|                                                  
                                                                        
                        
      
                            
                              
                                | Les Antiquitez
de la Ville                                             et du Duché
d’Estampes Paris, 
        Coignard,           1683
 Premiere 
          Partie,         Chapitre         XXXV,                         
                  pp.    171-180.
 | Des choses        memorables arrivées 
 à        Estampes   vers le regne de Charles VI, Louis dauphin et 
Charles VII |  
                                                 
                                                                        
                        
      
 
 PREMIÈRE          
PARTIE,            CHAPITRE                     XXXV.
 Des     choses 
    memorables         arrivées       à            Estampes
   vers le   Regne   de
 
                                                                        
                 
                                                                        
                     
                                                                        
                         | Charles VI. R. de France, m. 1422. Louis Dauphin, m. 1415.
 Charles VII. Regent,
 & depuis Roy de France.
 
 | 
 | Iean, Duc de Berry. Philippe le Hardy, Duc de Bourgogne.
 Philippe de Bourgogne.
 Iean de Bourgogne, Nevers.
 Comtes d’Estampes.
 
 |  Depuis 1399. jusqu’à 1435.
 
                                                
                                                                        
                        
        
                            
                                          
                                        | L’Usufruit  du Comté d’Estampes fut changé en proprieté 
     par la mort  du Comte Louis: Et Jean Duc de Berry commença aussi-tôt 
     à  en jouïr pleinement, & paisiblement, & à 
  en   disposer des fruits, & de tous les revenus, à sa volonté. 
     Je trouve que par une Ordonnance du trentiéme de Juillet de la 
 méme    année  1400. il commanda aux Receveurs de son domaine 
 d’Estampes  de  payer à  l’Eglise de Nôtre Dame, les dix livres 
 tournois,  qu’il  devoit pour la fondation des Anniversaires de Charles d’Evreux,
 Comte  d’Estampes. 
 Quelques [sic] temps aprés que le Duc 
      de Berry fut entré en pleine jouïssance du Comté 
d’Estampes,      il signala sa pieté envers l’Abbaye de Nôtre 
Dame la Royale,      dite de Maubuisson prés de Pontoise, par la remise 
& donation     entre-vifs, qu’il fit à l’Abbesse, & aux Religieuses 
de ce Monastere-là     de quatre muids de bled de rente, qu’il avoit 
droit de recevoir, sur les    dixmes qu’elles y avoient, nommé le fort
dixme le Roy: à condition    qu’elles diroient tous les ans à 
perpetuité quatre Obits,  comme  il est ordonné par le titre 
suivant.
 
