|                                                  
                                                       
      
                      
                        
                          | Les Antiquitez de la Ville
                                            et du Duché d’Estampes Paris, 
     Coignard,           1683
 Premiere 
       Partie,         Chapitre         XXXIV,                           
                pp.    156-170.
 | Des choses        memorables arrivées    Estampes 
    vers le regne de Philippe VI,   Jean    II, Charles V et Charles VI |  
                                                 
                                                       
      
 Pour Mme S.
 PREMIÈRE           PARTIE, 
          CHAPITRE                     XXXIV.
 Des     choses    memorables      arrivées
          à            Estampes vers le   regne de
 
                                                                        
           
                                                                        
               
                                                                        
                   | Philippe VI. Roy de France dit de Valois m. 1350.
 Iean surnommé le Bon 1364.
 Charles V. dit le Sage 1380.
 Charles VI.
 
 | 
 | Louis d’Evreux II. du Nom & II. Comte d’Estampes.
 Loüis Duc d’Anjou, & ses enfans.
 Iean Duc de Berry.
 Comtes d’Estampes.
 
 |  Depuis 1352. jusqu’à 1399.
 
                                                
                                                       
        
                      
                                    
                                  | CHarles  d’Evreux  Premier Comte d’Estampes 
  eut pour successeur     Loüis   son fils  aisné,  qui se qualifioit 
  aussi Comte de  Gien,   & Seigneur   de Lunel,  prés  de Bancaire 
  en Languedoc:  Jean son  puisné  eut en partage  d’autres Seigneuries; 
  Il fut communement   surnommé  d’Estampes, ces deux Princes étoient 
  en bas âge   quand leur Pere  mourut: & leur Mere, jeune Princesse, 
  épousa  peu aprés Charles de Valois II. du Nom, Comte d’Alençon, 
  sous  l’autorité duquel leurs biens  furent regis & administrez: 
  au moins voit-on plusieurs Contracts, Sentences,  & autres actes de 
justice,  faits en ce temps-là, à Estampes,  sous le nom de 
Charles Comte  d’Alençon, d’Estampes & de Gien. 
 Nos Historiens mettent Loüis
  Comte    d’Estampes     au nombre des Chevaliers  que le Roy Jean fit à
  Rheims,    pour rendre     plus magnifique la ceremonie  de son Sacre,
&   de la  Reine  Jeanne, fille    de Guillaume, Comte d’Auvergne,  &
de  Bologne,  veuve  de Philippe Comte    d’Artois, qui étoit fils
 d’Eude  IV. Duc,  &  Comte Palatin de  Bourgogne;  laquelle il avoit
épousée     un  mois aprés   la mort du Roy  Philippe
de Valois son Pere. Ce   Comte   Loüis fut des   premiers à 
cheval, lors que le Roy commanda     à  tous ses Vassaux   de se joindre
à luy sans delay, &     sans excuse,  en Anjou, ou en  Touraine,
où il alloit en diligence     pour s’opposer  au Prince de Galles,
 qui venoit de Bourdeaux à  la   teste de 2000. hommes d’Armes,  &
de 6000. Archers Anglois, ou Gascons,     pour ravager l’Auvergne, le Berry,
 la Sologne, & la Touraine, comme    il avoit fait l’année precedente,
  en Languedoc: & pour passer    de là en Normandie, au secours
du  Duc de Lanclastre [sic],
 qui  y étoit décendu [sic] avec
  des troupes de gens de guerre, pour favoriser les broüilleries de
Charles    d’Evreux, dit le Mauvais, & le Flambeau fatal de [p.157]             la France, Gendre
  du Roy,  qui avoit esté      luy-même le prendre dans le Château
  de Roüen, comme   il   dînoit avec le Dauphin, que Sa Majesté
  avoit envoyé      à dessein en ce lieu-là, sous pretexte
 de prendre possession      du Duché de Normandie, & d’y recevoir
les  hommages des Vassaux.
 
 |   Sacre de Jean II le Bon
 (Grandes Chroniques de
France)
 
 |  
                               | L’Histoire de ce temps-là 
met ce jeune Prince  Louis, au nombre       de   ceux, à qui le Prince 
de Galles donna à  souper, à       la  même table où 
étoit le Roy, le 19  de Septembre     1356.    jour auquel le Roy fut
pris prisonnier, aprés avoir  perdu     la bataille    prés 
de la ville de Poictiers: mais elle ne le met     pas au nombre   des prisonniers 
qui furent menez avec le Roy, au Printemps     suivant, de Bourdeaux    en 
Angleterre: ce qui donne lieu de croire qu’il     fut mis en liberté 
   pendant le sejour que l’on fit à Bourdeaux,     soit qu’il traitât, 
   & payât  luy-même sa rançon,      ou qu’il fut du
nombre    de ceux que  l’on relâcha, & renvoya    en  France, sur
la parole du   Roy, de satisfaire pour eux, à ceux    dont  ils étoient
 prisonniers.    Jean d’Estampes frere de Louis,   & Pierre d’Alençon
 frere uterin   de tous les deux, sont mis  au nombre des ôtages qui
furent  données [sic] aux  Anglois, pour
seureté du payement    qui leur  avoir été  promis par
le traité arrêté    au  bourg de Bretigny, prés
de la ville de Chartres, le huitiéme      de May 1360. Jean demeura
plusieurs années en Angleterre, &   peu   aprés son retour
en France, il entreprit le voyage de Rome où     il mourut, comme
il est marqué dans le testament du Comte Louis,   du  Samedy 28. jour
de Juin 1399. par lequel il legue au Comte du Perche  son Nepveu, un Saphir
appellé le Saphir d’Evreux, qu’il avoir eu aprés    la mort
de son frere decedé à Rome. 
 Entre les Seigneurs qui furent 
  tuez   à     la  bataille de Poictiers, Gaultier de Brienne, Duc 
d’Athenes,    Connêtable       de France, y-mourut. Il étoit 
fils de Gaultier    de Brienne, Duc   d’Athenes,    Comte de Brienne, & 
de Liche, qui mourut    en Sicile environ   l’an 1312.    Il avoit épousé
  Jeanne d’Eu,   fille de Raoul,  Comte d’Eu, &   de Guines, aussi Connêtable
  de   France, qui avoit  été   decapité le Jeudy 18
jour   de  Novembre 1352. dans  l’Hôtel de  Nesle, où le Prevôt
   de  Paris l’avoit arrêté  le Mardy precedent, aprés
 avoir    été convaincu par sa  propre confession, que le Traité
     qu’il avoit fait avec l’Anglois dont  il étoit prisonnier de
guerre,      de luy payer pour sa rançon la somme de quatre-vingt
mil écus:      ou au defaut de payement de le mettre en possession
du Comté de   Guines,   étoit une trahison, & une invention
pour introduire  dans ses terres  l’ennemy de la France. Le Dauphin Charles
qui gouvernoit  le Royaume pendant  la détention [p.158]              du  Roy son Pere, en
qualité de Regent,  trouva bon que Louis épousât  la
veuve du Duc d’Athenes: &  en faveur de ce mariage, qui fut fait au 
mois de janvier 1357. il continua  à Louis la jouïssance, sa
vie  durant, des terres, & Seigneuries  de Solives, & de Beaufort
en Champagne,  que le Roy son Pere avoit données    à Gaultier,
en faveur de son mariage avec Jeanne, par lettres du  troisiéme  d’Octobre
1351.
 
