Les Antiquitez de la Ville
et du Duché d’Estampes
Paris, Coignard, 1683
Premiere Partie, Chapitre
XXVIII, pp. 110-121.
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Plusieurs
beaux Reglemens de Police, faits en faveur des habitans de la ville
d’Estampes, par le même Roy Louis VII
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PREMIÈRE PARTIE, CHAPITRE
XXVIII.
Plusieurs beaux Reglemens de Police,
faits en faveur
des habitans de la ville d’Estampes, par le même Roy Louis VII
LE
même Roy Louis s’étant apperceu sur la fin de son regne,
qu’il s’étoit encore glissé beaucoup d’abus par la negligence
de ses Officiers dans la même ville d’Estampes, il fit pour les
retrancher, les Reglemens contenus en la Charte suivante donnée
à Paris l’an de l’Incarnation 1179.
[p.111]
1. In nomine sanctæ, &
individuæ Trinitatis, Amen. Ego Ludovicus Francorum Rex, Providentes
animæ nostræ saluti, pravas consuetudines, quæ in diebus
nostris per negligentiam servientium nostrorum, nobis ignorantibus, Stampis
fuerant inductæ, duximus reprobandas. Itaque ad memoriam tam præsentium
quam futurorum transmittentes, statutum nostrum, præcipimus quod
quicumque voluerit, licitè emat terram, quæ dicitur Octave [sic], salvis consuetudinibus nostris, nec ob hoc emptor servus
noster efficiatur.
2. Nullus emat pisces Stampis, nec
infra Balivam ad revendendum Stampis, exceptis harengis salitis, &
mangrelis salitis.
3. Nemo emat vinum Stampis, ad revendendum
in eadem villa, nisi tempore vindemiæ.
4. Nemo ibidem ad ibi revendendum
panem emat.
5. Nemo capiatur causa Telonii extra
metas mercati manens, dum erit infra easdem metas.
6. Liceat unicuique cheminum
(chemin) nostrum ad censum habenti, ostium vel fenestram
in domo sua facere, absque licentia Præpositi.
7. Nemini liceat pretium exigere
ob miniam præstandam, salvo minagio nostro.
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Louis VII (1137-1180)
Camée des années
1630
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8. Nullatenus liceat Præposito Stampensi
à cive dationem gagiorum exigere pro duello, quod non fuerit
judicatum.
9. Homines Stampenses vineas suas
pro voluntate sua & ordinatione faciant custodiri, salva mercede
custodum: nec Domini quibus census vinearum debetur ideo aliquid exigant.
10. Nemo regratarius (Revendeur)
ad fenestram, ouvroüer, ou boutique, vendens
bonitatem Præposito dabit.
11. Nemo bonitatem debebit Præposito,
nisi mercator fuerit in foro vendere solitus , & emere.
12. Nemo pellem Præposito debebit
nisi confitum faciens.
13. Servientes nostri alii quàm
Præpositus, in foro vel extra, bonitatem ab aliquo exigere non
poterunt.
14. Ob metas figendas Præpositus
sextarium vini rubei Stampensis tantummodò accipiet: &
unusquisque servientium nostrorum, qui figendis aderit metis, denarium
unum.
15. Emptores annonæ ad extra
portandum bonitatem non dabunt, sed Teloneum tantùm præbebunt.
16. Præpositus neque harengos,
neque alios pisces marinos, seu fluviales exigere parerit à
venditoribus; sed emat sicut alii.
17. Pro duello victo non exigemus
ultra sex libras; neque Præpositus [p.112] ultra solidos
sexaginta: nec campio qui vicerit supra solidos triginta, & duos accipiet,
nisi fuerit duellum de infractura banlivæ, vel muertro, vel latrocinio,
vel raptu, vel servitute.
18. Pressoragia non nisi ad vasa
dimidii sextarii recipientur.
19. Messageicerii singuli nonnisi
duodecim denarios pro bonitate dabunt singulis annis.
20. Cerarii singulo uno quoque anno
pro bonitate denariata ceræ tantùm, die Iovis ante festum
Purificationis B. Mariæ dabunt.
21. Arcuum venditores singuli arcum
unum pro teloneo annuatim dabunt.
22. Nemo pro fructu vendito qui non
valet plusquam quatuor [sic] denarios
teloneum solvet.
23. Nullius negantis debitum res
capientur, donec ratiocinatum fuerit, ubi debebit.
24. Pro logiis singulis relevandis
habebit Vigerius sextarium unum vini rubei Stampensis tantùm.
25. Neque Præpositus Iudæorum,
neque alius, hominem venientem ad forum, vel res suas, vel redeuntem
de foro, vel in foro existentem, in die mercati, pro debito capiet.
26. Venditor lini, vel canabi non
dabit pro teloneo pecuniam, sed tantummodò pugnatam rationabilem.
27. Pro debito recognito, & gagiato
Præpositus districtum non exiget, nisi per legitimas noctes.
28. Vidua pro relevatione stalli
plusquam viginti, & quinque solidos non dabit.
29. Campio conductitius non recipiatur.
Quæ omnia ut perpetuam obtineant firmitatem sigilli nostri autoritate,
& regii nominis caractere inferiùs annotato præsentem
chartam fecimus communiri. Actum Parisius, an. ab Incarn. M. CLXXIX. astantibus
in Palatio nostro quorum nomina supposita sunt, & signa. Comitis
Theobaudi Dapiferi nostri. Guidonis Buticularii. Reginaudi Camerarii.
Radulphi Constabularii. Data vacante Cancellaria.
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Traduction en Annexe 1
Sceau de Louis VII
Traduction en Annexe 1
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Pour l’intelligence du premier article de ces Reglemens, il faut remarquer
que la servitude n’a pas cessé dans les Gaules; aussi-tôt
que les François s’en sont rendus les maîtres sur les Romains:
& que nos anciens Rois y ont long-temps entretenu les mêmes
coûtumes, & droits, que les Romains y avoient introduit [sic] pour leur avantage, entr’autres
l’usage des serfs fonciers, & adscriptices, en laissant jouïr
ceux qu’ils subjuguerent des terres qu’ils possedoient; mais avec de
telles charges, qu’ils étoient plus à leurs [p.113] Seigneurs qu’à
eux mêmes, sans pouvoir changer de demeure: C’est pourquoy ils étoient
nommez gens de morte-main, ou bien hommes, & femmes, de corps,
& de suite. Cette sorte de servitude s’est peu à peu éteinte
dans la France par la bonté de nos Rois, qui l’ont changée
en une autre beaucoup plus douce, & plus supportable; sçavoir
en des redevances de bled, ou d’argent, ou de quelques courvées
raisonnables, qu’ils ont imposées sur leurs terres.
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Le Roy donc au premier article de son Ordonnance affranchit de servitude
un certain territoire appellé Octave, qui est à present
inconnu, à la charge seulement, que les possesseurs luy payeront
les droits Seigneuriaux accoûtumez.
Aux 2. 3. & 4. articles, il défend
la regraterie sur le pain, sur le vin, & sur le poisson frais, &
la permet seulement sur les harangs, & mâcreaux salez.
Au 5. il declare qu’un habitant demeurant
hors de l’enceinte du marché, n’y pourra être pris au corps
pour n’avoir payé le placeage.
Il faut observer icy que le mot,
Teloneum, qui est souvent repeté dans cette
Charte, est un nom general qui signifie diverses especes de droits,
comme de peage, barrage, & autres que l’on avoit coûtume de
payer en ce temps-là; & qui sont maintenant abolis, ou compris
sous d’autres noms: mais il est aussi quelquefois pris specialement pour
le droit de Tonlieu; c’est à dire placeage, & est payé
par les vendeurs ou achetteurs de marchandises, pour le lieu ou la place
qu’ils occupent le jour de foire, ou de marché, pour exposer leur
marchandise en vente.
Au 6. Sa Majesté accorde à
celuy qui tiendra son droit de voirie à ferme, la faculté
de faire une porte, ou un ouvroüer (c’est une boutique,) à
sa maison sans être obligé d’en obtenir la permission
du Prevost.
Le 7. ordonne qu’on ne payera au
marché que le droit de minage, sans rien payer, pour l’usage
de la mine.
Le 9. accorde aux habitans d’Estampes
la liberté de faire garder leurs vignes, en payant seulement
aux Messiers un salaire convenable, sans être obligez de payer
pour cela aucune chose aux Seigneurs censiers.
Les 10. 11. 13. & 15. ordonnent
que le seul Prevôt entre les Officiers du Roy, aura droit d’exiger
des marchands l’abonage; que ceux-là seulement seront tenus de
luy payer [Lisez: de le luy payer],
qui auront accoûtumé [p.114]
de vendre, & d’achetter au marché;
& non point ceux qui vendront en détail leurs boutiques,
ny ceux qui achetteront des grains pour les transporter ailleurs, qui
payeront seulement le barage [sic].
Le 12. Enjoint aux Gonfiseurs [Lisez: Confiseurs] de peaux d’en payer une au Prevôt
pour son droit.
Le 14. Regle le droit du Prevôt,
pour avoir étalonné les mesures à un septier de
vin rouge du crû d’Estampes: & celuy des autres Officiers
qui l’auront assisté en cette fonction, un denier.
Le 16. Défend au même
Prevôt d’exiger des Marchands aucun poisson d’eau douce, ou
salée; & luy enjoint, s’il en veut, d’en achetter, comme
les autres.
Le 18. Regle le droit de pressurage
à un demy septier de vin: il n’est pas dit de quelle quantité
on le doit payer; aujourd’huy on paye le pressurage à la Jâlée.
Le 19. Ordonne que chaque Megissier
payera tous les ans pour son abonnage douze deniers.
Le 20. Regle la redevance de chaque
Cierger par an dix livres de cire, qu’il étoit obligé
de fournir le Jeudy avant la Feste de la Purification de la Sainte Vierge.
Le 21. Celle des vendeurs d’arcs,
à un arc chacun, par an.
Le 20.
[Lisez 22.] Exempte de placeage celuy qui
vend des fruits jusques à la valeur de quatre deniers.
Le 23. Défend de saisir les
biens de celuy qui dénie une dette, avant qu’elle ait été
liquidée.
Le 24. Donne au Voyer un septier
de vin rouge, du crû d’Estampes, pour son droit de chaque loge
qu’on dressera.
Le 25. Défend au Prevôt
des Juifs, qui avoient un Juge particulier, & à quelqu’autre
Officier que ce soit de saisir au corps les jours de marché,
ceux qui y viennent pour vendre, ou achetter, soit en venant, en y séjournant
ou en s’en retournant: ny les choses qu’ils y amennent, ou qu’ils en
emportent. Cet article est aussi de la concession du Roy Louis le Gros,
& est encore presentemcnt en vigueur, & on le fait observer en
faveur du public, non pas en faveur du debiteur.
Le 26, Article décharge ceux
qui vendent du lin, ou du chanvre au marché, de payer de l’argent
pour le placeage: & les taxe à une poignée raisonnable
de l’un ou de l’autre.
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Sceau de Louis VII
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Le 27. Défend au Prevôt de proceder par saisie de corps
pour une dette reconnuë, & pour seureté de laquelle le
debiteur a donné des gages; si ce n’est qu’aprés luy avoir
donné un terme suffisant [p.115]
il ait demeuré trop long-temps à
paier. Cet article a été en quelque façon confirmé,
& éclairci par un article semblable couché dans le testament
que le Roy Philippe Auguste, fils de nôtre Roy Louis, fit à
son départ pour la Palestine en ces termes.
Nous défendons außi
à nos Prevosts, & Baillifs de proceder par saisie de corps
ny de biens contre personne tandis qu’il aura caution de poursuivre
son droit en nôtre Cour; si ce n’est pour homicide, meurtre, volerie,
& trahison.
La maniere d’assigner les delais de justice marquée en cét
article, est selon l’usage de la Loy Salique, où on les compte
par les nuits, & non pas par les jours; au titre 42. des serfs
attaints & convaincus de larcin; & au titre 47. de contrainte,
en cas de trouble, & de nouvelleté dans l’an, & autres.
Il est à croire que les Anciens Gaulois avoient pris cette façon
de compter des Druides, qui l’avoient retenu des Hebreux, dont ils étoient
décendus, comme disent plusieurs Historiens. Et Aimoine Liv.
1. chap. 7. de son histoire*, raporte que
les Gaulois usoient de cette façon de compter le temps par le
nombre des nuits; à cause que les Druides leur avoient persuadé,
qu’ils étoient issus du Dieu des tenebres.
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* Galli se omnes ab Dite Patre progenitos se dicunt; idque
à Druidibus proditum dicunt ob hanc causam spatia omnia temporis
non numero dierum, sed noctium finiunt. Aimon lib. 1.
Traduction en Annexe
2
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Le 28. permet à une veuve de relever boutique, sans qu’elle puisse
étre obligée à paier plus de vingt cinq sols.
On pratique aujourd’huy le contraire de cét article, & les
Veuves peuvent tenir boutique, aprés la mort de leurs marys, sans
paier aucune chose.
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Les 8. 17. & 19. [Lisez: 29.] articles
reglent l’usage du Duël, & défendent au Prevost de
contraindre aucun habitant de donner le gage de bataille, qu’aprés
qu’il aura été determiné, qu’il y a un legitime
sujet de combattre. De recevoir au combat un Champion mercenaire, &
gagé ou loüé pour combattre; & d’exiger du vaincu
pour son droit plus de soixante sols, six livres pour le Roy, & trente
deux sols pour le Champion victorieux; si ce n’est que le Duel eût
été entrepris pour cause d’infraction de banlieüe,
de meurtre, de larcin, de rapt, ou de servitude. C’étoit anciennement
la coûtume de nos François de decider leurs differends par
des combats particuliers, que l’on appelle Duels; de sorte que lors qu’il
étoit question de soûtenir une verité que l’on avoir
avancée, contre celuy qui la dénioit; ou bien de se purger
d’un crime, dont on étoit accusé, le Juge ordinaire faisoit
entrer en Champ clos les deux Champions, chacun esperant de faire paroistre
la [p.116] justice
de sa cause par la bonne issuë du combat, en sorte que celuy qui
étoit vaincu, étoit reputé avoir eu mauvaise cause,
comme si Dieu n’eût voulu octroier la victoire qu’à celuy
du costé duquel étoit le bon droit. Voicy à peu prés
ce qui s’observoit en France selon la remarque de Pasquier en ses recherches
de France*.
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*
Liv. 4.
cap. 1.
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Quiconque entreprenoit d’accuser un autre d’un crime digne de mort,
il falloit qu’en méme temps il offrit de verifier son accusation
par armes de personne à personne. L’accusé étoit
obligé de comparoître personnellement devant le juge, au
jour, & au lieu qui leur avoir été assigné. L’à [sic], aprés avoir oüy
la plainte de l’accusateur, il denioit le fait: & sur cette denegation
les gages de bataille étoient jettez de part & d’autre devant
le Juge. (Le gage c’étoit un gand ou autre chose semblable.)
Le Juge levoit celuy du deffendeur ou accusé le premier; &
aprés il levoit aussi celuy du demandeur ou accusateur: &
dés l’heure on mettoit les deux Champions en prison, ou bien on
les mettoit à la garde de quelques honnestes gens, qui étoit [sic] obligez de les representer
au jour du combat vifs ou morts: & s’il leur arrivoit quelque mal ils
en étoient punis, s’il se trouvoit qu’il y eût de leur faute,
& portoient pareille peine à celle que le combatant auroit souffert,
s’il eût été vaincu; qui étoit ordinairement
de mort ou d’infamie: sans que pour cela on laissast de proclamer à
son de trompe, & cry public que celuy qui s’estoit absenté,
lequel, faute de comparoître, étoit declaré faux
denonciateur: ou atteint & convaincu des cas qu’on luy imposoit.
Le Seigneur haut Justicier fournissoit les armes propres aux Champions,
lesquels se presentoient devant le Juge, le jour du Combat, armez à
la legere, & les cheveux coupez en rond au dessus des oreilles. Ils
revoioient leurs demandes & leurs défences, & y ajoûtoient
ou diminuoicnt selon qu’ils avoient plus ou moins dit: puis ils entroient
en Champ clos, dans lequel étoient quatre Chevaliers qu’ils avoient
choisis pour le garder; le reste du peuple demeuroit au tour des barrieres.
On faisoit une défence à haute voix de la part du Seigneur
que personne n’eût à nuire à pas un des Champions
par quelque parole ou action, ou mesme par quelque signe. Ils s’agenoüilloient
tous deux s’entre-tenans par la main puis chacun d’eux juroit qu’il avoit
bon droit, ensuite on leur demandoit leur nom, & s’ils croioient en
Dieu le Pere, le Fils & le Saint Esprit: & aprés qu’ils
avoient chacun répondu qu’Ouy. Le deffendeur ou l’accusé
disoit, écoute homme que je tiens, le nommant par son nom, Dieu
m’ayde, je n’ay [p.117] point
commis le crime dont tu m’accuse [sic].
Le demandeur ou l’accusateur lui repondoit, le nommant aussi par son
nom, qu’il avoir menti: puis ils juroient de ne point user sur soy d’aucunes
sorcelleries. Cela fait on donnoit à tous deux les armes: Ils
se separoient, les Maréchaux de Camp se mettoient entre eux deux,
pendant qu’ils faisoient leurs prieres, lesquelles finies, ils se retiroient
aux coings du Champ; & alors on crioit de la part du Seigneur qui donnoit
le champ, laissez-les aller, à cette parole ils commençoient
leur combat. Le vaincu étoit ignominieusement traîné
hors du Champ, & pendu à un gibet, ou brûlé selon
l’énormité du crime: & en cela l’accusateur & l’accusé
subissoient une méme Loy; toutefois avec cette difference, que si
l’accusé n’étoit pas vaincu avant que les étoilles
parussent au Ciel, il étoit reputé victorieux. Voila à
peu prés comme on en usoit anciennement en France, en matiere de
crimes, dont on peut juger des autres matieres.