 |   Jean de Berry en prière
 
 |  
                                     | Iean fils de Roy
de France, Duc de Berry, & d’Auvergne,       Comte de Poictou, d’Estampes,
de Boulogne, & d’Auvergne; sçavoir       faisons à tous
presens, & à venir, que, Nous, considerans       les grandes &
notables prieres, & service divin que les Religieuses,       Abbesse
& Convent de l’Abbaye Nôtre Dame la Roiale prés      de
Pontoise, ont eu continuellement aux Seigneurs, & Dames de l’Hostel 
    de France, lesquels ont esté Fondeurs de ladite Abbaye. Eu außi 
      consideration, & regard à ce que feüe nostre tres-chere 
    Dame,  & Mere repose, & est inhumée en ladite Abbaye: &
    afin qu’icelles Religieuses, les rentes, & revenus desquels sont
de   present   moult amendries, soient toûjours plus tenuës de
prier   Dieu pour    l’ame de nostredit Dame feuë Mere, la nôtre, [p.172]             quand il plaira à 
     nôtre  Seigneur que nous allions de vie à trépassement, 
     & de nos predecesseurs, & successeurs, parens, & amis, & 
    pour accroître le divin service, dont entre nos autres cures, & 
    sollicitudes, nous sommes plus soigneux: ausdites Religieuses, & à
    ladite Eglise avons donné,  ceddé, transporté, quitté,
    donnons, ceddons, transportons,  de nôtre pleine science, &
grace    especial, par ces presentes, perpetuellement  à toûjours-mes
    par donnation irrevocable, faite entre-vifs, la somme de quatre muids
de   bled, en quelque valuë, ou estimation qu’ils  soient à present,
   ou qu’ils seront pour le temps à venir: Esquels  quatre muids de
 bled   lesdites Religieuses nous étoient tenuës  chacun an de
 rente,   par avant cette donation: Et avions iceux accoûtumé 
  de prendre,   à cause de nôtre Comté d’Estampes, de, 
 &  sur les   dixmes de grains, qu’icelles Religieuses ont, & prennent 
 chacun  an en  nôtredite ville, & Comté d’Estampes, lieu, 
 & appartenances    d’icelles, nommé le Fort dixme le Roy, sans 
 ce que jamais nous ne   nos successeurs, ou ayons [Lisez: ayans]                de nous 
 cause, en puißions rien demander, ne   requerir, ou faire demander, 
 requerir, ou autrement poursuivre contre lesdites   Religieuses pour ladite 
 cause, parmy ce toutes voyes, que lesdites Religieuses,   qui sont à 
 present, & seront pour le temps à venir seront   tenuës de
 faire faire & celebrer chacun an, perpetuellement en leurdite  Eglise, 
 quatre Obits solemnels de vigiles, Commendaces, & Messe  à 
 Diacre, & Sousdiacre, pour le remede, & salut des ames de  nôtredite 
 feuë Mere, de nous, quand nous serons partis  de ce Siecle,  & de
 nos predecesseurs, & successeurs, parens, &  amis: dont le  premier 
 sera fait, & commencera le jour du trépas  de nôtredite 
 Mere, & les autres trois seront faits en suivant chacun an, de trois 
mois en trois mois: & de se [Lisez: ce]
            faire s’obligeront lesdites   Religieuses,
elles, & leur Eglise: & seront ces choses enregistrées   à
perpetuelle memoire au martyriloge, & livre des Obits   de ladite
Eglise. Si donnons en mandement à nos amez, & feaux  les gens
de nos comptes, à nos Baillis, Procureur, & Receveur d’Estampes,
& à tous nos autres Iusticiers, & Officiers, de nos successeurs,
presens, & à venir ou à leurs Lieutenans, & à
chacun d’eux, si comme à luy appartiendra, que de nos presens, don,
cession, octroy, transport, & quittance fassent, souffrent, & laissent
jouïr, & user plainement, & paisiblement lesdites Dames Religieuses,
& leur Eglise, sans les travailler, molester, ou empêcher, ou souffrir 
 estre molestées, travaillées, ou empêchées en 
aucune maniere contre la teneur des presentes: Car ainsi nous plaît-il, 
    & voulons estre fait, nonobstant que en ces lettres ne soit faite 
autre    mention de la valeur desdits quatre muids de bled, ordonnances , 
mandemens,    deffenses, ou autres choses à ce  contraires. Et que 
ce soit chose    ferme & [p.173] stable 
    à toûjours-mes  nous avons fait mettre nôtre scel à
    ces presentes, sauf en autre chose nôtre droit, & l’autruy
en   toutes.  Donné à Paris au mois de Fevrier, l’an de grace
mil   quatre cent, & quatre. 
 |   Premier sceau de Jean de Berry (vers 1393)
 
 
 
   Troisième sceau de Jean de Berry (1410)
 
 |  
                         |  Jean Duc de Bourgogne, qui étoit 
  Seigneur    proprietaire d’Estampes, au lieu de Philippe son Pere, confirma 
  l’année    suivante, cette donation des  quatre muids de bled faite 
  à l’Abbaye    de Maubuisson, par le Duc de Berry, qui n’étoit 
  plus que Seigneur   usufruitier d’Estampes, comme je l’ay cy-devant remarqué. 
 Sur la
plainte     qui   fut renduë à Messieurs du Parlement de Paris
par un Bourgeois      de la ville de Bourges, de ce que le Duc de Berry faisoit,
depuis quelque      temps, retenir sa fille enfermée dans son Château
de Bicestre-lez-Paris.       La Cour envoya un de ses Huissiers faire commandement
à ceux qui    gardoient  cette fille, de la rendre: ce qu’ils refuserent
de faire; &    sur le refus,  il les assigna.
 
