CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
 
René de Saint-Périer
Étampes: le XVIIIe siècle
[La grande histoire d’une petite ville, chapitre V] 
1938-1969

Jules Lepoint-Duclos: Place Saint-Gilles (gravure sur bois, 1938)    

     La personnalité et l’œuvre du Comte de Saint-Périer ont dominé l’historiographie étampoise pendant la première moitié du 20e siècle. Sa Grande histoire d’une petite ville, Étampes, parue en 1938, reste à ce jour la seule synthèse complète publiée sur l’histoire de cette ville.
B.G.

Avertissement
Chapitre I.
Chapitre II. Chapitre III. Chapitre IV. Chapitre V. Chapitre VI. Chapitre VII. Chapitre VIII. Index. Table.
 
COMTE DE POILLOÜE DE SAINT-PÉRIER
LA GRANDE HISTOIRE D’UNE PETITE VILLE, ÉTAMPES

V. Le XVIIIe siècle


 
CHAPITRE PRÉCÉDENT
TABLE DES MATIÈRES
CHAPITRE SUIVANT
V. Le XVIIIe siècle

     Réceptions des princes et du roi Louis XV.Fête originale en 1’honneur du duc de Bourgogne.Les imprimeurs d’Étampes.La vie intellectuelle et l’Académie d’Étampes.Le naturaliste Guettard.Le Bourgneuf et la vie mondaine.Mesures d’hygiène. La variole.Le dernier bourreau.Étampes, berceau de l’aviation.


Jules Lepoint-Duclos: Place Saint-Gilles (gravure sur bois, 1938)      Les dernières années du XVIIe siècle et tout le XVIIIe siècle, jusqu’à la Révolution, s’écouleront dans le calme pour notre ville. Elle ne traversera plus d’épreuves tragiques, elle ne sera plus mêlée aux grands événements du royaume. Elle ne retrouvera pas non plus la prospérité et l’animation qu’elle a connues durant des siècles: le siège de 1652, s’ajoutant avec toutes ses conséquences à tant de ravages passés, fut pour elle une atteinte dont elle ne se relèvera pas. Sa grande histoire est terminée. Elle se débattra, avec tous ses habitants, au milieu de difficultés financières grandissantes. Cependant, elle vivra, dans son obscurité; elle consolidera au moins quelques-unes de ses acquisitions et s’efforcera de réaliser quelques nouveaux progrès, dans la mesure où le lui permettront ses faibles ressources. Malgré les abus dont elle souffre, elle conserve un profond attache ment pour le roi, n’attendant que de lui les réformes nécessaires. Elle saisira toutes les occasions, petites ou grandes, de le lui marquer et s’associera à tous les événements qui intéressent le royaume et la couronne.

     Au nombre de ces occasions, il faut compter les réceptions des membres de la famille royale. En 1700, passe à Étampes le petit- fils de Louis XIV, second fils du Grand Dauphin, ancien duc d’Anjour, [p.72] roi d’Espagne depuis trois semaines sous le nom de Philippe V, par suite du testament du précédent roi, Charles II, et de l’imprudente acceptation de Louis XIV. Le nouveau roi, qui n’a que dix sept ans, va prendre possession de son royaume, accompagné de son frère, le duc de Bourgogne, père de Louis XV, et d’une escorte innombrable. Il y a quatre carrosses pour le roi et sa suite immédiate, quatre pour le duc de Beauvilliers, son gouverneur, quatre encore pour le maréchal de Noailles, plusieurs autres pour diverses gens de qualité qui les avaient à eux ou les avaient loués et de nombreuses chaises de poste. Ils arrivent à Étampes le 5 décembre vers midi, par un beau temps très froid; le maire et les échevins accueillent le roi à la porte de la ville, le lieutenant du bailliage Liénart prononce une harangue flatteuse à l’excès et trois compagnies de milice sous les armes l’accompagnent jusqu’à l’hôtel des Trois Rois. Les officiers de ville y apportent leurs présents, qui sont, pour une part, symboliques, mais savoureux, pour une autre: du pain, du vin et des écrevisses, que l’on jugea «les meilleures du monde», et les pauvres finances de la ville n’en furent pas plus obérées. Dans la soirée, le roi et sa suite s’amusèrent à tirer toutes sortes d’oiseaux et à mettre au net des dessins de maisons et de châteaux qu’ils avaient ébauchés sur la route, comme la tour de Montlhéry tandis qu’ils étaient arrêtés par un embarras de voitures à la porte de Linas. Les suisses de la garde, se référant à un vieil usage, prétendirent qu’il leur était dû un minot de sel, comme dans toute ville en possession d’un grenier à sel qui recevait le roi. Le receveur d’Étampes ne voulut point se laisser faire et porta la contestation devant Philippe V, qui lui donna raison, du fait qu’il était un roi étranger et non le roi: cette décision fort juste fut très bien accueillie par ceux de notre ville. Le lendemain matin, après la messe, le nombreux cortège reprit sa route vers l’Espagne.

