgeois d’Orléans vint à Étampes leur
apporter ladite copie et comme il ne voulut point accepter d’argent en
retour, ils lui offrirent quatre pintes de bon vin et du gibier. Et ils
obtinrent du roi Louis XII, moyennant finances d’ailleurs, le [p.28] jour du mariage de sa fille
Claude avec François, duc de Valois, une charte, qui les autorisait
à nommer un maire et à construire ou acheter une maison commune,
où ils pourraient mettre en sûreté leurs titres, et
s’assembler quand bon leur semblerait C’est ainsi que fut élu, en
1517, le premier maire dont nous connaissions le nom, Jean de Villette,
qui était lieutenant particulier du bailliage. Cette charte donna
lieu à un procès parce qu’elle rencontra aussitôt l’opposition
du lieutenant général, du prévôt, du procureur
du roi, tous craignant l’extension des pouvoirs de la municipalité
à leur détriment. Elle accordait, cependant, peu de chose,
en fait. Louis XII avait passé adroitement sous silence toutes les
questions qui pouvaient devenir litigieuses. Les échevins désiraient
être élus sans l’intervention des officiers du bailliage:
ils ne l’obtinrent pas. Leurs ressources restaient à peu près
ce qu’elles étaient. Ils ne pouvaient prendre d’initiatives importantes
sans l’avis des officiers du roi, qu’ils eurent ainsi intérêt
à se concilier: l’élection du lieutenant du bailliage, Jean
de Villette, comme maire, est significative à cet égard.
Louis XII, comme tous les rois, voulait la collaboration de ses fonctionnaires
avec la municipalité et sa charte ne promettait rien qui y fît
obstacle. C’est ainsi qu’elle fut enregistrée finalement en 1518
et les échevins purent acheter une maison de ville, avec une somme
de 2.000 livres tournois, qu’ils furent autorisés par François
Ier à prendre sur les octrois royaux.
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Les échevins d’Etampes, supportant avec peine que la vile
d’Orléans eût acquis de nombreux privilèges et possédât
un hôtel de ville, demandèrent aux bourgeois d’Orléans
une copie des lettres qui lui accordaient ces avantages afin de s’en inspirer
pour une requête auprès du roi. Un bourgeois d’Orléans
vint à Etampes leur apporter ladite copie et comme il ne voulut
point accepter d’argent en retour, ils lui offrirent quatre pintes de bon
vin et du gibier. Et ils obtinrent du roi Louis XII, moyennant finances
d’ailleurs, le jour du mariage de sa fille Claude avec Français,
duc de Valais, une charte, qui les autorisait à nommer un maire et
à construire ou acheter une maison commune, où ils pourraient
mettre en sûreté leurs titres, et s’assembler quand bon leur
semblerait. C’est ainsi que fut élu, en 1517, le premier maire dont
nous connaissions le nom, Jean de Villette, qui était lieutenant
particulier du bailliage. Cette charte donna lieu à un procès
parce qu’elle rencontra aussitôt l’opposition du lieutenant général,
du prévôt, du procureur du roi, tous craignant l’extension
des pouvoirs de la municipalité à leur détriment. Elle
accordait, cependant, peu de chose, en fait. Louis XII avait passé
adroitement sous silence toutes les questions qui pouvaient devenir litigieuses.
Les échevins désiraient être élus sans l’intervention
des officiers du bailliage ils ne l’obtinrent pas. Leurs ressources restaient
à peu près ce qu’elles étaient. Ils ne pouvaient prendre
d’initiatives importantes sans l’avis des officiers du roi, qu’ils eurent
ainsi intérêt à se concilier: l’élection du lieutenant
du bailliage, Jean de Villette, comme maire, est significative à cet
égard. Louis XII, comme tous les rois, voulait la collaboration de
ses fonctionnaires avec la municipalité et sa charte ne promettait
rien qui y lit obstacle. C’est ainsi qu’elle fut enregistrée finalement
en 1518 et le échevins purent acheter une maison de ville, avec une
somme de 2.000 livres tournois, qu’ils furent autorisés par François
Ier à prendre sur les octrois royaux.
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C’est également Claude de France qui accorda aux officiers royaux
d’Étampes l’autorisation de tenir leurs audiences dans son palais
du Séjour afin de leur donner un siège «plus convenable»
que la salle de la boucherie. L’inauguration du nouvel auditoire eut
lieu le 28 novembre 1518, en présence des officiers de toutes les
justices du bailliage et des notables de la ville. C’est là que
se trouve encore notre tribunal depuis plus de quatre siècles.
Au XVIe siècle, les assises s’y tenaient deux fois par an, sous
la présidence du lieutenant général du bailliage,
pendant une semaine, et les plaids avaient lieu tous les jours, sauf le
jeudi, le prévôt jugeant trois jours de la semaine, et les
officiers du bailliage, deux jours, ce qui montre les habitudes processives
de l’époque.
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C’est également Claude de France qui accorda aux officier royaux
d’Etampes l’autorisation de tenir leurs audiences dans son palais du Séjour
afin de leur donner un siège «plus convenable» que
la salle de la boucherie. L’inauguration du nouvel auditoire eut lieu le
28 novembre 1518, en présence des officiers de toutes les justices
du bailliage et des notables de la ville. C’est là que se trouve
encore notre tribunal depuis plus de quatre siècles. Au XVIe siècle,
les assises s’y tenaient deux fois par an, sous la présidence du
lieutenant général du bailliage, pendant une semaine, et les
plaids avaient lieu tous les jours, sauf le jeudi, le prévôt
jugeant trois jours de la semaine, et les officiers du bailliage, deux jours,
ce qui montre les habitudes processives de l’époque.
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A la mort prématurée de la reine, en 1524, le comté
d’Étampes rentra dans le domaine royal. En 1526, François
Ier le donnait à Jean de la Barre, premier gentilhomme de sa
chambre, pour les bons services qu’il lui avait rendus, particulièrement
à la bataille de Pavie «en laquelle il ne l’abandonna jamais».
Cette donation, très large, puisqu’elle accordait au donataire
la perception de tous les revenus, même ceux du grenier à
sel, et le pouvoir de nommer à tous les offices vacants, rencontra
une vive opposition à la Chambre des comptes. Le roi dut faire un
commandement exprès. La Chambre ne céda que sur la question
des offices. Mais Jean de la Barre [p.29]
reçut directement de Francois Ier une
part des revenus du grenier à sel d’Étampes. Par une autre
marque de la faveur royale, il fut maintenu dans la possession de son comté
jusqu’à sa mort en 1533, en dépit d’un acte promulgué
par le roi en 1531, qui révoquait toutes les donations de terres
qu’il avait consenties. Mais cet acte, comme on pouvait le prévoir,
eut toujours des applications inconstantes.
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A la mort prématurée de la reine, en 1524, le comté
d’Etampes rentra dans le domaine royal. En 1523, François Ier le
donnait à Jean de la Barre, premier gentilhomme de sa chambre, pour
les bons services qu’il lui avait rendus, particulièrement à
la bataille de Pavie «en laquelle il ne l’abandonna jamais».
Cette donation, très large, puisqu’elle accordait au donataire la
perception de tous les revenus, même ceux du grenier à sel,
et le pouvoir de nommer à tous les offices vacants, rencontra une
vive opposition à la Chambre des comptes. Le roi dut faire un commandement
exprès. La Chambre ne céda que sur la question des offices.
