Henri de La Tour d’Auvergne,
vicomte de Turenne
Lettres relatives au siège d’Étampes
avril-mai 1652
1
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A M. Le Tellier (a)
23 avril 1652
Monsieur,
J’ai receu les lettres qu’il vous a pleu m’escrire
et vous voiés bien que sans voiture il est impossible de fournir
de pain aux troupes; depuis que l’on est parti de Bleno (1) on n’a eu qu’une ration de pain, et il
n’y a qu’un seul moien d’empescher que l’infanterie ne périsse entièrement,
qui est de trouver des charrettes à Melun ou à la Cour, et
faire charger le pain et le mener à l’armée.
Nous marchons demain au matin à la Ferté
aux Alais (b) ou l’armée de l’ennemi
est arrivée a ce soir. Il y a le ruisseau qui vient de Maillesherbes
entre nous; on ne peut pas dire ce qui en réussira.
Je vous suplie très humblement de vouloir
faire un effort afin que nous puissions avoir du pain demain. On a pris
un valet de pied de M. le Prince (c)
qui portoit un ordre à ses troupes, lequel il a jetté. Je
ne voi pas que l’on puisse rien faire à ces troupes de Brie.
Je suis véritablement, Monsieur, votre
très humble et très affectionné serviteur.
Turenne
Au camp de Choisy sur Ecolle
(2)
ce 23 avril 1652 [p.17]
On a emmené icy cinq gendarmes de M. d’Orléans;
il y a eu deux officiers des leurs tués; ils ne disent rien, si ce
n’est la marche des ennemis lundi au matin hors de Montargis. [p.18] |
Original
Service Historique de l’Armée de terre (SHA),
cote A.1 133 n°240
(manuscrit entièrement autographe)
Editions
Barthélémy, p.?
Menditte n°7, pp. 16-17.
B.G. n°1
Louis II de Bourbon-Condé dit le Grand
Condé
Notes de Menditte et de B.G.
(1)
Bléneau (Yonne).
(2) Soisy sur
Ecole, canton de Corbeil (Essonne).
(a) Secrétaire
d'État au département de la Guerre.
(a) La Ferté-Alais
(Essonne)
(c) C'est Louis
II de Bourbon-Condé dit aussi le Grand Condé (1621-1686). |
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2
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A M. Le Tellier
Le 23 avril 1652
Monsieur,
Comme nous allions marcher vers Nemours nous
avons eu nouvelle comme les ennemis sont partis de Montargis hier deux heures
devant le jour et ont logé la nuict à Puseaux; ce qui
nous oblige a prendre nostre marche droict à Fontainebleau, et tirerons
vers Milly s’ils prennent le chemin d’Estampes, ou plus à main droicte
vers Corbeil au cas qu’ils eussent intention d’y aller. Le munitionnaire ne
nous veut donner q’une ration de pain aujourd’huy bien tard, de sorte que
nous sommes obligés de marcher sans l’attendre. Si nous allons en
descendant de la rivière vers Corbeil il nous sera bien aisé
d’avoir du pain, mais si nous marchons après eux dans la Beausse nous
en manquerons entièrement, si on ne prends force voictures de Melun
pour nous en envoyer. En partant de Bleneau on marcha sans pain et depuis
cela on n’a eu qu’une ration. Cela faict perdre toutes nos mesures et ruine
toute nostre infanterie.
Je suis très véritablement, Monsieur,
votre très humble et très affectionné serviteur.
Turenne
A Moret ce 23e apvril au matin. [p.19]
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Turenne
Original
SHA, cote A.1 133 n°241.
Editions
Cosnac, t.?, p. ?
Menditte n°8, p. 18.
B.G. n°2.
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3
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A M. Le Tellier
A Chastres (1)
27 Avril 1652
Monsieur,
Ceux de Dourdan ont reçu vingt cinq mousquetaires
et trente chevaux qui ont déjà battu un parti de l’ennemi
depuis qu’il y sont. Cela sert à asseurer tout à fait cette
ville là et à couvrir encore plus le chemin de Paris et celui
de Normandie. Nous faisons partir cette nuit quatre cens chevaux pour essayer
de faire quelque chose aux fourrageurs.