 Le  trouble d’esprit
où le Roy Charles VI. tomba en sortant de  la   ville   du Mans pour
aller en Bretagne, causa de grandes divisions entre    les Princes   du sang,
chacun pretendant le Gouvernement du Roiaume. Les   Ducs de Berry,   &
de Bourgogne, en qualite d’Oncles de Sa Majesté,     se le firent
 donner par l’Assemblée des Estats du Roiaume, tenuë     à
Paris, l’an 1392. à l’exclusion du Duc d’Orleans, frere   du  même
Roy, à cause, disoient-ils, qu’il étoit trop   jeune:  d’où
nâquit la querelle, & la haine, entre les maisons  d’Orleans, 
& de Bourgogne. Cette haine au lieu de s’éteindre  avec la vie
de Philippe  le Hardy, qui mourut dans la ville de Halles en Hainaut, le
27. jour d’Avril  1404. s’augmenta encore davantage dans le cœur de Jean, 
son fils aîné:  parce que le Duc d’Orleans fit naître
des difficultez, & des longueurs,  qui égaloient une opposition
couverte, à la demande qu’il fit  au Roy, d’executer les mariages
qui avoient été accordez entre  leurs enfans; Sçavoir
entre Louis Duc de Guienne, & Dauphin de  Viennois, & Marguerite,
fille de Jean: & entre Philippe, Comte de  Charolois, son fils, &
Michelle de France, fille du Roy; de sorte qu’enfin  ce nouveau Duc de Bourgogne
perdant le respect qu’il devoit avoir pour le  frere unique du Roy; sans
craindre ny la Justice divine, qui menace l’homicide  de la même mort,
dont il fera mourir son prochain: ny la vengeance que l’on pourroit executer
sur ses enfans, fit assassiner ce jeune Prince, dans Paris à la porte
Barbette, un soir qu’il alloit trouver le Roy dans son Hôtel de saint
Paul*. Le malheur  de la France étoit
si grand en ce temps-là, qu’au lieu de venger  un crime si enorme,
on fut contraint de le dissimuler, pour [p.174] ne
pas jetter l’Estat dans un plus grand  desordre, & de procurer une reconciliation
    entre les Princes d’Orleans,  & les Ducs de Bourgogne. Cette reconciliation
    fut faite dans l’Eglise  de Nôtre Dame de Chartres, où les
  deux  jeunes Princes d’Orleans,  & le Duc de Bourgogne jurerent, sur
 les saints  Evangiles de vivre toûjours  en bonne amitié, les
 uns envers  les autres.
 
 |   A gauche, Philippe II, à droite son fils
 Jean
 
 
 