Mais Jean de la Barre reçut directement de François Ier une
part des revenus du grenier à sel d’Etampes. Par une autre marque
de la faveur royale, il fut maintenu dans la possession de son comté
jusqu’à sa mort en 1533, en dépit d’un acte promulgué
par le roi en 1531, qui révoquait toutes les donations de terres qu’il
avait consenties. Mais cet acte, comme on pouvait le prévoir, eut
toujours des applications inconstantes.
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François Ier était alors sous l’empire de sa passion
pour une ancienne fille d’honneur de sa mère, Anne de Pisseleu,
la plus belle des savantes et la plus savante des belles,
qui l’avait conquis dès son retour de captivité par sa
beauté et son esprit. Elle avait épousé Jean de Brosses,
issu de la vieille famille féodale des vicomtes de Limoges, mais
complètement ruiné et ainsi fort impatient de reconstituer
sa fortune par ce rôle de mari complaisant. Tous deux obtinrent
du roi, en 1534, le comté d’Étampes, qui moins de deux
ans après était érigé en duché. Dans
l’acte qui établit cette nouvelle prérogative, François
Ier déclare qu’«il considère que le comté d’Étampes est
de belle et grande étendue, et de bon et gros revenu, tenu et
réputé une des plus notables et anciennes maisons du royaume,
dont dépendent plusieurs beaux fiefs et arrière-fiefs et
seigneuries et il veut pour la décoration dudit royaume élever
ledit comté en plus haut titre et degré». Ces mentions
flatteuses, qui contenaient certes une part de vérité, cherchaient
à masquer l’insigne faveur que le roi accordait à sa maîtresse
et l’ascendant qu’elle possédait sur lui. Ambitieuse, avare, vindicative,
elle sut en user pour acquérir un important domaine, ruiner ses
ennemis, favoriser ses partisans et surtout les membres de sa famille, fort
nombreux puisque, son père s’étant marié trois fois,
elle n’avait pas moins de trente frères et sœurs. Aussi ne fut-elle
guère aimée de ses contemporains qui l’appelaient «la
méchante», encore qu’elle encourageât les lettres
et les arts et qu’elle eût beaucoup de courtisans intéressés.
La ville d’Étampes ne peut lui être reconnaissante d’aucune
libéralité et la trace de la possession de son duché
aurait presque entièrement disparu, si son nom n’était
demeuré attaché à une maison charmante, au coin
de la place de l’Hôtel-de-Ville et de la rue Sainte-Croix. La date
de 1538 gravée sur l’encadrement d’une fenêtre et un buste
mutilé, qui semble représenter François Ier, ont
permis cette attribution. L’édifice et sa décoration sont
bien certainement de l’époque de la favorite. En 1547, François
Ier mourait à Rambouillet et le jour même de sa mort, Anne
de Pisseleu était bannie de la cour et le duché d’Étampes
lui fut enlevé. Mais son propre mari lui ayant intenté un
procès en reddition, c’est à lui seul que le nouveau roi
Henri II confirme la donation du duché «en considération
et contemplation des bons, grands et recommandables services qu’il a ci-devant
et par longtemps faits [p.30] au
feu roi et à lui pareillement». Cependant, Henri II ne tarda
pas à le retirer à Jean de Brosses pour l’offrir à
la belle duchesse de Valentinois, Diane de Poitiers, qu’il aimait déjà
dauphin, bien qu’elle eût environ vingt-cinq ans de plus que lui.
Cette favorite «si belle, dit Brantôme, que je ne sache cœur
de rocher qui ne s’en fût ému», douée, en outre,
de toutes les grâces de l’esprit, protectrice et inspiratrice de tous
les arts, mais sèche, âpre, intrigante, exerçait sur
Henri II une véritable fascination et seule la mort brutale du roi
en 1559, devait lui arracher presque tous les biens immenses qu’elle avait
su obtenir. En vertu de l’édit de révocation des dons royaux,
publié de nouveau par François II dès son avènement,
son duché lui fut enlevé. Elle fut chassée de la cour
avec infamie, par Catherine de Médicis et sous l’influence des Guise,
auxquels elle était cependant alliée. Mais le roi était
mort.
|
|
François Ier était alors sous l’empire de sa passion pour
uni ancienne fille d’honneur de sa mère, Anne de Pisseleu, la
plus belle des savantes et la plus savante des belles, qui l’avait conquis
dès son retour de captivité par sa beauté et son
esprit. Elle avait épousé Jean de Brosses, issu de la vieille
famille féodale des vicomtes de Limoges, mais en complètement
ruiné et ainsi fort impatient de reconstituer sa fortune par ce
rôle de mari complaisant. Tous deux obtinrent du roi, en 1534, le
comté d’Etampes, qui moins de deux ans après était
érigé en duché. Dans l’acte qui établit cette
nouvelle prérogative Français Ier déclare qu’«il
considère que le comté d’Etampes est de belle et grande étendue,
et de bon et gros revenu, tenu et réputé une des plus notables
et anciennes maisons du royaume, dont dépendent plusieurs beaux fiefs
et arrière-fiefs et seigneuries et il veut pour la décoration
dudit royaume élever ledit comté en plus haut titre et degré».
Ces mentions flatteuses, qui contenaient certes une part de vérité,
cherchaient à masquer l’insigne faveur que le roi accordait à
sa maîtresse et l’ascendant qu’elle possédait sur lui. Ambitieuse
avare, vindicative, elle sut en user pour acquérir un important
domaine, ruiner ses ennemis, favoriser ses partisans et surtout les membres
de sa famille, fort nombreux puisque, son père s’étant marié
trois fois, elle n’avait pas moins de trente frère et sœurs. Aussi
ne fut-elle guère aimée de ses contemporains qui l’appelaient
«la méchante», encore qu’elle encourageât les lettres
et les arts et qu’elle eût beaucoup de courtisans intéressés.
La ville d’Etampes ne peut lui être reconnaissante d’aucune libéralité
et la trace de la possession de son duché aurait presque entièrement
disparu, si son nom n’était demeuré attaché à
une maison charmante, au coin de la place d l’Hôtel-de-Ville et de
la rue Sainte-Croix. La date de 1533 gravée sur l’encadrement d’une
fenêtre et un buste mutilé qui semble représenter Français
Ier ont permis cette attribution. L’édifice et sa décoration
sont bien certainement de l’époque de la favorite. En 1547, Français
Ier mourait à Rambouillet et le jour même de sa mort, Anne
de Pisseleu était bannie de la cour et le duché d’Etampes
lui fut enlevé. Mais son propre mari lui ayant intenté un
procès en reddition, c’est à lui seul que le nouveau roi Henri
II confirme la donation du duché «en considération et
contemplation des bons, grands et recommandables services qu’il a ci-devant
et par longtemps faits au feu roi et à lui pareillement». Cependant,
Henri II ne tarda pas à le retirer à Jean de Brosses pour
l’offrir à la belle duchesse de Valentinois, Diane de Poitiers, qu’il
aimait déjà dauphin, bien qu’elle eût environ vingt-cinq
ans de plus que lui. Cette favorite «si belle, dit Brantôme,
que je ne sache cœur de rocher qui ne s’en fût ému»,
douée, en outre, de toutes les grâces de l’esprit, protectrice
et inspiratrice de tous les arts, mais sèche, âpre, intrigante,
exerçait sur Henri II une véritable fascination et seule la
mort brutale du roi en 1559, devait lui arracher presque tous les biens immenses [p.29] qu’elle avait su obtenir.