     En 1705, une fête fut organisée par les chevaliers de l’arquebuse d’Étampes pour célébrer la conquête du Piémont et les victoires que Louis-Joseph de Vendôme, duc d’Étampes, venait de remporter sur le prince Eugène. Ils tirèrent le canon, puis, un feu d’artifice, rue des Cordeliers, devant l’hôtel de Vendôme, où l’on avait préparé un «souper magnifique», qui fut suivi d’un grand bal. Ce duc d’Etampes était connu pour sa bonté et sa familiarité avec ses soldats, dont il était fort aimé. Le chevalier de Quincy, qui servait sous lui dans sa campagne du Piémont précisément, cite dans ses Mémoires cette jolie anecdote: «Un jour que j’étais avec lui (pour visiter les tranchées), un grenadier lui dit: “Monseigneur, donnez-moi une prise de votre tabac, on dit que vous en avez toujours d’excellent”. — “Tiens, prends, mon camarade, lui répondit le prince. — “Non, mon général, lui répliqua le grenadier, j’aime mieux que vous m’en donniez vous-même; la raison en est simple: vous m’en donnerez [p.73] davantage”. Alors, M. de Vendôme lui versa toute sa tabatière». Il mourut en 1712, en Catalogne, «d’une indigestion de poisson», bien qu’il y fût pour combattre les ennemis de Philippe V, qui lui dut entièrement le maintien de sa couronne. Un service funèbre fut alors célébré solennellement à Étampes, en son honneur, à Notre-Dame.

     En 1721, la misère s’est encore étendue. Le système de Law a ruiné d’innombrables gens, s’il en a enrichi d’autres. Le Régent sou lève l’indignation. Au milieu de ces troubles et de ces inquiétudes, toutes les espérances se portent vers le jeune roi, Louis XV. Or. à la fin de juillet, il tombe gravement malade, d’un mal qui reste indéterminé. En quelques jours, il est hors de danger et c’est alors dans tout Paris et dans tout le royaume une explosion de joie, qui donne la me sure des sentiments qu’il inspirait à son peuple. Pendant des semaines, se poursuivent des actions de grâce et des Te Deum, des feux d’artifice, des illuminations, des chants, des cavalcades, des fêtes bourgeoises et populaires. A Étampes, c’est le 24 et 25 août qu’ont lieu ces réjouissances, à Notre-Dame, à Saint-Basile et dans la rue de la Juiverie. Si nous n’en avons pas le détail, nous avons du moins ce lui de la réception qui fut faite, l’année suivante, à la petite infante Marie-Anne-Victoire, que doit épouser Louis XV. Elle n’a que cinq ans et elle vient de traverser toute la France en carrosse, quand elle arrive à Étampes, le 27 février. Le maire et les échevins se sont multipliés. Depuis huit jours, ils ont arrêté un programme minutieux. Le matin du 27, dès sept heures, les officiers de la bourgeoisie et les habitants «des mieux faits, habillés et équipés le plus uniformément possible, au nombre de 600, se rassemblent devant l’Hôtel de ville, puis, se rendent au son des fifres, tambours et trompettes à l’hôtel des Trois Rois, où l’intendant de Paris, arrivé la veille, les passe en revue et leur assigne leurs postes. Vers midi, ils se rangent sur deux rangs depuis l’hôtel jusqu’à l’Ecce homo, tandis que le maire et les échevins, avec tous les anciens échevins et officiers, en robe, manteau et rabat, vont attendre à la première porte de la ville du côté de Saint Martin. Les rues sont sablées et la porte décorée de lierre et de couronnes. L’infante arrive à trois heures. Le maire, Gabriel Pichonnat, fait une petite harangue à «l’infante-reine pour ainsi dire encore au berceau». Puis, le corps de ville suit le carrosse jusqu’aux Trois Rois, où, présenté à l’infante, dans son appartement, par le maître des cérémonies, il lui offre le présent de la ville: contenue dans une manne (l’osier, portée par quatre gardes, c’est toute une pâtisserie en pyramide, surmontée d’une couronne aux armes de France et d’Espagne en peinture dorée, autour de laquelle on a réuni des gâteaux, des confitures sèches et liquides, du cotignac, des massepains, des dragées, des oranges, des citrons, des fruits de toute espèce et des liqueurs de toutes façons, «le tout bien arrangé et venant de Paris», et séparément, des truites, des brochets et des écrevisses. La petite infante [p.74] parut satisfaite, mais elle voulut passer à son bras la couronne et la laissa tomber, si bien qu’elle se brisa en plusieurs morceaux. Fâcheux présage La petite Marie-Anne-Victoire, après cinq années mélancoliques passées au Louvre dans le pavillon du jardin de l’Infante, retourna en Espagne et ne fut, en effet, jamais reine de France.

     La municipalité revint alors à l’Hôtel de ville «où elle fit une collation médiocre». Elle eût mérité mieux, en vérité, mais il fallait tout prévoir, afin que l’ordre ne cessât pas de régner pendant toute la nuit, où de grandes réjouissances devaient avoir lieu. Le lendemain matin, la petite infante partait pour Paris, saluée à la porte Saint-Jacques par tout le corps de ville.

     En 1745, c’est le roi lui-même qui vient à Étampes, avec le dauphin, âgé de seize ans, pour y recevoir une autre infante, Marie Thérèse-Antoinette, la fille de Philippe V, qui sera dauphine pendant un an seulement, emportée dès ses première couches. Cette réception fut pour notre ville une lourde tâche, dont elle s’acquitta digne ment et avec une ardeur émouvante. On disposa pour le roi la maison de M. Rousse de Saint-André, rue Saint-Antoine, en face du collège des Barnabites, pour le dauphin, celle de M. Lepetit, près du Moulin Sablon, et pour l’infante, la maison Hémard de Danjouan, rue de la Juiverie. Louis XV avait été précédé de nombreux gardes de la maré chaussée, de 400 gardes françaises et de 400 suisses et il amenait avec lui, outre les princes du sang, une partie de la cour, tous ses ministres, les grands officiers de la couronne et un gros détachement militaire de sa maison. Malgré cette extraordinaire affluence de personnes, non seulement aucun accident, ni aucun désordre ne se produisit, mais encore rien ne manqua, ni en provisions de bouche, ni en logement, ni en moyens de transport; tout avait été prévu, même au delà du nécessaire «Étampes pendant ces beaux jours-là était devenue Paris».