   Charles VI
                   *   22. Novembre 1407.
 |  
                         | Mais  cette paix ne fut pas plûtost faite, que les partisans de
 la   maison   d’Orleans éprouverent sur eux la vengeance du Bourguignon,
    & furent contraints pour en éviter les cruelles suites, de
se   retirer à Blois. Ce qui fut un nouveau sujet de querelle, &
de   plainte à la maison d’Orleans: & les Princes Orleannois,
&   leurs partisans  pretendans que c’étoit ouvertement rompre
le Traité   fait à  Chartres, s’assemblerent à Gien:
sçavoir les   Ducs d’Orleans,  de Berry, de Bourbon, & de Bretagne:
les Comtes d’Alençon,   d’Armagnac,  de Richemont, Charles d’Albret,
qui retenoit toûjours  la qualité   de Connétable de
France, avec plusieurs autres  grands Seigneurs, qui firent vœu, & serment
de demeurer unis tous ensemble  pour détruire  la tirannie du Duc
de Bourgogne. Pour affermir davantage   cette ligue, Charles  Duc d’Orleans
épousa la fille du Comte d’Armagnac,   & de Bonne de Berry sa
femme, fille du Duc Jean. Les deux partis assemblerent   aussi-tôt
 le plus de troupes qu’ils purent; & parce que le Comte   d’Armagnac
avoit  mené le plus de gens, on surnomma ces troupes les   Armagnacs.
Le Bourguignon  commença à les battre sous l’autorité
  du Roy qu’il gouvernoit:  mais les Orleannois, sans avoir égard
à   toutes les défenses  d’armer qui leur étoient faites,
ne laissèrent     pas de continuer  leur entreprise, & de s’avancer
par Estampes jusques     à Mont-l’Hery,  & de là à
Bicestre, & jusques     dans les fauxbourgs de  Paris. Ce qui obligea
de faire la paix que l’on   appella  de Vvincestre, &  par corruption
 Bicestre, par l’entremise de  Charles  Roy de Navarre, surnommé 
le  Noble, & le second Salomon,   &  du Duc de Brabant, frere du
Bourguignon. 
 Mais  cette
paix fut d’aussi peu de durée que celle de Chartres,    &  rompuë
 pour pareil sujet. Joint aussi que le Duc d’Orleans  de  son côté,
  arrêta le sieur de Croüy, deputé    de la part du Bourguignon
  vers le Duc de Berry, & le fit gehenner  cruellement   pour découvrir
  les assassins de son Pere: Ce que le  Bourguinon
  [sic] prit aussi  pour une infraction   ouverte du Traité
  de Bicestre: & ayant  d’abord mis en campagne,   avec l’aide de ses
parens,   & amis, une tres-puissante  armée,   il entra au païs
de Vermandois,   où il prit [p.175] par
  composition Nefle, Roïe, & Chauny; brûla Ham, sur la riviere
  de Somme, qui étoit au Duc d’Orleans: & étant à
 Montdidier avec son armée, il fut contraint de faire une retraire
honteuse en ses pays. Les Orleannois qui s’étoient allez [sic] opposer au Bourguignon avec
 tout ce qu’ils avoient pû mettre ensemble de forces, voyans sa retraite,
 retournerent vers Paris, enseigne déployées [sic], esperant d’y entrer, &
 de s’en rendre les maîtres: mais le Bourguignon qui l’avoit preveu
y avoit envoyé des forces sous le Comte de Saint Paul: de sorte que
les Orleannois à leur arrivée y trouverent plus de resistance
qu’ils ne se l’étoient persuadez, & prirent seulement saint Denis,
& saint Cloud: & de là courans ordinairement jusques aux portes
de Paris, étoient tous les jours aux mains avec la garnison.
 
 |   Charles d’Orléans recevant l’hommage d’un vassal
 
 |  
                         | Cependant  le Bourguignon aprés s’étre allié avec
  l’Anglois,   se  rendit, de nuit dans Paris avec de nouvelles forces, &
  le 9. de Novembre   1411. il alla attaquer saint Cloud, & le força
  nonobstant la vigoureuse  resistance de ceux qui étoient dedans,
y  tua 900. hommes,  & en  fit cinq cent prisonniers & prit quantité
  de bagage,  où  il y avoit entre autres choses 1600. chevaux. Aprés
  cette  perte, les  Princes, & Seigneurs du party Orleannois se resolurent
  de  se retirer chacun en leurs terres, pour assembler de nouvelles troupes: 
   &  le Duc de Bourgogne demeura à Paris gouvernant paisiblement 
   le Roy,  & le Roiaume. Le Duc d’Orleans en se retirant prit Galardon 
  avec quelques  autres places, mit garnison dans Galardon, & dans Estampes 
  qui étoit  au Duc de Berry. Cette garnison couroit jusques aux portes 
  de Paris, qu’elle    incommodoit grandement, aussi bien que tous les pays 
  circonvoisins: ce que   les Parisiens ne pouvant supporter, ils obligerent 
  le Duc de Bourgogne d’aller   mettre le siege devant Estampes. Il mena Loüis
  Dauphin, & Duc de  Guienne son Gendre, avec les Comtes de Nevers, de
 la Marche, de Ponthieure,   de Vaudemont, & Boucicaut Maréchal 
 de France. Loüis de Bourdon   tenoit Estampes pour le party d’Orleans: 
 il le deffendit vaillamment: mais   voiant que les habitans étoient 
 resolus de se rendre au Dauphin, il  se retira dans le Château, & 
 le défendit longuement, nonobstant  la furieuse batterie des Assiegeans, 
 jusques à ce qu’il s’apperçeut 
 [sic] que la mine qui étoit   preste, faisant son effet,
 il ne pouroit plus le défendre: ce qui  le contraignit de se rendre
 à discretion. Bourdon, Jean d’Amboise,  & d’autres Chevaliers
furent envoiés prisonniers à Paris,  & de là conduits
à l’Isle en Flandre. Quelques Annalistes  ont mis par erreur     
       Bourbon  au [p.176]          
   lieu de             Bourdon, & cet erreur [sic] en aiant attiré un autre, 
  ils y ont ajoûté la qualité   de Duc, ce qui ne peut 
étre,   puisque Loüis Duc de Bourbon étoit  mort dés 
le 19 d’Aoust   1410. & que le siege ne fut mis devant  Estampes que sur
la fin de l’année   suivante 1411. la Ville &  le Château 
s’étant ainsi rendus,   Guillaume d’Arbouville, Chevalier,  & Gentil-homme
ordinaire de la chambre   du Roy, en fut fait Gouverneur  pour le Roy, par
commission donnée  Paris le 22. jour de Janvier de  la même
année, de la teneur suivante. 
 |   Reconstitution de Léon Marquis (1873)
 