En vertu de l’édit de révocation des dons royaux, publié
de nouveau par François II dès son avènement, son
duché lui fut enlevé. Elle fut chassée de la cour
avec infamie, par Catherine de Médicis et sous l’influence des Guise,
auxquels elle était cependant alliée. Mais le roi était
mort...
|
Cette courte possession du duché d’Étampes par Diane
de Poitiers nous a valu au moins l’élégante demeure qui
est aujourd’hui celle de la Caisse d’Épargne. Plusieurs faits
permettent de croire qu’elle a bien été construite et ornée
pour la favorite la date de 1554, gravée sur une fenêtre
de la plus jolie partie de cet hôtel, alors que le titre de duchesse
d’Étampes lui fut accordé par Henri II en 1553, la décoration,
où l’on retrouve ça et là les armoiries de France
mêlées aux armes de Diane et au croissant, les lettres
H et D entrelacées, enfin la présence, assez insolite,
à Étampes cette même année 1554, authentiquement
prouvée par une pièce des Archives nationales, de Jean
Goujon lui-même, le sculpteur du roi. Ce dernier fait paraît
démonstratif, car on ne s’expliquerait guère le séjour
à Étampes de Jean Goujon, si ce n’est parce qu’il était
chargé d’y embellir une habitation de la duchesse, comme il venait
précisément de le faire au château d’Anet. La pièce
d’archives qui le concerne nous apprend qu’il fut emprisonné à
Étampes, pour une raison qui demeure ignorée.
|
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Cette courte possession du duché d’Etampes par Diane de Poitiers
nous a valu au moins l’élégante demeure qui est aujourd’hui
celle de la Caisse d’Epargne. Plusieurs faits permettent de croire qu’elle
a bien été construite et ornée pour la favorite: la
date de 1554, gravée sur une fenêtre de la plus jolie partie
de cet hôtel, alors que le titre de duchesse d’Etampes lui fut accordé
par Henri II en 1553, la décoration, où l’on retrouve ça
et là les armoiries de France mêlées aux armes de
Diane et au croissant, les lettres H et D entrelacées, enfin la
présence, assez insolite, à Etampes cette même année
1554, authentiquement prouvée par une pièce des Archives
nationales, de Jean Goujon lui-même, le sculpteur du roi. Ce dernier
fait paraît démonstratif, car on ne s’expliquerait guère
le séjour à Etampes de Jean Goujon, si ce n’est parce qu’il
était chargé d’y embellir une habitation de la duchesse, comme
il venait précisément de le faire au château d’Anet.
La pièce d’archives qui le concerne nous apprend qu’il fut emprisonné
à Etampes, pour une raison qui n’est pas précisée,
sans doute des dettes.
|
Au cours du XVIe siècle, d’autres travaux furent accomplis dans
notre ville et beaucoup d’améliorations furent apportées
à l’administration de ses biens. La porte Saint-Jacques fut
construite en 1512. Une très médiocre, mais bien curieuse
peinture, conservée au Musée, nous la montre coiffée
d’un comble aigu en ardoises et bastionnée de deux tours, avec
la ligne de murailles qui ceignait la ville. Mais nous n’y voyons point
l’état ruineux de cette enceinte, conséquence des sièges
qu’elle avait eu à subir. Elle s’étendait tout le long
du boulevard Henri IV actuel depuis la ruelle d’Enfer, puis, au delà,
jusqu’à la petite place de notre monument aux Morts, descendait
comme la rue des Remparts, suivait la rivière d’Étampes
au sud et rejoignait le boulevard Henri IV par la rue du Filoir. En outre,
les faubourgs eux-mêmes étaient fortifiés, Il y avait
quinze portes, dont les huit principales, défendues par deux tours [p.31] et munies de ponts-levis,
étaient la porte Saint-Martin, la porte Dorée, la porte des
Lions ou du Châtel, la porte Saint-Jacques, la porte Évezard,
la porte Saint-Pierre, la porte Saint-Fiacre et la porte Saint-Gilles. A
chacune, étaient perçues des taxes, de péage pour le
roi et de barrage pour la municipalité, dont le montant élevé
prouve l’importance commerciale d’Etampes à cette époque. Mais
la valeur défensive de la fortification délabrée était
presque nulle. Or, les brigandages aussi bien que les guerres constantes
rendaient nécessaires les enceintes fortifiées. François
Ier alors en lutte avec Charles-Quint, qui venait de ravager la Provence
et menaçait de s’avancer jusqu’à Paris, prescrivit aux habitants
d’Étampes, par des lettres datées de Lyon, 1536, de réparer
leurs murs. Les habitants furent aussitôt assemblés et l’on
reprit un projet de restauration du XIVe siècle, qui s’appliquait
d’abord aux tours de la porte Évezard, puis, à la courtine
jusqu’à la porte Saint-Fiacre et qui comprenait, entre l’enceinte
et les terrains particuliers, des boulevards, qui devaient faciliter l’organisation
de la défense. On devait, en outre, garnir de ponts-levis toutes les
portes. Les frais de l’exécution de ce plan seraient pris sur les
deniers communs et même sur une taxe nouvelle, s’ils n’y suffisaient
pas. La prompte adhésion des habitants à ces projets montre
qu’ils sentaient l’urgence de la restauration des murs qui les protégeaient.
Et cependant, c’est l’obstination d’un petit groupe d’entre eux qui y
mit obstacle. Car il fallait raser quelques maisons. L’un des propriétaires
en question, un bourgeois riche, nommé Martin Auper, gagnant d’abord
à sa mauvaise cause les officiers royaux, réussit, sans
doute par corruption, à obtenir de la Chancellerie elle-même
l’ordre de cesser les travaux. Les échevins ne se tinrent pas pour
battus, ils en appelèrent au roi, qui désigna le bailli
d’Orléans pour juger du différend. Ce fut le lieutenant général
de ce bailli qui décida, en l’hôtel du Cheval bardé,
à Étampes, que Martin Auper et ses commettants recevraient,
pour les dommages qui seraient causés à leurs biens, une
indemnité à dire d’experts. Il semblait que toutes les difficultés
fussent aplanies et que les travaux pour raient être poursuivis
Il n’en fut rien. L’on se heurta à un obstacle insurmontable les
ressources de la ville étaient trop modestes pour faire face aux
indemnités en même temps qu’aux frais de la restauration
de l’enceinte. Quand survinrent les guerres de religion, on n’avait rien
pu contre cet état de choses et notre malheureuse ville se trouva
sans défense. Malgré les efforts des échevins et
de la majorité des habitants, quelques intérêts particuliers
l’avaient emporté sur l’intérêt général.
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Au cours du XVIe siècle, d’autres travaux furent accomplis dans
notre ville et beaucoup d’améliorations furent apportées
à l’administration de ses biens. La porte Saint-Jacques fut construite
en 1512. Une bien curieuse peinture, conservee au Musée, nous la
montre coiffée d’un comble aigu en ardoises et bastionnée
de deux tours, avec la ligne de murailles qui ceignait la ville. Mais nous
n’y voyons point l’état ruineux de cette enceinte, conséquence
des sièges qu’elle avait eu a subir. Elle s’étendait tout
le long du boulevard Henri IV actuel depuis la ruelle d’Enfer, puis, au-delà,
jusqu’à la petite place de notre monument aux Morts, descendait comme
la rue des Remparts, suivait la rivière d’Etampes au sud et rejoignait
le boulevard Henri-IV par la rue du Filoir. En outre, les faubourgs eux-mêmes
étaient fortifiés. Il y avait quinze portes, dont les huit
principales, défendues par deux tours et munies de ponts-levis,
étaient: la porte Saint-Martin, la porte Dorée, la porte
des Lions ou du Château, la porte Saint-Jacques, la porte Evezard,
la porte Saint-Pierre, la porte Saint-Fiacre et la porte Saint-Gilles. A
chacune, étaient perçues des taxes, de péage pour le
roi et de barrage pour la municipalité, dont le montant élevé
prouve l’importance commerciale d’Etampes à cette époque.