L’armée de l’ennemi est toujours à
Etampes, ayant, à ce qu’ils disent, fort peu de nouvelles de Paris.
Je croi que cette séparation là est assez considérable,
et peut produire, avec un peu de temps, beaucoup de bons effets.
Je vous supplie de me croire très véritablement,
Monsieur, votre très humble et très affectionné serviteur.
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Original
Signalé par Huart (p.483, n.1) comme le lot 33 de la
vente Georges Haumont du 23 janvier 1970).
Editions
Huart, p. 483, note (1) (édition partielle et fautive d'après l'original cité ci dessus, sans doute trop rapidement aperçu lors de la vente
du 23 janvier 1970, et daté de Chartres
au lieu de Chastre (Arpajon):... Ceux de Dourdan
ont receu vingt-cinq mousquetons (sic) et trente
chevaux qui ont desjà battu un parti de l'ennemi depuis qu'ils y
sont... L'armée de l'ennemi est toujours à Estampes, ayant
à ce qu'ils disent fort peu de nouvelles de Paris...
Cosnac, t.II, p.162.
Menditte, sans numéro, p. 19.
B.G. n°3.
Note de Menditte
(1) aujourd’hui
Arpajon. |
4
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Copie
de la lettre que Monseigneur de Turenne escrit a Monsieur l’abbé
de la Rivière le 3 mai 1652.
Monsieur,
Vostre lettre me vient d’estre rendue tout présentement,
mais j’ay appris aussi en mesme temps de celuy qui commande à Corbeil
que vous avés 25 ou 30 personnes avec vous, ce qui me faict vous
supplier de n’en vouloir retenir que cinq ou six auprès de vous en
attendant les ordres du Roy. Je vous asseure que j’ay toutes les peines
du monde à vous faire cette prière mais je croi, Monsieur,
que vous jugés bien que je ne vous la fais que pour des raisons dont
je ne me peux deffendre, vous honorant au poinct que je fais, et estant…
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Original
Archives municipales de Corbeil,
cote AA 17 n°2.
(copie jointe à la pièce originale suivante)
Editions
Menditte, sans numéro, p. 20, note (2).
B.G. n°4.
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Louis XIV sur un louis
de 1652
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A Monsieur Le Gouverneur de
Corbeil (1)
3 mai 1652
Monsieur,
Je vous envoie coppie de la lettre (2) que j’escris à Monsieur L’abbé
de la Rivière (3). Vous le prierés
bien fort de vouloir faire les choses que je lui escris, c’est afin qu’il
garde seulement cinq ou six personnes près de luy en attendant qu’on
ait les ordres de la Cour. Tenés y la main autant qu’il vous sera
possible et me croyés, Monsieur, votre affectionné serviteur.
Turenne
A Chastres le 3ème May 1652
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Original
Archives municipales (AM) de Corbeil,
cote AA 17 n°2.
Editions
Menditte n°9, p. 20.
B.G. n°5.
Notes de Menditte
(1) Qui se nommait
Jacques Bourgoin.
(2) Cette copie
est jointe à la lettre [Suit le texte que dans
la présente édition en ligne nous donnons ci-dessus au n°4
(B.G.)].
(3) Aumônier
de la Reine.
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6
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A M. Le Tellier
Le 4 mai 1652.
Monsieur,
Je me remets de M. de Gadaigne (1) pour ce qui s’est passé, comme j’ai
creu que l’on sera bien aise de le savoir promptement à la Cour. Je
ne vous feray que ce mot par lui. Il y a asseurément plus de deux
mille morts ou prisonniers et quantité d’officiers. Je viens présentement
de recevoir celle qu’il vous a pleu m’escrire touchant ce poste à
Neülly; nous vous approcherons pour y estre à la main; et aussi
n’ayant rien à faire icy qu’a assiéger Estampes nous n’avons
ni munitions de guerre ni vivres pour cela. C’est pourquoy je trouve bien
plus raisonnable d’empescher a l’ennemi la communication de Paris et avec
cela, estant ruiné comme il est, je croi qu’on en viendra a bout.