 |  
                         | Charles  par la grace de Dieu Roy de France, à
tous     ceux qui ces presentes  Lettres verront, salut, Sçavoir faisons
  que   comme de present les Ville,  Chastel,  & Comté d’Estampes
  soient   renduës, & remises  à nôtre obeissance,
&   en nôtre   main: & pour ce  soit neceßite de pourvoir
aux   offices de ladite   Comté de personnes  suffisantes, & idoines,
  qui lesdites Offices   teignent & exercent de par nous, comme il appartient;
  mémement   pour tenir ledit lieu d’Estampes,  & le pays d’environ
  en bonne seureté.   Nous, ce consideré,  & confians à
  plain des sens, loiauté,   & bonne diligence  de nôtre
Amé  & feal Chevalier, &   Chambellan, Guillaume  Sire d’Arbouville,
à  iceluy de grace speciale   par ces presentes avons  donné
& octroyé,  donnons &   octroions, l’office de Capitaine 
desdites Ville, & Château   d’Estampes:   à iceluy office
avoir  tenir & exercer doresnavant   aux droits,   &c. Si donnons
en mandement,  &c. Donné à   Paris l’an   de grace 1411.
& de nôtre  regne le XXII. ainsi signé   par   le Roy en
son Conseil, ou quel le Roy  de Sicile, Monsieur le Duc de  Bourgogne,  
le Comte de Nevers, vous [Lisez  sans doute:
              mons.]             le  chancelier
 de Guienne étoient.   I. Milet. 
 |   Sceau de Charles VI
 
 |  
                         | Et  par une autre commission, donnée au Camp devant Estampes,
on   voit   que le Roy n’y étoit pas present; mais seulement le Dauphin,
   Duc de  Guienne,  qui commit Estienne Chartier pour faire la recepte de
 ce  Comté,   & de Dourdan, de la Ferté Aalés, &
  de leurs dependances   depuis peu confisquées au Roy, pour cause
de  rebellion. 
 Stephanus Chartier nuper commissus
  per   Dominum   Aquitaniæ Ducem, & Delphinum Viennensem, tunc
ante  Villam   Stamparum,   cum exercitu existentem, ad officium receptæ
 Comitatus,   & Castellaniæ   Stamparum per deliberationem habitam
 in Camera,   fuit ordinatus Receptor in  dicto Comitatu, & in Castellaniis,
 de Dordano,   & de Feritate Aalés  cum earum pertinentiis, &
 etiam in quibuscunque   terris, in dictis locis  existentibus, de novo confiscatis,
  propter rebelliones:   ad vadia quæ  sibi per gentes compotorum,
&   thesaurarios, ad proximum   suum compotum  taxabuntur, per litteras
datas   die XVI. Aprilis an. MCCCCXII.   Sic signatas,  par le Roy à
la  relation du Conseil, étant [p.177]
            en  la Chambre des Comptes,    auquel les tresoriers
 étoient. Le Begue  per quæ etiam revocati    fuerunt quicumque
 Receptores particulares  in dictis terris. Die quoque vigesima   secunda
mensis ejusdem, prædictus  Stephanus præstitit  testamentum,
  & dedit cautionem de D. libr.  scilicet Guilletum Chartier  parisiensem,
  commorantem in vico de ficu, in Parochia Sancti Pauli, &  Ioannem Chartier
   apud Stampas: quæ cautio fuit tradita in Camera Franciæ.
  Il paroît de ce que les cautions ne s’obligerent que jusques à
  500 livres, du peu de valeur du domaine d’Estampes, en ce temps-là,
  & combien tout le pays avoit été ruiné par les
desordres   qui regnoient alors dans l’Etat.
 