     Louis XV arriva le 20 février. La milice bourgeoise, toujours composée de 600 hommes, était venue au-devant de lui jusqu’aux Capucins et formait la haie sur la route. Il entra par la porte Évezard, qui était décorée d’un arc de triomphe, et fut conduit par un immense cortège jusqu’à son logis; il y dîna, avec quelques privilégiés seulement, puisque la table n’était que de dix-huit couverts. Après le dîner, le roi joua au passe-dix, jeu de dés avec une banque, et gros jeu, puisque le duc de Richelieu y aurait gagné 1.800 louis, ce qui représente plusieurs centaines de mille francs de notre monnaie. Les principaux habitants d’Étampes avaient été admis au jeu du roi, c’est-à-dire à le voir, et non à y participer, ce dont ils purent se divertir sans péril pour leur bourse. Pendant ce temps, la ville s’illuminait. On avait installé, entre le logis du roi et celui du dauphin, trente caisses, ornées de girandoles et des chiffres royaux, qui portaient chacune 250 lampions. Le lendemain soir, la dauphine étant arrivée, les illuminations furent encore plus nombreuses: soixante-dix caisses semblables [p.75] étaient disposées rue Saint-Antoine et rue de la Juiverie, jus qu’à la maison Hémard de Danjouan. L’Hôtel de ville et les jardins des trois logis royaux étaient aussi brillamment éclairés. Il y eut ainsi 22.000 lampions allumés pendant toute la nuit. Le lendemain 21février, Louis XV et le dauphin allèrent jusqu’à Mondésir, qui était la première poste au delà d’Étampes, pour recevoir l’infante. A son arrivée, elle descendit de carrosse et vint s’agenouiller devant le roi, sur le tapis qui couvrait la route. Louis XV la releva, l’embrassa et lui présenta le dauphin, qui l’embrassa à son tour. Un mémorialiste de la cour nous apprend qu’elle n’était ni grande, ni petite, mais bien faite et d’allure noble, pâle et extrêmement blonde, jusqu’aux sourcils mêmes; ses yeux étaient vifs, mais ce qui la déparait «le plus», c’était son nez, grand, peu agréable, et paraissant «tenir à son front sans qu’il ait ce qui s’appelle la racine du nez». Cependant, le dauphin parut content, en dépit du nez de sa fiancée, qui était d’ailleurs un héritage des Bourbon. Revenus à Étampes par le faubourg Saint-Martin, au milieu des soldats et de tout un peuple enthousiaste, les princes restèrent jusqu’au lendemain. Le roi joua tout l’après-midi au lansquenet, jeu de cartes avec banque, qui avait été interdit par Louis XIV, mais qui, par réaction, était fort en faveur à la cour de Louis XV. L’infante n’y prit point de plaisir, elle n’aimait pas le lansquenet et pas davantage le cavagnole, sorte de loto, qu’on lui avait fait jouer auparavant, pour lequel les vers de Voltaire lui donnent raison:
On croirait que le jeu console,
Mais l’ennui vient à pas comptés
A la table d’un cavagnole
S’asseoir entre deux majestés.


     Ainsi la dauphine commençait à connaître l’ennui, dès son passage dans notre ville, alors que tant de choses y eussent été susceptibles de la divertir si elle n’avait été une pauvre petite princesse, prisonnière de l’étiquette et des préjugés.

     Le lendemain, les princes entendirent la messe à Saint-Basile, pour laquelle le curé reçut un demi-écu d’or, et quittèrent Étampes par la porte Saint-Jacques.

     Les frais de cette luxueuse réception furent évidemment considérables pour les ressources toujours précaires de notre ville. Les illuminations coûtèrent à elles seules 4. 500 livres. Mais la municipalité, se montrant digne et soucieuse de marquer son attachement au roi, estima «qu’on ne pouvait moins faire en cette occasion».

     Quelques années plus tard, elle manifesta ces mêmes sentiments sous une forme nouvelle qui révèle beaucoup de sagesse et de discernement. Ce fut pour fêter la naissance du duc de Bourgogne, le premier fils du dauphin qui avait été reçu à Étampes avec Louis XV en 1745 et qui, devenu veuf, s’était remarié avec Marie-Josèphe de [p.76] Saxe. Au lieu d’organiser à cette occasion des réjouissances d’un jour, coûteuses et dont il ne reste rien, le corps de ville eut l’idée de témoigner sa joie de l’événement en consacrant une somme de 1.550 livres, sur les deniers d’octrois, à doter et à marier une fille de chacune des cinq paroisses. Les cinq mariages eurent lieu le 8 février 1752 à l’église Saint-Basile, «parée et lavée», en présence du maire, des échevins et des officiers de ville. Chacun des mariés reçut un cierge, une pièce de douze sols pour l’offrande, une paire de gants et un anneau d’argent. Après le mariage, ils furent conduits à l’Hôtel de ville, précédés des violons et des tambours, où la dot de 250 livres fut remise à chaque ménage. En outre, un festin y fut offert à tous les mariés et à leurs parents, au nombre de trente personnes, et servi par les deux bedeaux de ville et les quatre hallebardiers, «revêtus de leurs robes et habits». On voit que la municipalité avait fait largement les choses.