Il y avoit aussi des coûtumes
locales, comme en Normandie, qui permettoient de parler de paix; &
méme de la faire, par la permission de la Justice, en tout état
du combat, avant qu’il fust finy. Et à Lorry au contraire, ceux
qui avoient une fois donné le gage de bataille, encore qu’ils s’accordassent
du consentement du Juge, avant que d’avoir nommé des Maréchaux
de Camp, ils ne laissoient pas d’étre obligez de paier chacun
deux sols six deniers d’amende. Le Roy donc retrancha par les articles
que j’ay rapportez, l’avidité du Prevost, qui le portoit à
contraindre les habitans d’Estampes à donner le gage de bataille,
pour toutes sortes de sujets indifferemment, & de tirer des vaincus
de grosses amendes: & défendit d’admetre un Champion à
gages, encore qu’il l’eût autrefois permis, comme nous l’apprenons
d’une Epistre du Comte de Nevers écrite à l’Abbé Sugger
(c’est la 124. entre celle [sic] de
cet Abbé) qu’il prie de se trouver à Estampes, la veille de
la Chaire de S. Pierre, où, ce jour-là Geoffroy de Doury, &
un de ses Gentils-hommes, devoient combatre pour luy: à cause qu’il
est juste que les seuls coûpables commettent au sort des armes leur
justification. Et aussi afin que les moins prudens ou ceux qui se laissent
facilement emporter à faire injure aux autres, ne fussent pas comme
invitez par cette liberté de pouvoir substituer en leur place, pour
combatre, un plus habile qu’eux à manier les armes.
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Suger (vitrail de Saint-Denis)
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Mais cette sorte de police a été ostée par les
Roys successeurs de Louis. Et l’Eglise l’avoit long-temps auparavant
deffendu au Concile tenu à Valence en Dauphiné l’an 855.
sous le Roy Lothaire, [p.118] comme
n’étant qu’un moien propre à tenter Dieu: De méme
que la preuve, ou la maniere de se justifier par le fer chaud, par l’eau
chaude, ou froide, ou par quelques autres moiens. Dans la suite du temps
le Roy Philippe le Bel permit 1’usage du Duel avec certaines modifications
de ce qui s’étoit fait auparavant, & en regla les ceremonies,
& la façon de combatre, par son ordonnance de l’an 1305. &
quoy que dépuis ce temps-là plusieurs Rois ayent travaillé
à abolir des combats si funestes à l’Estat, & si dangereux
pour les familles. Neanmoins nous pouvons dire que cette gloire étoit
reservée à nôtre invincible Monarque Loüis le
Grand qui en a défendu absolumcnt l’usage par de si saintes loix,
& des peines si infamantes, qu’elles ont enfin tiré les armes
de la main de ceux qui y étoient les plus portez.
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C’est le Roy Loüis VII. qui donna aux Chanoines Reguliers de
saint Augustin de l’Abbaye de saint Victor de Paris, par titre de l’an
1147. les trente muids de bled, mesure d’Estampes qu’ils reçoivent
tous les ans du domaine, pour faire cesser les plaintes que ces Chanoines
luy faisoient souvent, que le moulin, que le Roy son Pere leur avoit
donné à Estampes en fondant leur Abbaye, comme il est
dit dans la Charte de cette fondation de l’an 1113. que le Lecteur curieux
pourra voir dans le livre des Antiquités de Paris, par du Breuil* , ne leur rendoit pas tant de bled qu’ils devoient en retirer.
Et afin qu’ils pussent étre plus facilement paiez de ces trente
muids de bled, Sa Majesté leur accorda qu’ils missent un Garde
dans les deux moulins qui luy appartenoient, assis, l’un au dessus, &
l’autre au dessous du Pont de Louëtte, proche la porte de saint Jean,
qui commençast dés le jour de saint Remy à reserver
pour eux la moulte de ces moulins, jusques à ce qu’ils eussent
receu leurs trente muids de bled. Saint Loüis arriere fils de Loüis
VII. ajoûta par titre donné à Estampes l’an 1256.
Le Samedy aprés la feste de saint Nicolas en Decembre, que si la
quantité de bled qu’on retireroit chaque année de ces deux
moulins, ne montoit pas à ces trente muids, ce qui y manqueroit
seroit suppléé de son bled provenant d’ailleurs. C’est en
vertu de ces titres que les Comtes, & les Ducs d’Estampes ont été
dans la suite des temps condamnez à continuer sur leur domaine à
cette Abbaye cette rente de 30. muids de bled; donc pour faciliter le payement
le Bailly d’Estampes ordonna l’an 1580. qu’elle seroit dorenavant payée
par égale portion, aux termes du Roy, qui sont Nôtre Dame de
la Chandeleur, l’Ascension & la Tous-saints. Voicy ces deux titres. [p.119]
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*
Pag. 404.
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Ludovicus Dei gratia Francorum Rex, & Dux Aquitanorum,
omnibus sanctæ Eccesiæ fidelibus, tam posteris, quam præsentibus
in perpetuum. Iam ad multorum notitiam reipsa extante, & attestante
pervenit, quod illustris memoriæ Pater meus, Ludovicus Dei gratia
Rex Francorum, Abbatiam Canonicorum sancti Victoris ob remedium animæ
suæ, & prædecessorum suorum à fundamentis instituit.
Hic, inter alia beneficia quæ eidem Ecclesiæ contulit, etiam
unum ex molendinis regiis, quæ sunt apud veteres Stampas, in eleemosinam
dedit. Molendina autem illa duo sunt, & juxta se ad invicem sita.
Sed quia Canonici prædicti frequenter conquerebantur quod de molendino
suo minùs habebant, quàm deberent: statuimus assensu Canonicorum,
quatenùs iidem Canonici, pro molendino suo, triginta modios frumenti,
ad Stampensem modium, per singulos annos habeant. Et ut eosdem triginta
modios liberiùs, & citiùs habete poßint. Hoc
iterum statuimus, & statuendo præcipimus, ut annis singulis
claves utriusque molendini prædicti Canonici in festo sancti Remigii,
remota omni dilatione, & occasione, & absque ullius contradictione
accipiant: & tamdiù utrumque molendinum in sua potestate teneant,
quo usque suos 30. modios frumenti plenè, & integrè habeant,
hoc tamen determinatum est, quod Serviens Canonicorum ministerialibus
nostris fidelitatem faciet, quod nihil utrà constitutos 30. modios
ad opus Canonicorum accipiet: quibus acceptis reddentur claves utriusque
molendini ministerialibus nostris, & ipsi de cætero usque ad
prædictum terminum id quod de molendinis exiet, ad nostros usus
recipient. Quod ne valeat oblivione deleri scripto commendavimus: &
ne possit à posteris infringi, sigilli nostri autoritate, &
nominis nostri caractere subterfirmavimus. Actum Parisius publicè
an. Incarn. Verbi MCXLVII. astantibus in Palatio nostro quorum nomina subtitulata
sunt & signa. Rodulphi Viromanduorum Comitis, & Dapiferi nostri.
Guillelmi Buticularii. Mathæi Camerarii. Mathæi Constabularii.
Data per manum Cadurci Cancellarii nostri.
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Traduction en Annexe 3
Sceau de Louis VII
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Ludovicus Dei gratia Francorum Rex Præposito
Stampensi qui pro tempore fuerit, sal. Cum Canonici sancti Victoris
Paris. pro molendino suo, quod habebant ex dono illustris memoriæ
Ludovici Regis proavi nostri apud veteres Stampas, habere debeant XXX.
Modios frumenti ad modium Stampensem singulis annis; mandamus tibi,
& districtè præcipimus, quatenùs prædictos
XXX. Modios frumenti, de frumento veniente ad molendinos nostros Stampenses,
si ad hoc sufficere poßit, omni dilatione seu occasione remota
persolvas eisdem, prout in charta ipsius Proavi nostri super hoc confecta,
pleniùs continetur. Quod si bladum
[p.120] ad ipsos molendinos nostros veniens, ad hoc
sufficere nequeat, tu de nostro perficias eisdem XXX. Modios memoratos.
Actum apud Stampas an. Domini MCCLVI. mense Decembri, Sabbato post festum
Beati Nicolai.
Il y a des
Annalistes qui rapportent la mort de Jean d’Estampes ou des Temps, à
cause de sa longue vie, aux premieres années du regne de nôtre
Roy Louis VII. & disent qu’il a été homme d’armes de
l’Empereur Charlemagne, & qu’il a vécu trois cent soixante &
un an; mais Paule Emile, & beaucoup d’autres ne sont pas de cette opinion,
ne pouvant croire qu’il ait vêcu tant d’années sans s’être
rendu recommandable par quelque belle action, dont la memoire auroit passé
à la posterité avec le nombre des années de sa vie,
ce qui toutefois ne nous paroît point, n’en étant point fait
mention dans l’Histoire. Quoy qu’il en soit de ce Jean d’Estampes. Il est
assuré qu’il y a eu un autre Jean d’Estampes, qui vivoit au temps
de nôtre Roy Louis VII. & de Louis VI. son Pere. Celuy-cy étoit
tres-noble, & grand Seigneur, dont Sugger fait mention, au Livre premier
de ce qu’il a fait pendant qu’il a gouverné son Abbaye*. Où il dit qu’étant venu à Guillerval, qui
est un Bourg à deux lieuës d’Estampes, il trouva cette
terre en si mauvais état, & si négligée depuis
plusieurs années, qu’il n’y avoir point de maison pour loger
l’Abbé, ny de grange pour retirer les grains, ny aucun lieu pour
la commodité du Seigneur, où il pût recevoir ses
droits; ce qui l’obligea à acheter pour son Abbaye, une metairie
de trois charuës, au sujet de laquelle il y avoit eu depuis quarante
ans de tres-grands differends, & plusieurs combats entre Jean d’Estampes,
fils de Payen, homme noble & vaillant, & un autre Gentil-homme,
nommé de Piguiere, ou de Piviers, si la lettre G, du mot Piguerensem,
doit être prise pour V, selon l’ancien usage, qui ne pûrent
jamais être d’accord ensemble qu’en demeurant tous deux privez
de cette terre. Et pour mieux assurer ce Contract il fut signé,
selon l’usage du temps, par des parens, & des amis des parties contractantes,
entr’autres par un nommé Baudouyn de Corbeil, ce qui me fait juger
que ce Jean d’Estampes, dont nous parlons, étoit mary de Madame
Eustache de Corbeil, dont il est dit dans les donations qu’elle a fait
à l’Abbaye d’Yerre en Brie, que ç’a été du
consentement de Jean d’Estampes son mary, & de Baudouyn de Corbeil
son Gendre, & d’Ameline sa femme, comme l’a remarqué le sieur
de la Barre en son Histoire de Corbeil. Et il y a sujet de croire que Jean
d’Estampes étoit frere, [p.121 (et non
127)] ou du moins proche parent de Marc Vicomte d’Estampes,
dont il est fait une honnorable mention dans la Cronique de Morigny, liv.
2., & dont je parleray dans mes Observations sur la même Cronique.
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Sceau de saint Louis
Traduction en Annexe 4
* Tom. 4. Hist. Franc. pag. 335.
Suger (vitrail de Saint-Denis)
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A) Notes sur le texte latin de ces règlements
(1) Terram, quæ
dicitur Octave.
Il est clair que Fleureau est ici gêné
par ce terme qu’il n’a pas compris, et que normalement il aurait dû
rendre, selon sa typographie, par Octavæ. Le texte signifie
littéralement «la terre
qui s’appelle les Huitièmes». J’ai
fait remarquer en 2004 dans le Cahier d’Étampes-Histoire
n°6, pages 79-81 qu’il existe dans la région plusieurs pièces
de terre appelées pareillement Les dîmes (en latin
decimæ, «les dixièmes») et que par suite il devait s’agir d’un domaine soumis
à une taxation se montant au huitième de la production
annuelle. Depuis j’ai remarqué que Guizot avait fait la même
hypothèse, en note à sa traduction de 1839: «Il y avait le territoire
d’Étampes, des terres qui portaient le nom d’octaves
et dont les possesseurs, selon les anciennes coutumes, étaient
serfs du roi. Peut-être ce nom d’octave avait-il été
donné à ces terres parce que le seigneur y prenait
la huitième gerbe». En ancien français «huitième» se disait «huime». Comme par ailleurs il existe aussi dans la région
des terres qui s’appelle «La Dîmerie», j’ai suggéré
également que la terre en question, que Fleureau déclare
de son côté un peu plus loin «à présent inconnue», pourrait bien être en réalité
le lieu-dit actuel «L’Humery», corruption
très possible de «L’Huimerie».
(2) Exceptis harengis... «Excepté
les harengs...». Le nom de ce poisson est un mot
d’origine germanique qui est passé
dans le latin dès le IIIe siècle sous la forme aringus. Niermeyer atteste les formes médiévales suivantes:
harengus, haringus, harengium et
haringium. Dans une charte étampoise de 1209
(donné par Fleureau pp. 459-460), sera utilisée une autre
dénomination: duo halecia
«deux
harengs», mot également toujours neutre
mais d’orthographe et de déclinaison variable: alec,
allec, allex (G. -ecis), allecium,
allecum, allexium (G. -ii), sur la base du latin
antique (h)al(l)ec ou (h)al(l)ex (G. -ecis), qui
désignait une préparation culinaire à base de poisson
décomposé.
(2) ...et mangrelis. «...et les maquereaux» (Fleureau écrit «mâcreaux»). L’orthographe de ce mot est particulièrement
remarquable. En latin antique «maquereau» (au sens de poisson) se disait scomber, scombri,
m (cf. espagnol escombro), racine qui n’a pas survécu
en France où elle a été supplantée par une
autre racine qui a produit maquereau. En latin médiéval
Niermeyer et Blaise attestent les formes
suivantes: macarellus, makerellus et
maquerellus. De fait le mot est attesté en français dès
le XIIe siècle sous la forme makerel.
On pourrait croire
ce mot d’origine germanique, vu sa diffusion (picard macrieu,
flamand makreel, anglais mackrell, danois makrel);
mais, selon Littré, les germanistes disent que ce mot vient du français. On
a donc imaginé une forme originelle non attestée *maclereau,
qui remonterait à la racine latine macula, «tache», du fait des zébrures qui marquent ce poisson. Pierre Guiraud (Structures étymologiques du lexique
français, Larousse, 1967), pense plutôt que ces mêmes
zébrures l’ont fait nommer d’après le vieux verbe maquer,
qui signifiait «contusionner».
D’autres (dont
le Robert de 1977) continuent à rapporter ce mot à l’ancien
picard makier, «faire», d’origine
germanique (cf. to make en anglais), via un ancien
néerlandais makelaer, «courtier», dérivé de makeln «trafiquer», lui-même dérivé de maken «faire».
Mais comment ce verbe d’un sens très
général aurait pu ce spécialiser dans des sens aussi
différents que maquereau, maquignon et maquiller?
Surtout, cela s’accommode mal avec notre forme mangrelus, dont
on s’étonne qu’elle n’ait été relevée ni par
Niermeyer ni par Blaise. Datant de 1179, et apparaissant dans une charte,
c’est-à-dire dans un texte caractérisé par une langue
qui tend autant qu’elle peut à l’archaïsme, elle indique que
la forme originelle du mot était plutôt en français mangrel
que makerel. Je suggère pour ma part, d’après cette
graphie ancienne, que le français maquereau (à rapprocher
de maquignon et de maquiller), dérive du latin mango,
mangonis, qui signifiait précisément autant «marchand d’esclaves» que «maquignon». Outre un synonyme mangonicus,
il existait aussi déjà en latin un
verbe mangonico, qui signifiait apparemment «bonimenter» ou bien même (selon le nouveau
Gaffiot) «maquiller (une marchandise)». C’est donc bien cette racine mang-
qui paraît avoir produit en français la racine mac-
ou maqu-, et il n’y a pas de raison d’aller chercher dans l’ancien
flamand makelaer, au prix d’ailleurs d’une métathèse
difficile, l’origine de Makerel, d’autant qu’on ne peut
plus expliquer après cela maquignon et maquiller.
Quant au suffixe
diminutif -erel, -ereau, même s’il est rare, on
le retrouve bien dans lapereau, «petit lapin», fait sur la même racine que lapin, et surtout
dans hobereau, «petit hobe (oiseau de proie)», ce dernier mot en étant venu à désigner
de son côté, par un processus inverse, les membres de la
petite noblesse, considérés comme de «petits oiseaux de proie». Comme makerel, hoberel
ou hobereau est un surdiminutif. Le terme simple est hobe,
qui désignait déjà un petit oiseau de proie. On lui
trouve néanmoins d’après Godefroy deux diminutifs simples,
hobel et hobet, et deux surdiminutifs, hoberet et hoberel. Pareillement tourterel
ou tourtereau (qui n’est pas un surdiminutif puisque la racine
est turtur, mais qui est ressenti comme tel par analogie),
designe un amoureux. Hotte a de même
produit hotteret et hotterel ou hotterau,
«petite hotte». Hache a donné hachet ou hachette
mais aussi hachereau, «petite hache». Haste, «broche»
ou «viande rôtie
(avec cette broche)» avait pareillement un diminutif simple, hâtelle,
et deux surdiminutifs hastelet et hasterel ou
hâtereau.