 |   Armes de Pierre II et de Louis 
 II
 (Armorial de Gueldre)
 
 |  
                             | Le Comte Louis voyant qu’il
n’avoit point d’enfans   de Jeanne, fit   diverses      dispositions de ses
biens, dont je parleray dans  la suite  de cette Histoire,      particulierement 
en traitant de l’Eglise de Nôtre     Dame; &  cependant,    je remarqueray
icy, qu’il donna entre-vifs à     Louis  de France II.    fils du
Roy, & Duc d’Anjou, & de Touraine,   &    Comte du Maine,   
& à Madame Marie de Bretagne sa femme,   fille  puisnée 
 de  Charles de Châtillon, Comte de Blois, &   de Jeanne de Bretagne, 
   pour eux, leurs enfans, & successeurs, les  Comtez, Châteaux, 
Villes,    & Châtellenies d’Estampes, de  Gien-sur-Loire, de Dourdan, 
&    d’Aubigny-sur-Nierre, avec deux mille  livres tournois de rente, 
faisant  partie  de quatre mille livres tournois  de rente, qu’il avoit accoûtumé 
     de prendre, & avoir  sur le tresor du Roy à Paris, de la succession
     de son Pere, avec  tous les droits, Noblesses, fiefs, arriere-fiefs, 
hommages,      justices,  Seigneuries, maisons, terres, eaux, bois, prez, 
fours, moulins,       étangs,  pescheries, cens, rentes, revenus, peages,
travers &     autres  choses  qui en dépendoient. Les motifs de
cette donation  furent   la proximité  du sang qui étoit entre
les donataires,  &  le donateur; la reconnoissance  des biens, &
de l’honneur, que  le Duc d’Anjou luy avoit toûjours  fait, au temps
de leur jeunesse,  qu’ils avoient été nourris,  & élevez
  ensemble;  & depuis en le conservant aux bonnes graces du Roy, des
Ducs   de Berry,  & de Bourgogne    frere du Roy, & des autres Princes
du   sang Roial:  & pour reconnoître    l’honneur,  qu’il avoit
fait,  & l’affection  qu’il avoit témoignée    au Comte
d’Alençon,   &  du Perche, son frere, & à  toute  
 leur famille, en voulant,   & consentant au mariage de Louis  son fils
 aîné,  avec  la  fille aînée du même  Comte
du Perche. |   Louis Ier d’Anjou et Jean de 
Berry
 (Armorial de Gueldre)
 |  
                             | Le Donateur mit dans cette
donation des conditions   tres-dignes de   remarque:      il reserva l’usufruit,
sa vie durant seulement,  des Comtez,   Châteaux,      Villes &
Châtellenies qu’il avoit donnez,    le doüaire  de   la Comtesse
d’Estampes sa femme, & cent livres   tournois   de rente,   à
  prendre sur les choses par luy cedées,   ou sur quelques   unes
d’icelles,   pour donner, & transporter, ou en   ordonner [p.159]             tant  en sa  vie, qu’en
son testament,       en faveur de l’Eglise, ou d’autres tels qu’il   luy
plairoit. Il stipula     qu’en  cas qu’il fût pris prisonnier par les
 ennemis du Roiaume,   ou  que pour  les dommages causez par les ennemis
du même  Roiaume,   il vint à  être tellement opprimé,
qu’il n’eût   pas dequoy entretenir  son Etat: en ces deux cas, &
non autrement, il   pourroit vendre des heritages  qu’il avoit cedez, &
que le Duc d’Anjou   retiendroit, s’il vouloit pour  le prix qu’ils auroient
été   vendus. Il reserva   aussi expressement,  que s’il plaisoit
à Dieu   de luy donner des enfans   legitimes, cette  donation seroit
nulle, &   ils pourroient luy succeder   en tous ses biens,  comme si
elle n’avoit point  été faite. 
 |   Louis Ier d’Anjou
 (sur une de ses monnaies)
 