Mais la valeur défensive de la fortification délabrée
était presque nulle. Or, les brigandages aussi bien que les guerres
constantes rendaient nécessaires les enceintes fortifiées.
François Ier, alors en lutte avec Charles-Quint, qui venait de ravager
la Provence et menaçait de s’avancer jusqu’à Paris, prescrivit
aux habitants d’Etampes, par des lettres datées de Lyon, 1536, de
réparer leurs murs. Les habitants furent aussitôt assemblés
et l’on reprit un projet de restauration du XIVe siècle, qui s’appliquait
d’abord aux tours de la porte Evezard, puis, à la courtine jusqu’à
la porte Saint-Fiacre et qui comprenait, entre l’enceinte et les terrains
particuliers, des boulevards, qui devaient faciliter l’organisation et la
défense. On devait, en outre, garnir de ponts-levis toutes les portes.
Les frais de l’exécution de ce plan seraient pris sur les deniers
communs et même sur une taxe nouvelle, s’ils n’y suffisaient pas. La
prompte adhésion des habitants à ces projets montre qu’ils
sentaient l’urgence de la restauration des murs qui les protégeaient.
Et cependant, c’est l’obstination d’un petit groupe d’entre eux qui y mit
obstacle. Car il fallait raser quelques maisons. L’un des propriétaires
en question, un bourgeois riche, nommé Martin Auper, gagnant d’abord
à sa mauvaise cause les officiers royaux, réussit, sans doute
par corruption, à obtenir de la Chancellerie elle-même l’ordre
de cesser les travaux. Les échevins ne se tinrent pas pour battus,
ils en appelèrent au roi, qui désigna le bailli d’Orléans
pour juger du différend. Ce fut le lieutenant-général
de ce bailli qui décida, en l’hôtel du Cheval bardé,
à Etampes, que Martin Auper et ses commettants recevraient, pour
les dommages qui seraient causés à leurs biens, une indemnité
à dire d’experts. Il semblait que toutes les difficultés
fussent aplanies et que les travaux pourraient être poursuivis.
Il n’en fut rien. L’on se heurta à un obstacle insurmontable: les
ressources de la ville étaient trop modestes pour faire face aux
indemnités en même temps qu’aux frais de la restauration de
l’enceinte. Quand survinrent les guerres de religion, on n’avait rien pu
contre cet état de choses et notre malheureuse ville se trouva sans
défense. Malgré les efforts des échevins et de la majorité
des habitants, quelques intérêts particuliers l’avaient emporté
sur l’intérêt général.
|
Nous avons vu que la municipalité avait été autorisée
par Louis XII à construire ou acheter une maison de ville et
par François Ier à y consacrer 2.000 livres. L’Hôtel
de Ville ne fut pas construit, [p.32] comme
il a été dit, mais acheté pour cette somme, en 1514,
à Jacques Doulcet, conseiller du roi, qui le tenait de Jeanne
Doulcet, femme du grenetier d’Étampes à la fin du XVe siècle.
C’était un bel hôtel, qui ne dut pas nécessiter d’aménagements
pour sa nouvelle affectation.
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Nous avons vu que la municipalité avait été autorisée
par Louis XII à construire ou acheter une maison de ville et par
François r y consacrer 2.000 livres. L’Hôtel de ville ne fut
pas construit, comme il a été dit, mais acheté pour
cette somme, en 1514, à Jacques Doulcet, conseiller du roi, qui le
tenait de Jeanne Doulcet, femme du grenetier d’Etampes à la fin du
XV siècle. C’était un bel hôtel, qui ne dut pas nécessiter
d’aménagements pour sa nouvelle affectation.
|
La fondation de l’Hôtel-Dieu d’Étampes doit remonter à
la fin du XIIe siècle, sans qu’on ait plus de précision
à cet égard. Auparavant, si l’on s’en rapporte à
une tradition, les lits des malades pauvres étaient installés
dans l’église même de Notre-Dame, à l’extrémité
de la nef. L’incommodité de ce procédé fit décider
la construction d’un bâtiment séparé, dans la cour
des chanoines, à l’emplacement de l’hôpital actuel. Il s’appela
d’abord l’aumônerie de Notre-Dame. Au XVIe siècle, on y
adjoignit un dortoir des pauvres, converti plus tard en une chapelle,
qui nous a été conservée.
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La fondation de l’Hôtel-Dieu d’Etampes doit remonter à la
fin du XXe [sic] siècle,
sans qu’on ait plus de précision à cet égard. Auparavant,
si l’on s’en rapporte à une tradition, les lits des malades pauvres
étaient installés dans l’église même de Notre-
Dame, à l’extrémité de la nef. L’incommodité
de ce procédé fit décider la construction d’un bâtiment
séparé, dans la cour des chanoines, à l’emplacement
de l’hôpital actuel, Il s’appela d’abord l’aumônerie de Notre-Dame.
Au XVIe siècle, on y adjoignit un dortoir des pauvres, converti plus
tard en une chapelle, qui nous a été conservée.
|
A la même époque, des changements furent apportés
à l’administration de l’Hôtel-Dieu, qui laissait fort à
désirer. Elle était confiée à un prêtre,
désigné comme maître et administrateur par l’archevêque
de Sens. C’était, en 1537, un nommé Jacques de la Vallée,
dont l’incurie avait entraîné la mort de plusieurs pauvres
dans les rues, faute de secours. Les habitants adressèrent à
l’archevêque des plaintes qui ne restèrent pas sans effet.
Une transaction s’ensuivit, par laquelle l’administration du revenu temporel
de l’Hôtel-Dieu appartiendrait désormais au maire et aux échevins,
qui donneraient un traitement et une maison près de l’hôpital
au dit Jacques de la Vallée et à ses successeurs. Dès
ce moment, il fut établi, pour le service des malades, des religieuses
de l’ordre de Saint-Augustin qui furent d’abord des filles d’Étampes.
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A la même époque, des changements furent apportés
à l’administration de l’Hôtel-Dieu, qui laissait fort à
désirer. Elle était confiée à un prêtre,
désigné comme maître et administrateur par l’archevêque
de Sens. C’était, en 1537, un nommé Jacques de la Vallée,
dont l’incurie avait entraîné la mort de plusieurs pauvres
dans les rues, faute de secours. Les habitants adressèrent à
l’archevêque des plaintes qui ne restèrent pas sans effet.