Le sens originel
du mot serait donc bien «proxénète», comme l’ont déjà suggéré bien
des auteurs, et son application à un poisson constitue un très
ancien sobriquet dont la signification exacte nous échappe, comme
il arrive souvent. D’après W. von Wartburg, il reposerait sur une légende
populaire selon laquelle le maquereau accompagne les bancs de jeunes harengs
lors de leurs migrations, comme un proxénère veille sur ses
prostituées (Évolution et structure de la langue française,
Berne, Francke, 1958, fasc. 60, p. 504). Peut-être.
Pour citer cette hypothèse,
assez nouvelle, on voudra bien le faire sous la forme suivante: Bernard
GINESTE, «et mangrelis... et les maquereaux», in Corpus Étampois,
http://www.corpusetampois.com/che-17-fleureau-b28.html#etmangrelis,
2006.
(6) Unicuique cheminum
(chemin) nostrum ad censum habenti. On notera
le soin que prend Fleureau de donner le sens d’un terme de latin médiéval,
à une époque où n’existent pas encore de dictionnaire
approprié. Littéralement: «à quiconque qui tiendra à cens notre chemin», ce que Fleureau glose par «à
celuy qui tiendra son droit de voirie à ferme» et que
Guizot traduit par «à tout homme
tenant notre droit de voirie à ferme». Cheminus est l’une des formes
du mot caminus, d’origine celtique et non attesté en
latin antique, qui se présente en latin médiéval
selon Niermeyer tantôt au masculin (caminus, cheminus,
chiminus), et tantôt au neutre (chaminum,
chemenus, chiminum). Niermeyer (sub verbo «caminus» et Blaise (sub verbis «caminus» et «cheminus») donnent deux sens: 1)
«chemin»;
2) «pouvoir de taxer le
trafic» ou «droit de péage».
(7) miniam... minagium. La mine (latin médiéval
mina) est une mesure de capacité
des grains provenant directement de l’hémine antique (en latin
classique hemina, du grec hèmina,
«demi-setier») Comme la mesure des grains sur les
marchés relevait dans l’Antiquité du contrôle de l’autorité
publique, elle est naturellement devnue au Moyen Age un privilège
seigneurial donnant lieu à la perception d’une redevance appelée
soit mine (latin mina) ou minage
(latin minagium). On trouve aussi sous
Philippe Auguste heminagium.
(9) salva mercede
cutodum. Il s’agit d’une clause juridique réservant
les droits du corps des gardes champêtres. Fleureau comprend «en
payant seulement aux Messiers un salaire convenable», et Guizot traduit «sauf la récompense des gardes». Cela ne rend pas
nettement le sens de l’original. Une franchise est accordée au vignerons,
mais il leur est précisé qu’elle ne va pas jusqu’à
leur permettre de fixer le salaire (merces) du garde champêtre
(custos), qui est apparemment un officier public assermenté, appelé
en français messier, ainsi que le porte Fleureau et
comme le confirme le Coutumier général cité
par Littré: «Messiers ou sergents messiliers sont les gardes des vignes ou
de bled et moissons». Loysel
précise dans ses Institutes coutumières
de Loysel (1607): «Les sergents messiers ou forestier sont crus de leurs prises ou
rapports jusqu’à cinq sols». Ce sont bien des officiers publics et il n’appartient
pas aux vignerons de déterminer leur rénumération,
qui est sans doute fixée par le droit coutumier.
(10) Regratarius
(Revendeur). Littré définit
le regrattier comme «celui (...) qui vend en détail,
et de seconde main, des marchandises de médiocre valeur».
Il ajoute que le mot désignait particulièrement,
autrefois et parfois, «ceux qui vendaient du sel à petite
mesure, dans les pays de gabelle.» Il définit
par ailleurs le revendeur comme «celui (...) qui achète pour
revendre».
(10) Fenestram, ouvroüer,
ou boutique. Le mot ouvroir n’est pas à rattacher (comme semble le faire ici Fleureau)
à la racine du verbe ouvrir, mais à celle d’œuvre,
ouvrage et ouvrier. Fleureau insiste en effet
dans sa paraphrase, où il rend à nouveau fenestra
par ouvroir: «un ouvroüer (c’est une boutique,)». En réalité, un ouvroir est un «lieu de travail en commun» selon Littré, qui cite les passages
suivants du Livre des métiers, du XIIe siècle:
Que nul ne voise (n’aille) ouvrer (travailler)
hors des ouvrouers (ateliers) du dit mestier (102);
Se (si) une persone barchaigne (marchande)
denrées à un marchand à son estal, ... son voisin
ne puet issir (sortir) de son ouvrouer pour mostrer (montrer)
ses denrées à celui qui veut achater à
son voisin (206). C’est donc plutôt une arrière-boutique,
et cela ne répond pas du tout au sens de fenestra. Boutique, adopté par Guizot, est
en revanche plus approprié car ce mot désigne en son sens
premier selon Littré le «lieu où un marchand vend sa marchandise», tandis que l’ouvroir
est celui où il la prépare. Il me semble cependant qu’étal
ou devanture serait plus précis
pour rendre fenestra. Niermeyer
donne: «vitrine, boutique». Vitrine est peu anachronique. Il est probable
qu’on a déjà à Étampes le type de boutique ci-contre
ultérieurement attesté par l’iconographuie. Le croquis ci-contre
est tiré d’un article de Y.-D. Papin, «Les enseignes médiévales»,
in Archeologia LXIX (1974), déjà reproduit par Jean-Pierre
Leguay, dans son ouvrage La Rue au Moyen Age, Rennes, Ouest-France,
1984, p. 128.
(10) Bonitatem. Cette expression barbare, bonitatem dare, qui revient
quatre fois (articles 10, 11, 13 et 15), signifie très littéralement:
«accorder
une bonté». Selon le Dictionnaire de Godefroy, bonté a pris au Moyen
Age plusieurs sens concrets, dont celui d’«avantage gratuitement accordé»,
et «faire bonté» y signifie «faire don». Fleureau comprend qu’il s’agit de «payer l’abonage», c’est-à-dire
de s’acquitter d’une redevance fixée par convention et correspondant
au rachat de certaines obligations, mais cette interprétation
paraît mal fondée, puisque le terme est aussi appliqué
à backchichs indûment perçus. Guizot traduit pour sa
part systématiquement bonitas par «don gratuit». On peut reprocher
à cette traduction une fausse apparence de sens technique et précis
(du fait surtout qu’il utilise l’article défini dit de notoriété:
«le don gratuit»), choix qui le conduit de plus
à écrire, d’une façon involontairement amusante: «Nul ne devra de don gratuit au Prévôt», comme si un don gratuit pouvait être obligatoire.
Cette expression désigne ici visiblement par euphémisme
une forme de racket semi-légal. Il s’agit de bakchichs exigés
par ses officiers «à son
insu», nobis
ignorantibus... sinon à son détriment. Le plus simple
est sans doute de traduire bonitas
par «cadeau».
(12) Confitum faciens. Littéralement
«celui qui fait le confit». Fleureau rend cette étrange
périphrase par «confiseurs de peaux» (altéré
par le typographe en «Gonfiseurs») et Guizot par «pelletier». Mais si c’est exactement
ce qu’avait voulu dire le roi il aurait utilisé le mot propre. Ce
qu’il veut dire au contraire est qu’on ne doit pas taxer de la même manière tous ceux qui affaire
au commerce des fourrures et du cuir mais seulement celui qui foit «le confit». Qu’est-ce à dire?
Le Dictionnaire
de Godefroy et celui de Littré donnent sous le mot confit, le sens suivant: «cuve à confire les peaux, trempées dans
un mélange d’eau, de farine et d’autres ingrédients» et surtout «eau sure dans
laquelle le chamoiseur plonge les peaux minces», le chamoiseur étant un pelletier spécialisé
dans la prépartion des peaux de chamois; il est cependant clair
que les autres pelletier utilisaient aussi un confit analogue.
Littré
ajoute cette citation des Ordonnances des rois de France (t.
II, p. 385) qui interdit, pendant une épidémie, aux «pelletiers, megissiers, teinturiers de toille, barbautiers
et autres de semblable estat, de faire leurs
confis, megis et barbaudes au dedans leurs maisons.» Le pelletier fait et vend les fourrures à l’aide
notamment du confit (préparation destinée à
amollir le cuir). Le mégissier «blanchit» les peaux, c’est-à-dire qu’il les débarrasse
de leur pelage, en utilisant le mégis (composition d’alun,
de cendre et d’eau). Le teinturier colore les étoffes. Le barbautier,
selon le dictionnaire de Godefroy, serait la même chose que le mégissier,
mais le contexte et la racine du mot (que je n’ai trouvé dans
aucun autre dictionnaire) invite plutôt à y voir une sorte
spéciale de teinturier, peut-être ceux qui teintaient le
cuir, apparemment à l’aide de la barbaude. qui devait être
une sorte de teinture.
Le commerce de la fourrure
et du cuir ne doit être taxé en nature à tous les
niveaux de la production et de la commercialisation: il le sera seulement
au moment du premier traitement du cuir, avant même l’intervention
du mégissier.
(14) Ob metas figendas. Fleureau glose
cette expression erronément: «pour avoir étalonné les mesures», et Guizot traduit comme lui «pour l’étalonnage des mesures». Cependant meta n’a jamais signifié «mesure». En latin classique ce mot signifie «cone, pyramide» puis «borne» (sens le plus usuel) et de là (au sens figuré)
«but» ou «extrémité». En latin médiéval il peut signifier de
plus «javelle»
ou «meule (de foin)». Mais comme le verbe figo
signifie en tout premier lieu «enfoncer,
planter, fixer», le
sens le plus satisfaisant de cette expression est donc très évidemment «pour l’installation de
bornes», c’est-à-dire «pour le bornage d’une parcelle». On remarque ici une certaine négligence de Guizot
qui se fie trop facilement au travail de Fleureau.
(17) Infractura banlivæ.
Fleureau, suivi par Guizot, rend cette
expression par «infraction de banlieüe», ce qui constitue plutôt une
transcription qu’une traduction, voire un non-sens en l’absence de note.
Le contexte en
effet indique qu’il s’agit: 1) soit d’une infraction extrêmement
grave, comme premier terme d’une gradation descendante; 2) ou bien d’un
terme générique introduisant la liste d’infractions qui
suit: «ou meurtre,
ou brigandage, ou enlèvement, ou asservissement». Or aucun dictionnaire n’attestait
de sens satisfaisant dans ce contexte, y compris même le Blaise,
jusqu’à la parution du Niermeyer.
Que signifie
donc le mot banlieue? Quoique son orthographe soit loin d’être
fixée (bannileuga, bannileuca, bannilega,
banniliva, banleuga,
banleuca, banlega, banliva, balleuga, balleuca, ballega, balliva), il est clairement composé des éléments
bannum («ban») et leuga
(«lieue»). Ses trois sens classiques sont:
1) «district d’un
rayon d’environ une lieue où s’exerce l’autorité d’un
châtelain»; 2)
«district d’un rayon d’environ une lieue où s’exerce l’autorité d’une ville»; 3) «amende
pour une infraction commise dans ce district». Mais aucun de ces trois sens ne satisfait au contexte.
Seul Niermeyer
en présente un quatrième qui nous met sur la piste de
la solution: 4) «enceinte immunitaire d’une
abbaye». Dans l’absolu
ce sens précis est satisfaisant. Le crime serait la violation
de l’immunité qui protège le district entourant une abbaye,
crime d’une gravité supérieure même à celle
d’un meurtre, notamment en raison de son caractère sacrilège.
Mais le contexte
suggère plutôt un cinquième et nouveau sens plus
général du mot banlieue, plus satisfaisant encore
dans le contexte et qui sous-tend d’ailleurs si l’on y réfléchit
bien tous les autres: 5) «zône de droit», dans le même sens où l’on parle de nos
jours, et de plus en plus, de «zônes
de non-droit». (Notons au passage que de nos
jours, curieusement, le mot «banlieue»
en est venu à connoter exactement le contraire de cette signification
première.)
Ainsi infractura banlivae pourrait se traduire
tout simplement par «violation de la zône de droit»
et donc «atteinte à
la sûreté publique». Les crime qui sont ensuite énumérés
seraient alors les catégories infractions constitutives d’une
telle violation: «meurtre, brigandage, enlèvement, asservissement». Citons en ce sens Jean-Jacques
Rousseau: «Il n’y a, disais-je à
madame de Boufflers, que les crimes qui portent atteinte à la sûreté
publique, dont sur le simple indice on décrète les accusés
de prise de corps, de peur qu’ils n’échappent au châtiment.»
Mais on peut
aussi interprétrer ce premier terme comme un crime spécifique
supérieur en gravité aux autres en spécifiant son
sens comme suit: «atteinte
à l’autorité publique locale»,
et on ne peut pas exclure non plus le sens spécifique de «rébellion» («opposition par voie de fait
à l’éxécution d’un acte juridique»), qui lui est inclu.
(19) Messageicerii. Ce mot est très problématique. Il est très
difficile d’y reconnnaître avec Fleureau et Guizot une forme latine
de «mégissiers», car les Dictionnaires
plus récents de Blaise et Niermeyer, qui se cantonnent aux textes
strictement médiévaux s’accordent pour présenter
une seule graphie isolée de notre mot mesgeicus
(pluriel mesgeici), précisément
tirée d’un acte de Louis VII. Pour l’ancien français, Godefroy
donne megeicel, megisseur; et le Larousse
étymologique de 1971: megucier (1205) et mégissier
(1268). Tout cela démontre que mégissier
dérive du terme de mégis, «préparation destinée
à traiter les peaux qu’on veut défaire de leur poil», lui-même dérivé
du verbe megier, lui-même provenant du latin medicare, «soigner», par spécialisation du sens.
Alors, pourquoi Fleureau
et Guizot croient-ils qu’il est ici question des mégissiers?
C’est que le mot était souvent orthographié avec un s (mesgissier)
qu’on a cru étymologique et qui est même passé en latin.
Du Cange connaît un mesgicerius qui n’est évidemment pas médiéval, mais
moderne puisqu’il n’est pas repris par Blaise ni Niermeyer.
Par ailleurs le même Du Cange donne trois variantes d’un mot d’ancien
français, qu’il glose mesgicerius,
à savoir: mesguerchier,
mesveicher et mesguichier, tous trois ignorés de Godefroy, et construit sur une
racine visiblement tout à fait différente. Sur cette base
Littré est allé jusqu’à suggérer pour étymologie
une corruption irrégulière et difficile (et disons même
abracabrante) de l’allemand weissgerben, «messager», de weiss, «blanc» et gerben, «tanner». Quoi qu’il en soit il est absolument impossible de
voir dans notre texte une forme du mot «megissiers», même en y supposant une grave corruption.
Nous proposons une solution
totalement différente. Il faut découper Messageicerii en Messagei
cerii, et supposer qu’un tilde a été omis ou mal
lu dans le deuxième mot, cer’ii, ce qui pourrait
donner Messagei cerarii, littéralement «les messagers-ciriers», ce qui désignerait,
à ce qu’on peut imaginer, des négociants en cire à
cacheter qui seraient en même temps des écrivains publics,
voire une corporation de postiers, acheminant des plis cachetés. De
nos jours, ce sont bien, en France, les bars-tabacs qui vendent des timbres!
On remarquera que précisément l’article suivant parle des ciriers
(cerarii). Dans ce deuxième cas il faut
certainement comprendre «ciergier», comme le traduit Guizot: on aurait
là deux catégories de vendeurs de cire.
(25) Præpositus Iudæorum. «Le prévôt des Juifs».
Sur la communauté juive étampoise aux XIIe et XIIIe
siècles, je me permets de renvoyer à mon article de
2003 dans le Cahier d’Étampes-Histoire n°5 (2003)
pages 14 à 24: «Rabbi Nathan ben Meshullam
et les rabbins étampois du XIIe siècle».
(26) Pugnatam
rationabilem. «une poignée raisonnable», c’est-à-dire «ce que peut contenir un poing». Ce mot de pugnata n’est
pas classique, car le latin antique n’avait en ce sens que pungus
ou pugillus, voire manipulus. Il est donné sous
cette forme régulière par Blaise, mais non pas curieusement
par Niermeyer qui ne donne que pugneria, pugnieria,
punhiera et puneira. Mais que veut dire
ici exactement rationabilis, «une poignée raisonnable»?
Un incident survenu
à Étampes au XVIIIe siècle et opposant le bourreau
à la municipalité nous le fera comprendre, grâce
au beau travail de Charles Forteau sur ce personnage, paru en 1910: «Le
dernier exécuteur des sentences criminelles du Bailliage d’Étampes
et le droit de havage». Ce droit consistait à saisir des
poignées de certaines denrées sur le marché. A
la longue, par souci d’hygiène, on avait remplacé la main
par une cuillère. En 1607 par suite d’abus, on en était
revenu à la perception à la main, mais depuis cet usage s’est
réintroduit et il en découle de nouveaux abus. Voici la
plainte de la population en 1740, résumée par Forteau, et
qui montre comment une poignée
peut cesser d’être raisonnable.