 |  
                             | La premiere de ses conditions
fait voir la prudence   du Donateur,  en   se   conservant dequoy s’entretenir
sa vie durant, selon sa   qualité      &  sa haute naissance.
La deuxiéme marque sa justice,   &     l’amitié  qu’il
avoit pour sa femme, en assurant ce qui luy étoit      deû.
 La troisiéme fait voir sa pieté envers Dieu.   La  quatriéme
 fait connoître sa fidelité, & son  affection  au service
du  Roy, & de l’Estat. La cinquiéme, sa prévoyance:  Et
la sixiéme,  témoigne l’inclination naturelle que chacun  a
de se perpetuer par de legitimes successeurs, dans lesquels on espere toûjours
   vivre. Les lettres de cette donation sont de la teneur suivante. 
 A tous ceux qui ces presentes 
   Lettres     verront,    Audoüin Chauberon, Docteur en Loix, Conseiller 
   du Roy  nôtre   Sire,   & garde de la Prevôté de 
 Paris,  salut;  sçavoir   faisons   que pardevant Iean Fourcaut, &
 Iean  de Cointrecourt,  Clers  Notaires dudit  seigneur en son Châtelet 
 de  Paris, fut present  Noble,  & tres-Puissant  Prince Monseigneur Louis,
   Comte d’Estampes, lequel sans  force, contrainte,  fraude, deception, seduction,
   ou malengin aucun; mais  de sa pure, & liberale volonté, si
comme   il disoit, reconnut, & confessa, que, il considerant la grand 
prochaineté   de lignage, en quoy il est conjoint à tres-excellent 
Prince, Monseigneur   Louis fils de Roy de France, Duc d’Anjou, & de Touraine,
& Comte  du Maine; & à tres-noble Princesse Madame la Duchesse
sa femme,  & à    Loys, & Charles leurs enfans: & les
grands biens,  graces, faveurs,    & plaisirs, que par ledit Monsieur
le Duc d’Anjou  luy ont été    faits, ou temps de la jeunesse
d’eux deux, &  depuis, ou quel temps ledit   Monsieur le Comte d’Estampes
fut nourry avec  luy; tant en le tenir en l’amour,   & grace du Roy nôtre
Seigneur,  de bonne mémoire, dernier   trépaßé, 
 que Dieu absoille: de nos Seigneurs les Ducs   de Berry & de Bourgogne 
 ses freres: comme à luy aider, & à  garder, & soûtenir 
  son honneur & Etat: & outre que ledit  Monsieur le Duc a retenu 
pour  être,  [p.160]             & 
 demeurer  avec luy toutes fois  qu’il luy plaira,  à cent sols parisis 
 par chacun  jour qu’il sera devers luy, ou devers  Madame la Duchesse sa 
femme: &  à deux mille livres tournois de  pension par chacun an,
doresnavant  sa vie durant, soit ou non devers ledit  Monsieur le Duc ou
devers Madame  la Duchesse dessusdite, esperant avecques  ce és biens,
& honneurs  dudit Monsieur le Duc, pour le temps à  venir. Considerant
außi  le grand honneur, & signe de grand amour,  & affection
que ledit Monsieur le Duc a montrée   de fait à  luy, &
à Monsieur le Comte d’Alencon, &  du Perche son frere,  &
à tout leur lignage, en voulant, &  consentant le mariage  dudit
Loys son aîfé fils, & de l’aînée   fille  dudit
Monsieur le Comte d’Alençon sa niepce: & pour la  grand’amour, 
 singuliere affection que ledit Monsieur le Comte d’Estampes  a eu de tout 
temps, & encores a pour les causes dessus dites, & pour  plusieurs 
autres qui a ce le mouvent, ausdits Monsieur Duc, Madame la Duchesse  sa femme,
& à leurs enfant dessusdits. Voulant, & desirant  de tout
son cœur faire außi de sa partie, service, & plaisir audit  Monsieur
le Duc, afin qu’il ne soit ou puisse être repris, ou accusé 
de vice d’ingratitude, avoir donné, ceddé, quitté, délaissé,
   & transporté: Et en la presence desdits Notaires donna, cedda,
   quitta, transporta, & délaissa à toûjours perpetuellement,
   par don perpetuel irrevocable fait entre vifs ausdits Monsieur le Duc
d’Anjou,    & Madame la Duchesse, pour eux, leurs hoirs successeurs,
& ayans   cause d’eux, ou temps venir, les Comtez, Châteaux, Villes,
& Chastellenies    d’Estampes, & de Gien-sur-Loire, les Châteaux,
Villes, & Chastellenies   de Dourdan, & d’Aubigny-sur-Nierre, &
deux mille livres tournois  de rente, demourant de quatre mille liures tournois
de rente qu’il prenait,  devoit, & avoit accoûtumé de prendre,
& avoir sur le  tresor du Roy nôtre Seigneur à Paris, de
la succeßion  de son Pere; desquelles quatre mille livres tournois
de rente le dit Monsieur   le Comte d’Estampes, auparavant la datte des presentes,
a vendu, & transporté    les autres deux mille livres audit Monsieur
le Duc, si comme par les lettres    sur ce faites il peut apparoir, avec
tous les droits, noblesses, fiefs,  rierefiefs,  hommages, justices, Seigneuries,
manoirs, maisons, terres, eaux,  bois, prez,  fours, moulins, étangs,
pescheries, cens, rentes, revenus,  peages,  travers, redevances, & autres
quelconques appartenances, &  dépendances   desdites Comtez, Châteaux,
 villes, & Châtellenies,  telles   quelles soient, & convient
 qu’elles soient dites, appellées,  &  nommées, & qu’en
 icelles luy competent, & doivent appartenir,    comment que ce soit,
sauf reservé, & retenu par ledit Monsieur    le Comte, l’usufruit
desdits Comtez, Châteaux, Villes, & Châtellenies,    sa vie
durant, tant seulement: Et le doüaire de Madame la [p.161] Comtesse  d’Estampes sa
 femme, & cent livres tournois de rente à prendre  par ledit Monsieur
 le Comte sur les terres dessus dites, ou aucunes d’icelles,  pour donner,
 & transporter, ou en ordonner tant en sa vie, comme en son  testament
 ou derniere volonté, à personne d’Eglise, ou à  autres
 qu’elles [sic] qu’il 
 luy plaira. Et außi que s’il avenoit que  ledit Monsieur le Comtes 
      fût pris, & emprisonné en sa personne  par aucuns ennemis
      du Roiaume: Ou que par adverse fortune d’ennemis du Roiaume,  ledit
Monsieur      le Comte fut tellement opprimé, qu’il n’eût dequoy
 bonnement      tenir son Etat; iceluy Monsieur le Comte, en ces deux cas,
&  non  autrement,    pourroit  vendre de ses heritages dessusdits: ausquels
achetter   ledit Monsieur   le Duc seroit premierement avant tous autres
appellé,   & receu,   &  les aurait avant tous autres, pour
le prix qu’ils seroient  vendus:   Et en  outre reservé, & retenu,
que s’il plaisoit Dieu que, ou   temps à venir il eut aucuns hoirs
naturels, & legitimes,   procrées    de sou corps, cette presente
donation seroit de nulle  valeur: mais pouroient    iceux hoirs succeder
à luy, comme si ladite  donation n’eût  oucques   été 
faite. Lesquelles retenuës  ledit Monsieur  le Duc volt,  & consenty, 
& les ot agreables, &  promit par la  foy de son corps,  pour cet 
corporellement baillée és mains  desdits Notaires, & jura 
aux SS. Evangiles de Dieu tenir fermes, &  stables, & non venir encontre 
en aucune maniere ou temps à venir.  Lesquelles choses dessusdites, 
& chacune d’icelles ainsi comme dessus  sont devisées,  ledit Monsieur
le Comte d’Estampes pour luy ses hoirs,  & ayans cause de luy, promit
par la foy de son corps, pour ce corporellement  baillé  és 
mains desdits Notaires, & jura aux Ss. Evangiles  de Dieu par  luy touchez, 
avoir, & tenir fermes, & agreables à  toûjours,  sans 
jamais dire, faire, ne venir, ou faire venir par luy,  ne par autres,  ne 
par paroles, ne par effet, occultement, ou en appert, à l’encontre, 
 en quelque maniere que ce soit, sur peine de deux cens mille francs d’or 
à encourir par ses hoirs, ou ceux, ou celuy d’iceux qui y mettroient 
empéchement, à appliquer audit Monsieur le Duc, & madite 
Dame la Duchesse, leurs hoirs, successeurs, ou ayans cause d’eux. Et pour 
tenir, entretenir, & accomplir toutes les choses dessusdites,  & chacunes
d’icelles sans enfraindre: ledit Monsieur le Comte obligea  luy, & sesdits
hoirs, les Comtez, Châteaux, Châtellenies,   Villes & terres
cy-dessus déclarées, & tous ses autres   biens, & les
biens de ses hoirs, meubles, non meubles presens, &  avenir, quels, ou
qu’ils soient, qu’il soûmit pour ce du tout à  la Iurisdiction,
cohertion, & contrainte de nous, & de nos successeurs   Prevôts
de Paris, & de toutes autres Iustices, Iurisdictions, où  ils
seront, & pourront estre trouvées. Renonçant en ce fait
expressement ledit Monsieur le Comte, par cesdits serment & foy, à
toutes manieres [p.162] d’exceptions 
  de mal, de  fraude, d’erreur, lesion, circonvention, & decevance en 
fait,  à  convention de lieu, & de juge, à condition sans 
cause,  ou de non  juste, & induë cause, à la dispensation, 
&  absolution  de son Prelat, & de tous autres sur le fait de son 
serment,  à toutes lettres données, & â donner, empêtrée,
        ou à empêtrer de quelconque Prelat, ou Prince quels
qu’ils       soient,  ou sous quelconque forme de paroles qu’elles soient,
à    ce   qu’il puisse  dire, alleguer, maintenir, & proposer
au temps à       venir autre chose  par luy avoir été
passée &    accordée,    qui écrit, ou non écrit,
que passé,    ou accordé,    à tous uz, Coûtumes,
Ordonnances, constitutions,    & établissement    des lieux, villes,
& de païs quels    qu’ils soient, au benefice de   Croix prinse,
ou à prendre, tant  pour  le saint voyage d’Outre-mer,    qu’autrement,
à toutes cautelles,   cavillations, & allegations   quelconques,
à tout droit écrit,   & non écrit, canon,   civil,
& generalement à tout  ce qui tant de fait comme de droit   de
uz, de coûtumes, & autrement   aidier, & valoir, pouroit à
 dire, ou proposer contre la teneur   de ces lettres, & contre aucunes
des  choses dessusdites, mêmement   au droit disant renonciation generale
non valoir, en laquelle generale renonciation,     ledit Monsieur le Comte
voulut,  & accorda que tous expeciaux, renoncemens     y sont entendus,
tout ainsi  comme se de mot à mot elles y estoient     specifiées,
nommées  & declarées, nonobstant les   uz, & coûtumes
à ce contraires. A laquelle donation, à    toutes les choses
dessus nommées  faire, ordonner, & deviser,   fut  presente tres-excellente,
& tres-puissante  Princesse Madame Blanche,   fille de Roy deFrance,
& de Navare, Duchesse  d’Orleans, & heritiere   pour partie dudit
Monsieur le Comte, laquelle de son bon gré, &   de sa bonne volonté,
sans force, contrainte,  ou malengin, si comme   elle disoit, voult, consenty,
agrea, ratifia, emologa,    & approuva  la donation, transport, &
autres choses dessus dites,    entant comme  à luy puet de present,
& pouroit au temps à     venir touchier,  & appartenir aprés
la mort dudit Monsieur le   Comte,  se il advenoit   qu’il allât de
vie à trépassement   devant  elle, &   promit par la foy
de son corps, pour ce corporellement    baillée  és mains desdits
Notaires, non venir, ou faire venir    encontre: En témoin de ce nous
à la relation d’iceux Notaires,    avons mis à ces Lettres
doubles le scel de ladite Prevôté    de Paris. Ce fut fait,
& passé le Samedy neuviéme jour   du mois de Novembre,
l’an de grace mil trois cens quatre-vingt-un: Et au  bas, signé de
Coitrecourt, & Fourquant.
 