Je ne vous mande point tous ceux qui ont bien servi en cette occasion; M.
de Gadaigne y a très bien faict.
Je vous supplie de vouloir demander pour Blancher
qui avait une compagnie dans Vaubecourt, et qui a été cassé,
une compagnie dans Picardie, vacante d’aujourd’huy.
M. le Conte de Broglio a très bien agi,
M. de Vaubercourt (2) aussi.
Je vous supplie de vouloir parler pour nostre
pain, il finit demain. On ne peut pas subsister sans cela.
Je demeure, Monsieur, votre très humble
et très affectionné serviteur.
Turenne
A Etrechy (3),
le 4 may du soir [p.22]
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Turenne
Original
SHA, cote A.1 133 n°266.
Editions
Cosnac, t. ? p.?.
Menditte n°10, p. 21.
B.G. n°6.
Notes de Menditte
(1) Gadagne (Charles,
Félix, comte Galéan de) maréchal de camp en 1652.
(2) Nicolas de
Nettancourt d’Haussonville, comte de Vaubécourt (1603-1678) – Lieutenant
général en 1651.
(3) 10 kms au
Nord d’Etampes. |
7
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A Monsieur le Gouverneur de
Corbeil
6 mai 1652
Monsieur,
Envoyant les quelques blessés de l’armée
de sa Majesté à Corbeil avec les quessons (a), je vous prie de les recevoir et les faire
traicter en attendant que la Cour y establisse un hospital et ce qu’il y
sera nécessaire pour cela. Ce que vous aurez employé à
cela je vous le feray rembourser et seray tousjours,
Monsieur, votre très affectionné
serviteur.
Turenne
A Chastre le 6 mai 1652. [p.23]
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Original
AM Corbeil, cote AA 17 n°4.
Editions
Menditte n°11, p. 22.
B.G. n°7.
Note de B.G.
(a) Quessons
(et plus loins quaissons), lisez caissons..
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8
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A M. Le Tellier
Le 10 mai 1652
Monsieur,
Estant bien aise de scavoir la volonté
du Roy sur un eschange que l’on me propose de faire du Sieur du Rechau, guidon
des gens d’armes de Monsieur le Prince, contre le Sieur de Villeneufve,
capitaine et major du régiment de Traci, lesquels sont tous deux
prisonniers, je vous supplie très humblement de me mander si le Roy
l’aura aggréable, et me faire la faveur de me croire, Monsieur, votre
très humble et très affectionné serviteur.
Turenne
Au camp de Palézeau le 10ème may 1652
[p.24]
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Original
SHA, cote A.1 133 n°296.
Editions
Costac, t.?, p.?.
Menditte n°12, p. 23.
B.G. n°8.
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Louis XIV sur un louis
de 1652
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9
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A M. le Gouverneur de Corbeil
12 mai 1652
Monsieur,
Celle-cy est pour vous prier de faire délivrer
entre les mains du porteur de la présente qui est un officier de
l’artillerie, six milliers de poudre; luy faire fournir les chariots pour
les mener jusqu’au port, et les faire embarquer avec le pain qui descendra
demain, luy faisant fournir de batteaux pour cela. Et vous prie aussi de
donner dix ou douze suisses pour escorter le pain jusqu’au lieu où
l’on le descharge.
Je suis, Monsieur, votre très affectionné
serviteur.
Turenne
Au camp de Paléseau le 12ème may
1652. [p.26]
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Original
AM Corbeil, cote AA 17 n°5.
Editions
Menditte n°13, p. 24.
B.G. n°9.