     A côté de ces fêtes pittoresques, le XVIIIe siècle apporte à notre ville des formes d’activité nouvelles. L’une des plus intéressantes concerne l’imprimerie. Malgré son importance réduite et sa proximité de Paris, Étampes vit s’établir un imprimeur dans ses murs, non pas seulement à la Révolution, comme il a été dit et répété à tort, mais dès 1709. C’était un nommé Jean Borde, issu d’une famille d’imprimeurs d’Orléans, né dans cette ville en 1682, qui avait appris son art, d’abord, dans l’atelier de son père, puis, à Paris dans d’excellentes maisons, entre autres chez le célèbre Coignard, où il avait gagné l’estime de ses maîtres et «avait acquis les connaissances nécessaires pour s’acquitter de sa profession avec honneur». Depuis le milieu du XVIIe siècle, l’exercice de cette profession était réglementé en 1704, un arrêt avait fixé le nombre d’imprimeurs dans chaque ville et l’on ne pouvait installer d’imprimeries nouvelles sans une décision du Conseil d’État; en outre, le candidat devait passer un examen qui exigeait une culture approfondie. Jean Borde avait satisfait à ces épreuves, «expliqué des vers latins et lu des vers grecs». 11 ouvrit donc en 1709 une imprimerie à Étampes, où il réédita (la première édition est jusqu’ici inconnue, mais peut-être fut-elle faite déjà à Étampes la même année) un petit ouvrage connu aujourd’hui par un seul exemplaire, qui n’existe même pas à la Bibliothèque nationale. Il contient l’Office du Saint Sacrement comme il se dit dans les paroisses et environs d’Étampes et la Vie et les miracles des saints Can, Cancien et Cancienne, les patrons d’Étampes. On ne connaît pas d’autres publications de l’imprimerie étampoise, mais il y en eut certainement, malgré son existence éphémère, puisque dès 1712, Jean Borde quittait notre ville pour s’installer à Orléans, où il mourut presque aussitôt. En 1719, le maire, les échevins et les officiers de ville adressent une requête au Conseil d’État afin d’obtenir le rétablissement de l’imprimerie locale, «pour le bien et l’utilité de [p.77] la ville, attendu qu’il s’y présente journellement assez d’ouvrages utiles au public pour qu’un imprimeur puisse s’y établir et y exercer avec succès». Il y avait deux candidats Michel Carlu, compagnon imprimeur à Paris, qui avait fourni les preuves de sa capacité, fut agréé et demeura sans doute l’imprimeur d’Étampes de 1720 à 1734, puisqu’on sait que la seconde imprimerie subsista pendant ces quatorze années. Mais on ne connaît pas de pièce éditée qui porte son nom. Peut-être est-ce lui qui publia, vers 1722, le poème bien connu des Étampois, Le chien pêcheur, en vers latins et français, de Claude Charles Hémard de Danjouan, petit-fils du maire René Hémard, dont on ignore l’éditeur original. Le chien des Cordeliers d’Étampes, qui en est le héros, a-t-il vraiment existé et recueilli des écrevisses parce qu’elles s’attachaient à ses longs poils? C’est peu probable, d’autant moins qu’un auteur normand du XVIe siècle, Philippe Le Picard, a conté une histoire tout à fait analogue. Mais la légende était sans doute répandue dans Étampes. Si elle a inspiré à Charles Hémard d’assez bons vers latins, ses vers français sont malheureusement bien dénués de poésie et tantôt plats, tantôt d’une pesante emphase, qui répond mal au pittoresque du sujet. Charles Hémard n’était pas cependant un esprit ordinaire. Il faisait partie du petit groupe de lettrés et de savants étampois dont nous parlerons plus loin.

      Depuis 1734, il n’y avait plus d’imprimeurs à Étampes, à cause du décès ou du départ de Michel Carlu à cette date, et parce qu’ensuite, il ne s’était présenté personne pour lui succéder. Mais en 1757, François Izenard, originaire de Poitiers, qui avait fait son apprentissage d’imprimeur chez son oncle dans cette ville, ouvre une librairie à Étampes et bientôt se rend compte «que non seulement il y pourrait subsister avec une imprimerie, mais encore qu’elle y était nécessaire». Il sollicite donc et obtient le 8 février 1759 de Louis-Philippe, duc d’Orléans et d’Étampes, l’autorisation d’établir une imprimerie et de s’intituler «son imprimeur en la ville d’Étampes». Mais à peine né, son atelier était interdit par un arrêt du Conseil, qui supprimait les imprimeries dans un certain nombre d’autres petites villes où l’autorité n’admettait pas leur utilité. Cependant, Izenard demeura libraire à Étampes, en exerçant aussi l’art du relieur: l’église de Congervil le possédait encore, il y a quelques années, un missel et un graduel reliés par lui, comme en faisait foi la signature. Il fit deux tentatives, en 1765 et en 1778, pour obtenir du Conseil le rétablissement de son atelier typographique, mais elles restèrent inutiles. En 1780, le maire et les échevins adressèrent la même requête en sa faveur à l’intendant, toujours en vain. C’est seulement en 1790 que s’ouvrira, sous la direction de Claude Dupré, une nouvelle imprimerie, à laquelle les événements révolutionnaires donnèrent beaucoup d’activité et dont nous parlerons en son temps. [p.78]