 Les renonciations que l’on 
mettoit     dans   les   contracts   au temps que cette donation a été 
   faite sont  remarquables.
 
 |   Armes de Pierre II d’Alençon
 et de Louis II d’Évreux
 (Armorial de Gueldre)
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
   Louis Ier d’Anjou et Jean de 
Berry
 (Armorial de Gueldre)
 
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                             | Pour  donner plus de lumiere à
ce que je  vais dire du Comté        d’Estampes,  & des autres
Seigneuries données   à  Louis      Duc d’Anjou: [p.163] il   faut     de necessité
 sortir de  France, entrer en Italie, &  remarquer      que Charles Comte
d’Anjou,  frere  du Roy saint Louis qui succeda au Comté     de Provence
du chef  de Beatrix,  fille de Raimond Beranger, Comte de Provence,    &
de Focalquier,  sa femme,  receut du Pape Urbain IV, l’investiture    des
 deux Siciles, (c’est  à  dire de l’lsle de Sicile, & du  Roiaume
  de Naples) comme d’un  fief de 1’Eglise Romaine, que l’Empereur  Henry
VI.  & Federic II. Son fils avoient usurpé    sur les Princes
 Normans,  qui l’avoient conquise sur les Grecs, & les   Sarrazins, lors
 que le Roy  Robert regnoit en France. 
 