Une transaction s’ensuivit, par laquelle l’administration du revenu temporel
de l’Hôtel-Dieu appartiendrait désormais au maire et aux échevins,
qui donneraient un traitement et une maison près de l’hôpital
au dit Jacques de la Vallée et à ses successeurs. Dès
ce moment, il fut établi, pour le service des malades, des religieuses
de l’ordre de Saint Augustin qui furent d’abord les filles d’Etampes.
|
Il existait encore à cette époque plusieurs autres établissements
hospitaliers dans notre ville. Leur administration fut désormais
surveillée par le maire et les échevins, qui devaient
élire deux administrateurs tous les trois ans, en vertu d’un édit
de Charles IX, de 1561, motivé par les désordres et les
malversations qui s’exerçaient partout. L’hôpital Saint-Jean-au-Haut-Pavé
était la plus ancienne de ces fondations, de par sa situation
même dans la vieille ville, rue du Haut-Pavé, un peu avant
la rue Saint-Jean. En outre, nous savons par une charte de 1085 que Philippe
Ier en fut le bienfaiteur.
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Il existait encore à cette époque plusieurs autres établissements
hospitaliers dans notre ville. Leur administration fut désormais
surveillée par le maire et les échevins, qui devaient élire
deux administrateurs tous les trois ans, en vertu d’un édit de Charles
IX, de 1561, motivé par les désordres et les malversations
qui s’exerçaient partout. L’hôpital Saint-Jean-au-Haut-Pavé
était la plus ancienne de ces fondations, de par sa situation même
dans la vieille ville, rue du Haut-Pavé, un peu avant la rue Saint-Jean.
En outre, nous savons par une charte de 1085 que Philippe Ier en fut le
bienfaiteur.
|
La commanderie ou l’hôpital de Saint-Jacques de l’Épée
avait été fondée par des chevaliers de cet ordre,
sur l’emplacement de l’abattoir actuel, à une date que nous ignorons:
un acte de François Ier de 1518 confère cette commanderie
à un nommé Pierre Dance, par un acte qui ne doit pas être
confondu, comme il l’a été par certains historiens d’Étampes,
avec un acte de fondation. L’ordre de Saint-Jacques de l’Épée
fondé en Espagne dès le XIIe siècle, pour enrayer
les troubles causés par les Maures aux pèlerinages [p.33] de Saint-Jacques de Compostelle,
avait établi en France des refuges pour les pèlerins,
principalement sur la route de Saint-Jacques, et c’est ainsi qu’ils
en créèrent un à Étampes, à une époque
certainement bien antérieure à l’acte de François
Ier, puisque son existence est mentionnée dans le droit de port
accordé par Jean de Foix en 1490. En 1580, cet hôpital et
ses dépendances furent donnés par le roi à des capucins,
qui y entreprirent divers travaux, mais sans que son affectation en fût
modifiée, ni son administration soustraite à la surveillance
du maire.
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L’existence à Etampes d’une Commanderie de l’ordre de Saint-Jacques
de l’Epée, maison d’accueil, tout particulière ment ouverte
aux pèlerins de Saint-Jacques de Compostelle, est attestée
en 1490 par le droit de port que Jean de Foix accorde au commandeur. Mais
on ignorait jusqu’à ces dernières années la date de
fondation de cette Commanderie à Etampes. Nous avons eu la bonne
fortune de l’apprendre par un érudit français qui découvrit,
au cours de ses recherches dans les archives espagnoles de l’Ordre de Saint-Jacques,
que notre roi Philippe-Auguste fit don en 1184 à l’ordre militaire
espagnol d’un domaine près d’Etampes: Donatio Villaenovae prope
Stampas sub colle Montis Falconis. Il s’agit du lieu-dit Villeneuve-sous-Montfaucon,
situé tout près de Morigny. La donation de Philippe-Auguste,
authentifiée par une bulle apostolique du pape Lueius III n’autorise
pas à conclure que la Commanderie a d’abord été édifiée
en ce lieu, puisqu’il n’en reste aucune trace, mais elle permet d’affirmer
que la fondation remonte au XIIe siècle, à l’époque
où fut créé l’ordre en Espagne. Il est possible que
les chevaliers de Saint-Jacques aient préféré au domaine
de Villeneuve, proche de la Maladrerie de Saint-Lazare, voisinage peu souhaitable,
le terrain près du port où nous les trouvons établis
en 1480, où leur souvenir demeure sous le nom de la petite rue du
Chevalier de l’Epée. En 1580, leur hôpital et ses dépendances
furent donnés par le roi à des capucins, qui y entreprirent
divers travaux, mais sans que son affectation en fût modifiée,
ni son administration soustraite à la surveillance du maire.
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La maladrerie de Saint-Lazare, sur la route de Paris, avait reçu
dès le XIIe siècle des donations importantes des rois
Louis VI et Louis VII, et plus tard, de nombreux autres bienfaiteurs.
Mais au début du XVIe siècle, elle était administrée
d’une manière déplorable. Les fonds étaient détournés,
les lépreux, ne recevant plus de soins, mendiaient dans la ville
et risquaient de propager leur mal. Cette situation n’étant pas
spéciale à Étampes, François Ier, en 1543,
avait chargé les baillis de surveiller les léproseries et
de destituer les administrateurs coupables. Mais les abus persistaient,
en particulier à la maladrerie de Saint-Lazare, où les lépreux,
en 1544, n’étaient plus que quatre. Une part des revenus étaient
employés par un administrateur, Jacques Yvon, à poursuivre
un procès pour conserver sa charge. Ses successeurs ne furent pas
plus honnêtes et s’efforçaient de corrompre les officiers
royaux, si bien qu’en 1560, un bourgeois d’Étampes fut désigné
comme administrateur et à partir de 1561, le bienfaisant édit
de Charles IX fut appliqué là comme dans les autres établissements.
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La maladrerie de Saint-Lazare, sur la route de Paris, avait reçu
dès le XIIe siècle des donations importantes des rois Louis
VI et Louis VII, et plus tard, de nombreux autres bienfaiteurs. Mais au
début du XVI siècle, elle était administrée d’une
manière déplorable. Les fonds étaient détournés,
les lépreux, ne recevant plus de soins, mendiaient dans la ville et
risquaient de propager leur mal. Cette situation n’étant pas spéciale
à Etampes, François en 1543, avait chargé les baillis
de surveiller les léproseries et de destituer les administrateurs
coupables. Mais les abus persistaient, en particulier à la maladrerie
d’Etampes, où les lépreux, en 1544, n’étaient plus
que quatre. Une part des revenus étaient employés par un administrateur,
Jacques Yvon, à poursuivre un procès pour conserver sa charge.
Ses successeurs ne furent pas plus honnêtes et s’efforçaient
de corrompre les officiers royaux, si bien qu’en 1560, un bourgeois d’Etampes
fut désigné comme administrateur et à partir de 1561,
le bienfaisant édit de Charles IX fut appliqué là
comme dans les autres établissements.
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Enfin, l’hôpital Saint-Antoine, qui existait dès le
début du XIIIe siècle, était destiné à
loger «des passants valides». Il était situé
en face de l’ancien collège, c’est-à-dire à l’emplacement
du collège actuel, et comprenait une chapelle pour cette double
raison, il fut donné au début du XVIIe siècle,
aux Pères barnabites qui venaient d’être appelés
à la direction du collège comme nous allons le voir.
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Enfin, l’hôpital Saint-Antoine, qui existait dès le
début du XIIIe siècle, était destiné à
loger «des passants valides». Il était situé
en face de l’ancien collège, c’est-à-dire à l’emplacement
du collège jusqu’en 1963, et comprenait une chapelle pour cette
double raison, il fut donné au début du XVIIe siècle,
aux Pères barnabites qui venaient d’être appelés à
la direction du collège comme nous allons le voir.