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A M. Le Tellier
Le 14 mai 1652
Monsieur,
Comme je n’envoie personne solliciter pour ces
quatre régiments de cavallerie allamans et pour mon régiment
d’infanterie je vous suplie très humblement que, dans les lieux où
estoint leurs quartiers, on donne les ordres nécessaires afin qu’ils
puissent estre paiés des ustencilles.
Vous voiés bien, Monsieur, que la prétention
est fort raisonnable mais je vous suplie d’en vouloir user comme d’une chose
que vous désirés qui réussisse. Je vous en serai sensiblement
obligé et vous suplierai de me croire, Monsieur, votre très
humble et très affcctionné serviteur.
Turenne
A Palaiseau ce 14eme Mai 1652. [p.26]
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Original
SHA, cote A.1 133 n°270.
(Lettre entièrement autographe)
Editions
Costac, t.?, p.?.
Barthélémy, p.?.
Menditte n°14, p. 25.
B.G. n°10.
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Louis XIV sur un louis
de 1652
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A M. Le Tellier
Palaiseau ce 15 may 1652.
Monsieur,
Quoique je n’aye pas beaucoup de choses à
mander, je ne perdrai pas l’occasion de ce valet de pied du Roy. On m’a
emmené encore aujourd’hui des prisonniers d’Etampes qui disent qu’ils
ne manquent point de grains; mais ils vont au fourrage assez loing; et sont
tous dans la ville, où ils font travailler, ne prétendant
plus garder les fauxbourgs. C’est une assez grande réduction qu’une
armée entière dans une ville.
M. de Bordeaux s’en va présentement a
Melun voir ce qu’il pourra faire pour le pain de munition, qui va extrêmement
mal.
Je suis de tout mon cœur, Monsieur, votre très
humble et très affectionné serviteur.
Turenne. [p.27]
|
Original
Original perdu.
Editions
Costac, t. II, 172.
Menditte sans numéro, p. 26.
B.G. n°11.
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12
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A M. Le Tellier
Le 18 mai 1652
Monsieur,
J’avois attendu M. le Conte Broglio pour répondre
a la lettre qu’il vous a plû m’escrire. J’envoye M. de Linville (1), avec tous les chevaux de cette artillerie
ici, pour ramener le canon et les munitions qui sont à Poissi, prétendant
qu’il sera aidé des attelages de la Court pour pouvoir tout amener
ici, nos chevaux ne suffisant pas; ce qui retarderoit la marche de la Cour
jusques à mardi, les chevaux ne pouvans être de retour a Saint-Germain
que lundi au soir; si ce n’est que la Cour faisant un effort ne peut en partant
demain dimanche ou lundi, et venant à Chilly (2), emmener tout le canon et les munitions,
ce que l’on croie bien malaisé. J’ay entretenu M. de Linville des
raisons pour lesquelles il estoit nécessaire que la Cour fust sur
la rivière de Seine avant que tout s’approchant plus près d’Estampes
que nous ne sommes, estans icy au lieu de tous où l’on peut apparemment
le mieux empescher la communication a Paris et faire que la Cour et toutes
les munitions nécessaires viennent par derrière, pouvant y
arriver plus aisément un accident: ou par la marche de leur armée
vers Paris, ou par la séparation de la Cour en quelque autre lieu
où nous puissions estre, hors celuicy. [p.28]
M. de Bordeaux (3)
est allé à Melun et on m’a asseuré qu’il estoit monté
jusques vers Sens. Je n’ay point eu de ses nouvelles depuis qu’il est parti.
Je vous supplie de me continuer l’honneur de vos bonnes graces et me croire
très certainement, Monsieur, votre très humbre et très
affectionné serviteur.
Turenne
Au camp de Palaiseau ce 18 may 1652. [p.29]
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Original
SHA, cote A.1 133 n°320..
(Lettre entièrement autographe)
Editions
Costac, t.?, p.?
Menditte n°15, pp. 27-28.
B.G. n°12.
Notes de Menditte
(1) Anne
Léon des Boves-Contenan, marquis de Lainville (mort en 1668).