  A Charles I. succeda Charles II.
dit   le  Boiteux       son fils, qui fut surpris par les Arragonnois devant
Naples,    & perdit       la Sicile. Il laissa neuf fils, & quatre
filles.  Charles  dit Martel,      l’aîné, fut couronné
Roy de  Hongrie le 8. de Septembre      de l’an 1290. aprés la mort
de son  Oncle maternel  Ladislas IV.  fils    d’Estienne V. Rois de Hongrie.
Le III.  fut Robert, Duc de Calabre,  lequel    aprés la mort du Roy 
son pere,  fut par jugement du Pape Boniface  VIII.  preferé en la 
succession   du Roiaume de Naples à Charles  II.  du nom Roy de Hongrie, 
dit vulgairement   Charobert, fils de Charles Martel,  contre le droit de 
representation, suivant    lequel ce Roiaume devoit appartenir  au Neveu, 
& non pas à l’Oncle.    Robert eut un fils nommé  Charles 
Duc de Calabre, qui mourant avant     luy, laissa seulement trois filles, 
 l’aînée desquelles nommée     Jeanne, fut instituée 
 heritiere du Roiaume de Naples, par Robert    son Ayeul Paternel, à 
la  charge qu’elle épouseroit, comme   elle fit, André frere 
de Louis,  Roy de Hongrie, son Cousin, qu’elle   fit étrangler   à 
Aversa,  le 5. de Septembre de l’an .1345.   peu de temps aprés   l’avoir
épousé.  Aprés quoy  elle épousa Louis,   Prince
de Tarente, aussi son Cousin; durant la  vie duquel Louis Roy de Hongrie,
  frere d’André, la persecuta vivement,   & passa en Italie avec
de  puissantes troupes pour venger la mort de  son frere: mais le Pape Clement
  VI. moyenna un accord entr’eux, par lequel  elle demeura Reine de Naples,
 à condition qu’aprés sa mort,  le Roiaume de Naples reviendroit
 à ce Roy de Hongrie, ou aux siens.  Louis de Tarente étant
decedé,   Jeanne épousa en troisiéme    nopces Jacques
d’Arragon, &  prit enfin pour quatriéme  Mary,   Othon de Brunsvick,
de la tres illustre   maison de Saxe. | 
             
            
               
                 
                   |   
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                   | 
 | Ladislas d’Opole 
(1352-1401), vassal  de Louis de Hongrie titré duc de Naples
 (Armorial de Gueldre)
 
 |  |  
                             |  Cependant le Pape Gregoire XI.
 étant     mort   au mois de Mars de l’an    1378. Urbain VI. fut
canoniquement  éleu     en   sa place. Ce souverain    Pontife irrité
contre  Jeanne, de  ce   qu’elle   avoit donné  [p.164] retraite      en sa ville
de Fondy, aux Cardinaux qui  avoient éleu contre luy    Clement  VII.
appella en Italie Charles,  arriere-fils  de Jean VIII. fils    de Charles
 le Boiteux, Roy de Hongrie  aprés la mort de son Cousin    Louis;
pour  prendre possession    du Roiaume de Naples, dont il luy donna    l’investiture
le jour de la Pentecôte     de l’an 1381. Jeanne  déja    vieille,
& qui n’avoit point d’enfans    de pas un de ses Maris,  se   voyant
fort pressée, se laissa persuader    par Clement Antipape,  d’adopter
pour son fils, Louis de France, Duc d’Anjou,    Oncle du Roy de  France Charles
VI. Clement envoya Louis l’investiture du   Roiaume, avec les Lettres de
l’adoption de Jeanne, données à   Naples dans le Château
de Lœuf, l’an 1380. le 29. jour de Juin. Charles   de Duraz,  qui avoit été
 investi par Urbain, comme j’ay dit,   faisoit  cependant une rude guerre
contre  Othon, qu’il vainquit, & prit   prisonnier,  aussi bien que la
Reine Jeanne,  laquelle il fit pendre, &   étrangler  à
Aversa, le 22. jour  de May 1382. au méme   lieu, ou trente  sept
ans aupauravant [sic]             elle
       avoit  fait étrangler  son premier  Mary. 
 Louis de France accepta de 
bon   cœur   l’honneur      que  la Reine Jeanne luy avoit fait de l’adopter 
pour   son  fils, l’instituant      par  ce moien heritier universel en tous 
ses   biens,  & l’investiture    que  Clement  luy avoit envoyée, 
&   pensa  à ce qui luy  étoit    necessaire  pour une si
grande   entreprise.  Il avoit deux puissans ennemis   à combattre 
 en Italie,   le Pape Urbain,   & les Hongrois: &  pour cet effet 
deux choses luy  étoient  necessaires, une puissante armée, 
& de l’argent   pour l’entretenir,  & fournir aux frais qu’il faut 
faire en de semblables   rencontres. Il assembla plus de trente mille hommes 
& le plus d’argent   qu’il pût; & si nous en croions du Haillan 
en son Histoire de France,  il se saisit des tresors du Roy son frere qui 
étoit mort, que l’on  faisoit monter à dix huit cens mille écus
d’or, somme tres-considerable  pour le temps; & fit tout ce qu’il pût
pour en tirer d’autres, par de nouvelles impositions sur le peuple.
 
 |                                          
                                                                                  
            
               
                 
                   |   
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                   | Jeanne de Naples (1326-1382) (De mulieribus claris de
Boccace,       BNF,  ms fr. 599, f° 93 v)
 