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La première mention des écoles d’Étampes nous est
donnée par une bulle du pape Luce III en 1183, qui accordait au
chapitre de Sainte-Croix le droit d’instituer un maître des écoles.
Mais aussitôt les chanoines de Notre-Dame, qui étaient précisément
alors en lutte ouverte avec ceux de Sainte-Croix, firent opposition à
ce privilège. Ils réussirent à l’enlever à
leurs rivaux, en 1191, par une sentence des juges ecclésiastiques
qu’avait désignés le roi pour régler les nombreux
points contestés entre les deux chapitres. Mais cet enseignement
n’avait pas de siège; il était donné tout simple ment
dans la maison du maître, auquel on ne sait s’il était alloué
un bénéfice de l’église en paiement de sa tâche.
C’est seulement en 1515 que nous voyons les habitants d’Étampes
se préoccuper [p.34] d’avoir
une maison d’école et des «maîtres gagés»
pour instruire gratuitement leurs enfants. Il demandent à François
Ier l’autorisation de consacrer une partie des deniers qui avaient été
affectés aux fortifications de la ville à l’achat ou à
l’édification «d’une maison commode pour y tenir les écoliers,
estimant que leur ville serait mieux défendue par des citoyens
bien instruits aux bonnes lettres, avec la connaissance desquelles l’on
acquiert aussi la prudence, que par des murailles et autres fortifications».
On voit que nos bourgeois d’Étampes étaient pleins d’illusions
sur l’usage que font les hommes de la science qu’ils ont acquise, reflet
de cette belle époque de la Renaissance, où la supériorité
des choses de l’esprit s’imposait à tous.
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La première mention des écoles d’Etampes nous est donnée
par une bulle du pape Luce III en 1183, qui accordait au chapitre de Sainte-Croix
le droit d’instituer un maître des écoles. Mais aussitôt
les chanoines de Notre-Dame, qui étaient précisément
alors en lutte ouverte avec ceux de Sainte-Croix, firent [p.30] opposition à ce privilège.
Ils réussirent à l’enlever à leurs rivaux, en 1191,
par une sentence des juges ecclésiastiques qu’avait désignés
le roi pour régler les nombreux points con testés entre les
deux chapitres. Mais cet enseignement n’avait pas de siège; il était
donné tout simplement dans la maison du maître, auquel on
ne sait s’il était alloué un bénéfice de l’église
en paiement de sa tâche, C’est seulement en 1515 que nous voyons
les habitants d’Etampes se préoccuper d’avoir une maison d’école
et des «maîtres gagés» pour instruire gratuitement
leurs enfants. Ils demandent à François Ier l’autorisation
de consacrer une partie des deniers qui avaient été affectés
aux fortifications de la ville à l’achat ou à l’édification
«d’une maison commode pour y tenir les écoliers, estimant
que leur ville serait mieux défendue par des citoyens bien instruits
aux bonnes lettres, avec la connaissance desquelles l’on acquiert aussi
la prudence, que par des murailles et autres fortifications». On voit
que nos bourgeois d’Etampes étaient pleins d’espérances ou
d’illusions sur l’usage que font les hommes de la science qu’ils ont acquise,
reflet de cette belle époque de la Renaissance, où la supériorité
des choses de l’esprit s’imposait à tous.
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Le roi accorda son autorisation, mais on ne sait quand ni par qui fut
donnée à la ville, pour en faire un collège, la
maison sise à l’angle de la rue Saint-Antoine et de la rue du Pont-Quesneaux,
aujourd’hui rue Magne, en face du collège actuel. Elle était
en mauvais état et nécessita dès 1561 des réparations
urgentes, en vue des quelles François II, tout en accordant 600
livres, ordonna une visite des maçons et charpentiers experts,
sous la foi du serment. L’expertise eut lieu en présence du bailli,
Nicolas Petau, du lieu tenant de la prévôté, du maire,
des échevins et d’un grand nombre d’habitants. La conclusion fut
qu’il fallait «abattre la dicte mai son et la rebastir de nouvel»,
les murailles étant crevées, le bout du logis pourri, les
planchers rompus... Grâce à une somme de 1200 livres, octroyée
en deux fois, par le roi Charles IX, la ville put acheter en 1564 une maison
contiguë à l’ancienne et la faire aménager. Mais il
fallait d’autres ressources pour l’entretien des maîtres. Une prébende
du chapitre de Notre-Dame d’un revenu annuel de 300 livres étant
vacante par le décès de son titulaire, Louis Guibour, le maire
et les échevins obtinrent du roi, en 1566, qu’elle leur fût
concédée pour cet objet. Mais dès 1569, elle leur était
enlevée par un arrêt du Parlement en faveur d’un frère
de Louis Guibour, qui, en vertu des provisions qu’il avait reçues
de cette prébende, avait poursuivi le maire et les échevins.
Ceux-ci ne se découragèrent point cependant. Ils savaient
que le revenu de la maladrerie de Saint-Lazare dépassait ses besoins,
les lépreux n’y étant plus qu’en très petit nombre:
ils se firent accorder par le roi en 1575 une rente de 300 livres sur ce
revenu. C’est ainsi qu’un principal, Nicolas Charrier, prêtre et maître
ès-arts de l’Université de Paris, fut enfin appelé
à la direction des «grandes écoles d’Étampes».
Il avait la charge d’instruire et faire instruire les enfants d’Étampes
et des environs «ès bonnes mœurs et vie suivant l’institution
de l’Eglise catholique, en la connaissance des lettres et A B C, lire, écrire,
jeter comptes tant au jet qu’à la plume, en la grammaire et les premiers
rudiments de la langue latine et lettres [p.35]
humaines». Le principal était assisté
de deux régents, qu’il devait loger et entretenir sur les trois cents
livres de revenu, et, en outre, il était tenu de loger, nourrir et
instruire gratuitement deux enfants pauvres, appelés déjà
boursiers, qui étaient chargés de nettoyer les classes et de
«faire autre service honnête sans être distrait de leur
étude». Le collège semble avoir bien fonctionné
pendant une cinquantaine d’années, puisqu’il comptait plus de cent
élèves en 1626. Mais le désordre y fut alors introduit
par un principal incapable, presque toujours absent, Claude Vuaflard, et
dès 1628, il n’y avait plus que douze élèves. Vuaflard
fut révoqué par le maire et les échevins, auxquels
le bailli, puis, le Parlement donnèrent raison. Mais ils rencontrèrent
encore des difficultés avec un nouveau principal et c’est alors qu’ayant
reçu dans l’intervalle une somme de 8000 livres léguée
au collège par le lieutenant général du bailliage,
Jacques Petau, ils firent appel aux Pères barnabites, établis
depuis peu à Montargis. Leur administration, qui devait durer plus
d’un siècle, ne s’écoula pas sans nuages, contrairement à
ce qu’on eût pu espérer. Ils ne tinrent pas l’engagement qu’ils
avaient pris, pour satisfaire aux clauses du testament de Jacques Petau,
de construire un nouveau bâtiment et laissèrent l’ancien tomber
en ruines. Ils ne résidèrent pas au collège, mais dans
l’hôpital Saint-Antoine, qui ne leur avait été donné
qu’en attendant l’édification du nouveau bâtiment et d’une
chapelle. Enfin, leur enseignement laissait tant à désirer
qu’un mémoire dressé contre eux par le maire et les échevins
signale, entre autres griefs, que «c’est un hasard quand quelqu’un
des pensionnaires apprend le latin» et qu’un des régents
est un Suisse «qui a toutes les peines du monde à s’exprimer
eu français». En dépit de nombreux mémoires
semblables causés par «l’état affreux du collège»
et consécutifs aux plaintes réitérées des
habitants, les barnabites furent maintenus à la direction du
collège jusqu’en 1779, après quoi ils ne demeurèrent
qu’en petit nombre à Étampes.