(2) Chilly-Mazarin,
canton de Lonjumeau (Essonne).
(3) Bordeaux
(de) – Intendant de l’armée de Turenne.
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Louis XIV sur un louis
de 1652
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13
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A M. Le Tellier
Monsieur,
J’ay escris à M. le Maréchal de
l’Hospital comme les roues de deux pièces de canon qui sont rompues
nous ont empesché de marcher et en effet, tant pour cette raison
là que pour nos vivres, il est impossible de s’approcher d’Estampes,
sans estre asseurés que nous aurons à Melun et Corbeil des
vivres asseurés et des chariots suffisans pour les porter au camp.
Et puisque nous n’avons point d’équipage assez grand pour cela, il
est impossible de le faire qu’avec le charroy de la Cour. Il y a certainement
abondance de grains dans Estampes,de sorte que vous jugés bien, Monsieur,
que de s’approcher d’une armée, qui est dans une ville et sur laquelle
par cette raison on ne peut rien entreprendre si promptement, n’ayant pas
un jour de pain devant soy, ni moyen de faire venir une ration l’une après
l’autre de sept ou huict lieues de là, ce seroit vouloir perdre une
armée poutr plaisir.
Comme ceci est la plus importante chose de cette
guerre ici, il ne la faut pas entreprendre sans fondement. Nous ne sommes
ici qu’à une lieue et demie de la rivière, nous avons esté
trois jours sans pain, et on n’en peut porter qu’une ration, qui est une
belle advance pour une marche. [p.30]
On n’a point voulu recevoir M. l’Intendant à
Melun, à cause de quelque bestail pris, lequel est monté plus
haut pour voir quels magasins il pourra faire. Je n’ay point eu de ses nouvelles
depuis qu’il est parti. Il attend asseurément d’estre jusques à
Sens pour m’en mander.
J’envoye les garnisons à à Saint-Germain.
Je vous supplie d’ordonner que l’on face tous les efforts possible
afin de les faire charger de pain ou de farine et qu’ils s’en viennent avaec
la Cour — ou mêsme de grain s’il n’y avoit pas de ces deux là.
J’envoye présentement à Cobeil
M. de Renneville afin que l’on convertisse en farine le plus de bled que l’on
pourra.
J’ai envoyé un officier avec des mousquetaires
à Hautebruyère dès que j’eûs de vos nouvelles.
M. de Navaille (1)
fut hier avec trois ou quatre cens chevaux faire une embuscade aux fourrageurs
de l’ennemi. Il prit plus de deux cens chevaux. Tous les prisonniers rapportent
qu’ils ont beaucoup de grains dans Estampes. Quelque cavallerie qui estoit
dans un fauxbourg se resserra hier dans la ville. Il y a certainement une
grande mesintelligence entre les Allemans et les François.
Dès que les chevaux de l’atttirail de
la Cour auront repeu je les feray partir afin que la Cour puisse partir demain
(2). Je vous supplie de me continuer
l’honneur de vos bonnes graces estant, Monsieur, votre très humble
et très affectionné serviteur.
Turenne [p.31]
J’ai eu une pensée que si la présence
de M. le Mareschal de la Ferté (3)
n’estoit pas nécessaire en Lorraine on pouvoit le faire venir sur
la Marne. Je vous asseure qu’un corps de trois mille hommes avec les communes
empescheroit M. de Lorraine (4) de marcher
vers Paris. On pouroit négotier tout de mesme avec lui et mesme l’y
laisser venir pour sa personne pourvu que son armée n’en eut pas
le chemin libre.
Au camp de Palaiseau le 20
may 1652 [p.32]
|
Turenne
Original
SHA, cote A.1 133 n°335.
Editions
Costac, t.?, p.?.
Menditte n°16, pp. 29-31.
B.G. n°13.
Notes de Menditte
(1)
Philippe de Montaud de Benac,duc de Navailles, lieutenant général
en 1653, maréchalde France en 1675.
(2) La
Cour fera mouvement le 21 de Saint-Germain à Melun.