A ce propos, l’assemblée fait observer à la Cour
que la réquisition du procureur du Roi insérée
dans cette commission tendant à ce que la cuiller dont se sert
l’exécuteur sera réduite et ne pourra contenir qu’un sixième
de boisseau, le jugement qui ordonne cette réduction prouve nécessairement
que cette cuiller était plus grande, ce qui est une preuve de
l’abus énorme qu’on en avait fait, car d’après la requête
de 1607, elle ne devait être que d’un seizième par chaque
charretée de blé et avoine de 6 setiers ou autre plus
grande quantité, que cette fixation rapproche de l’idée
qu’on doit avoir du havage qui est le droit de percevoir sur les grains
vendus dans les marchés autant qu’on en peut prendre
avec la main, que les magistrats de ce temps, prévoyant sans
doute l’abus qui pouvait être fait de cette cuiller, ont jugé
à propos de la supprimer entièrement par leur sentence du
28 septembre 1607, que les exécuteurs commencé à s’en
servir à mesure qu’on aura perdu de vue ce règlement, et
que rien n’étant resté qui fixât la grandeur de cette
cuiller, ils l’auront prise et augmentée à discrétion
jusqu’au delà du sixième du boisseau.
Et pour faire
connaître l’abus de cette cuiller et combien il est nécessaire
de la supprimer, il faut remarquer qu’au lieu de prendre une cuillerée
sur chaque charrette de 6 setiers et plus, il la prend sur chaque sac
de 16 boisseaux à la mesure d’Etampes; par conséquent,
lorsque le blé vaut de 18 à 20 francs il en emporte pour
3 ou sols et plus lors que le blé est plus cher, ce qui est encore
plus sensible sur les menus grains qui s’apportent en petits sacs, dont
le boisseau vaut souvent 30 ou 40 sols, quelquefois 3 livres, ou 4 francs,
il en enlève pour la valeur de 5 sols, 6 sols 8 deniers, 10 soIs
et 13 sols 4 deniers, non seulement sur des sacs complets, mais encore
sur des fractions de sacs dans lesquels il puise à discrétion,
et dévore ainsi la substance du pauvre, ce qui fait comme on le voit,
un droit beaucoup plus fort, plus onéreux et plus fatigant que celui
du domaine; que d’ailleurs la perception avec la cuiller étant entièrement
laissée à sa discrétion et à celle des
gens de la lie du peuple qu’il emploie, qui, n’ayant personne pour les
observer, peuvent prendre la cuiller comble au lieu de la prendre rase
et commettre impunément toutes injustices de pareille nature;
par exemple, en donnant une secousse à la cuiller pour y faire
tenir plus de grain. Dans la perception d’un droit si intéressant
pour le public, on ne doit point s’en rapporter à sa délicatesse,
ni à celle de ses valets.
|
(27) Non exiget districtum.
«il n’exigera pas l’exécution». Ce mot non classique de districtus, -us désigne
au départ, et notamment ici l’«action
coercitive qui émane de l’autorité judiciaire» (Niermeyer). Il acquiert à partir de là des
acceptions dont certaines sont assez voisines de celles
de bannum et de banleuga: «pouvoir
judiciaire»; «territoire où il s’exerce»
(cf. le français district); «exercice de la justice comme source de revenu»; «amende». «prison». Fleureau
glose ici exigere districum par «procéder par saisie de corps», ce qui est trop spécifier. Guizot traduit
«ne fera point
de saisie».
(27)
Nisi per legitimas noctes. «Sans
laisser passer les nuits prescrites». Certaines
durées légales et apparemment aussi contractuelles étaient
exprimées en termes de nuits et de jours par suite d’un archaïsme
judiciaire remontant à l’époque mérovingienne comme
l’expliquera plus loin Fleureau. Le sens de legitimus est ici
délicat. Guizot traduit «si ce n’est après le nombre
de jours prescrit par la loi». Fleureau comprend d’une manière
plus souple «si ce n’est qu’aprés luy avoir
donné un terme suffisant il
ait demeuré trop long-temps à paier». Legitimus a souvent au Moyen Age le simple signification
de «normal» ou «usuel».
B) Notes sur le commentaire
par Fleureau des Règlements
(1) Serfs fonciers, & adscriptices...
Gens de morte-main... hommes, & femmes, de corps, & de suite. Pour tout ce développement, Fleureau dépend déjà
de Pasquier, qu’il citera seulement plus loin,
au sujet de l’institution du duel. Nous citons ici un développement
parallèle à celui de Fleureau tiré d’un ouvrage
de Christoph Besold (1577-1638) publié en 1626 et récemment
mis en ligne par l’Université de Mannheim (http://www.uni-mannheim.de/mateo/camenahist/besold4/books/besoldusopus4_1.html),
qui utilise le même passage de Pasquier:
CAP. VI. De Servis
modernis.
POrro
servitute quia vix possumus carere, ideo ea etiam nunc ab usu haut plane
discessit, novumque genus Servorum introductum fuit; cum ob inopiam
Plebis, tum etiam Divitum amplitudinem, Krantzius, Polit. 1. cap. 4. Id
vero in Rusticis quibusdam fere haeret, et aegricolis: quos vulgo leibeygne
Leuth / oder zur alltäglichen Diensten geseßne Vnderthonen
nominamus. Practici homines Proprios vocant, Galli de main morte, et
hommes et femmes de corps [p.29]
appellant. Pasquier. 4. des recherch. cap. 5. ubi adscriptitios serfs
fonciers nominat. [...]
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(1) Serfs fonciers. On notera que l’adjectif foncier
(formé sur le français fons, «fonds») n’a pas d’arrière-plan latin direct, ni classique
ni médiéval. En voici la définition par l’Encyclopédie
ou Dictionnaire raisonné des arts, des sciences et des métiers
(t.XV, 1775): «Serf foncier, est celui
qui ne peut changer de demeure au préjudice de son seigneur,
dont il est homme de corps & de suite; il en est parlé dans
un titre de Thibaut, comte palatin de Champagne & de Brie, roi de
Navarre, du mois de Mai de l’an 1329. Voyez le traité de la
noblesse par de la Roque, chap. xiij.»
(1) Adscriptices. Terme
de droit latin ignoré du Littré comme du Robert et de
la plupart des dictionnaires français. La forme ascriptice serait peut-être plus régulière
car on n’écrit pas en français par exemple adscencion,
mais ascension. Du latin a(d)scripticius,
qui signifiait chez
Cicéron «récemment
inscrit sur les rôles» (en parlant des nouveaux citoyens romains).
Dans le Code Justinien (VIe siècle), l’expression
servi ascripticii
désigne les «esclaves attachés au fonds
et cédés avec lui à chaque acheteur» (Grand Gaffiot).
(1) Gens de morte-main. En voici la définition par l’Encyclopédie (t.XV, 1775): «Serf
de main-morte ou Main-mortable, est celui qui est sujet aux lois de
la main-morte envers son seigneur. Voyez Main mortable, Main-morte
& Servitude.». Morte-main. En voici la définition par l’Encyclopédie (1751): «Main-morte, signifie
puissance morte, ou l’état de quelqu’un qui est sans pouvoir
à certains égards, de même que s’il étoit
mort. Ainsi on appelle gens de main-morte ou main-mortables,
les serfs & gens de condition servile qui sont dans un état
d’incapacité qui tient de la mort civile. On appelle aussi les
corps & communautés gens de main-morte, soit parce
que les héritages qu’ils acquierent tombent en main-morte &
ne changent plus de main, ou plutôt parce qu’ils ne peuvent pas
disposer de leurs biens non plus que les serfs sur lesquels le seigneur
a droit de main-morte. [...] En France, la main-morte
ou condition serve se contracte en trois manieres; savoir, par la naissance,
par une convention expresse, ou par une convention tacite, lorsqu’une
personne libre vient habiter dans un lieu mortaillable. [...] Voyez
Coquille, des servit. personnelles, le traité de la main-morte
par Dunod.»
(1) hommes, & femmes, de corps, &
de suite. En voici les définition par l’Encyclopédie (t.XV, 1775): «Serf
de corps et de poursuite, est celui qui est personnellement serf &
en sa personne, indépendamment d’aucun héritage, &
que le seigneur peut réclamer & poursuivre en quelque endroit
qu’il aille. Voyez l’article 116 des anciennes coutumes du duché
de Bourgogne.» [...] «Serf de poursuite, est celui que le seigneur peut suivre
& réclamer en quelque lieu qu il aille; c’est la même
chose que serf de corps. Voyez l’article 116 des anciennes coutumes
du duché de Bourgogne.»
(1) Courvées raisonnables.
Ce terme légèrement bizarre de raisonnable ne semble pas
avoir de sens technique précis ni d’être spécialement
d’usage, et semble inspiré à Fleureau par l’article 26
où il est question de ne percevoir qu’une pugnatam rationabilem, «une
poignée raisonnable». C’est-à-dire
qu’il ne faut pas exagérer.
(1) Octave. Fleureau, s’il avait compris le texte, aurait écrit
soit Huitièmes (traduction), Octaves (transcription
francisée) ou Octavæ (transcription latin conforme à son usage orthographique),
tandis que cette orthographe Octave est aberrante.
(1) à présent inconnue. J’ai montré en 2004
dans le Cahier d’Étampes-Histoire n°6, pages 79-81
qu’il s’agit en fait du lieu-dit actuel «L’Humery».
(5) Teloneum... peage, barrage, &
autres (...) maintenant abolis... Ce nom vient du grec télônion,
où il désigne le «bureau d’un percepteur
d’impôts», par exemple dans
l’Évangile, où il est occupé par le futur apôtre
(et évangéliste) saint Matthieu, à partir de telônès,
«fermier». Il a déjà en latin antique trois orthographes:
teloneum, toloneum et telonum (Grand
Gaffiot). Voici les orthographes de ce mot attestées par
Niermeyer en latin médiéval, que nous donnons ici pour la
commodité des internautes qui ne reconnaîtraient pas l’une
de ces formes: teloneum, theloneum, telloneum, theoloneum,
tolenum, tolonum, tholonum, tolnum; telonium, thelonium, tellonium, theolonium,
tolenum, tolonum, tholonum, tolnum; teloneus, theloneus, telloneus, theoloneus,
tolenus, tolonus, tholonus, tolnus; telonius, thelonius, tellonius, theolonius,
tolenus, tolonus, tholonus, tolnus; telon (G: telonis),
thelon (G. thelonis); tonleium, tonleum, tonlium, tunleium. On trouve aussi l’adjectif telonicus.
Teloneum a
produit en allemand Zoll, anglais toll , provençal
tolieu en français moderne tonlieu. En
français médiéval on trouvait notamment aussi:
tonleu (XIIe siècle),
tonliu, tonneuage, telonnage,
tonneur, tonnil «tonlieu», tonloier, «préposé au tonlieu, douanier, péager», tonloierie, «levée du tonlieu».
Voici les sens
de ce mot en latin médiéval, selon Blaise: 1) «bureau de la douane»; 2) «droit de passage»; 3) «tonlieu et toutes sortes de taxes commerciales». Selon Niermeyer:
1) «bureau de péage» (sens étymologique); 2)
«tonlieu (taxe
sur le transport et la vente des marchandise)»; 3) «terme
général pour désigner l’ensemble des redevances
pesant sur le commerce et le trafic».
Pour tonlieu
en français, Littré ne donne curieusement qu’un seul sens:
«Droit qui
se payait pour les places où l’on étalait dans un marché». Le Robert de 1977 est un peu plus
précis: 1) «Impôt
ou taxe que l’on percevait sur les marchandises transportées.» 2) «Droit payé par les marchands pour étaler dans
les foires et marchés.»
(5) peage, barrage. Le péage est le «droit
seigneurial qui se prenait sur le bétail ou sur la marchandise qui
passe, pour entretenir les ponts et les passages»
(Littré, sens n°1). Ce mot ne vient pas comme le croit Littré
de piéton (latin pedes, peditis) mais directement
de pied (latin pes, pedis), comme le montre son
arrière-plan latin médiéval pedaticus
(avec pour variantes pidaticus, petaticus, pesaticus, pedaticum,
pidaticum, petaticum, pesaticum, pedagium, pidagium, petagium, pesagium,
pedatgium, pidatgium, petatgium, pesatgium, peagium, peatgium, paagium):
c’est étymologiquement le «droit de mettre le pied». En revanche le premier sens du
mot barrage n’est certainement pas de même nature, et Littré
a raison de dégager l’évolution suivante du sens: «barrière qui ferme un chemin»
(sens n°1), «barrière qu’on ne peut passer qu’en payant un droit de
péage (sens n°3a)», «droit qu’on paye au barrage» (sens n°3b). En effet on
ne trouve pas ce mot avec le sens de «péage» en ancien français, et on ne lui trouve pas non puis d’arrière-plan latin
avant l’époque moderne. Ainsi Jakob Bornitz, dans son traité
Aerarium (Frankfort sur le Main, 1612), parlant des différentes
redevances liées aux transports, évoque celle qui est perçue
aux portes des villes pour financer l’entretien de la voirie (propter
tutelam viarum publicarum) et qui est appelée pour cette raison
portarium (néologisme de Bornitz qui
rend sans doute un terme allemand; en revanche Niermeyer atteste bien un
portaticus ou portagium), et barragium
par les Français (portarium dicitur, Gallis barragium). A
Étampes notamment il est clair qu’il existait un péage entre la ville d’Étampes
et son faubourg de Saint-Martin, puisque la porte qui les séparaient,
sur la grande route royale, au débouché de l’actuelle rue
d’Enfer, s’appelait Porte de la Barre. C’est là qu’on percevait
le ou peage (pedaticum) appelé
en français barrage.
(5) placeage. Ce dernier mot qui revient
trois fois dans le commentaire de Fleureau (aux articles 5, 20 et 26),
sans avoir spécialement d’arrière-plan dans la charte, est-il
à l’époque de Fleureau un terme coutumier des plus anciens,
ou bien néologisme
tout récent? En effet, selon Littré,
le plaçage (qu’ignore carrément le Robert) est avant tout l’«action de placer»; or, selon le même «placer ne paraît être venu en usage qu’au commencement
du XVIIe siècle»; et Littré
donne ensuite seulement comme deuxième sens: «Terme d’administration. Distribution
des places dans un marché ou une foire, etc.» Mais en réalité
on s’égarerait en suivant ce raisonnement, car la diffusion du terme
de plaçage a précédé de loin celle du verbe placer,
et le Lexique de l’ancien français de Godefroy atteste
même plusieurs sens pour plaçage
dont le principal est le «droit qui
est dû au seigneur pour la liberté de placer et de vendre
ses marchandises ou ses bestiaux au lieu ou se tient la foire ou aux halles
et marché de la seigneurie». L’arrière-plan latin de ce mot est plateaticum
(plateagium, platagium), qui est attesté dès le Xe
siècle en Italie, selon Niermeyer: «redevance
levée sur les achats et ventes qui se font dans une place publique». Plaçage
vient donc directement du place au sens de «place
publique, place du marché», et non
de «placer», ni de «place, emplacement». C’est le droit perçu sur la place du marché,
comme le barrage est perçu sur la route à la sortie de la ville.
(6) Une porte, ou un ouvroüer (c’est une boutique,).
Le texte dit plus littéralement une porte et une fenêtre,
c’est-à-dire une devanture. Fleureau semble bien se tromper sur
le sens du mot ouvroir, comme nous
l’avons déjà dit, en rapportant erronément à
la racine d’ouvrir. Un ouvroir,
c’est un atelier, qui est donc plutôt situé dans l’arrière-boutique.
(9) Messiers.
Le messier est selon Littré
un «garde champêtre
temporaire, particulièrement pour l’époque où les
fruits de la terre commencent à mûrir.» Le mot vient du bas-latin messarius
(de messis, «moisson»), qui n’est pas dans la charte, qui porte seulement custodes,
les «gardes»
(Godefroy atteste aussi messeur et messieur).
(10)
Droit d’exiger... l’abonage. J’ai déjà dit
que Fleureau parle de «l’abonage»
semble-t-il hors de propos, et que Guizot évoque
«le don gratuit», alors qu’il semble qu’il s’agit seulement d’un «cadeau» plus ou moins réclamé
sous la contrainte de la coutume.
(14)
Pour avoir étalonné les mesures. Faux sens
grave de Fleureau: il s’agit ici du bornage des champs (l’abonage, pour
le coup, au moins au premier sens de ce terme).
(18) regle le droit de pressurage à
un demy septier de vin: il n’est pas dit de quelle quantité on
le doit payer; aujourd’huy on paye le pressurage à la Jâlée. Guizot
porte en traduction: «Le droit de pressurage ne sera reçu que de (?) vases
d’un demi-setier». Fleureau s’étonne
que la qu’il ne soit pas précisé sur quoi on prélève
un demi-setier et précise que de son temps on paye le pressurage
«à la jâlée». Observons q’il ne précise pas lui non plus sur
combien on paie une jâlée!
Il faut penser que les cuves des pressoirs avaient au XIIe siècle
une taille fixe, et que c’est sur chaque cuvée que l’on prélevait
à titre de redevance un demi-setier
de vin.
Le pressurage est en effet
le «droit que l’on payait
au seigneur pour user de son pressoir banal»
(Littré, sens n°4). Le mot latin de la charte est pressoragium.
Les différentes orthographes en sont pressoraticum, pressuraticum,
pressoragium, pressuragium. Le sens en est bien selon Niermeyer
«profit du pressoir banal» (voire «rachat de la banalité
du pressoir»).
Qu’est-ce qu’un
demy septier? (notons en
passant que cette orthographe aberrante de septier avec un p
est assez courante, par analogie sans doute avec sepmaine,
semaine, et qu’elle alterne avec sextier, qui est
bien plus normal, puisque le mot viennent de sextarium). Sous l’Ancien
Régime un setier de vin valait 7,61 selon Littré (et
7,44 litres à Paris selon Bouillet). Qu’en était-il à
Étampes? On devait être dans le même ordre d’idées:
un peu moins de huit litres. Donc le demi-setier devait valoir entre 3
et 4 litres.