 | Dont    traduction en Annexe1. 
 |  
                         | Les  Orleannois se trouvans trop foibles pour resister à la puissance 
     du  Bourguignon, appuié de l’autorité du Roy, firent alliance 
     avec  l’Anglois qui leur donna 8000. hommes de secours. L’Armée 
  Roiale   fut  conduite par le Dauphin qui la commandoit en qualité 
  de Lieutenant    General devant Bourges, où étoient les Ducs 
  de Berry, &    de Bourbon. La ville fut battuë pendant plus de 
six  semaines: mais  enfin  Dieu qui se plaist à étre nommé 
  le Dieu de Paix,  benissant  le travail de ceux qui la procuroient, disposa 
  le cœur du Dauphin  à  la donner, & celuy des Princes à 
  la recevoir. Elle fut  concluë  à Auxerre, presque aux mêmes 
  conditions que celles  de l’accord  de Bisestre [sic].  Comme cette  paix fut suivie de nouveaux
desordres commis par les Bourguignons,  elle fut  encore suivie d’un quatriéme
accord fait à Pontoise,  aprés  lequel le Duc de Bourgogne,
& ses Partisans se retirerent  d’eux-mêmes  de la Cour, en Flandre:
& sur l’avis que le Roy reçût  qu’ils  armoient, pour les
prevenir, il s’y en alla avec une tres-puissante   armée;  mais tout
ce grand appareil se termina encore à un  traité qui  fut moienné
par le Duc de Brabant, & la Comtesse  de Hainault,  frere, & sœur
du Duc de Bourgogne. Cet accord ne fut pas  de plus longue  durée
que les autres, le Bourguignon couvoit toûjours  dans son  cœur le
dessein de rentrer au Gouvernement auprés du Roy.  La perte  de la
bataille d’Azincourt*, en laquelle  le Duc d’Alençon
 avoit été tué & les Ducs  d’Orleans  & de Bourbon
 faits prisonniers par les Anglois, luy en ouvrit  le chemin.  Il s’avança
 jusques à Lagny où il sejourna  prés  de trois mois,
&  puis il se retira en son pays sans avoir  emporté  aucun fruit
de sou  voiage que le surnom de Jean de Lagny. 
 | * 25. Oct. 1423. 
 
  Bataille d’Azincourt (miniature du XVe siècle) |  
                         | Mais  dés l’année 1417. il retourna encore en France avec 
   une  tres-puissante  armée. Les Villes de Montdidier, de Senlis, 
 de  Beauvais,  de Meulant,  & de Pontoise luy ouvrirent les portes, &
   il s’avança  jusques  au village de Montrougc prés de Paris:
   d’où, après [p.178]       
     quelque    sejour, il alla prendre   Mont-l’Hery, Palaiseau,
Marcoussis, & Dourdan,    pendant que d’autres Capitaines  de son Armée
prirent Roche-Fort,   Galardon, Chartres, Aulneau, Estampes, & d’autres
petites Villes, &   Châteaux, dont la prise peut beaucoup incommoder
celle de Paris, dans   laquelle le Dauphin Charles, qui portoit la qualité
de Regent en France,  s’étoit renfermé. De sorte qu’Estampes
sur pris deux fois en  six ans par le Duc de Bourgogne;   une fois pour le
Roy, contre les Orleannois,  & la seconde contre le Roy  & le Dauphin
Charles (le Dauphin Loüis  Gendre du Bourguignon étant  mort
dés le 18. de Decembre 1415.)  Lors que la ville fut prise cette 
seconde fois elle appartenoit à  la Maison de Bourgogne; par ce que
 le Duc de Berry étoit mort sans  enfant mâle, le 15. jour d’Avril
 1415. en son Hôtel de Neesle  à Paris, âgé de
76.  ans. Ce Prince étoit d’un  naturel doux & paisible, genereux, 
&  liberal, qui aimoit les joyaux  & les Edifices: Il en fit bâtir 
 plusieurs pendant sa vie, entre  autres la sainte Chapelle du Château 
 de Bourges, en laquelle son corps  repose. 
 |   Jean sans Peur
 