(3) La
Ferté (Henri de Senneterre, marquis de) maréchal de France
en 1651.
(4) Charles
IV, duc de Lorraine (1604-1674).
Charles IV de Lorraine
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14
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A M. Le Tellier
Le 23 mai 1652.
Monsieur,
J’escris à M. l’Intendant comme en faisant
toutes les diligences possibles, et travaillant à Chilly et au parc
avec tous les ouvriers du pays, nous ne pouvons marcher que samedi au matin,
de sorte qu’il est nécessaire de nous envoyer demain Vendredi tous
les charrois de la Cour, qui prennent tout le pain qui est à Corbeil
et celuy qui est sur les batteaux; n’en faisant prendre aujourd’huy qu’une
ration, afin que nous ayons tout ici demain. Je vous supllie de vouloir aussi
presser pour les outils. La nouvelle se confirme comme Monsieur de Lorraine
arrive à la Ferté Milon. Cela ne faict point changer en rien,
mais cela doit faire cognoistre que luy mesme ne scait pas s’il retournera
en Flandre, s’il advancera vers Paris, ou s’il demeurera en Champagne. Pour
le fondement qu’il y a à prendre sur luy, c’est qu’il a bien envie
de faire continuer des désordres de France par quelque manière
que ce puisse estre. Je suis très véritablement, Monsieur,
votre très humble et très affectionné serviteur.
Turenne
Au camp de Palaiseau le 23 may 1652. [p.33]
|
Turenne
Original
SHA, cote A.1 133 n°350.
Editions
Costac, t.?, p.?.
Menditte n°17, p. 32.
B.G. n°14. |
15
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A M. Le Tellier
Le 25 mai 1652.
Monsieur,
Afin qu’il vous plaise y donner les premiers
ordres, je mettroi ici ce que j’escris à M. l’Intendant, qui est que
l’on fit distribuer hier vendredi pour trois jours de pain à l’infanterie,
et pour deux jours à la cavallerie. Je renvoye présentement
les quaissons. Je vai loger aujourd’huy à Châtres. Le canon
ne peut marcher d’ici qu’a quatre ou cinq heures du soir. J’iray loger à
Estrechy le lendemain, estant besoin d’y faire un entrpos à cause
des chevaux et des roues qu’il faut reprendre pour aller quérir les
pièces, afin d’estre lundi de bonne heure auprès d’Estampes,
qui est le jour que le pain manqueroit. Vous jugés bien que nous faisons
toute la diligence afin d’avoir tous les attelages de la Cour et les mulets
libres afin de vous les renvoyer, jugeant bien que l’on ne peut pas avoir
suffisamment de pain que par le moyen de ces attelages là. Mais en
attendant je vous supplie de nous envoyer demain sans faute à Châtres,
tout ce qu’il y aura de pain, pour charger les quaissons que vous renvoyerés.
Si je suis parti je laisseray une escorte pour les mener a Estrechy, estant
entièrement nécessaire que nous ayons pour un jour de pain
au moins en arrivant auprès d’Estampes, hors le pain que vous aurés
prist à Corbeil, qu’il faudra faire mener à Estampes. Puisque
la Cour va à Melun on pourra encore plus seurement faire venir les
convois delà à Estampes; de sorte qu’il y faudra faire les
principaux magazins. On peut prendre pour entrepos La Ferté-en-Laye
(1). [p.34]
Nous n’avons qu’un jour de pain devant nous
de sorte qu’à moins qu’il vous plaise presser que l’on ne perde point
de temps on en manquera asseurément. Et si en arrivant auprès
d’Estampes on estoit quelque jour sans pain, nous perdrions beaucoup de
soldats, et cela degousteroit fort les autres. Je vous supplie de me continuer
l’honneur de vos bonnes grâces estant, Monsieur, votre très
humble et très affectionné serviteur.
Turenne
A Palaiseau le 25ème may 1652. [p.35]
|
Original
SHA, cote A.1 133 n°356.