     L’existence d’une imprimerie à Étampes dès 1709 et les raisons qui furent invoquées avec insistance pour son rétablissement chaque fois qu’elle fut supprimée montrent déjà que notre ville était alors animée d’un certain mouvement intellectuel. On sait par ailleurs qu’elle comptait, en effet, tout un groupe de gens fort instruits dans les matières les plus diverses, qui se réunissaient chez M. Geoffroy (peut-être le grand’père de Geoffroy-Saint-Hilaire): Pichonnat, médecin, dissertait sur l’anatomie, Claude-Charles Hémard, l’abbé Lemaître, curé de Notre-Dame, Michel Godeau, recteur de l’université de Paris, né à Étampes et toujours en relations avec ses compatriotes, représentaient les belles-lettres et Descurain, maître apothicaire et botaniste, s’intéressait à toute l’histoire naturelle. Il y eut là, pendant de nombreuses années, une manière de petite Académie, dont tous les membres étaient entourés de respect et d’admiration et ce n’est pas à cette époque qu’un Labiche eût pu ridiculiser l’Académie d’Étampes. Le grand naturaliste Guettard, petit-fils de Descurain, qui fut élevé dans ce milieu et nous l’a fait connaître, atteste que les travaux de ces excellents observateurs « les avaient rendus dignes de la plus célèbre Académie». Descurain était l’âme de ce petit groupe.

     La botanique surtout le passionnait. Il avait constitué un jardin d’expériences, où il réunissait les plantes singulières de la région et des plantes étrangères que lui procuraient ses correspondants, en particulier les Jussieu, professeurs au Jardin du roi, devenu aujourd’hui le Muséum d’histoire naturelle. En outre, il avait rédigé un ensemble d’obersations sur les plantes locales, que publia, en 1747, son petit-fils Guettard, en y ajoutant un travail personnel, sous le titre Observations sur les plantes. Nous voyons ainsi que la répartition des cultures a peu varié depuis cette époque, sauf en ce qui concerne la vigne, très abondante alors, et que la flore indigène ne s’est guère modifiée non plus. Nous avons eu la bonne fortune de retrouver deux plantes rares dans les stations mêmes signalées par Descurain, l’Aristoloche «dans le cimetière Saint-Germain», aujourd’hui le cimetière de Morigny, et l’Asarum europaeum, plante extrêmement rare aux environs de Paris, qui continuait de fleurir depuis le début du XVIIIe siècle dans le bois du Chesnay, au-dessus de Brières, tandis que tant de choses ont disparu à jamais. L’autorité de Descurain auprès de ses compatriotes était grande. Il avait fait des études de médecine à Paris, sans avoir eu le temps de les achever, ce qui lui permit, cependant, de soigner beaucoup de malades à Étampes et même aux environs c’est ainsi qu’il herborisait dans toute la campagne. Et lorsque survint une aurore boréale, le 19 octobre 1726, l’effroi fut si vif qu’on fit aussitôt demander à Descurain ce qu’il pensait de cette troublante apparition. II assura qu’il n’y avait rien à craindre et «l’on se crut en sûreté, puisque Monsieur Descurain pensait y être».

     Le plus grand mérite de Descurain fut peut-être de déterminer [p.79] l’orientation de son petit-fils vers les sciences naturelles. En effet, si Guettard est assez peu connu du grand public, il est pourtant une des gloires de notre ville. Dirigé d’abord vers la médecine par Bernard de Jussieu, l’ami de son grand’père, il étendit ses travaux à toutes les branches de l’histoire naturelle, botanique, zoologie, minéralogie, paléontologie et dès l’âge de vingt-huit ans, il entrait à l’Académie des Sciences. On lui doit de nombreuses découvertes; la plus importante est celle des volcans éteints d’Auvergne, dont il reconnut le premier la nature. Mais nous ne saurions omettre qu’il fut aussi le premier à signaler la présence d’ossements fossiles d’une faune froide (Renne et Mammouth) aux portes mêmes d’Étampes, au-dessus de la maladrerie Saint-Lazare.

Fig.5 - Château du Bourgneuf (d'après un dessin de 1752, du Marquis d'Argenson)
 