Il est vrai que,
sous l’Ancien Régime, le demi-setier,
au dire tant de Littré que de Bouillet, en était une mesure
tout à fait distincte: c’était un quart de pinte, la pinte
étant elle-même un huitième du setier, de sorte qu’un
demi-setier ne valait qu’un
trente-deuxième de setier! Le setier valait près de huit
litres, et le demi-setier un quart de litre! Cette bizarrerie qui, n’avait
sûrement pas cours au XIIe siècle, explique pourquoi on
en était venu à utiliser une autre dénomination pour
la redevance.
Qu’est-ce en effet
que la jâlée?
D’après le Dictionnaire de Trévoux (XVIIIe siècle),
c’est une «sorte de mesure. Une jalée
de vin. Ces mots de jalage, jale, jalée, s’écrivent quelquefois
avec deux ll, jallage, &c.» Littré
curieusement ignore ce mot bien qu’il connaisse le jalage, «Terme de coutume féodale. Droit qui se levait sur
le vin vendu en détail.» Il précise
aussi que la jale était une
«espèce de grande jatte ou de baquet.» Robert précise que ce dernier mot est attesté
au XIIe siècle et que c’est la «forme
francienne de gale, galon.» En latin,
selon Niermeyer, on trouve: galona, galonus, galo (-onis), ou jalo (-onis). Cette unité de mesure a survécu en Angleterre
sous le nom de gallon (mot emprunté à l’ancien normand
galon). A titre indicatif, le gallon anglais vaut 4,42 litres.
Nous sommes dans le même ordre de grandeur qu’avec le demi-setier du XIIe siècle.
Ainsi, tout devient
clair. La charte limite la perception du droit de pressurage à
environ 4 litres par cuvée, quantité qu’on appelait demi-setier au XIIe siècle, mais
jâlée au XVIIe siècle,
parce qu’entre-temps s’est repandue la coutume bizarre d’appeler demi-setier
une quantité de vin correspondant en fait à un trente-deuxième
de setier.
(19)
Chaque Megissier...
pour son abonnage.
Double erreur comme on l’a déjà dit, autant chez Fleureau
que Guizot: il n’est pas question ici des megissiers ni de la redevance précise
et institutionalisée qu’est l’abonage. La charte porte bonitatem. Il s’agit comme nous
l’avons dit d’une sorte de bakchich dont le roi réprouve et interdit
certains excès tout en l’officialisant pour lui donner un cadre
clair et des limites raisonnables.
(20)
Ciergers... Feste de la Purification de la Sainte Vierge.
La purification de la Sainte Vierge, qui eut lieu, selon la loi de Moïse
(Lévitique XII, 2), quarante jours après la naissance
du Seigneur, était donc fêtée le 2 février.
On appelle aussi cette fête Chandeleur, du latin Candellorum,
c’est-à-dire «des chandelles». Selon l’Almanach catholique de 1920, «avant de célébrer la messe, le célébrant
bénit les cierges de cire qui lui sont présentés,
puis l’on part en procession autour de l’Église. (...) Ce cierge béni est emmené par les fidèles
chez eux pour le conserver pieusement. Les personnes l’allument pendant
les orages, au devant les images saintes, et surtout auprès du
lit d’un malade, pendant son agonie. Il est également allumé
pour éloigner le démon, écarter les mauvaises pensées
et pour attirer la bénédiction de Dieu sur les familles
et leur demeure.» On comprend donc que les
jours précédent le 2 février étaient une période
d’activité importante pour les ciriers que Fleureau appelle «ciergiers».
(23) Défend
de saisir les biens de celuy qui dénie une dette, avant qu’elle
ait été liquidée. Fleureau se garde
bien de traduire précisément le texte de cet article dont
il ne comprend que le sens général, intuitivement, tandis
que Guizot, qui prend le risque louable de le traduire, ne peut user
de cet expédient.
Voici le texte:
Nullius negantis debitum res capientur,
donec ratiocinatum fuerit, ubi debebit. Voici
la traduction de Guizot: «On ne saisira les biens de nul homme qui refuse de payer une
dette, jusqu’à ce qu’on ait calculé combien il doit.». Cette traduction est mauvaise.
1) Il est question non d’un homme qui «refuse
de payer» une
dette, mais qui en «nie» l’existence. 2) Il est absolument impossible de
traduire ubi par «combien» puisque ce mot signifie
«où». 3) De plus Guizot se trouve réduit
à supposer que ubi debebit est une proposition subordonnée
interrogative indirecte alors que le verbe est à l’indicatif.
4) Enfin, malgré toutes ces contorsions, il n’aboutit qu’à
un sens absurde: pourquoi en effet attendre qu’un débiteur refuse
de payer pour calculer combien il doit? Et le roi n’a-t-il pas autre
chose à faire que d’édicter de telle absurdités?
Fleureau quant à lui ne se mouille pas et devine
le sens général du texte, au jugé. Au moins il traduit
correctement negantis par «qui dénie». Pour le reste le contexte et le bon sens lui suggère
que le roi demande qu’on éclaircisse d’abord la situation. En effet liquider une dette signifie proprement la «rendre liquide», c’est-à-dire «claire et nette», comme dit Littré, d’une
manière qui ne laisse plus de place à la contestation.
Quel est le problème
qu’ont donc rencontré nos deux historiens? Encore une fois ils
n’avaient pas le dictionnaire de Niermeyer, et ne connaissaient par suite
que les sens classiques de ratiocinor 1) «calculer»; 2) «raisonner»; voire, lorsqu’il est suivi d’une proposition interrogative
indirecte, 3) «examiner» ou
même 4) «conclure». Mais en latin médiéval (ou il peut se
présenter sous une forme non déponente, ratiocinare),
ce verbe peut également signifier: 5) «se justifier, en répondre», ou «apporter des preuves, plaider»;
6) «raisonner,
convaincre par le raisonnement».
Le sens est donc:
«On ne saisira
les biens de nul homme qui dénie une dette, jusqu’à
ce que l’affaire ait été plaidée au lieu où
il se trouvera avoir contracté cette dette»,
ou bien encore simplement: «jusqu’à ce que la chose ait été prouvée.» Fleureau avait correctement vu deviné
le sens général, à la louche. Il faut toujours
supposer que les textes ont un sens, logique.
(24)
Voyer. Erreur notable de Fleureau, car il n’est pas question
ici de voyer ni de voirie. Lorsque la charte a évoqué
un personnage de ce genre, elle a plutôt utilisé une locution
qui indique que la voirie étampoise était affermée: Unicuique
cheminum nostrum ad censum habenti.«à quiconque qui tiendra à
cens notre chemin», ce que Fleureau glose
justement «à celuy qui tiendra son
droit de voirie à ferme».
L’erreur de Fleureau s’explique et s’excuse d’autant plus facilement
que la question est relativement complexe au point que Littré encore
reste assez imprécis à ce sujet et que des ouvrages récents
de qualité commettent encore cette erreur.
Le mot de la charte
pour désigner le fonctionnaire en question est viguerius, l’une des nombreuses
graphies médiévales du plus classique vicarius.
Citons-en quelques autres, attestée ou toujours possibles: vicarius,
vecarius, viarius, vaarius, vaierius, veherius, vejarius, veyerius, vierius,
vigarius, vigerius.
Le sens originel
et général de cet adjectif, le plus souvent substantivé,
est: «remplaçant (d’)une personne ou
un objet, suppléant, substituant, délégué». Par suite ce titre a été
appliqué une grande quantité de fonction subalterne et
a reçu un très grand nombre d’acceptions spécialisées,
soit ecclésiastiques ou laïques: Niermeyer n’en dénombre
pas moins de trente.
En français
vicarius a produit trois mots bien différents.
1) Vicaire est de formation savante, avec les acceptions spécialisées
que l’on sait. 2) Viguier (qu’a utilisé Guizot dans sa traduction)
est de formation pupulaire, mais méridionale, comme on le voit
par le fait que la guttutale médiane n’a pas disparu; c’est
ce qui explique aussi que le premier sens que donne Littré à
ce mot: «juge qui, dans les provinces
du Midi, faisait les fonctions de prévôt». 3) Voyer, qui s’écrivait veeir
dans la Chanson de Roland (XIe s.) et voier au XIIIe siècle.
Ce qui
complique les choses, c’est que l’altération de ce mot vicarius
en langue d’oïl a conduit a la confusion de sa racine avec celle
qui désigne la «voie». Puisque voie vient de via, on a cru
que voyer venait de viarius, alors qu’il provient en réalité
de vicarius (Notons que viacaria a évidemment connu
la même évolution: vicaria,
vecaria, viaria, vaaria, vaieria, veheria, vejaria, veyeria, vieria,
vigaria, vigeria).
Au XVIe siècle
on a donc spontanément réservé l’appellation de
voyers aux fonctionnaires chargés de l’entretien
des voies de communication, et c’est en ce sens que Henri IV crée
la charge de Grand Voyer pour son ministre Sully. C’est évidemment
aussi en ce sens que Fleureau écrit voyer et voirie,
induisant son lecteur en erreur. Littré encore nous explique que
voyer vient de l’adjectif latin viarius. Même
le récent et excellent Grand Gaffiot fait produire
à l’adjectif viarius le français voyer. Seul
Niermeyer est clair à ce sujet: au mot viarius, il se contente
de renvoyer sèchement à vicarius. Blaise
n’est pas encore arrivé à la même clarté, car
il ne donne pour viarius que des sens spécialisés qu’il
a cru rencontrer au fil de ses lectures: «seigneur justicier» et «geôlier», sans paraître se rendre compte qu’il ne s’agit
que d’une variante de vicarius.
Ainsi donc l’erreur de
Fleureau est bien excusable. Au reste on pourrait bien conserver ce
terme de voyer, pour désigner
la charge de l’officier dont parle de notre charte: mais en précisant
en note ce qu’il faut entendre par ce terme, qui n’a rien à voir
avec les voies de communications.
(24) De chaque loge qu’on dressera. Erreur de Fleureau, qui ne comprend décidément
pas la teneur de cet article. Il n’explique pas ce qu’est une loge, terme qu’il
n’a sans doute pas compris, gêné qu’il a été
par le terme de vigerius, qu’il vient de rendre erronément
par «voyer».
Par ailleurs il n’a pas compris non plus le verbe relevare utilisé
par la charte: Pro logiis singulis relevandis, ce qui est d’autant plus étonnant qu’il l’a parfaitement
compris dans la suite à l’article 26, où il rend pro relevatione stalli par
l’expression «Relever boutique».
Relever
est pris dans les deux cas dans son acception féodale (sens n°29
de Littré): «relever le fief, donner
au seigneur féodal ce que la coutume a réglé pour
avoir l’investiture d’un fief comme vacant par la mort du vassal». Les institutions urbaines encore toutes récentes
sont étroitement calquées sur celles du monde féodal.
Qu’est-ce
donc qu’une loge? Ce mot d’origine germanique (laubia, laupia, lobia, lovia,
logea, logia, loja, loza, laubium, laupium, lobium, lovium, logeum, logium,
lojum, lozum) a selon Niermeyer les sens suivants: «auvent, galerie, arcade, portique, loggia». D’après le contexte, et
spécialement l’analogie avec l’article 26 où il est question
du relèvement d’un étal (pro relevatione stalli) par la veuve d’un commerçant
défunt, il faut y voir un emplacement habituel au marché
hebdomadaire, où l’on dresse éventuellement chaque semaine
un auvent ou abri provisoire, comme de nos jours.
Nous supposons que l’étal
(stallum ou stallus) est une boutique permanente,
tandis que la loge (logia) est
un emplacement réservé sur la place du marché. A
chaque changement de tenancier, par voie de décès ou de vente,
le nouvel attributaire de cet emplacement doit verser une redevance analogue
à celle qui est due pour le relèvement d’un
fief.
(25) au Prévôt des Juifs, qui avoient un Juge
particulier. On notera comme remarquable l’absence
de curiosité de Fleureau pour les institutions particulières
de la communauté juive d’Étampes. Il approuvera d’ailleurs
pleinenement, en la rapportant, leur expulsion de 1182, et la justifiera
avec un manque de rigueur intellectuelle qui ne se peut expliquer que par
la passion religieuse, pp. 378-179. Il faut néanmoins remarquer
qu’il semble interpréter ici le terme de «prévôt» au sens
de «juge particulier».
(27) Défend... de proceder par saisie de corps.
Fleureau n’est pas ici très rigoureux. Il est sans doute question
de saisie, encore que le texte de la charte ne soit pas explicite à
cet égard. Mais pour pourquoi spécialement saisie de corps et non pas seulement de
biens?
(27) La Loy Salique... par les nuits, & non par
les jours... au titre 42... au titre 47... Fine remarque de
Fleureau. Niermeyer ne dit pas autre chose dans son article «nox»,
où il allègue les treize textes suivants, qui vont du VIe
au IXe siècle et dont nous reprenons ici la liste avec résolution
des abrévations, pour la commodité des internautes: 1) Lex
Salica, tit. 37; 2) Pactus Childeberti (an. 555-558), c. 5 (A. BORETIUS
& V. KRAUSE, Capitularia regum Francorum, Hannover, 1883, t.
I p. 5). 3) Chilperici edictus (an. 571-574), c. 8, (ibid., p.
9); 4) Edictus Rothari (an. 643), c. 274 (F. BLUHME, Edictus ceteraeque
Langobardorum leges, in Fontes iuris Germanici in usum scholarum, in MGH,
1869, pp. 1-73); 5) Formula Sal. Lindenbr., no. 21 (K. ZUMER, Formulae
Merowingici et Karolini aevi, in MGH, Formulae, 1, Hannover,
1886. p. 282); 6) Lex Baiwariorum (K.A. ECKHARDT, Die Gesetze
des Karolingerreiches, t. II, 1934, in Germanenrechte,
2, pp. 74-180), tit. 16 c. 9; 7) C. ZEUSS, Traditiones possessionesque
Wizenburgenses, Speyer, 1842) no. 63 (a. 774); 8) D. Karol. no.
88 (an. 774/775) (?); 9) Capit. de part. Saxon. (an.785), c. 24, p. 70;
10) Capitulare de villis, c.7 (in A. BORETIUS,
op. cit.); 11) Vita Goaris, c.10 (éd.
B. KRUSCH, in Serie Rerum Merov., t. IV), p. 421; 12) WETTINUS
AUGIENSIS, Vita altera Galli, c. 15 (éd., ID., ibid.),
p. 264; 13) Concil. Clovesh. a. 874 (in J. D. MANSI, Sacrorum conciliorum
nova et amplissima collectio, Firenze, 1759-1798, t. 14, col. 487 C).
(27) Aimoine Liv. 1. chap. 7. Aimoin
de Fleury, mort vers 1008, a écrit une Histoire des Francs
qui va des origines à 654, ouvrage imprimé dès
1514, et que Fleureau cite ici de seconde main, non sans plusieurs altérations.
Nous donnons en Annexe 2 traduction de ce texte,
sur la base du texte de l’édition princeps, mise en regard avec
le texte de Fleureau
(28) Relever boutique. Fleureau
calque ici le latin: Vidua pro relevatione stalli
plusquam viginti, & quinque solidos non dabit, littéralement:
«la veuve pour le relèvement d’un
étal ne donnera pas plus de vingt-cinq sous». Relever est pris ici dans son acception
féodale, comme on l’a dit plus haut. Il
est très étonnant que Fleureau qui comprend ici parfaitement
le sens du verbe relevare, n’ait pas fait de même à
l’article 24 lorsqu’il est question de relever des «loges».
(8) (17) (29) L’usage du Duël... Pasquier en ses recherches de France. Pour tout ce passage,
Fleureau dépend de Pasquier, qu’il a déjà utilisé
au sujet de l’institution du servage. Nous donnons en bibliographie les
différentes édition des Recherches
de la France de Pasquier.
(8) (17) (29) Epistre du Comte de Nevers... à l’Abbé
Sugger... 124. Il y a à s’étonner que Fleureau
ne donne pas le texte de cette lettre d’un grand intérêt
pour l’histoire locale, et qu’il a trouvée sans doute le tome IV
du recueil des Historiens de Duchesne. Les Lettres de Suger ont récemment
été rééditées par Françoise Gasparri.
C) Notes sur les Chartes de Saint-Victor
La veille de
la Chaire de S. Pierre. Cette fête est au 22 février.
Dans le livre des Antiquités de Paris, par du
Breuil. Au chapitre précédent, Fleureau a plus
correctement orthographié son nom, de sorte qu’on doit en attribuer
la faute ici à son éditeur posthume. Dom Jacques
du Breul, religieux de l’abbaye parisienne de Saint-Germain-des-Prés,
avait donné en 1608 le dernier remaniement connu de l’un
des classiques de l’historiographie parisienne, constamment réédité
depuis 1532, Les Antiquitez, Chroniques et Singularitez de
Paris, ville capitale du royaume de France, de Gilles Corrozet
(1510-1568). Les Antiquitez de Paris ainsi rééditées, augmentées par
frère Jacques du Breul, et parues chez Bonfons, formaient un in-16 de 450
pages. Du Breul donna ensuite par ailleurs un ouvrage plus conséquent
et nouveau en 1612, Le Théâtre des antiquités
de Paris, où est traicté de la fondation des églises
et chapelles de la cité, Université, ville et
diocèse de Paris, comme aussi de l’institution du parlement,
fondation de l’Université et colléges, et autres choses
remarquables, divisé en quatre livres, ouvrage réédité
et augmenté par un certain D.H.I. en 1639. Voyez notre bibliographie.
