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[extrait concernant le pays étampois] |
A l’occasion de l’inauguration de la ligne de chemin de fer de Paris à Tours le 26 mars 1846, le journal L’Illustration publie une description de cet itinéraire, «numéro spécial destiné à à servir, pendant de nombreuses années, de guide pittoresque à tous les voyageurs qui iront de Paris à Tours»; ce numéro est illustré de 41 gravures dont quatre concernent le pays étampois: nous les avons mises en ligne par ailleurs. |
Chamarande |
Notre-Dame |
Saint-Basile |
Saint-Martin | Tranchée d’Étampes |
L’Illustration
VII.161 (samedi 28 mars 1846), pp. 51-62
Chemin de fer de Paris
à Bordeaux.
Première section, de Paris à Tours. [extrait, pp. 54-55] [...] DE PARIS À ÉTAMPES [...]
A peu de distance se rencontre la station de Brétigny, dont nous ne dirions rien si ce village, peu important et composé de nombreux hameaux, n’avait été le théâtre de la signature du fameux traité de Brétigny. Son église, située sur un mamelon, se nomme le Guet-Saint-Pierre. Il nous faut abandonner pour quelques instants les riants coteaux, les vertes vallées; nous sommes sur le plateau qui sépare la vallée de l’Orge de celle d’Étampes, ou de la Juine. Là des champs bien cultivés, mais monotones. Patience! Bientôt nous allons encore admirer; de belles habitations, de grands et nobles parcs passeront sous nos yeux. Il faut bien se reposer un peu. Marolles est le premier point que l’on rencontre après Brétigny. Ce que nous avons dit de Brétigny peut s’appliquer à Marolles. Mais ici nous sommes entrés dans la vallée de la Juine, et l’influence bienfaisante de l’eau se fait déjà sentir; un des premier à en profiter est le vaste parc du Mesnil, entourant le château du même nom; il appartient à M. le duc de Choiseul. Une vaste échappée de vue nous permet de voir sur notre gauche une aile de ce château, et ce que l’on en aperçoit fait vivement regretter de ne pas en voir davantage. Peu après on arrive au charmant village de Lardy, situé au fond de la vallée et environné d’énormes plantations de peupliers et d’arbres fruitiers de toutes sortes. M. le comte Jaubert possède auprès de Lardy un délicieux ermitage. Le château de Gillevoisin est petit, mais qu’il est bien entouré! Situé au fond d’une vallée, rien n’est plus frais, plus agreste que les environs de cette charmante habitation. Torfou, que l’on aperçoit à une demi-lieue sur la hauteur à droite, a un télégraphe. Depuis Marolles, la voie de fer a décrit une courbe fort sensible. En arrivant près de Chamarande, elle en décrit une dans un autre sens, ce qui permet de voir le noble château de Chamarande sous deux aspects différents. Ce château, qui date du dix-septième siècle, est bâti en briques et en grès. Une noble avenue conduit à l’entrée principale; de vastes dépendances, des communs d’une dimension peu ordinaire l’entourent. Son parc est une véritable forêt. Ce manoir, d’un aspect tout à fait majestueux et grand, est remarquable également par la beauté de ses eaux. Il appartient à M. le marquis de Talaru. Dans les environs se trouvent plusieurs tuileries. La campagne qui l’entoure, semée de rochers de grès, est pittoresque et agreste. Étréchy, station du chemin de fer, est un assez grand bourg fermé de murs, traversé par la route royale d’Orléans et longé par le chemin de fer, qui le laisse à sa droite, tandis que, vers la gauche, l’œil se repose avec plaisir sur la délicieuse vallée de la Juine, dans laquelle on aperçoit à travers les arbres les villages d’Auvers, de Saint-Georges, le château de Gravelle et celui de Jeure, dont le parc, arrosé par la Juine, est vaste et bien planté. De l’autre côté de la rivière on distingue Morigny avec sa belle église jadis abbatiale. Un peu plus loin, la route d’Orléans traverse sous la voie de fer, élevée à cet endroit au moyen d’un énorme remblai; la Juine donne la vie à un grand nombre d’usines; nous citerons entre autres le moulin dit de Pierre-Brou, d’une architecture originale, construit avec élégance, et cependant bien approprié à sa destination. Mais déjà nous approchons d’un des centres d’action du chemin de fer d’Orléans, d’un établissement important de cette entreprise, qui en compte déjà tant; au sortir d’une vaste tranchée, image de la solitude, on se trouve tout à coup transporté au milieu de l’activité la plus grande; on entre dans la gare d’Étampes. ÉTAMPES
Rien de pittoresque comme l’aspect que présente cette ville; le chemin de fer la domine de toutes parts, et il est lui-même dominé par une tour qui fait l’orgueil des habitants d’Étampes, la tour de Guinette. Que dirons-nous des établissements du chemin de fer, qui ne puisse être appliqué à tous les autres de cette vaste entreprise? Tout y est tracé sur une grande échelle; tout est construit avec solidité, simplicité, pas d’ornements inutiles, mais tout ce qui peut rendre le service plus facile y est prodigué. La gauche de la gare est occupée par les bâtiments de l’embarcadère, salle de voyageurs, bureaux des bagages, etc., etc. En face se trouve le buffet, que les voyageurs, pendant le temps d’arrêt que le convoi fait à Étampes, trouvent toujours garni d’une manière convenable. Du même côté, on peut voir d’abord une vaste remise où sont à couvert soit les voitures de rechanges placées au centre de