 | Armes de Clément  VII   sur  son livre de prières 
 |  |  
                             | Ce  Duc avoit en son armée
huit à   neuf mille hommes  d’armes,      deux mille Arbalestiers,
& grand nombre d’Archers   à  cheval.     Il passa par Avignon
pour saluër Clement, auteur, &  promoteur   de  l’entreprise, qui
le couronna Roy de Naples l’an 1382. Il  traversa  heureusement    les Alpes,
la Lombardie, la Toscane, la Romagne,  & arriva  en la Poüille,
   qu’il reduisit facilement en son obeïssance,   avec  la Calabre:
mais   les ennemis croians qu’il valoit mieux temporiser,   afin de faire
refroidir   l’humeur martiale des François, aprés   qu’ils
 les eurent affaiblis   par des escarmouches, & de legers combats,  
ils commencerent  [p.165]             à 
   se    mettre en campagne avec des troupes fraîches, &  plus fortes
    en  nombre: tellement que les François furent contraints  de se
 renfermer      dans la Ville de Barlette. Le Duc Loüis ne pouvant souffrir
  d’étre      bloqué dans cette Ville par ses Ennemis, &
 voiant  d’ailleurs     que ses forces diminüoient de jour en jour,
sortit  en campagne,  &    leur donna la bataille, en laquelle son armée
 fut défaite,     & lui blessé de cinq coups se sauva dans
 la Ville d’où    il étoit sorty, & y mourut le 20. de
Septembre  1384. plûtost      de regret d’avoir esté vaincu
que de ses blessures. Il portoit  en   ses armes de Jerusalem, qui est d’argent
à une croix potencée     d’or accompagné de 4. croisettes
de même, party de Sicile,   qui  est semé de France au lambel
de gueules, tiercé de Valois   qui  est aussi semé de France
à la bordure de gueules. 
 Marie de Bretagne femme de 
Louis    fut   extremement      affligée de la mort de son mary, elle 
eut  recours    en cette rencontre      au Roy, & aux Ducs de Berry, &
 de Bourgogne,    Oncles de ses enfans;      pour avoir leur avis de ce qu’elle
 devoit faire.    Ils resolurent qu’il  étoit    expedient de poursuivre
 l’entreprise    du deffunt. Le Roy qui  s’en alloit  à  Avignon visiter
 le Pape Clement,   y conduisit l’aîné    des deux  enfans,
aussi  nommé  Loüis,  que Clement couronna Roy    de Sicile 
& de  Naples comme  son Pere: Charles,  le second portoit la    qualité
 de Prince de Tarante, & de Duc  de Calabre: & dépuis    il
 a porté  celle de Comte du Meine.  Le Roy avant son depart pour 
 aller à Avignon,  crea solemnellement  Chevaliers, ces deux jeunes
 Princes, dans l’Eglise de  Saint Denis, le premier  jour de May 1389. Revenons
 maintenant à Estampes,  d’où nous  nous sommes un peu éloignez.
 
 |   Louis Ier d’Anjou et Jean de 
Berry
 (Armorial de Gueldre)
 |  
                           | Le Duc Louis d’Anjou, premier du Nom, 
ne fut  pas  plûtôt     arrivé    en son nouveau Roiaume, 
que faisant  reflexion  sur l’état     de ses   affaires, il jugea 
bien qu’il ne pouvoit  attendre  de secours   d’hommes   &  d’argent que
de la France: en quoy il  avoit besoin  de   la faveur  de Jean  Duc de Berry,
son frere, qui sçavoit  d’ailleurs    étre   mal content de
ce que les Estats ne luy avoient point  donné    de part  au gouvernement
du Roiaume, ny de la personne du Roy.  Pour l’attacher     donc   à
ses interests, il luy donna la Principauté  de Tarente.      Jean
voiant son frere mort, fit instance à ses Neveux  de luy delivrer 
    la Principauté que son frere luy avoit donnée.   Mais le
 Conseil     de ces jeunes Princes n’en fut pas d’avis; jugeant que s’ils 
 mettoient   cette  Principauté hors de leurs mains, ses habitans
pourroient  prendre   de  là, occasion de se rebeller contre eux;
outre [p.166] qu’il leur étoit
 impossible de la donner leur Oncle en son entier par ce que depuis la donation
    faite, leur Pere en avoit aliené quelque partie. Ils luy offrirent
    donc pour le recompenser, de luy transportcr tout le droit qu’ils pouvoient
    avoir & pretendre sur les Comtez d’Estampes, de Gien sur Loire, de
 Dourdan,       & d’Aubigny, & la transaction passée entre
le Duc de Berry,      & ses Neveux, fut agrée, & confirmée
 par le Roy  Charles    VI. par Lettres patentes en son camp en Flandre,
l’an  1385. le  premier jour   d’Aoust, de la teneur suivante. 
 |   Louis II d’Anjou enfant
 