Assis, l’un
au dessus, & l’autre au dessous du Pont de Louëtte, proche
la porte de saint Jean. Il s’agit du Moulin Branleux d’En-haut
et du Moulin Branleux d’En-bas. Selon Gatineau, le moulin du haut, motorisé
en 1934, fut le dernier en service à Étampes. C’est l’actuelle
résidence Le Molière (depuis 1970). Celui d’en-bas conserve
encore sa roue sur la façade nord. Nous donnons ci-dessous extrait
du plan d’Étampes aux XVIe et XVIIe siècles reconstitué
par Léon Marquis, en 1881.
Le jour
de saint Remy. Cette fête est au 1er octobre.
La moulte
de ces moulins. Le Littré ni le Robert ni le Bouillet
ne mentionnent ce mot de moulte qui
déjà à l’époque de Fleureau doit constituer
une coquetterie archaïsante, car nous trouvons seulement dans le
Lexique de l’Ancien français de Godefroy que la molte est la «mouture,
droit que les vassaux payaient au seigneur pour pour faire moudre au
moulin banal», et que c’était
aussi un «droit seigneurial
qui se payait des fruits de la terre». D’après le contexte où l’emploie Fleureau, la moulte était perçue en nature, au moins à Étampes.
Voici les formes latines de ce mot médiéval
dérivé du verbe molere,
«moudre», selon Niermeyer: molta,
mouta, molda. Selon ce dernier auteur, le mot peut revêtir trois
sens: 1) «droit banal de moulin»; 2) «mouture, redevance
de moulinage»; 3) «le
blé qui vient au moulin».
On trouve aussi en ancien français,
selon Godefroy, moltain, «qui est obligé
de faire moudre son grain au moulin seigneurial», moltant, «qui sert à moudre» ou bien également «qui est obligé de faire moudre son grain au moulin seigneurial», molturage, «mouture»
ou «droit sur la mouture», molturance, «mouture», molturer, «moudre» ou «prendre le droit de mouture».
On aura
remarqué que Niermeyer utilise le terme de mouture pour
parler d’une redevance de moulinage. Littré ne présente
pour ce mot que le sens de «salaire du
meunier» (sens n°3); ceci dit, concernant
un moulin banal, ce salaire constituait bien de soi un droit féodal.
Voici les formes latines médiévales de ce
deuxième mot selon Niermeyer: molitura (forme canonique,
dérivée du verbe molere, «moudre»), moletura, molatura, moltura, molctura, maltura, moutura,
mautura, motura, mottura, mutura, moldura, modura. Ses sens recouvrent
en bonne partie celui du précédent: 1) «la recette d’un moulin à farine»; 2) «le droit banal de moulin»; 3) «le blé
qui vient au moulin»; 4) «la mouture, redevance de moulinage».
La feste de
saint Nicolas en Decembre. Cette fête est au 6 décembre.
Le Bailly
d’Estampes ordonna l’an 1580. Fleureau ne donne pas le texte
de ce document, que nous n’avons pas trouvé pour l’instant.
Voicy
ces deux titres. Nous donnons en Annexe
3 traduction du texte de la charte de 1147, et en Annexe 4 traduction de celle de 1256.
Remota... occasione.
«sans entrave», Le mot occasio
a ici ici l’un de ses sens purement médiévaux: «refus, entrave, mauvais prétexte».
Ce sens est déjà en germe chez Tertullien (IIIe siècle),
puisqu’il use de ce mot, selon le Grand
Gaffiot, au sens de «prétexte».
D) Notes sur Jean des Temps
Des Annalistes.
Depuis au moins le milieu du XIIIe siècle chez Vincent de Beauvais,
Martin d’Oppavia, Guillaume de Nangis, etc. Nous avons réuni
les dires de 43 auteurs différents sur ce personnage dans notre
page: «Jean d’Étampes
a-t-il vécu 361 ans? ou la légende du Mathusalem étampois», http://www.corpusetampois.com/che-16-legendedejeandetampes.html (2003-2006).
Jean
d’Estampes ou des Temps. La confusion entre le Jean d’Estampes
et Jean des Temps dans l’état actuel de nos recherches ne remonte
qu’au XVIe siècle, ou peut-être à la fin du XVe.
Il faut remarquer qu’elle n’était guère possible qu’en français (Jean des Temps,
Jean d’Estampes), tandis qu’elle serait difficile à expliquer en latin (Johannes de
Temporibus, Johannes de Stampis).
Paule Emile,
& beaucoup d’autres. Pour l’instant je n’ai guère
trouvé d’auteurs antérieurs à Fleureau mettant en
doute ouvertement l’histoire de Jean des Temps, sinon Paul Émile en 1519. Seul Thomas Browne invite à
la prudence à ce sujet, dans ses Pseudodoxia
Epidemica parus en 1646. Même
un incrédule comme Jean
Bodin, dans un écrit pourtant resté
secret, ne paraît pas douter du fait. Voici la liste provisoire de
ces auteurs, par ordre chonologique: Vincent de Beauvais.— Martin
d’Oppavia.— Guillaume de Nangis.— Juan Gil de Zamora.— Sigimar
de Kremsmünster.— Jean
Lelong d’Ypres.— Autres
chroniques flamandes.— Liber Terre Sancte d’Évreux.—
Philippe de Bergame.— Fulgosius.— Johannes Nauclerus (Vergenhans).— Paul
Émile.— Joachim
Curius.— François
de Belleforest.— Theodor
Zwinger.— Giovanni
Selino.— Paolo Morigia.— Jean
Bodin.— Richard
Verstegan.— Lewis Bayly.— Balthasar
Exner.— Francis
Bacon.— Thomas
Browne.
Par
quelque belle action. Fleureau a mal compris le texte de
Paul Émile, que nous avons mis en
ligne, et qui ne dit pas que les Historiens n’auraient pas manqué
de signaler les hauts faits et sa vaillance de Jean des Temps, ce qui
est un raisonnement assez peu satisfaisant si l’on veut bien y réfléchir,
mais le prodige (virtus) qu’aurait constitué une telle
longévité: cum
interea nulla in tot motibus mentio eius facta fuerit, nec latere
ignorarive potuisset virtus, «alors que dans l’intervalle,
au milieu de tant de péripéties il n’a été
fait aucune mention de lui, et que ce miracle (virtus) n’aurait
pu rester inaperçu ou inconnu». Paul Émile
use évidemment du mot de virtus dans son acception médiévale
de «prodige». Fleureau est encore une fois ici
trahi par sa méconnaissance du latin proprement médiéval.
Sugger...
au Livre premier de ce qu’il a fait pendant qu’il a gouverné son
Abbaye... Tom.
4. Hist. Franc. pag. 335. Cette édition
du De Administratione sua de Suger par les Duchesne au quatrième
tome de leur Recueil des Historiens, paru en 1641, est son édition
princeps. Indéfiniment reprise, elle ne sera améliorée
que par Lecoy de la Marche en 1867, puis par Françoise Gasparri
en 1996. On n’en conserve qu’un seul manuscrit.
Piguiere,
ou de Piviers. La Piguière est une commune du département
de l’Aveyron, dans le causse de Sauveterre. Piviers, c’est-à-dire
Pithiviers, est une commune du Loiret.
Mary de Madame
Eustache de Corbeil. Fleureau a déjà parlé
au chapitre XIII de
cette Eustache ou Eustachie de Corbeil dont des généalogistes
ont voulu faire, contre toute évidence, une fille du roi Philippe
Ier. Nous redonnons ici ce texte:
Philippe I. ne se contentant pas de Berthe, sa legitime
épouse, passant à Tours l’an 1091. fit enlever
par un de ses Gentils-hommes, Bertrade de Monfort, femme de
Fouques Réchin, ou l’Aspre, Comte d’Anjou, laquelle il
épousa, au grand scandale de la France, & de toute l’Europe,
après la mort de son mary, qui ne pouvant se venger de l’affront
qu’il avoit receu de l’enlevement de sa femme, en mourut bien-tost
après de déplaisir. Il y a de nos Historiens, qui
ont laissé par écrit, que de ce mariage Philippe eut
quatre enfans, deux garçons Philippe, & Fleury, &
deux filles, Cecile, & Eustache. Dieu ayant eu en horreur l’incestueux
adultere du Roy; a voulu que la memoire de ces deux Princes, soit entierement
éteinte, sans qu’il reste d’eux, ny de posterité, que
le seul nom. Cecile leur sœur fut mariée deux fois, la
premiere, elle épousa Tancrede, Prince d’Antioche (Guill.
de Tyr. lib. XI. c. 4.), neveu de [p.76]
Boëmond, qui s’est si fort signalé
dans les Croisades; & la seconde Bertrand, Comte de Tripoly,
en Syrie. Belle-forest en ses Annales, assure qu’Eustache
fut mariée à Jean, Seigneur d’Estampes, qui en faveur
de ce mariage, en fut fait le premier Comte: Mais il se trompe;
parce que cette Eustache est surnumeraire, entre
les enfans de Philippe, & de Bertrade, que la plus commune opinion
de nos Historien, & Genealogistes reduit seulement à
deux garçons, & une fille. Et j’ay ci-devant remarqué,
qu’il n’y a point eu de Comte, ny de Seigneur proprietaire de
la ville d’Estampes que le Roy. Et nous verrons en traitant de l’Abbaye
de Morigny, que le Roy Philippe, & Louis le Gros son fils, ont
toûjours joüy de la ville d’Estampes: même du vivant
de Jean, surnommé d’Estampes, qui fut mary d’une Eustache,
non pas de France, mais de la maison de Corbeil, laquelle dans toutes
les donations qu’elle a faites, avec son mary, à l’Abbaye d’Yerre
en Brie, où elle est inhumée, n’a jamais pris la qualité,
ni de fille, ni de sœur de Roy, ni de Princesse, ni de Comtesse: non
plus que son mary celle de Comte d’Estampes. (Antiquitez...,
1re partie, ch. XXIII, pp. 75-76)
|
Dans les donations
qu’elle a fait à l’Abbaye d’Yerre en Brie. Je ne sais
pas où Fleureau a trouvé ces chartes du monastère
d’Yerres.
Le sieur de
la Barre en son Histoire de Corbeil. La Barre, prévôt de Corbeil, a fait paraître
en 1647 ses Antiquitez de la ville, comté
et chatelenie de Corbeil. Fleureau a déjà cité
cet ouvrage au chapitre
3.
Dans la Cronique
de Morigny, liv. 2. C’est-à-dire au livre 2 de
la Chronique de Morigny que Fleureau connaît par l’édition
qu’en ont donnée les Duchesne en 1641 au tome 4 du Recueil
des Historiens français. Voyez notre bibliographie
en annexe au chapitre 26. Nous donnons en Annexe 2
le texte de l’édition de Léon Mirot de 1912 pour ce passage.
Mes
Observations sur la même Cronique. Ces
Observations constituent le début et l’essentiel de la troisième
parte de l’ouvrage de Fleureau, aux pages 473-575.
Bernard Gineste, août
2006.
Toute critique, correction
ou contribution sera la bienvenue. Any criticism
or contribution welcome.
|
ANNEXE 1
LA CHARTE DE LOUIS VIII DE 1179, TRADUITE PAR GUIZOT
(1839)
Nous donnons en
regard le texte donné par l’édition posthume de Fleureau
de 1683 et celui de la version de François Guizot, donnée
en annexe à son Cours d’Histoire moderne et faite sur
le texte du Recueil des ordonnances, t. XI, p. 188.
Texte
latin de Fleureau (1683) |
Version française de Guizot
(1839) |
1. In nomine sanctæ, & individuæ Trinitatis, Amen.
Ego Ludovicus Francorum Rex, Providentes animæ nostræ saluti,
pravas consuetudines, quæ in diebus nostris per negligentiam servientium
nostrorum, nobis ignorantibus, Stampis fuerant inductæ, duximus
reprobandas. Itaque ad memoriam tam præsentium quam futurorum transmittentes,
statutum nostrum, præcipimus quod
|
Au nom de la sainte et indivisible Trinité, amen. Moi Louis,
roi des Français, afin de pourvoir au salut de notre âme,
nous avons cru devoir abolir de mauvaises coutumes qui, dans la durée
de notre règne, ont été introduites à [p.300] Etampes, à
notre insu, par la négligence de nos sergens. Transmettant
donc notre statut à la mémoire de tous présens
et à venir, nous ordonnons:
|
quicumque voluerit, licitè emat terram, quæ dicitur
Octave [sic], salvis consuetudinibus
nostris, nec ob hoc emptor servus noster efficiatur.
|
1° Que quiconque voudra puisse librement acheter la terre dite
Octave, sauf nos droits accoutumés; et que pour cela l’acheteur
ne devienne pas notre serf;
[Il y avait le territoire d’Étampes, des terres
qui portaient le nom d’octaves et dont les possesseurs, selon
les anciennes coutumes, étaient serfs du roi. Peut-être
ce nom d’octave avait-il été donné à
ces terres parce que le seigneur y prenait la huitième gerbe.
(Note de Guizot)]
|
2. Nullus emat pisces Stampis, nec infra Balivam ad revendendum Stampis,
exceptis harengis salitis, & mangrelis salitis.
|
2° Que nul n’achète de poissons à Étampes,
ni dans la banlieue, pour les revendre à Étampes, excepté
les harengs salés et les maquereaux salés;
|
3. Nemo emat vinum Stampis, ad revendendum in eadem villa, nisi tempore
vindemiæ.
|
3° Que nul n’achète de vin à Étampes pour
le revendre dans la même ville, excepté à l’époque
de la vendange;
|
4. Nemo ibidem ad ibi revendendum panem emat.
|
4° Que nul n’y achète du pain pour l’y revendre;
|
5. Nemo capiatur causa Telonii extra metas mercati manens, dum erit
infra easdem metas.
|
5° Que nul homme habitant hors des limites du marché
ne soit arrêté à raison du droit de place, tant
qu’il sera dans lesdites limites;
|
6. Liceat unicuique cheminum nostrum
ad censum habenti, ostium vel fenestram in domo sua facere, absque licentia
Præpositi.
|
6° Qu’il soit permis
à tout homme tenant notre droit de voirie à ferme,
de faire une porte ou une boutique dans sa maison, sans la permission
du prévôt;
|
7. Nemini liceat pretium exigere ob miniam præstandam, salvo minagio
nostro.
|
7° Que personne ne puisse exiger quelque prix pour le prêt
de la mine, sauf notre droit de minage;
|
8. Nullatenus liceat Præposito Stampensi à cive dationem
gagiorum exigere pro duello, quod non fuerit judicatum.
|
8° Qu’il ne soit permis en aucune façon au prévôt
d’Étampes d’exiger d’un citoyen la remise de gages pour un
duel qui n’aura pas été décidé par jugement.
|
9. Homines Stampenses vineas suas pro voluntate sua & ordinatione
faciant custodiri, salva mercede custodum: nec Domini quibus census vinearum
debetur ideo aliquid exigant.
|
9° Les hommes d’Étampes pourront faire garder leurs vignes
à leur volonté et pour le bon ordre, sauf la récompense [p.301] des gardes; et les seigneurs,
à qui le cens des vignes est dû, n’exigeront rien pour
cela.
|
10. Nemo regratarius ad fenestram vendens bonitatem Præposito
dabit.
|
10° Aucun marchand regratier, vendant à la boutique,
ne donnera de don gratuit au prévôt;
|
11. Nemo bonitatem debebit Præposito, nisi mercator fuerit in
foro vendere solitus , & emere.
|
11° Nul ne devra de don gratuit au prévôt, sauf
tout marchand ayant coutume de vendre et d’acheter dans le marché.
|
12. Nemo pellem Præposito debebit nisi confitum faciens.
|
12° Nul ne devra une peau au prévôt, à
moins qu’il ne soit pelletier par état.
|
13. Servientes nostri alii quàm Præpositus, in foro vel
extra, bonitatem ab aliquo exigere non poterunt.
|
13° Nos sergens, autres que le prévôt, dans le
marché ou au dehors, ne pourront exiger de don gratuit de
personne.
|
14. Ob metas figendas Præpositus sextarium vini rubei Stampensis
tantummodò accipiet: & unusquisque servientium nostrorum,
qui figendis aderit metis, denarium unum.
|
14° Pour l’étalonnage des mesures [Faux-sens, lisez: Pour le bornage d’une parcelle
(B.G.)], le prévôt ne recevra qu’un setier de
vin rouge d’Etampes, et chacun de nos sergens, qui aura assisté
à l’étalonnage des mesures [Lisez: au bornage d’une parcelle (B.G.)], un denier.
|
15. Emptores annonæ ad extra portandum bonitatem non dabunt, sed
Teloneum tantùm præbebunt.
|
15° Les acheteurs de vivres ne donneront, pour les exporter,
nul don gratuit, mais paieront seulement le barrage.
|
16. Præpositus neque harengos, neque alios pisces marinos, seu
fluviales exigere parerit à venditoribus; sed emat sicut alii.
|
16° Le prévôt ne pourra exiger des marchands ni
harengs, ni autres poissons de mer ou d’eau douce, mais les achetera
comme les autres.
|
17. Pro duello victo non exigemus ultra sex libras; neque Præpositus [p.112] ultra solidos sexaginta: nec campio
qui vicerit supra solidos triginta, & duos accipiet, nisi fuerit
duellum de infractura banlivæ, vel muertro, vel latrocinio, vel
raptu, vel servitute.
|
17° Pour un duel nous n’exigerons pas plus de six livres du
vaincu, ni le prévôt plus de soixante sous; et le champion
vainqueur ne recevra pas plus de trente-deux sous, à moins
que le duel n’ait été entrepris pour infraction de banlieue,
ou meurtre, ou larcin, ou rapt, ou asservissement.
|
18. Pressoragia non nisi ad vasa dimidii sextarii recipientur.
|
18° Le droit de pressurage ne sera reçu que de vases
d’un demi-setier [Faux-sens; lisez:
ne sera perçu qu’à la hauteur d’une demi setier (par cuvée)]; [p.302]
|
19. Messageicerii singuli nonnisi duodecim denarios pro bonitate dabunt
singulis annis.
|
19° Chaque mégissier [Lisez peut-être
plutôt: messager-cirier (B.G.)] ne donnera que douze deniers
chaque année pour le don gratuit.
|
20. Cerarii singulo uno quoque anno pro bonitate denariata ceræ
tantùm, die Iovis ante festum Purificationis B. Mariæ dabunt.
|
20° Les ciriers ne donneront par an, pour le don gratuit, qu’une
dénerée de cire, le jeudi avant la fête de la
Purification de sainte Marie.