 |  
                         | Il  portoit en ses armes de France ancien, qui est, d’azur semé
  de   fleurs   de Lys d’or, à la bordure engrelée de gueules;
   outre   le Duché  de Berry, il possedoit les Comtez d’Auvergne,
de   Poitiers,   de Montpensier,  de Bologne & ceux d’Estampes, &
de Gien,  desquels   il avoit disposé,  avec les Châtellenies
de Dourdan,  & d’Aubigny,  en faveur de son  frere le Duc Bourgogne [sic],   & de ses enfans mâles
   seulement, comme j’ay déja dit. La   fille aisnée de ce
Duc    luy succeda en tous ses meubles, qui étoient   de grand prix;
&    la puisnée eut les Comtez d’Auvergne, & de  Monpensier
par octroy,    & grace du Roy, qui defera à la priere  que le
deffunt luy en   avoit faite. Une Cronique manuscrite a remarqué 
que le Comté   d’Auvergne ne luy fut donné que pendant sa vie. |   Gisant de Jean de Berry
 |  
                         | Il  se presente icy une difficulté sur laquelle les historiens
 sont    partagez,   auquel des trois enfans de Philippe le Hardy Duc de
Bourgogne,      écheurent   les Seigneuries que le Duc de Berry luy
avoit données.      Les sieurs  de sainte Marthe disent qu’elles écheurent
à   Philippe   son troisiéme  fils, Comte de Nevers & de
Retel. D’autres   disent,   aprés Coquille,  en son histoire du Nivernois
que Philippe   le Hardy   fit l’an 1401. un partage  de tous ses biens, par
lequel il ordonna   que toutes  ces Seigneuries appartiendroient  à
son fils aisné    Jean, dont  le fils Philippe II. surnommé
 le Bon, les donna avec   le Comte d’Auxerre,  l’an 1434. à Jean surnommé
 de Nevers,   son Cousin germain, & fils de son Oncle Philippe, troisiéme  [p.179] fils de Philippe le Hardy, 
    Comte de Nevers & de Rethel, pour s’acquitter de cinq mille livres 
 de   rente qu’il luy avoit promis en recompense des droits que Jean pretendoit 
    sur les Duchez de Brabant, Lothier, Limbourg, & autres Seigneuries, 
  qu’il  luy retenoit injustement, & à Charles son frere aîné; 
    pour sa part des meubles délaissez par Bonne d’Artois sa Mere, 
morte    l’an 1425. & pour s’acquitter de vingt mille saluts d’or qu’il 
avoit   reçûs de la premiere femme du même Prince Jean 
de Bourgogne.   Je suis volontiers  cette seconde opinion, non seulement à
cause de  l’autorité de Coquille, à qui l’on peut ajoûter
beaucoup   de foy, la qualité  qu’il a euë de Procureur Fiscal
au Duché   de Nevers, luy ayant  donné la commodité de
voir les Chartes,   & les titres de  cette maison: Mais aussi pour ce
qu’il est dit dans  un article du Traité  arrêté à 
Arras le 21. jour  de Septembre 1435. entre le  Roy Charles VII. & Philippe 
le Bon, que ces Seigneuries soient renduës  à Jean de Nevers, 
qui luy appartenoient    par le transport que Monsieur  de Bourgogne luy en
avoir fait, aprés   qu’il auroit apparu par titre  valable de la donation
du Duc de Berry: Voicy   l’article. 
 |   Assassinat de Jean sans Peur en 1419
 