 |  
                             | Charles par la
grace de Dieu Roy de France,  à     tous   ceux qui ces presentes
lettres verront, salut. Comme de la  partie     de   nôtre  tres-chere
& amée Tante, la Reine de Hierusalem,       &  de Sicile,
 Duchesse d’Anjou, tant en son nom, comme tuteresse,    ayant   le bail,
 garde,  & administration & gouvernement, de nos    chers, &
bien  amez Cousins, Loüis Roy & Duc desdits Roiaume,    &  Duché,
 & Charles, enfans d’elle, & de nostre tres-cher    &  amé
Oncle, que Dieu absolve, Louïs, jadis Roy, &  Duc  d’iceux  Roiaumes,
& Duché: & außi de la partie  d’iceux  enfans,  nous
ait esté exposé que nostre tres-cher  & tres  amé
 Oncle, Iean Duc de Berry & d’Auvergne, Comte de Poitou; disant  que
feu  le Roy nostredit Oncle, luy donna en son vivant,  la Principauté
 de  Tarante, avec toutes ses appartenances quelconques,  pour certaines
considerations,      si comme plus plain est contenu en certaines  Lettres
d’iceluy feu nôtre      Oncle, audit nôtre Oncle de Berry,  sur
ce faites: a requis icelle    nôtre  Tante, au nom que dessus, & 
aussi nostredit Cousin le Roy,   que ladite  Principauté, ainsi que 
donnée luy avait esté,   luy voulsist  bailler & delivrer.
 Mais pour ce que sans le tres-grand   & importable  dommage desdits
exposans,  consideré que pour le  bail, & delivrance  de ladite
Principauté,  le fait de la conqueste  du Roiaume de Sicile  en seroit,
ou pouroit étre  empesché, & seroit occasion  de mettre
en rebellion envers lesdits  exposans, les Nobles, & non nobles,  &
habitans de la dite Principauté,   & plusieurs autres parties
 du Roiaume de Sicile. Et aussi pour ce qui     n’est pas à present
bien   possible, que ladite Principauté    leur pût étre
baillée,   & delivrée, pour   ce que nostre dit cher Oncle
en aliena plusieurs   droits, rentes, &  revenus en son vivant; il a
esté parlé   qu’en lieu & recompensation     desdites Principautez
& appartenances   lesdits exposans bailleront,    en  tant comme chacun
d’eux puet touchier, audit  nôtre Oncle le Duc   de  Berry, pour luy
ses hoirs, successeurs & aians cause de luy, au cas  toutefois  qu’il
nous plairoit, & que nous voudrions interposer,  &  mettre nostre
 authorité & decret sur, en maniere que la  chose  se puist licitement
 faire, & sans prejudice d’aucun, [p.167]
             tout &     tel droit comme ils ont, ou
leur  appartient, & compete en la succession     des Comtez, Villes,
& Châteaux:  & generalement tout le droit    qui leur appartient
en la succession des  Comtez d’Estampes: & de Gien    sur Loire, és
Villes, Châteaux,  & Châtellenies  de   Dourdan, & d’Aubigny,
& en toutes les  appartenances & appendances      d’icelles Comtez,
Villes, & Châteaux;  & generalement tout     le droit qui leur
appartient en la succession de nôtre Cousin le  Comte    d’Estampes:
& outre aussi le droit qu’ils ont, & peuvent  avoir,  &  leur
appartient, & compete és Villes, terre, Chastel  &  Baronnie
 de Lunel, avec tous ses droits, Seigneuries, Noblesses, appendances,  &
 appartenances quelconques lesquels le feu nostredit Oncle, le Roy,  avant
qu’il eut prins le titre de Roy, acquit en son vivant, dudit Comte d’Estampes.
Savoir faisons que nous considerans les choses dessus dites, eu sur ce Conseil
& advis de nôtre tres-cher & amé oncle le Duc de Bourgogne:
 & informez deuëment tant par luy, que par plusieurs autres de nôtre
 Sang, & lignage, & de nostredit Coujin, que ladite compensation
est,  & fera grand profit & utilité   evidens nostredite Tante,
&  nosdits Cousins ses enfans, à icelle   nôtre Tante la
Reyne, au  nom que dessus, & audit nôtre cousin,  le Roy son fils,
avons donné  & octroié, donnons & octroions  par ces
presentes, de grace  especial, si mestier est, & de certaine Science,
 autorité Roiale,  a pleine puissance congié,  licence, &
autorité de bailler,  ceder, & transporter leur  droit qu’ils
ont, & leur appartient, &  compete és Comtez,  Villes, terres,
& Seigneuries dessusdites avec  leurs appartenances quelconques,  audit
nôtre Oncle le Duc de Berry,  tant en la forme & maniere que dessus
est dit, nonobstant la minorité    d’âge, & quelconque  autre
defaut, qui pour ladite minorité    pourroit étre en ladite 
compensation: & sans ce que pour cause    d’iceux bail, ceßion,
  & transport, aucun preiudice soit engendré    ladite nôtre
  Tante la Royne, quant au fait du bail, garde,administration,    & gouvernement
  de sesdits enfans; Ainçois ayt iceux bail, garde,    & administration,
  & gouvernement, tout ainsi que ladite compensation    n’étoient
  point faite, nonobstant coûtumes de nôtre Roiaume,   usaiges,
  stils, observations, & autres choses quelconques à ce   contraires,
  & quant à ce nous auctorisons nôtre Tante ou   nom que
dessus,  & ledit nôtre Cousin, le Roy son fils; & dés
  maintenant,  nous, ayant agreable ladite compensation, decernons icelle
avoir   valeur,  force & vigueur, & nous plaist qu’elle fait faite
par la  maniere  que dessus, & la promettons à confermer quand
requis en  feront [lisez: serons]:
 & par ces presentes    suppleons tous de faux  [lisez:  défauts]:   
& dispensons contre tous droits, toutes coûtumes, usaiges &
    observances de pays, par lesquels où [lisez: ou] lesquelles ladite compensation
     ne devrait étre faite; & qui aucun prejudice pourroient [p.168] apporter à ladite
     nôtre Tante la Royne, bail, garde, & administration, &
gouvernement     dessus-dites, ou autrement en quelconque maniere. Si donnons
en mandement     par ces mêmes presentes à tous les Iusticiers,
& Officiers     de nôtre Roiaume, & à chacun d’eux,
si comme à  luy   appartiendra, ou leurs Lieutenans, que de nos presens
Octroy, grace,  licence,   auctorisation, suppletion, & de toutes autres
choses dessus  écrites,   ils fassent & laissent joüir, &
user paisiblement  lesdites parties,  & chacune d’icelle, en tant comme
chacune touche, ou poura toucher ou  temps advenir, sans les empécher,
ou souffrir empécher au contraire:  nonobstant les droits, coûtumes,
& autres choses dessus dites. En témoin de ce nous avons fait
mettre nôtre Seel à ces Lettres, données le premier jour
d’Aoust, en nôtre Ost, en Flandre, l’an de grace MCCCLXXXV. le quint
de nôtre regne, signé par le Roy. Present Monsieur le Duc de
Bourgogne, & plusieurs du Conseil, R. Toronde. 
 | 
   Charles VI
 (camée des années 1630)
 
 
 
 
   Ecu de Charles VI
 
 
 
 
   Sceau de Charles VI
 
 
 |  
                             | Les memoriaux de la Chambre
des Comptes au livre   E, feüillet   77.    marquent  que le Duc de
Berry fit une remise generale   au Roy son   Neveu,    de toutes  ses terres,
& Seigneuries; même des   droits   qu’il  avoit  acquis  en vertu
de cette transaction, dans les Villes  d’Estampes,     &  de Dourdan,
 en cas qu’il mourût sans enfans mâles,   à    la charge
que  Sa Majesté donneroit cent mille livres  à  Bonne   sa
fille, mariée,  l’an 1376. à Amé  VII. Comte de Savoye,
  dont elle eût Amé VIII. premier Duc de Savoye, dépuis
    êleu Pape, au Concile de Basle, le 17. de Novembre 1439. &
nommé     Felix V. & soixante mille livres  à Marie, sa
seconde fille,  qui   épousa en premieres nopces  Loüis de Châtillon,
Comte  de   Dunois: en secondes, Philippe d’Artois, Comte d’Eu: & en
troisiéme      Jean, premier du Nom, Duc de Bourbon: mais que dépuis
le Duc de   Berry   obtint du Roy, nonobstant la remise qu’il avoit faite
à sa   Majesté,   la grace de pouvoir disposer d’Estampes,
de Gien, &   de Dourdan; en suite   dequoy  il en disposa en la
maniere suivante,   au profit de Philippe  le Hardy, Duc de Bourgogne, son
frere, & de ses   enfans. 
 |   Jean de Berry
 