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Le roi accorda son autorisation, mais on ne sait quand ni par qui fut
donnée à la ville, pour en faire un collège, la maison
sise à l’angle de la rue Saint-Antoine et de la rue du Pont-Quesnaux,
aujourd’hui rue Magne, Elle était en mauvais état et nécessita
dès 1561 des réparations urgentes, en vue desquelles François
II, tout en accordant 600 livres, ordonna une visite des maçons
et charpentiers experts, sous la foi du serment, L’expertise eut lieu en
présence du bailli, Nicolas Petau, du lieutenant de la prévôté,
du maire, des échevins et d’un grand nombre d’habitants. La conclusion
fut qu’il fallait «abattre la dicte maison et la rebastir de nouvel,
les murailles étant crevées, le bout du logis pourri, les
planchers rompus», Grâce à une somme de 1.200 livres,
octroyée en deux fois, par le roi Charles IX, la ville put acheter
en 1564 une maison contiguë à l’ancienne et la faire aménager,
Mais il fallait d’autres ressources pour l’entretien des maîtres,
Une prébende du chapitre de Notre-Dame d’un revenu annuel de 300
livres étant vacante par le décès de son titulaire,
Louis Guibour, le maire et les échevins obtinrent du roi, en 1566,
qu’elle leur fût concédée pour cet objet. Mais dès
1569, elle leur était enlevée par un arrêt du Parlement
en faveur d’un frère de Louis Guibour, qui, en vertu des provisions
qu’il avait reçues de cette prébende, avait poursuivi le maire
et les échevins. Ceux-ci ne se découragèrent point cependant.
Ils savaient que le revenu de la maladrerie de Saint-Lazare dépassait
ses besoins, les lépreux n’y étant plus qu’en très
petit nombre ils se firent accorder par le roi en 1575 une rente de 300
livres sur ce revenu. C’est ainsi qu’un principal, Nicolas Charrier, prêtre
et maître ès-arts de l’Université de Paris, fut enfin
appelé à la direction des «grandes écoles d’Etampes».
Il avait la charge d’instruire et faire instruire les enfants d’Etampes et
des environs «ès bonnes mœurs et vie suivant l’institution de
l’Eglise catholique, en la connaissance des lettres et A B C, lire, écrire,
jeter comptes tant au jet qu’à la plume, en la grammaire et les premiers
rudiments de la langue latine et lettres humaines». Le principal était
assisté de deux régents, qu’il devait loger et entretenir
sur les trois cents livres de revenu, et, en outre, il était tenu
de loger, nourrir et instruire gratuitement deux enfants pauvres, appelés
déjà boursiers, qui étaient chargés de nettoyer
les classes et de «faire autre service honnête sans être
distrait de leur étude». Le collège semble avoir bien
fonctionné pendant une cinquantaine d’années, puisqu’il
comptait plus de cent élèves en 1626. Mais le désordre
y fut alors introduit par un principal incapable, presque toujours absent,
Claude Vuaflard, et dès 1628, il n’y avait plus que douze élèves.
Vuaflard fut révoqué par le maire et les échevins,
auxquels le bailli, puis, le Parlement donnèrent raison. Mais ils
rencontrèrent encore des difficultés avec un nouveau principal
et c’est alors qu’ayant reçu dans l’intervalle une somme de 8.000
livres léguée au collège par le lieutenant général
du bailliage, Jacques Petau, ils firent appel aux Pères barnabites,
établis depuis peu à Montargis. Leur administration, qui devait
durer plus d’un siècle, ne s’écoula pas sans nuages, contrairement
à ce qu’on eût pu espérer. Ils ne tinrent pas l’engagement
qu’ils avaient pris, pour satisfaire aux clauses du testament de Jacques
Petau, de construire un nouveau bâtiment et laissèrent l’ancien
tomber en ruines. Ils ne résidèrent pas au Collège,
mais dans l’hôpital Saint-Antoine, qui ne leur avait été
donné qu’en attendant l’édification du nouveau bâtiment
et d’une chapelle. Enfin, leur enseignement laissait tant à désirer
qu’un mémoire dressé contre eux par le maire et les échevins
signale, entre autres griefs, que «c’est un hasard quand quelqu’un
des pensionnaires apprend le latin» et qu’un des régents est
un Suisse «qui a toutes les peines du monde à s’exprimer en
français». En dépit de nombreux mémoires semblables
causés par «l’état affreux du collège» et
consécutifs aux plaintes réitérées des habitants,
les barnabites furent maintenus à la direction du collège
jusqu’en 1779, après quoi ils ne demeurèrent qu’en petit nombre
à Etampes.
|
Parmi les améliorations qui furent apportées à
notre ville au XVIe siècle, il faut compter encore l’organisation
de la police les ravages des pillards et des assassins s’ajoutaient,
en effet, à ceux des gens de guerre et il devenait urgent de «purger»
toute la région. Un prévôt des maréchaux
et un lieutenant criminel assisté d’un lieutenant, d’un greffier
et d’abord de quatre, puis de six archers, en furent chargés.
En 1563, Étampes était devenue le centre d’une maréchaussée,
qu’elle conserva après la répression des désordres.
|
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Parmi les améliorations qui furent apportées à notre
ville au XVI’ siècle, il faut compter encore l’organisation de
la police les ravages des pillards et des assassins s’ajoutaient, en effet,
à ceux des gens de guerre et il devenait urgent de «purger»
toute la région. Un prévôt des maréchaux et un
lieutenant criminel assisté d’un lieutenant, d’un greffier et d’abord
de quatre, puis de six archers, en furent chargés. En 1563, Etampes
était devenue le centre d’une maréchaussée, qu’elle
conserva après la répression des désordres.
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A la même époque, les habitants d’Étampes, désireux
d’épargner aux jeunes gens les dangers de l’oisiveté et
«l’occasion d’aller fréquenter les tavernes et jeux scandaleux»,
obtinrent du roi Henri II l’autorisation d’organiser des jeux d’arbalète
et d’arquebuse, avec un concours et l’exemption d’impôts durant un
an pour [p.36] les vainqueurs.
Le concours eut lieu chaque année le 1er mai sur une place d’Étampes
celui qui abattait le «papegaut», l’oiseau de bois monté
sur un mât, du trait de son arbalète, était proclamé
roi des arbalétriers, et celui qui triomphait de même en
tirant à l’arquebuse, roi des arquebusiers. L’un et l’autre recevaient
un mouton d’or ou quarante sols tournois. L’hôtel de l’Arquebuse,
où se faisaient les exercices, longtemps situé rue Saint-Jacques,
fut transféré au XVIIIe siècle sur le Port, à
l’emplacement du casino actuel; il était alors le siège
d’une compagnie nombreuse de chevaliers, au somptueux costume, dont un
portrait conservé au musée d’Étampes nous donne quelque
idée. Ils se réunirent pour la dernière fois le 15
août 1790 et firent la remise de leurs drapeaux, qui furent suspendus
à la voûte de Notre-Dame.