[Dans Fleureau (Antiquités d’Êtampes,
p. 114) ce mot denariata est traduit par dix livres de cire.
Mais dans le Recueil des ordonnances des rois de France, on
remarque qu’il ne signifie en général qu’une dénerée
ou la valeur d’un denier, ce qui semblerait confirmé par le
mot tantùm qui indique cet impôt comme
fort modique. Ce serait donc la valeur d’un denier en cire. (note de Guizot)]
|
21. Arcuum venditores singuli arcum unum pro teloneo annuatim dabunt.
|
21° Chaque marchand d’arcs donnera par an un arc pour sa redevance.
|
22. Nemo pro fructu vendito qui non valet plusquam quatuor [sic] denarios teloneum solvet.
|
22° Nul ne paiera de droit de place pour avoir vendu du fruit
qui ne vaut pas plus de quatre deniers.
|
23. Nullius negantis debitum res capientur, donec ratiocinatum fuerit,
ubi debebit.
|
23° On ne saisira les biens de nul homme qui refuse de payer
une dette, jusqu’à ce qu’on ait calculé combien il
doit [faux-sens.
|
24. Pro logiis singulis relevandis habebit Vigerius sextarium unum vini
rubei Stampensis tantùm.
|
24° Pour chaque loge qu’on dressera [Faux-sens, lisez: Pour chaque reprise d’échoppe
(B.G.)], le viguier n’aura qu’un setier de
vin rouge d’Etampes.
|
25. Neque Præpositus Iudæoram, neque alius, hominem venientem
ad forum, vel res suas, vel redeuntem de foro, vel in foro existentem,
in die mercati, pro debito capiet.
|
25° Le jour du marché, ni le prévôt des
Juifs, ni aucun autre, n’arrêtera pour dette un homme venant
au marché, ou revenant du marché, ou séjournant
dans le marché, non plus que ses marchandises.
|
26. Venditor lini, vel canabi non dabit pro teloneo pecuniam, sed tantummodò
pugnatam rationabilem. |
26° Le marchand de lin ou de chanvre ne donnera pas d’argent
pour le droit de place, mais seulement une poignée raisonnable.
|
27. Pro debito recognito, & gagiato Præpositus districtum
non exiget, nisi per legitimas noctes.
|
27° Pour une dette reconnue et cautionnée, le prévôt [p.303] ne fera point de saisie,
si ce n’est après le nombre de jours prescrit par la loi.
|
28. Vidua pro relevatione stalli plusquam viginti, & quinque solidos
non dabit.
|
28° Une veuve, pour relever boutique, ne donnera pas plus de vingt-cinq
sous.
|
29. Campio conductitius non recipiatur.
|
29° Qu’on n’admette point de champion mercenaire.
|
Quæ omnia ut perpetuam obtineant firmitatem sigilli nostri
autoritate, & regii nominis caractere inferiùs annotato præsentem
chartam fecimus communiri. Actum Parisius, an.
ab Incarn. M. CLXXIX. astantibus in Palatio nostro quorum nomina supposita
sunt, & signa. Comitis Theobaudi Dapiferi nostri. Guidonis Buticularii.
Reginaudi Camerarii. Radulphi Constabularii. Data vacante Cancellaria.
Fleureau, Antiquitez..., pp. 111-112.
|
Afin que tout ceci soit ferme et stable à toujours, nous
avons fait confirmer la présente charte par l’autorité
de notre sceau et l’apposition de notre nom royal. Fait à Paris,
l’an de l’incarnation 1179e. Assistant dans notre palais ceux dont les
noms et sceaux sont ci-dessous apposés: le comte Thibaut notre
sénéchal; Gui, bouteiller; Renault, chambellan; Raoul,
connétable. Donné, la chancellerie vacante.
Recueil des ordonnances, t. XI, p.
211-213.
|
|
|
|
LE PASSAGE D’AIMOIN ALLÉGUÉ PAR
FLEUREAU
Nous donnons ici, en regard
du texte corrompu cité par Fleureau en 1683, celui de l’édition
princeps de 1514 (dont un scan ci-dessus).
Texte altéré
donné par Fleureau
(1683) |
Texte de
l’édition princeps
(1514)
|
Traduction de B. G.
(2006)
|
Galli se omnes
ab Dite Patre progenitos se dicunt; idque à Druidibus proditum
dicunt ob hanc causam spatia omnia temporis non numero dierum, sed noctium
finiunt.
Aimon lib. 1.
|
Galli se omnes ab Dite Patre progenitos
prędicant: idque ab Dryidibus proditum
dicunt. Ob hanc causam spatia omnis temporis non numero dierum, sed
noctium finiunt.
Aimoin, livre I, chapitre VIII
|
Les Gaulois prétendent qu’ils descendent tous de
Dis Pater, et ils disent que cela leur a été transmis par
les Druides. C’est pour cette raison qu’ils mesurent l’étendue
de toute durée non pas en nombre de jours, mais de nuits.
Livre 1 de l’Histoire
d’Aimoin.
|
|
ANNEXE 3
LA CHARTE DE LOUIS VIII DE 1147, TRADUITE PAR B.G. (2006)
Nous donnons ici
en regard le texte donné par l’édition posthume de
Fleureau de 1683 et la traduction que nous en proposons provisoirement.
Texte
latin de Fleureau (1683) |
Version française de B.G.
(1839) |
Ludovicus Dei gratia Francorum Rex,
& Dux Aquitanorum, omnibus sanctæ Eccesiæ fidelibus,
tam posteris, quam præsentibus in perpetuum.
|
Louis,
par la grâce de Dieu, roi des Français et duc des Aquitains,
à tous les fidèles de la sainte Église, tant à
venir que présents, à perpétuité.
|
Iam ad multorum notitiam reipsa extante, & attestante
pervenit, quod illustris memoriæ Pater meus, Ludovicus Dei gratia
Rex Francorum, Abbatiam Canonicorum sancti Victoris ob remedium animæ
suæ, & prædecessorum suorum à fundamentis instituit.
Hic, inter alia beneficia quæ eidem Ecclesiæ contulit, etiam
unum ex molendinis regiis, quæ sunt apud veteres Stampas, in eleemosinam
dedit. Molendina autem illa duo sunt, & juxta se ad invicem sita.
Sed quia Canonici prædicti frequenter conquerebantur quod de molendino
suo minùs habebant, quàm deberent: statuimus assensu Canonicorum, quatenùs iidem Canonici,
pro molendino suo, triginta modios frumenti, ad Stampensem modium,
per singulos annos habeant. Et ut eosdem triginta modios liberiùs,
& citiùs habete poßint.
|
Il est déjà parvenu à la connaissance
de beaucoup de gens, vu que la réalité même est patente
et en témoigne, que mon père d’illustre mémoire,
Louis par la grâce de Dieu roi des Francs, a fondé ex nihilo
l’abbaye des chanoines de Saint-Victor pour le salut de son âme et
de celles de ses prédécesseurs. C’est lui qui, entre autres
libéralités qu’il a consenties à la dite Église,
lui a encore donné à titre d’aumône l’un des moulins
royaux qui se trouvent aux Vieilles Étampes. En fait ces moulins sont
au nombre de deux et ils sont situés l’un vis-à-vis de l’autre.
Mais, comme les susdits chanoines se plaignaient fréquemment
qu’ils tiraient moins de ce moulin qu’ils ne l’auraient dû, nous avons
décidé avec l’accord des chanoines que les dits chanoines,
pour leur moulin aient pour chaque année trente muids de blé
comptés en muids d’Étampes.
|
Hoc iterum statuimus,
& statuendo præcipimus, ut annis singulis claves utriusque
molendini prædicti Canonici in festo sancti Remigii, remota
omni dilatione, & occasione, & absque ullius contradictione
accipiant: & tamdiù utrumque molendinum in sua potestate
teneant, quo usque suos 30. modios frumenti plenè, & integrè
habeant, hoc tamen determinatum est, quod Serviens Canonicorum ministerialibus
nostris fidelitatem faciet, quod nihil utrà constitutos 30. modios
ad opus Canonicorum accipiet: quibus acceptis reddentur claves utriusque
molendini ministerialibus nostris, & ipsi de cætero usque ad
prædictum terminum id quod de molendinis exiet, ad nostros usus recipient.
|
Nous
décidons donc à nouveau, et par cette décision nous
ordonnons, que les dits chanoines reçoivent chaque
année, lors de la fête de saint Rémi, les clés
de chacun de ces deux moulins, sans retard ni entrave et sans opposition
de qui que ce soit, et qu’ils gardent en leur possession chacun de ces deux
moulins aussi longtemps qu’il faudra jusqu’à ce qu’ils aient leurs
trente muids de blé pleins et entiers. Il a cependant été
précisé que l’officier des chanoines prêtera ce serment
à nos officiers: qu’il ne prendra rien au-delà des trente muids
fixés au profit des chanoines et que, quand il les aura reçu,
les clefs de chacun de ces deux moulins seront rendues à nos officiers,
et que ceux-ci prendront ensuite jusqu’au terme susdit ce qui sera produit
par ces moulins. |
Quod ne valeat oblivione deleri scripto commendavimus: &
ne possit à posteris infringi, sigilli nostri autoritate, &
nominis nostri caractere subterfirmavimus. Actum Parisius publicè
an. Incarn. Verbi MCXLVII. astantibus in Palatio nostro quorum nomina
subtitulata sunt & signa. Rodulphi Viromanduorum Comitis, & Dapiferi
nostri. Guillelmi Buticularii. Mathæi Camerarii. Mathæi Constabularii.
Data per manum Cadurci Cancellarii nostri.
Fleureau, Antiquitez..., p. 119.
|
Et pour que cela ne puisse être détruit par
l’oubli nous l’avons fait mettre par écrit; et pour que cela ne
puisse être enfreint par la postérité, nous l’avons
ci-dessous confirmé par l’autorité de notre sceau et par
le monogramme de notre nom. Fait à Paris l’an de l’incarnation du
Verbe 1147, étant présents dans notre palais ceux dont sont
portés ci-dessous les noms et les marques. De notre sénéchal Raoul, comte de Vermandois.
Du bouteiller Guillaume. Du chambrier Matthieu. Du connétable
Matthieu. Donné par la main de notre chancelier Cadurce.
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CHARTE DE SAINT LOUIS IX DE 1256
Nous donnons ici
en regard le texte donné par l’édition posthume de
Fleureau de 1683 et la traduction que nous en proposons provisoirement.
Texte donné par Fleureau
(1683) |
Traduction de B. G. (2006)
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Ludovicus Dei gratia Francorum Rex Præposito Stampensi qui pro
tempore fuerit, sal.
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Louis
par la grâce de Dieu roi des Francs au prévôt d’Étampes
qui sera en fonction en son temps, salut.
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Cum
Canonici sancti Victoris Paris. pro molendino suo, quod habebant ex
dono illustris memoriæ Ludovici Regis proavi nostri apud veteres
Stampas, habere debeant XXX. Modios frumenti ad modium Stampensem singulis
annis;
|
Attendu que les chanoines
de Saint-Victor, pour leur moulin, qu’ils avaient de par une donation
de notre arrière-grand-père le roi Louis d’illustre mémoire
aux Vieilles Étampes, devraient avoir 30 muids de blé
en muids d’Étampes,
|
mandamus tibi,
& districtè præcipimus, quatenùs prædictos
XXX. Modios frumenti, de frumento veniente ad molendinos nostros Stampenses,
si ad hoc sufficere poßit, omni dilatione seu occasione remota persolvas
eisdem, prout in charta ipsius Proavi nostri super hoc confecta, pleniùs
continetur. Quod si bladum [p.120] ad
ipsos molendinos nostros veniens, ad hoc sufficere nequeat, tu de nostro
perficias eisdem XXX. Modios memoratos.
|
nous t’ordonnons et nous te commandons strictement que tu règles
aux mêmes les susdits 30 muids de blé sur le blé
qui arrive à nos moulins étampois, s’il peut y suffire, sans
retard ni entraves, ainsi qu’il est porté plus au long dans la charte
établie à ce sujet par notre dit arrière-grand-père;
et que, si le blé arrivant à nos susdits moulins ne pouvait
y suffire, tu leur complètes les dits 30 muids en les tirant de
nos réserves.
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Actum
apud Stampas an. Domini MCCLVI. mense Decembri, Sabbato post festum
Beati Nicolai.
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Fait
à Étampes l’an du Seigneur 1256 au mois de décembre
le samedi après la fête de saint Nicolas.
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Sceau de saint Louis
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Sceau de saint Louis
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LE DE ADMINISTRATIONE DE SUGER
Version anglaise de C. Crockett
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Texte donné par C. Crockett
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Version française de B. G. (2006)
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14. Thus, in fear that the fruit of our labor might be brought
to naught for want of memory, we have committed the history of what we
have done in the Beauce to writing.
|
[p. 74] 14. Ne igitur laboris nostri fructus ex oblivione in irritum
deducatur, illa etiam quæ in Belsa auxiliante Deo augmentari
eleboravimus, scripto commendare curavimus.
|
14. Ainsi donc, pour que le fruit de notre peine ne soit
pas rendu vain par le fait de l’oubli, nous avons pris soin de noter
par écrit les biens que nous nous sommes efforcés d’augmenter
en Beauce avec l’aide de Dieu
|
The first village of St. Denis, called Guillerval, near
Saclas, given with the latter to St. Denis by King Dagobert in the enumeration
[in his charter], was for a long time-or even from the beginning-in such
a state of disorder that there was nowhere left in the village where
even the Abbot might rest his head, nor any barn nor property of the
lord. [The inhabitants] paid only 25 small muids each year (which is
to say no more than four of our muids) in rent each year for the land
which they cultivated, together with half of the rent of their houses.
|
Prima villa beati Dyonisii, quæ vocatur Guillelvalis
prope Sarclidas, in catalogo Dagoberti regis beato Dyonisio ab eodem rege
traditas [tradita? (B.G.)], usque
adeo a multis retro temporibus aut semper ita incomposita extiterat, ut
nec domus ubi etiam abbas caput reclinaret, nec granchia aliqua, nec quicquam
dominicum in tota villa [p. 76] existeret. Viginti quinque modiolos tantum, qui non excedunt
quatuor nostros modios, pro censu terrarum quas colebant, cum modico
domorum suarum censu singulis annis persolvebant.
|
Le premier domaine de Saint-Denis, qui s’appelle Guillerval-près-Saclas
dans la liste du roi Dagobert, ayant été donné
à saint-Denis par le dit roi, jusqu’à nos jours et depuis
longtemps, sinon depuis toujours, se trouvait dans un tel état
de désorganisation qu’il n’y existait ni de demeure où l’abbé
puisse reposer la tête, ni quelque grange, ni quelque réserve
seigneuriale dans tout le domaine. On s’y acquittait seulement chaque
année de vingt-cinq petits muids, qui ne valent pas plus
de quatre de nos muids, pour cens des terres qu’on y cultivait, en plus
d’une redevance minime pour sa demeure.
|
For the love of our lords the Holy Martyrs, we therefore
bought for the church three carrucates of land within this domain, which
was the source of a forty-years war between the noble and courageous man
John of Étampes, son of Pagan, and another man, a knight of Pithiviers.
By paying a considerable sum to both these men we acquired this land
and ended this war between kinsmen and friends, namely Baldwin of Corbeil
and many others, and we confirmed this with a charter. [...] |
Ad hanc igitur adaptandam ob amorem dominorum nostrorum
sanctorum Martyrum accedentes, quandam terram videlicet trium carrucarum
in eadem villa sitam, pro qua [a] quadraginta annis et ultra guerra maxima
agitabatur inter Johannem Stampensem filium Pagani, virum nobilem et strenuum,
et quendam, alium militem Pigverensem, multo sumptu apud utrumque apposito,
ecclesiæ comparavimus, et quod uterque quærebat ut neuter
haberet, nobis eam retinendo et guerræ eorum finem sic imponendo,
favore parentum et amicorum, videlicet Balduini de Corboilo et multorum
aliorum, carta nobis firmari fecimus. [...] |
Ainsi donc, pour le réorganiser par amour pour nos
saint martyrs, nous intéressant à une certaine terre, à
savoir de trois charruées, située dans le dit domaine,
pour laquelle depuis quarante ans et plus sévissait une très
grande querelle entre Jean d’Étampes, fils de Payen, homme noble
et vaillant, et un certain autre chevalier, de Pithiviers, au prix d’une
somme considérable versée à chacun d’eux, nous l’acquîmes
pour nous Église; et, en la gardant en notre possession afin qu’aucun
d’entre eux ne possède ce qu’ils voulaient tous deux, et en mettant
fin ainsi à leur querelle, grâce à la bienveillance
de leurs parents et amis, à savoir de Baudouin de Corbeil et de
beaucoup d’autres, nous nous le fîmes certifier par un document
écrit. |
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Source: Basile Fleureau, Les Antiquitez de
la ville et du Duché d’Estampes, pp. 110-121. Saisie:
Bernard Gineste, août 2006.