 |  
                            | Iean fils de Roy de France, 
Duc de Berry,  &   d’Auvergne,        Comte de Poitou: sçavoir 
faisons à tous  presens   &     à   venir, que comme nous 
aions acquis par certains,  & justes       tiltres,   les Comté, 
Chastel, Ville & Chastellenie  d’Estampes;      les Châteaux,  
Villes, & Châtellenies de Gien,  &   de  Dourdan,   ensemble 
les  appartenances, & dependances, &  aions   esté recûs  [sic] en    foy & hommage 
de   Monsieur le Roy, reservé le viaige de  nôtre      tres-cher 
Cousin,   Meßire Loüis, Comte d’Estampes. Et il soit    ainsi 
que nous n’aions   qu’un seul fils, & deux filles, qui sont mariées 
   & [p.169] nôtre 
     cher &   tres  amé frere, Philippe Duc de Bourgogne ait plusieurs 
     enfans mâles,   & femelles, & soit disposé au plaisir
      de Dieu, d’en avoir  encore d’autres: & pour la tres-parfaite amour
    que  nous avons à  nostredit frere, & à ses enfans,
tant    pour  raison naturelle, comme pour les tres grands biens, honneurs,
&    proufits,  & plaisirs que nostredit frere nous a faits toute
sa vie,   & fait chacun jour, nous voudrions plus (ou cas que nous trepaßions
   sans hoir masle procrée de nôtre  corps, en loyal mariage)
 quc  lesdites Comtez, Châteaux,  Villes, &  Châtellenies
veinssent,  & écheussent à  nostredit frere & à
ses enfans  mâles, & à leurs  successeurs mâles procrées
   en droite ligne, qu’à nos filles ne autres personnes quelconques.
  Nous, pour ces considerations  dessus dites, & autres justes &
raisonnables    qui à ce nous  meuvent, euë sur ce grande &
meure déliberation,    de nôtre  certaine science, avons donné,
cedé, &   transporté:  donnons, cedons, & transportons,
par donation irrevocable   faite entre  vifs (ou cas que nous trépaon
de ce siecle sans hoir  mâle procrée   de nôtre corps,
en loyal mariage) à  nostredit frere, à   ses enfans, &
à leurs successeurs mâles, procrées    en ligne directe
lesdits Comté, Chastel, Ville, & Châtellenie    d’Estampes,
& lesdits Châteaux, Villes, & Châtellenies    de Gien,
& de Dourdan, ensembles toutes leurs appartenances, & dependances,
  tant en justices hautes, moyennes, & basses, ressorts, & jurisdictions,
   comme fiefs, & arrierefiefs, hommes & femmes de corps, patronages,
   & collations de benefices, bois, eaux, Garennes, terres, rentes, revenus,
   profits, & emolumens quelconques, sans y rien retenir (reservé
   le viaige de nostredit Cousin) & ce  [Lisez: se (si)] au temps de nôtre
  deceds il étoit  trépassé, nous voulons que l’usufruit
  soit consolidé  avec la proprieté desdits Comtés,
Châteaux,   Villes, Châtellenies,  & appartenances au profit
de nostredit frere,  & de ses enfans mâles,  comme dit est, que
tantost aprés   nostre decret [Lisez:
déceds],   si lors  n’avions hoir mâle, procrée
de nostre corps, comme  dessus est  dit, nostredit  frere, & ses enfans
mâles puissent prendre, &  apprehender la  possession, & saisine
corporelle desdits Comtez, Châteaux,  Villes,  & Châtellenies,
& en lever, & percevoir les fruits,  profits,  & émolumens:
Et que dés     maintenant nostredit frere en puisse  entrer en foy,
& hommage, à     la charge, & par les conditions  dessus declarées.
Et ou cas   que  nostredit frere, ou ses enfans mâles  trépasseroient
en   quelque  temps que ce fust, sans hoir mâle procrée de leur
corps:  Et que d’eux ne seroient trouvez aucuns hoirs mâles descendans
d’eux,  par droite ligne, en loial mariage, lesdits Comtez, Châteaux,
Villes,  & Châtellenies, appartenances & dépendances,
retourneront  de plain droit sans difficulté, à nos filles,
ou aux descendans    d’elles en droite ligne, & à celuy ou ceux [p.170]             qu’il appartiendra
        de raison. Promettant en bonne foy, & par nosttre serment, &
   sous     l’obligation de tous nos biens avoir ferme & stable cette
presente     donation,   sans jamais venir l’encontre: Et que ce soit chose
ferme, &    estable à  toûjours, nous avons fait mettre
nostre scel à    ces Lettres. Donné à Paris le 28. jour
de Janvier MCCCLXXXVII.    Ainsi signé, par Monsieur le Duc, vous [sic] &   le Comte de Sancerre presens.
     Gontier. 
 |   Philippe le Hardi
 
 
 
 
   Premier sceau de Jean de Berry (vers 1397)
 
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                             | Ce transport n’étoit
à proprement   parler, qu’une substitution,         avec retention
d’usufruit au profit du Duc de  Berry, pendant sa vie,     en   cas qu’il
furvêcût le Comte Louis,  qui étoit déja      
fort avancé en âge. Ce Comte mangeoit   souvent à   la
  table du Duc de Berry. Il luy arriva qu’en disnant avec   luy à
  Paris,   le sixiéme jour de May 1400. la tête luy   tomba
sur   le bras   qu’il avoit ployé sur la table, ce que le Duc aiant
  apperceu   &   croyant qu’il dormît, il dit en riant,       
     Le beau Consin   s’endort,   levez-le:  Mais on trouva qu’il
étoit mort. Ce Comte,  comme   il avoir toûjours  vécu
 Chrétiennement, pour mourir de   même, s’y étoit  préparé
 en faisant son testament     environ, onze mois avant  l’accident qui luy
 arriva. Le commencement de   ce   testament qui fut receu  par Chaon, &
 Fourbour Notaires à   Paris,   le 28. Juin 1399. nous  fait voir
sa  grande pieté, &  sa ferme esperance  en la misericorde  de
Dieu.  Comme il avoit long-temps  auparavant disposé  de ses immeubles,
 il ne luy restoit que quelques  meubles, dont il pût  tester, lesquels
  il donna à ses parens  seulement pour gages de son  amitié.
 Son corps sur inhumé à  saint Denis en France,  prés
 de celuy de sa femme, dans la Chapelle  de Nôtre Dame la  Blanche,
& son cœur fut mis avec celuy de sa Mere, dans un tombeau devant  le
Grand Autel de l’Eglise des Celestins de Paris. Il portoit en ses armes 
de France ancien, au bâton componé d’argent, & de gueules.
 Et sa femme portoit d’Eu, qui est d’azur au lion d’or chargé de billettes
  de même. 
 |   Jean de Berry à table
 (Grandes Heures, mois 
de  janvier)
 
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