     Pendant une partie du XVIIIe siècle, un faubourg de notre ville connut une animation d’un autre ordre. C’est Saint-Pierre, qui depuis longtemps déjà constituait une sorte de petite ville un peu à l’écart de l’autre, avec son église, son prieuré, sa chapelle Saint-Symphorien, son hôpital de Buval, ses écoles et enfin, son château du Bourgneuf. Le fief du Bourgneuf et son château existaient dès le XVIe siècle et ils avaient appartenu par acquisitions successives à Claude de l’Isle, seigneur du Grand-Boinville, à François Roiger, seigneur de Mauchesne, à Bénigne Le Ragois, seigneur de Guignonville, à Nicolas de Cœurs, et enfin à Alphonse-Germain de Guérin, seigneur de Moulineuf, qui l’acheta en 1710. Ce dernier eût été, contrairement à ses prédécesseurs, en état de conserver ce lourd domaine par le riche mariage qu’il avait fait en épousant Henriette-Françoise Le Camus, fille du trésorier général des états de Courtrai, mais il fut tué dès 1713 au siège de Fribourg-en-Brisgau. Sa veuve épousa en 1721 Louis-Guy-Henri de Valori, qui devint ainsi seigneur du Bourgneuf et le resta jusqu’à sa mort, en 1774, après avoir apporté dans sa de meure et le petit bourg environnant une vie toute nouvelle. En effet, le marquis de Valori, allié aux plus vieilles maisons de France, possesseur d’une immense fortune, qui avait fait la guerre avec Villars et rempli des missions auprès de Frédéric II, avait des relations innombrables. Aussi, quand il venait au Bourgneuf, il y recevait tant de monde que la cour devenait déserte, disait-on. On y jouait la comédie et les réceptions étaient fastueuses. Voltaire y séjourna souvent et il y subit une mésaventure dont on fit grand bruit, non seulement à Paris, mais jusqu’à Berlin: poursuivant de ses assiduités une servante farouche du marquis de Valori, il reçut d’elle un bon soufflet. Le château avait été agrandi et aménagé par Valori. Il s’étendait, avec ses dépendances et son parc, entre la rue Sadi-Carnot actuelle et la rue de l’Alun. Il comprenait aussi «l’auditoire» du bailli, avant même que le marquis de Valori fût nommé gouverneur et bailli d’Étampes, en 1767. 11 mourut en 1774, à quatre-vingt-deux ans, et fut inhumé dans l’église Saint-Pierre. Un fragment de sa pierre tombale [p.80] a été retrouvé en 1927 lors de la démolition d’une maison de la rue Évezard, où elle constituait une partie de cheminée: image des bouleversements aveugles qu’accomplissent les hommes. Le petit-fils du vieux marquis de Valori, Charles-Jean-Marie de Valori, lui succéda dans sa propriété et dans sa charge de gouverneur et grand bailli d’Étampes, qu’il exerça jusqu’à la Révolution. Il émigra en 1791 avec sa femme, qui était la fille de Dupleix. Ses biens furent vendus au profit du domaine et sa belle demeure (fig. 5) fut entièrement démolie. Quelques dépendances, comme le colombier, en subsistèrent longtemps et c’est à notre époque même qu’on en acheva sans scrupules la destruction. La bibliothèque, qui était considérable, fut cependant sauvée à la Révolution et fait partie maintenant de la bibliothèque de l’Arsenal.

     Au temps où nous parvenons, notre ville commence à perdre sa physionomie ancienne. Les portes de son enceinte menaçaient ruine on décida la démolition de plusieurs d’entre elles en 1771. La porte Saint-Jacques fut abattue la première et remplacée par deux piliers à chapiteaux. Le fossé de la fortification, en avant des murs, qui mesurait près de vingt mètres de largeur, fut comblé sur la moitié de sa longueur dans la direction de la rue Évezard, avec des déblais qu’on enleva de la rue du Rempart, pour niveler son sol, auparavant très inégal. Deux allées de tilleuls furent plantées sur la partie du fossé comblée, tandis que le reste fut conservé pour abriter le jeu de paume, qui était très en faveur et se jouait jusque-là dans tout le fossé. La porte Saint-Martin ou de la Barre, qui évoquait tant de souvenirs, fut entièrement démolie, «jusqu’à un pied au-dessous du sol», la même année 1772, et l’on mit à sa place une simple barrière pour les droits d’entrée. Déjà quelques années avant, le fossé avait été comblé et la muraille rasée sur une douzaine de mètres en descendant vers les Portereaux. La porte du Château ou des Lions fut remplacée par des piliers surmontés de deux lions. Enfin, la porte Évezard fut abattue vers 1775 et des piliers, qui furent d’abord élevés à sa place, s’écroulèrent presque aussitôt.

     C’est aussi à cette époque, en 1774, que la foire Saint-Michel, qui se tenait depuis le XIIe siècle près de la maladrerie de Saint-Lazare, au lieu dit Saint-Michel, fut transférée sur les promenades du Port, agrandies par le comblement du fossé. On sait que le port ne fonctionnait plus depuis un siècle; les bassins avaient été comblés et l’on y avait planté des ormes et des tilleuls. La foire était alors très brillante, parce que le haut commerce de la ville et des alentours y participait en même temps que les bateleurs et les fripiers.

     Des mesures d’un autre ordre, prises soit par le lieutenant de police, soit par le corps de ville, montrent que des conceptions nouvelles commencent à s’imposer. Ainsi, les règlements relatifs à la propreté des rues et même à l’hygiène sont renouvelés en 1779. Les habitants [p.81] sont tenus de balayer deux fois par semaine devant leurs portes «même jusqu’à la moitié de la chaussée», d’arroser avant, en temps de sécheresse, et de ne faire aucun amas de paille, fumier, pierres, tuileaux ou débris de légumes dans les rues; un entrepreneur est chargé d’enlever les tas de boue après le balayage des habitants et de nettoyer les places publiques. Les bêtes mortes doivent être «traînées dans les terres hors la ville et les faubourgs, à un quart de lieue des maisons, routes et chemins et enterrées dans des fosses profondes au moins de sept pieds». Ces ordonnances étaient d’autant plus justifiées que des épidémies fréquentes désolaient la ville. En 1754, ce sont des «fièvres putrides» difficiles à déterminer, mais en 1781, c’est la variole, qui fauche près de deux cents enfants en trois mois. La population, très diminuée par les suites du siège de 1652, durant près d’un siècle, était remontée en 1740 à 1628 feux; elle retombe, après les épidémies de 1754, à 982 feux, mais à l’aube de la Révolution, elle dépasse 2.000 feux, à peu près comme au milieu du XVIIe siècle.