 |  
                                   | Que le Châtel,
ville, Comté, & Seigneurie       de Gien-sur-Loire , qu’on dit
avoir été donnée,  &     transportée avec
la Comté d’Estampes, & la Seigneurie     de  Dourdan, par feu
Monsieur le Duc de Berry, à feu Monseigneur   le  Duc  Iean, Pere
de mondit Seigneur de Bourgogne, seront de la part du   Roy  mises,  &
baillées reaument, & de fait, és mains   de  nous Duc 
de Bourbon, & d’Auvergne, tantôt ledit accord paßé,
      pour tenir, & gouverner l’espace d’un an en suivant, & jusques
   à   ce que durant ledit an, Iean de Bourgogne, Comte d’Estampes,
 ou  mondit Seigneur   pour luy, auront montré, ou fait montrer au
Roy,  ou son Conseil les   Lettres dudit don, fait à mondit Seigneur
de Bourgogne, par feu mondit   Seigneur de Berry: lesquelles veuës,
si elles sont trouvées suffisantes,  & valables, sommairement, 
& de plein, & sans quelconques procés,  Nous Duc de Bourbonnois, 
  & d’Auvergne, serons tenus de bailler, &  délivrer audit 
Comte  d’Estampes, ou à mondit Seigneur de Bourgogne  pour luy, lesdites 
 ville, & Châtel de Gien-sur-Loire, ville, &  Châtel d’Estampes,
  & Seigneurie de Dourdan, comme à luy appartenans, par le moien,
  & transport que luy a fait mondit Seigneur de Bourgogne, sans ce que
 de la part du Roy l’on puisse, ne doive alleguer aucune prescription, ou
laps depuis le deceds de feu Mondit Seigneur de Berry: & außi nonobstant
  quelconques conditions ou oppositions d’autres, qui voudront pretendre
droit   en ladite Comté de Gien, &c. ausquels si aucuns en y a
sera reservé     leur droit, pour le poursuivir [sic], 
 [p.180] par droit de justice,     quand bon luy semblera, 
contre  ledit Comte d’Estampes. |   Jean de Nevers (vers 1473)
 
 |  
                        |  Cet article fut sans doute executé
 de  part,    & d’autre, & Jean de Nevers, ou de Bourgogne, car c’est 
 le même,    fut remis en la possession du Compté   [sic]             d’Estampes, à 
  l’exclusion de Richard   de Bretagne, qui pretendoit y avoir droit comme 
 je diray cy-aprés.   Ils assisterent tous deux au Traité d’Arras, 
  en qualité de  Deputez, Richard pour le Roy, & Jean pour le Duc
  de Bourgogne. Car l’on  voit encore à present des Sentences, rendu
  par le Prevôt d’Estampes,  au mois de Janvier de l’année 1436.
  scelées du sceau des armes    de Jean de Nevers, quoy que ce fut
du  vivant de Richard, qui ne deceda qu’en   1438. Jean de Bourgogne de Nevers
  portoit en ses armes écartelé    au premier & 4. de France
  moderne, au 2. & 3. parti, au premier  de  Bourgogne ancien, qui est
 bandé d’or & d’azur de six pieces.  Au  2. de Limbourg, qui est
 d’argent au lion de gueules, couronné,  &  armé d’or,
lampassé   d’azur à la queuë passée    en sautoir:
chargé  sur le tout de Flandres moderne, qui est d’or  au  lion de
sable, armé,   & lampassé de gueules: & au  sceau 
que l’on mettoit aux actes  de justice à Estampes, ces armes  étoient
 soûtenuës   de celles de la ville, avec cette inscription  au
tour  du contre scel.             Sceau  de la Prevôté d’Estampes. 
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         A gauche, blason de Jean de Nevers, vers 1473. A droite,
  autre    blason, mis en ligne par Wikipédia. Aucun
 ne concorde    exactement avec la description de Fleureau (B.G.)
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