Editions
Costac, t.?, p.?.
Menditte n°18, p. 33-34.
B.G. n°15.
Notes de Menditte
(1)
La Ferté-Alais (Essonne)
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16
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A M. Le Tellier
Le 27 mai 1652.
Monsieur,
Monsieur l’Intendant arriva hier soir ici et
tous ces messieurs de la Cour. Je trouve très à propos la pensée
de faire mener les vivres par batteau au Mesnil Cormel. J’y feroy demeurer
la cavallerie et quelques mousquetaires ?? faict voir le long de la rivière
q’il y aura des batteaux. Je crains qu’il ne s’en trouve point, de sorte
que si ceux de la Seine n’y sont pas propres il faut songer aux charrois.
Je ne laisseroy pas toujours de faire venir de la cavallerie et de l’Infanterie
au Mesnil Cormel, afin que les charrois viennent à couvert de la
rivière d’Estampes jusque là, c’est-à-dire du costé
de Melun, et là passent le pont pour s’en venir à Estrechi
où je laisseroy quelques gens.
Encore qu’il y eust des voitures on ne
nous faict voir qu’une ration de pain à voitures à la fois.
Il faudroit que, Jacquier (1) manquant
a cela, on fist un fonds de cinq ou six rations. Il me manque autre chose
que de l’argent pour cela, pouvant dansle haut de la rivière faire
assés de farines; et ainsi Jacquier fournissant le journallier on se
mettroit en advance de quatre ou cinq rations que l’on auroit toujours devant
soy. Ce n’est pas grand-chose qu’un fonds de cinq ou six rations, une fois
payé. [p.36]
Il n’y a rien autre chose d’Estampes, sinon
qu’ils ont bruslé des maisons du fauxbourg en nous voyant approcher.
Je ne scay point encore comment nous logerons. Il me semble qu’il n’y auroit
point d’apparence que si le roi veut venir ici que ce fust avant que l’on
fust logé et les postes prises. Je vous supplie de parler pour ce
pain et faire résoudre cette dépense. Il peut y arriver mille
accidents par là. Le moindre convoi qui manquera nous perdrons beaucoup
d’infanterie. Je croi que l’on juge assés la conséquence de
cette affaire ici à la Cour afin que nous ne manquions pas de vivres.
Seguin (2) vient présentement
d’arriver. Il a prit deux cens trente chevaux et cens prisonniers. Je suis
de tout mon cœur, Monsieur, votre très humble et très affectionné
serviteur.
Turenne
L’abbé Drouet a passé icy. Je
lui ai donné escorte. Il ne faut point faire de fondement asseuré
sur ce pain de Dourdan. [p.37]
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Louis XIV sur un louis
de 1652
Original
SHA, cote A.1 133 n°370.
Editions
Menditte n°19, pp. 35-36.
B.G. n°16.
Notes de Menditte
(1)
Jacquier, munitionnaire général.
(2) Seguin,
capitaine au régiment de Beauveau.
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Louis XIV sur un louis
de 1652
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17
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A M. Le Tellier
Le 30 mai 1652.
Monsieur,
Comme le roy demeure icy aujourd’hui je vous
suplie très humblement d’ordonner que si vous avés du pain prest,
que l’on face charger des bateaux et qu’on les face monter à Mesnil
et Estrechi afin que, s’il se peut une fois en notre vie, nous puissions
estre en avance d’un jour de pain. Je suis très véritablement,
Monsieur, votre très humble et très affectionné serviteur.
Turenne
Je vous suplie très humblement de nous
faire avoir des outils et principalement des pics.
Le 30 may 1652.
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Original
SHA, cote A.1 133 n°380.
(Lettre entièrement autographe)
Editions
Costac, t.?, p.?.
Barthélémy, p.?.
Menditte n°20, p. 37.
B.G. n°17.
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Source: éditions Huart
et Menditte.