     La sécurité et la paix des habitants font également l’objet des soins de la police urbaine. On interdit dans les rues les jeux dangereux, le jet des boules de neige, les pétards et fusées, le tir de toutes armes à feu, les charivaris, les essais de chevaux, les chiens errants. Mais l’éclairage des rues fait totalement défaut en 1788, M. de Poilloüe de Bierville réclame en vain l’installation de réverbères.

     Cependant, la municipalité marque son zèle à défendre les droits de ses administrés, en particulier par un long et dispendieux procès qu’elle entame, en 1764, contre le dernier exécuteur des sentences criminelles du bailliage. On sait que ce titre pompeux s’appliquait tout simplement au bourreau, mais cette dernière appellation était considérée comme si infâmante que plusieurs arrêts de Parlements l’avaient interdite et punissaient d’amendes ceux qui l’employaient. Dès une haute époque et partout, des conflits s’étaient élevés entre les habitants des villes et le bourreau, en raison de la singulière manière dont étaient réglés ses émoluments. En effet, d’une part, il était payé, à des tarifs divers, pour chacune de ses interventions, qui étaient nombreuses et variées: attacher au carcan, marquer et flétrir, fouetter aux carrefours, percer ou couper la langue, appliquer la question, pendre, rouer, décapiter, brûler, rompre vif et ensuite jeter au feu, ce qui était le plus chèrement indemnisé: 50 livres au présidial de Bourges, en 1666. D’autre part, il touchait une redevance en nature, appelée le droit de havage, qui consistait à prendre lui-même autant que sa main pouvait contenir de céréales, de légumes, de fruits, d’œufs, etc., mis en vente dans les marchés. Il était accompagné d’un valet, qui marquait à la craie le dos des marchands qui s’étaient acquittés. Cette curieuse rétribution fut abolie à Paris en 1721; mais [p.82] elle subsistait à Étampes, en dépit des nombreuses contestations auxquelles elle avait déjà donné lieu au XVIe et au XVIIe siècles. Le droit pour le bourreau de prendre à la main les denrées du marché avait été remplacé par celui de les mesurer au moyen d’une cuiller en fer, mais la dimension de la cuiller, d’abord fixée, avait constamment grandi et le bourreau ainsi que «les gens de la lie du peuple qu’il employait» ne manquaient pas de la prendre comble, au lieu de la prendre rase, et de lui donner des secousses pour y faire tenir plus de choses. En 1760, les abus commis par le bourreau Desmorets causaient un si grand tort aux marchands qu’ils commençaient à déserter le marché d’Étampes. C’est ainsi que le maire et les échevins, s’appuyant sur le précieux mémoire rédigé par Plisson au XVIIe siècle au sujet précisément des droits du bourreau, portèrent l’affaire devant le Parlement, qui donna raison à la ville, par un arrêt de 1767. Le droit de havage était réduit à une perception fixe, en argent, qui devait être levée aux barrières de la ville, sur les grains et les légumes secs exclusivement. Ainsi ce vieil usage perdait enfin, à la grande satisfaction des habitants, son caractère abusif et si curieusement moyenâgeux. Desmorets fut le dernier bourreau d’Étampes. Il ne devait plus d’ailleurs exercer souvent son office, puisqu’au cours du procès, la suppression en est envisagée. Les exécutions avaient lieu place Saint-Gilles, à l’angle de la rue Traversière, que l’on surnommait, à cause de cela, la rue de la Femme-sans-Tête ou Monte-à-Regret. C’est là qu’étaient placés une potence pour les con damnations capitales et un pilori qui servait, avec le carcan, à infliger la peine du fouet ou de l’exposition, aggravée par l’écriteau infâmant. Ces divers supplices reprirent activement à Étampes pendant la seconde partie de la Révolution et dans les années suivantes, durant lesquelles les vols et les brigandages se multiplièrent.

     Notre ville nous offre à cette époque un exemple des idées nouvelles et originales, qui surgissaient alors dans les esprits de toutes les classes sociales, et de la hardiesse des conceptions et des tentatives. Un chanoine de l’église Sainte-Croix, l’abbé Desforges, annonça dans le Mercure de France, en juillet 1772, qu’il avait trouvé le moyen de faire voler les hommes en l’air dans un cabriolet. Il demandait à ceux que cette invention, évidemment merveilleuse, pouvait intéresser une somme de 100.000 livres, si son expérience réussissait, mais qui devait être préalablement déposée chez un notaire. La curiosité de ces choses était telle qu’il trouva la somme auprès de plusieurs habitants de Lyon, qui la remirent effectivement à un notaire. L’abbé Desforges avait déjà construit sa machine: elle avait la forme d’une gondole, couverte pour mettre à l’abri de la pluie, mesurait environ 2m. 25 sur 1m. 15, et ne pesait que quarante-huit livres. Mais le pilote pouvait emporter, en sus de son propre poids, une valise de quinze livres. Toute la gondole était enduite de plumes [p.83] et surmontée, en outre, d’un parasol de plumes. Deux rames, également à longues plumes, maniées par le pilote, devaient assurer le maintien et la progression dans les airs. Il paraît que la machine était, en principe, à l’épreuve des grands vents, de la pluie, des orages et pouvait même servir de bateau, en cas de besoin. Elle devait voler à la vitesse de trente lieues à l’heure et pouvait faire trois cents lieues par jour pendant quatre mois. L’abbé Desforges avait bien prévu qu’il faudrait protéger l’homme contre la violence de l’air et pour cela, il devait porter une grande feuille de carton sur sa poitrine et un bonnet sur sa tête, avec des verres pour les yeux. On ne peut nier que cette invention reposait sur une vue prophétique de ce qui devait être réalisé dans l’avenir, mais là se borna le mérite du pauvre chanoine puisqu’en dépit de tous ses efforts, il ne réussit pas à s’en voler. Il avait hissé sa machine au sommet de la tour de Guinette, au milieu d’un grand nombre de curieux. Installé dans son cabriolet, il donna le signal du départ, «les ailes se déployèrent et se mirent en mouvement avec une grande vitesse», mais dès qu’on le lâcha, il retomba à terre. Il en fut quitte pour une contusion au coude. Il paraît que sa foi dans son invention n’en fut pas ébranlée, mais on ne connaît pas de lui d’autres tentatives. S’il avait rencontré en France beaucoup de railleurs ou d’indifférents, il n’en fut pas de même à l’étranger, «où l’on s’attendait, en plusieurs endroits, le voir arriver dans sa gondole aérienne». Sachons-lui gré, au moins, d’avoir porté loin le nom de notre ville, associé à l’idée d’un rêve merveilleux et non absurde, puisqu’il devait être un jour une réalité. Malgré son échec, Desforges n’est pas tombé dans l’oubli et son effort permet de considérer Étampes comme un des berceaux de l’aviation. [p.84]