la ligne dans les prévisions des besoins du service, soit celles destinées au service direct d’Étampes à Paris; à côté, un grand bâtiment formant un octogone régulier, dont le toit, percé de fenêtres, verse une lumière abondante, sert de remise à douze machines toujours en bon état; quatre portes, placées à angle droit, donnent accès dans l’intérieur du bâtiment; des magasins spacieux, pour abriter les marchandises, complètent l’ensemble de cette gare, qui, par sa position entre les deux points extrêmes de la ligne de paris à Orléans, est le centre d’un mouvement d’autant plus grand, qu’Étampes, fournissant à peu près la moitié des farines nécessaires à la consommation de Paris, le transport en est effectué par le chemin de fer, qui s’est naturellement trouvé de ces importants envois. Ne passât-on qu’une demi-heure à Étampes, il faut solliciter de madame de Bourraine, la permission de visiter sa maison située vers Saint-Basile. Ce manoir, admirablement bien conservé, date du quatorzième siècle. Il fut habité par Diane de Poitiers. La tour de Guinette, qui domine la gare, est un reste de l’ancien château construit par le roi Robert, qui séjourna longtemps à Étampes; c’est dans ce château qu’il répudia la reine Berthe, son épouse. Le roi Louis VI, dit le Gros, y a tenu les états; la tour de Guinette se compose de quatre tours semi-circulaires, engagées l’une dans l’autre, et c’est un reste précieux de l’architecture militaire de la fin du dixième siècle. Si vous vous arrêtez à Étampes, visitez surtout les quatre églises, Notre-Dame-du-Fort, Saint-Basile, Saint-Gilles et Saint-Martin. Pour nous, nous continuons notre route; mais tous les enchantements, les verdoyantes vallées devant lesquelles nous avons passé pour venir de Paris ne se présenteront plus d’ici Orléans; nous entrons en pleine Beauce, et, bien que nous ne partagions pas l’opinion du joyeux curé de Meudon qui affirme qu’autrefois la Beauce était couverte d’arbres, et que c’est le cheval de Gargantua qui, d’un coup de queue, les a tous abattus, nous devons avouer que, par cette raison ou par toute autre, un arbre est chose rare dans ce monotone pays de plaine qui porte, il est vrai, de riches moissons, mais n’en est pas moins ennuyeux à parcourir même en chemin de fer. D’ÉTAMPES À ORLÉANS
En sortant de la gare, la voie longe la promenade de la ville, qui consiste en une allée d’arbres, élevée au-dessus du chemin et soutenue par un mur. On passe sous un pont qui communique de la ville à la tour de Guinette. Le chemin, construit au sommet d’un énorme remblai qui franchit la vallée de la Louette, commence à prendre une pente assez sensible; aussi, semblable aux chevaux de renfort que l’on attelle aux montées rudes de nos anciennes grandes routes, est-on obligé de mettre une seconde locomotive pour aider à gravir lapente. A peine est-on sorti du remblai de la vallée de la Louette que l’on entre dans une profonde tranchée que l’on parcourt pendant environ trois kilomètres, et l’on en sort que pour entrer dans ces interminables plaines de la Beauce, dans lesquelles l’œil cherche en vain autre chose que du blé et du chaume, selon la saison dans laquelle il parcourt ce pays. Aussi notre rôle de cicerone se bornera à une simple nomenclature de noms; qui a vu un des villages de cette partie de la France, les a tous vus; qui aregardé un de leurs clochers, les connaît tous. La première station est Angerville; mais, avant d’y arriver, on passe devant Mondésir, Monnerville et Dommerville; peu avant la station, la route royale passe du côté gauche du chemin de fer au côté droit; et, jusqu’à Orléans, on ne la perd pas de vue. A peu de distance d’Angerville, on entre dans le département d’Eure-et-Loir. D’Angerville à Toury, — station du chemin de fer,— on passe à côté de Champilory; la Chapelle-Saint-Blaise, Château-Gaillard, [p.55] sont situés entre Toury et Artenay; avant ce dernier point, on passe du département d’Eure-et-Loir dans celui du Loiret; la Croix Briquet précède de peu la station de Chevilly , et l’on entre dans la forêt d’Orléans ou de Cercottes. Etc. |
BIBLIOGRAPHIE PROVISOIRE
Éditions
ANONYME, «Chemin de fer de Paris à Bordeaux», in L’Illustration. Journal universel VII/161 (samedi 28 mars 1846), pp. 51-62 [avec 41 gravures de Philémon Blanchard et Adrien Dauzats et 4 cartes], dont une réédition partielle par le Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-19-18460328illustration.html, 2005 [le texte concernant les environs d’Étampes est pp. 54-55 & les gravures concernant Chamarande et Étampes pp. 53 & 56-57]. Numéro suivant
ANONYME, «Inauguration du chemin de fer de Paris à Bordeaux», in L’Illustration. Journal universel VII/162 (samedi 4 avril 1846), pp. 65-66 [avec une gravure de Pharamond Blanchard p. 1: «Inauguration du chemin de fer de Paris à Tours. — 26 mars 1816. — Bénédiction des machines, par mons. 1’archevêque de Tours.»], dont une réédition partielle par le Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-19-18460404illustration.html, 2005. Bernard GINESTE [éd.], «L’Illustration du 4 avril 1846: Grivellerie en gare d’Étampes (26 mars 1846)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-19-18460404illustration.html, 2005. Merci de vos critiques, remarques ou
contributions.
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