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BIBLIOGRAPHIE
Éditions
Édition
princeps, posthume: Dom Basile FLEUREAU
(religieux barnabite, 1612-1674),
Les Antiquitez de la ville, et du Duché
d’Estampes avec l’histoire de
l’abbaye de Morigny et plusieurs remarques
considerables, qui regardent l’Histoire generale de France
[in-4°; XIV+622+VIII p. (N.B: les pages
121-128 sont numérotées par
erreur 127-134); publication posthume par Dom Remy de
Montmeslier d’un texte rédigé en réalité
vers 1668], Paris, J.-B. Coignard, 1683.
Réédition
en fac-similé: Dom
Basile FLEUREAU,
Les Antiquitez de la ville, et du
Duché d’Estampes avec l’histoire
de l’abbaye de Morigny et plusieurs
remarques considerables, qui regardent l’Histoire
generale de France [23 cm sur 16],
Marseille,
Lafittes reprints, 1997.
Réédition
numérique en ligne (en cours
depuis 2001): Bernard GINESTE [éd.],
«Dom Fleureau: Les
Antiquitez d’Estampes (1668)», in
Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/index-fleureau.html,
2001-2006.
Ce chapitre: Bernard GINESTE [éd.],
«Dom Fleureau: Plusieurs beaux règlemens de police faits en faveur
des habitans de la ville d’Étampes par le même roi Louis VII
(1668)», in Corpus
Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-17-fleureau-b28.html,
2001-2006.
Sur Les
Recherches de la France d’Étienne Pasquier
1) Éditions sans
le 4e livre cité par Fleureau (c’est malheureusement l’édition
princeps de 1581 qu’a choisi de mettre en ligne la BNF)
Étienne PASQUIER (1529-1615:
écrivain français, et latin sous le nom de Stephanus
PASCHASIUS, historien des lettres françaises et des traditions
nationales, poète, avocat au Parlement de Paris à partir
de 1549, puis avocat général près la Chambre
des comptes à partir de 1585), Des recherches de la France.
Livre 1er. Plus: Un pourparler du Prince [in-8°; pièces
liminaires; 100 ff.; vec une ode de Remy Belleau Sur les
recherches de E. Pasquier], Paris, Le Magnier & V. Sertenas,
1560.
Étienne PASQUIER, Des Recherches
de la France, livre premier, plus Un pourparler du prince [2 tomes
en 1 volume in-16; 115 ff.], Orléans, P. Trepperel, 1567.
Étienne PASQUIER, Des Recherches
de la France, livres premier et second, plus Un pourparler du prince
[in-16; 239 ff.; table], Paris, P. L’Huillier, 1569. Paris, C. Micard,
1571.
Étienne PASQUIER, Des recherches
de la France, livre premier et second, plus Un pourparler du prince
et quelques dialogues [in-16; 246 ff. & 49 p. de table], Paris,
Gilles Robinot, 1581. Dont une réédition numérique
en mode image par la BNF sur son site Gallica, «Pasquier,
Étienne (1529-1615). Des recherches de la France, livre premier
et second, plus…», http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1104469,
en ligne en 2006.
2) Éditions avec le 4e
livre allégué par Fleureau
Étienne
PASQUIER, Les Recherches de la France, reveuës &
augmentées de quatre livres [36 cm; 4+379 p.], Paris, Jamet
Mettayer & Pierre L’huillier, 1596.
Étienne PASQUIER, Les recherches
de la France d’Estienne Pasquier, reveues et augmentées d’un
livre et de plusieurs chapitres par le mesme autheur [in-4°;
1175 p. & table des matières; portrait; portrait; ouvrage en
7 livres], Paris, L. Sonnius, 1607.
Étienne PASQUIER, Des recherches
de la France. Livre premier. Plus un pourparler du prince. Le tout par
Estienne Pasquier, advocat en la cour de parlement de Paris, augmentées
en ceste dernière édition de trois livres entiers, outre
plusieurs chapitres entrelassez en chacun des autres livres, tirez de
la bibliothèque de l’autheur [in-f°; pièces liminaires;
1019 p. & table], Paris, Sonnius, 1621. Paris, O. de Varennes, 1633.
Paris, P. Ménard, 1643.
Étienne PASQUIER, Les Recherches
de la France d’Estienne Pasquier,... reveuës, corrigées,
mises en meilleur ordre et augmentées en cette dernière
édition de trois livres entiers, outre plusieurs chapitres entrelassez
en chacun des autres livres, tirez de la bibliothèque de l’autheur
[in-f°; table des chapitres & 919 p. & table des matières],
Paris, L. Billaine & de Luynes, 1665.
Étienne PASQUIER, «Recherches
de la France», in ANONYME [éd.], Œuvres d’Estienne Pasquier
contenant ses recherches de la France, son plaidoyé pour M.
le duc de Lorraine, celuy de Me Versoris pour les jesuites contre l’Université
de Paris, Clarorum virum ad Steph. Pasquierium carmina, epigram matum
libri sex, epitaphiorum liber, iconum liber cum nonnullis Theod. Pasquierii
in Francorum regum icones notes, ses lettres, ses œuvres meslées
et les lettres de Nicolas Pasquier fils d’Etienne [2 volumes in-f°;
4+XXII p. & 1364 cc.; 4+XLIX & 1482 cc.], Amsterdam (Trévoux),
aux dépens de la Compagnie des libraires associez, 1723. Dont
une réédition en fac-similé réduit: Étienne
Pasquier. Œuvres complètes [31 cm; 2 volumes reliés;
XXII+1363 & XVIII+1482 p.; au 2e volume les Œuvres mesléesPremier
& second livre du Monophile, Colloques d’amour,
Lettres amoureuses, Les jeux poétiques
& La puce ou Jeux poétiques françois et latins],
Genève, Slatkine & Paris, Champion], 1971.
Marie-Luce DEMONET, Jean-Pierre DUPOUY,
Raymond ESCLAPEZ et alii [éd.], Étienne Pasquier.
Les recherches de la France; éd. critique commentée par
Marie-Luce Demonet, Jean-Pierre Dupouy, Raymond Esclapez... [et
al.], avec la collab. de Claude Blum, Paul Bouteiller, Fabrice Iacono...
[et al.], sous la dir. de Marie-Madeleine Fragonard et François
Roudaut [23 cm; 3 volumes; 2275 p.; bibliographie pp. 2133-2176;
index], Paris, H. Champion [«Textes de la Renaissance» 11,
1-3], 1996 [ISBN 2-85203-622-3].
Quelques
publications sur les chartes de Louis VII
Voyez
notre bibliographie provisoire au chapitre précédent.
Manuscrit, éditions et traductions
du De
Administratione sua de Suger
1) Manuscrit unique: BNF manuscrit latin n°
13835 (anciennement n° 1072 du fonds de saint-Germain, provenant
de Saint-Denis). Ce manuscrit, qu’on peut dater des environs de 1160-80,
porte un titre dû à une main postérieure datable
du XIVe ou du XVe siècle, Gesta Suggerii abbatis («
Histoire de l’abbé Suger). Il a été décrit
pour la première fois par DOUBLET (Histoire de l’abbaye de Saint-Denis,
1625).
2) Édition
princeps: Andreas DU CHESNE (André DUCHESNE, 1584-1640)
& Fransciscus DU CHESNE (François, son fils & continuateur,
1616-1693), «Sugerrii abbatis liber de rebus in administratione
sua gestis», in ID., Historiae Francorum scriptores coaetanei...
quorum plurimi nunc primum ex variis codicibus mss. in lucem prodeunt,
alii verò auctiores et emendatiores; cum epistolis regum, reginarum,
pontificum, ducum, comitum, abbatum et aliis veteribus rerum Francicarum
monumentis opera ac studio filii post patrem Francisci Du Chesne [in-f°;
«Auteurs de l’Histoire des Francs contemporains des faits… dont la
plupart sont édités pour la première fois à
partir de divers ouvrages manuscrits, tandis que les autres le sont plus
au long et plus correctement; avec les lettres des rois, des reines, des
évêques, des ducs, des comtes, des abbés et les autres
anciens monuments des affaires de la France, par les soins et le travail
du fils d’André Duchesne, François, après la mort de
son père», Lutetiae Parisiorum (Paris), sumptibus S. Cramoisy
(Sébastien Cramoisy), 1636-1649, tome IV (1641), pp. 331-350.
3) Dom Michel FÉLIBIEN (bénédictin
de la congrégation de Saint-Maur, 1665-1719), «Sugerrii
abbatis liber de rebus in administratione sua gestis» [reprise
du texte établi par DUCHESNE], in ID., Histoire de l’abbaye
royale de Saint Denis en France, contenant la vie des abbez qui l’ont gouvernée
depuis onze cent ans, les hommes illustres qu’elle a donnez à
l’Église et à l’État, les privilèges accordez
par les souverains pontifes et par les evêques, les dons des rois,
des princes et des autres bienfaiteurs, avec la description de l’église
et de tout ce qu’elle contient de remarquable, le tout justifié
par des titres authentiques et enrichi de plans, de figures et d’une carte
topographique par dom Michel Félibien [in-f°; pièces
liminaires; 592+CCXXIII p. & table ; planches ; figures; carte; en
appendice, choix de textes en latins et français (dits «preuves»);
index], Paris, Frédéric Léonard, 1706. [dont une
réédition en fac-similé (28 cm; LIV+592+CCXXIII
p.; 11 dépliants; illustrations; avec une introduction d’Hervé
PINOTEAU), Paris, Éd. du Palais-Royal, 1973 (ISBN 2-7777-0067-2)],
pp. CLXXII & suivantes.
4) François CLÉMENT &
Michel-Jean-Joseph BRIAL (1743-1828) (bénédictins de
l’ordre de Saint-Maur) [éd.], «Sugerrii
abbatis liber de rebus in administratione sua gestis» [reprise de la deuxième partie seulement du texte établi
par DUCHESNE], in ID., Rerum
Gallicarum et Francicarum Scriptores. Tomus duodecimus (Novæ Collectionis
Historicorum Franciæ tomus duodecimus) – Recueil des Historiens
des Gaules et de la France. Tome douzième, contenant ce qui s’est
passé sous les trois règnes de Philippe 1er, Louis VI dit
le Gros, et de Louis VII surnommé le Jeune, depuis l’an MLX jusqu’en
MCLXXX, par des religieux bénédictins de la Congrégation
de Saint-Maur [in-8°; LVI+1013 p.; sommaire: p. LVI], Paris,
Imprimerie Royale, 1781 [dont une réédition: Léopold
DELISLE (membre de l’Institut, 1826-1910) (éd.), Recueil
des historiens des Gaules et de la France. Tome douzième, édité
par des religieux bénédictins de la Congrégation
de Saint-Maur. Nouvelle édition publiée sous la direction
de M. Léopold Delisle (mêmes texte & pagination), Paris,
Victor Palmé, 1877; dont une réédition en microfiches:
Doetinchem, Microlibrary Slangenburg Abbey, années 1990; dont une
réédition numérique en mode image par la BNF sur
son site Gallica, http://visualiseur.bnf.fr/Visualiseur?Destination=Gallica&O=NUMM-50130,
1995 (en ligne en 2006)], pp. 96-102.
5) Jacobus-Paulus MIGNE (Jacques-Paul
MIGNE, 1800-1875) [éd.], Sugerii abbatis s. Dionysii Opuscula
et epistolae nunc primum in unum collecta. accedunt Roberti Pulli
S. R. E. cardinalis et cancellarii. Josleni Suessionensis. Zachariae
Chrysopolitani, episcoporum. Zachariae Ignotae Sedis episcopi.
Willelmi Sandionysiani monachi: scripta vel scriptorum fragmenta
quae extant, accurante J.-P. Migne [in-8°], Paris, Migne
[«Patrologiae cursus completus omnium SS. Patrum, doctorum
scriptorumque ecclesiasticorum sive Latinorm, sive Graecorum . Patrologia
Latina»
186], 1854 [dont deux rééditions en fac-similé
(29 cm; 1528 colonnes), Turnholti (Turnhout, Belgique) Brepols, 1971.
1993], cc. 1211-1240.
6) Deuxième édition: Albert LECOY DE LA MARCHE
(archiviste aux Archives nationales, 1839-1897) [éd.],
Œuvres complètes de Suger recueillies, annotées
et publiées d’après les manuscrits pour la Société
de l’Histoire de France [in-8°; XXIV+488 p.; texte de
l’œuvre en latin et commentaire en français moderne; contient
aussi la Sugerii vita de Guillaume de Saint-Denis;
bibliographie pp. XXI-XXIII], Paris, Vve de J. Renouard [«Societé de l’histoire de
la France» 139], 1867, pp. 151-209.
7) Erwin
PANOFSKY (historien de l’art germano-étatsunien) [éd.
et traducteur en anglais], Abbot Suger on the Abbey Church of
St. Denis and Its Treasures [texte de LECOY DE LA MARCHE et traduction
anglaise de la deuxième partie (chapitres 24 et suivants)], 1958
[réimpression: University of California Press, 1979 (ISBN: 0691003149)].
8) Michel BUR [traducteur], «Mémoire sur son administration abbatiale», in ID., Suger abbé de Saint-Denis. La geste
de Louis VI et autres œuvres [16 cm sur 25; 302 p.; traduction
de trois ouvrages: La geste de Louis VI; Fragment de la vie de Louis
VII; Mémoire sur son administration abbatiale], Paris, Imprimerie
Nationale [«Acteurs de l’histoire»], 1994 [ISBN: 2110812060].
9) Troisième
édition: Françoise GASPARRI [éd. et trad.],
«L’œuvre administrative de l’abbé Suger de Saint-Denis»,
in ID., Suger. Œuvres. tome I. Écrit sur la consécration
de Saint-Denis - L’œuvre administrative de l’abbé Suger de Saint-Denis
- Histoire de Louis VII [20 cm; ], Paris, Les Belles Lettres
[«Les classiques de l’histoire de France au moyen age » 37],
1996, pp. 54 & suivantes.
10) Christopher CROCKETT [éd.]
«Abbot Suger of Saint-Denis On his Administration» [texte
latin repris de l’édition de Lecoy de la Marche, scanné
et corrigé d’après celui de l’édition de Gasparri,
avec une nouvelle traduction anglaise], in ID., Centre des Études
chartraines. A home on the Web for Chartres-related Scholarship, http://www.ariadne.org/cc/sources/suger1.html,
en ligne en 2006.
Éditions des Lettres de Suger
Andreas &
Franciscus DU CHESNE, Op. cit., 1641, pp. ?-?.
François GASPARRI [éd.
et trad.], Suger. Œuvres. Tome 2. Lettres de Suger. Chartes
de Suger. Vie de Suger par le moine Guillaume. Texte établi, traduit
et commenté par Françoise Gasparri [20 cm; XLIX+420
p.; 14 p. de fac-similé; texte latin et traduction française
en regard; bibliographie additionnelle pp. XLV-XLIX; index] les Belles
lettres [«Les classiques de l’histoire de France au Moyen âge»],
2001 [ISBN 2-251-34052-1].
Les Antiquités de Paris
par Jacques du Breul
Jacques DU BREUL [éd. & continuateur] et Gilles CORROZET
(1510-1568) [premier auteur], Les antiquitez et choses plus
remarquables de Paris, recueillies par M. Pierre Bonfons et depuis
augmentées par F. Jacques du Breul, religieux de l’Abbaye
Saint-Germain des Prez [petit in-8°; XXII+450 p.; 27 figures
in-texte gravées sur bois par Rotel], Paris, Nicolas &
Pierre Bonfons, 1608.
Dom Jacques DU BREUL,
Le Théâtre des antiquités de Paris,
où est traicté de la fondation des églises
et chapelles de la cité, Université, ville et diocèse
de Paris, comme aussi de l’institution du parlement, fondation
de l’Université et colléges, et autres choses remarquables,
divisé en quatre livres, par le R. P. F. Jacques Du Breul
[in-4°; XVI+1310 p.; la table; figures], Paris, Claude de La
Tour & P. Chevalier, 1612.
D. H. I. (avocat en
Parlement) [continuateur anonyme] & Dom Jacques DU BREUL
[premier auteur], Le Théâtre des antiquités
de Paris, où est traité de la fondation des églises
et chapelles de la cité, Université, ville et diocèse
de Paris, comme aussi de l’institution du parlement, fondation
de l’Université et colléges, et autres choses remarquables,
divisé en quatre livres, par le R. P. F. Jacques Du Breul. Augmenté
en cette édition d’un supplément contenant le nombre
des monastères, églises, l’agrandissement de la ville
et fauxbourgs qui s’est faict depuis l’année 1610 jusques à
présent [2 parties en 1 volume in-4°; pièces
liminaires, 974+104 p.; table], Paris, Société des imprimeurs,
1639.
Sur la Chronique
de Morigny
Les Antiquitez de Corbeil par De la Barre
Jean de LA BARRE (prévôt de Corbeil), Les Antiquitez
de la ville, comté et chatelenie de Corbeil, de la recherche de
Me Jean de La Barre [in-4°; 280 p.; pièces liminaires;
table], Paris, N. et J. de La Coste, 1647.
Toute critique,
correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or
contribution welcome.
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