 
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BIBLIOGRAPHIE

Éditions

Le Comte de Saint-Périer (Emile Bouneau, 1951) Couverture de l'édition séparée de La grande histoire d'une petite ville par le Comte de Saint-Périer (1938)     Édition princeps: René de SAINT-PÉRIER, La grande histoire d’une petite ville: Étampes [in-4° (16 cm sur 25); 143 p.; 8 gravures sur bois originales in-texto de Jules Lepoint-Duclos; 16 planches hors-texte dont deux croquis et 14 photographies originales de Jules Lepoint-Duclos; ouvrage couronne par l’Institut], Étampes, Édition du Centenaire de la Caisse d’Épargne (1838-1938), 1938 [AME, ADE]. Dont une réédition remaniée posthume à partir de 1964 dans le Bulletin Municipal d’Étampes.

     Réédition partielle corrigée et augmentée: Raymonde-Suzanne de SAINT-PÉRIER [éd.] & René de SAINT-PÉRIER [†1950], «La grande histoire d’une petite ville: Étampes» [réédition mise à jour publiée en feuilleton], in Étampes. Bulletin Official Minicipal 2 (janvier 1964), pp. 20-30; 3 (2e semestre 1964), pp. 24-29; 4 (hiver 1964-1965), pp. 25-31; 5 (janvier 1966), pp. 13-16; 6 (septembre 1967), pp. 13-15; 7 [et non 6 comme indiqué aux AME] (2e semestre 1967), pp. 9-11; 10 [et non 9 comme indiqué aux AME] (1er semestre 1969), pp. 17-19 [AME, ADE].


    
Réédition en fac-similé du texte de 1938: René de SAINT-PÉRIER, La grande histoire d’une petite ville: Étampes [20 cm; 140 p.; illustrations; reproduction en fac-similé de l’édition de 1938], Paris Le Livre d’Histoire [«Monographies des villes et villages de France»], 2004 [Cette réédition ne tient pas compte des remaniements posthumes et sa notice introductive est un plagiat de notre page bibliographique.]

     Édition électronique des seules gravures sur bois de Jules Lepoint-Duclos: Bernard GINESTE [éd.], «Jules Lepoint-Duclos: Monuments étampois (gravures sur bois, 1938)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cae-20-lepointduclos1938huitgravures.html, 2004.

     Édition électronique des seules photographies de Jules Lepoint-Duclos: Bernard GINESTE [éd.], «Jules Lepoint-Duclos: Monuments étampois (photographies, 1938)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cae-20-lepointduclos1938photographies.html, 2004.

    
Édition électronique intégrale: Bernard GINESTE [éd.], «René de Saint-Périer: Grande histoire d’une petite ville, Étampes (1957-1969)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-saintperier1938grandehistoire.html (9 pages web), 2005.

     Ce chapitre: Bernard GINESTE [éd.], «René de Saint-Périer: Étampes, le XVIIIe siècle (1957-1969)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-saintperier1938grandehistoire05.html, 2005.

Sur le Comte de Saint-Périer

     Adrien GAIGNON, «Le Comte de Poilloüe de Saint-Périer» [notice nécrologique], in Bulletin de l’Association Les Amis d’Étampes et de sa région 7 (janvier 1951), pp. 117-119 [AME, ADE].
     Réédition partielle: BILLARD 1984, pp. 115-118.
     Réédition
numérique intégrale: Bernard GINESTE [éd.], «Adrien Gaignon: Le Comte de Poilloüe de Saint-Périer (nécrologie, 1951)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cpe-20-saintperier-gaignon1.html, 2004].

     Émile BOUNEAU, «Dernier portrait du comte de Saint-Périer (juillet
1950)», in Bulletin de l’Association Les Amis d’Étampes et de sa région 7 (1951), p. 120 [dont l’image au début de la présente page].

     Pour une bibliographie plus complète et évolutive: Bernard GINESTE [éd.], «Le Comte de Saint-Périer et son épouse: une bibliographie», in Corpus Étampois,http://www.corpusetampois.com/cbe-saint-perier.html, 2003.


Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
Source: L’édition de 1938 et ses remaniements posthumes édités par la Comtesse. Saisie et mise en page de Bernard Gineste, 2005.
    
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