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A la même époque, les habitants d’Etampes, désireux
d’épargner aux jeunes gens les dangers de l’oisiveté et «l’occasion
d’aller fréquenter les tavernes et jeux scandaleux», obtinrent
du roi Henri II l’autorisation d’organiser des jeux d’arbalète et
d’arquebuse, avec un concours et l’exemption d’impôts durant un an
pour les vainqueurs. Le concours eut lieu chaque année le 1er mai
sur une place d’Etampes: celui qui abattait le «papegaut»,
l’oiseau de bois monté sur un mât, du trait de son arbalète,
était proclamé roi des arbalétriers, et celui qui triomphait
de même en tirant à l’arquebuse, roi des arquebusiers. L’un
et l’autre recevaient un mouton d’or ou quarante sols tournois. L’hôtel
de l’Arquebuse, où se faisaient les exercices, longtemps situé
rue Saint-Jacques, fut transféré au XVIIIe siècle
sur le Port, à l’emplacement du casino actuel; il était alors
le siège d’une compagnie nombreuse de chevaliers, au somptueux costume,
dont un portrait conservé au musée d’Etampes nous donne quelque
idée. Ils se réunirent pour la dernière fois le 15
août 1790 et firent la remise de leurs drapeaux, qui furent suspendus
à la voûte de Notre-Dame.
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Enfin, c’est encore au XVIe siècle, en 1556, que fut rédigée
«la coutume d’Étampes» c’est-à-dire l’ensemble
des usages locaux en matière de droit, grâce à
laquelle les jugements pourraient s’inspirer des mœurs et des traditions
du lieu. Jusqu’alors, on suivait la coutume de Paris qui avait été
rédigée en 1510. A cet effet, les trois états du
bailliage furent convoqués à l’auditoire d’Étampes
et les officiers royaux établirent des cahiers préparatoires,
qui furent ensuite discutés en la présence de Christophe
de Thou, premier président au Parlement de Paris et de deux conseillers.
La rédaction fut publiée dès 1557. Le procès-verbal
de cette réunion des trois ordres est un document précieux
par les noms et l’état des personnes qu’il nous fait connaître
à cette date.
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Enfin, c’est encore au XVIe siècle, en 1556, que fut rédigée
«la coutume d’Etampes», c’est-à-dire l’ensemble des
usages locaux en matière de droit, grâce à laquelle
les jugements pourraient s’inspirer des mœurs et des traditions du lieu.
Jusqu’alors, on suivait la coutume de Paris qui avait été
rédigée en 1510. A cet effet les trois états du bailliage
furent convoqués à l’auditoire d’Etampes et les officiers
royaux établirent des cahiers préparatoires, qui furent ensuite
discutés en la présence de Christophe de Thou, premier président
au Parlement de Paris et de deux conseillers. La rédaction fut publiée
en 1557. Le procès-verbal de cette réunion des trois ordres
est un document précieux par les noms et l’état des personnes
qu’il nous fait connaître à cette date.
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Cet examen des travaux et des progrès réalisés
dans notre ville au cours de ce siècle nous montre qu’elle était
assez sagement administrée, aussi bien par les officiers royaux
que par la municipalité, comme l’avait voulu le prudent Louis
XII. La municipalité eut, en effet, le bon sens d’accepter sa subordination,
au lieu d’engager de stériles querelles, et l’habileté
de se rendre presque toujours favorables les fonctionnaires du roi et ainsi
le roi lui-même. Elle n’en fut ni moins vigilante, ni moins dévouée
aux intérêts de la cité et c’est ainsi que peu à
peu son rôle grandit. Elle ne réussit pas, cependant, à
faire d’Étampes une ville heureuse, comme le montre trop bien
le triste ensemble des plaintes, des suppliques des requêtes, des
procès. Mais cela tenait à deux causes indépendantes
de sa volonté, qui réagirent constamment l’une sur l’autre,
et non pas seulement dans la période que nous venons de considérer:
d’abord la fréquence des guerres, civiles ou étrangères,
puis, le déplorable état des finances, entretenu précisément
par les frais de guerre. Les institutions financières présentaient
à Étampes la même complexité que dans les autres
villes du royaume et nous n’entreprendrons pas de les exposer ici. On
sait que les impôts, qu’ils fussent le cens, les aides, la taille
ou la gabelle accablaient [p.37] tous
les non-privilégiés d’un véritable fardeau, encore
aggravé par le détestable système de l’affermage
des taxes à percevoir et par les malversations des receveurs.
Notre région constituait «l’élection d’Étampes»,
en tant que circonscription financière, vieille dénomination
conservée du temps oit le peuple choisissait les hommes, dits «élus»,
qui levaient ensuite les impôts sur un ordre du roi. Elle fut
spécialement atteinte par ces abus et ces charges, pour diverses
raisons: sa réputation de contrée riche, en dépit
de sa faible étendue, l’impôt étant arbitrairement
réparti, le grand nombre de ses habitants exemptés de taxes
et en fin, les ruines qu’y avaient accumulées tantôt les
guerres, dont elle fut si longtemps le théâtre même,
tantôt le passage dévastateur des troupes et des pillards. [p.38]
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Cet examen des travaux et des progrès réalisés dans
notre ville au cours de ce siècle nous montre qu’elle était
assez sagement administrée, aussi bien par les officiers royaux
que par la municipalité, comme l’avait voulu le prudent Louis XII.
La municipalité eut, en effet, le bon sens d’accepter sa subordination,
au lieu d’engager de stériles querelles, et l’habileté de
se rendre presque toujours favorables les fonctionnaires du roi et ainsi
le roi lui-même. Elle n’en fut ni moins vigilante, ni moins dévouée
aux intérêts de la cité et c’est ainsi que peu à
peu son rôle grandit. Elle ne réussit pas, cependant, à
faire d’Etampes une ville heureuse, comme le montre trop bien le triste
ensemble des plaintes, des suppliques, des requêtes, des procès.
Mais cela tenait à deux causes indépendantes de sa volonté,
qui réagirent constamment l’une sur l’autre, et non pas seulement
dans la période que nous venons de considérer: d’abord la fréquence
des guerres, civiles ou étrangères, puis, le déplorable
état des finances, entretenu précisément par les frais
de guerre. Les institutions financières présentaient à
Etampes la même complexité que dans les autres villes du royaume
et nous n’entreprendrons pas de les exposer ici. On sait que les impôts,
qu’ils fussent le cens, les aides, la taille ou la gabelle accablaient
tous les non-privilégiés d’un véritable fardeau, encore
aggravé par le détestable système de l’affermage des
taxes à percevoir et par les malversations des receveurs. Notre
région constituait «l’élection d’Etampes», en
tant que circonscription financière, vieille dénomination
conservée du temps où le peuple choisissait les hommes, dits
«élus», qui levaient ensuite les impôts sur un
ordre du roi. Elle fut spécialement atteinte par ces abus et ces
charges, pour diverses raisons sa réputation de contrée riche,
en dépit de sa faible étendue, l’impôt étant
arbitrairement réparti, le grand nombre de ses habitants exemptés
de taxes et enfin, les ruines qu’y avaient accumulées tantôt
les guerres, dont elle fut si longtemps le théâtre même,
tantôt le passage dévastateur des troupes et des pillards.
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Édition de 1938, pp. 23-37.
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Édition de 1964, pp. 27-30.
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