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BIBLIOGRAPHIE PROVISOIRE
Éditions
Édouard
de BARTHÉLÉMY (1830-1888), Correspondance inédite
de Turenne avec M. Le Tellier et avec Louvois, d’après les originaux
conservés au dépôt de la guerre [in-8°; 146 p.;
extrait des Mémoires de la Société des Antiquaires
de Picardie 23 (1873); les lettres autographes sont publiées
in extenso; les lettres simplement signées sont seulement],
Paris, Didier, 1873 ou 1874 [publie seulement les lettres dont on a les autographe
et analyse seulement les autres].
Comte Gabriel-Jules de COSNAC (1819-1893), Souvenirs
du règne de Louis XIV, par le Cte de Cosnac (Gabriel-Jules) [8
volumes in-8°], Paris, Vve J. Renouard, 1866-1882 [cite quelques lettres
de Turenne au fil de son récit comme preuves].
Suzanne d’HUART (baronne, archiviste paléographe,
conservateur en chef aux Archives nationales, 1923-2003) [éd.], Lettres
de Turenne (1626-1669), extraites des archives Rohan-Bouillon [24 cm;
677 p.; cartes; planches en noir et en couleur ; index], Paris, S.E.V.P.E.N.
[«Direction des archives de France. Archives nationales. Inventaires
et documents»], 1971.
Arnaud Pierre de BERTERECHE DE MENDITTE (capitaine
dit de MENDITTE) [éd.], Lettres oubliées ou
inédites de Turenne pour l’année 1652, par le capitaine A.
de Menditte, avec les conseils de M. P. [i.e. B(ernard)] Waksman [30
cm; 105 p ; 4 ff. de planches; index], Vincennes, Service historique de l’armée
de terre, 1975.
Bernard GINESTE [éd.], «Turenne:
Lettres relatives au siège d’Étampes (avril-mai
1652)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-turenne1652lettres.html, 2007.
1652 dans le Corpus Étampois
Bernard GINESTE,
«Marie Angélique Arnauld: Sur des religieuses fuyant le
siège d’Étampes (fin mai 1652)»,
in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-16520525arnauld.html, 2008.
Bernard GINESTE, «Marie
Angélique Arnauld: Deux lettres à la reine de Pologne (misère de Paris et d’Étampes, mai-juin 1652)»,
in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-16520628arnauld.html, 2008.
Bernard GINESTE [éd.],
«Petrus Baron: Stemparum
Halosis (texte latin de 1654)», in Corpus Étampois,
www.corpusetampois.com/cls-17-baron-halosis.html, janvier 2003.
Bernard GINESTE [éd.],
«Pierre Baron: La Prise
d’Étampes (édition bilingue annotée
de Pinson, 1869)», in Corpus Étampois,
www.corpusetampois.com/cls-17-baron-halosis-bilingue.html, janvier 2004.
Bernard GINESTE [éd.],
«Pierre Baron: La Prise
d’Étampes (traduction Pinson seule)», in
Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/cle-17-baron1654prisedetampes.html, janvier 2004.
François JOUSSET
& Bernard GINESTE [éd.], «René
Hémard: La Guerre d’Estampes en 1652 (édition
1884 de Pinson)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/cle-17-renehemard-guerre.html,
janvier 2003.
Bernard GINESTE [éd.],
«Basile Fleureau: Recit veritable de ce qui
s’est passé au siege de la Ville d’Estampes en l’année 1652 (édition
de 1681)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-fleureau-b44.html, janvier
2003. 2e édition illustrée et annotée:
mai 2007.
André BELLON, «Antoine
Pecaudy», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-1652pecaudy-bellon.html,
2003.
Bernard GINESTE [éd.],
«Turenne: Lettres relatives au siège d’Étampes
(avril-mai 1652)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-turenne1652lettres.html, 2007.
Sur
Turenne
COLLECTIF D’INTERNAUTES, «Henri de La Tour d’Auvergne, vicomte de Turenne», in Wikipédia, fr.wikipedia.org/wiki/Henri_de_la_Tour_d’Auvergne-Bouillon, en ligne en 2007.
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