Corpus Latinum Stampense
 
Louis VII
Don d’une foire aux moines de Longpont
Étampes, 1142
   
Eglise de Longpont (Gravure de L. Gaucherel)
Statue de Notre-Dame (Gravure de L. Gaucherel)
Portail de l'Eglise de Longpont (Gravure de L. Gaucherel)
    
     En 1142, alors que Louis VII est à Étampes, Pierre, prieur de Longpont, accompagné de Macaire, abbé de Morigny, obtient du roi la concession d’une foire d’une semaine chaque année du 7 au 15 septembre. Lisez aussi la lettre que Louis VII écrivit aux chevaliers de Montlhéry pour les prévenir de ne pas attenter à cette franchise. On remarquera que Louis VII a donné plusieurs chartes relatives à Étampes, et notamment un droit de foire à la maladrerie d’Étampes, dont nous avons donné une traduction en Annexe à un chapitre de Fleureau

     La saisie des textes anciens est une tâche fastidieuse et méritoire. Il ne faut pas décourager ceux qui s’y attellent en les pillant sans les citer.

 
Louis VII
Don d’une foire aux moines de Longpont
Étampes, 1142
1. Première traduction (2008)

     In nomine sancte ac individue Trinitatis. Ego Ludovicus, Dei gratia, rex Francorum & dux Aquitanorum, notum facimus universis, presentibus pariter & futuris, quoniam
     Au nom de la sainte et indivise Trinité. Moi Louis, par la grâce de Dieu roi des Francs et duc des Aquitains, nous faisons savoir à tous, présents autant qu’à venir, ceci.
     nostram adiere presentiam domnus abbas Macharius Mauriniacensis & Petrus, prior sancte Marie Longi Pontis, humiliter deposcentes quatenus, pro animarum patris mei & matris mee predecessorumque meorum remedio, nundinas quasdam, quas ferias vulgariter appellamus (1), ecclesie sancte Marie Longi Pontis in perpetuum possidendas concederemus.
     En notre présence sont venus monseigneur l’abbé de Morigny, Macaire, et Pierre, prieur de Notre-Dame de Longpont, requérant humblement que, pour le salut des âmes de mon père, de ma mère, et de celles de mes prédécesseurs, nous concédions à l’église de Notre-Dame de Longpont un marché que nous appelons en langage courant foire (1), pour qu’elle en jouisse à perpétuité.
     Quorum peticionem misericorditer amplectentes, ecclesie sancte Marie Longi Pontis nundinas, a vigilia nativitatis beate Marie que colitur in septembri usque ad octabas continue perdurantes, concessimus.
     Accueillant avec joie leur demande, nous avons concédé à l’église Notre-Dame de Longpont la foire qui se tient sans interruption depuis la veille de la nativité de Notre-Dame qui se célèbre en septembre jusqu’à l’octave de cette fête [c’est-à-dire du 7 au 15 septembre].
     Forum (1) quoque de Monte Leherico, quod infra octabas evenerit, apud Longum Pontem sicut & feria tenebitur. Remisimus etiam in manu (2) jamdicti Petri, prioris, & ecclesie Longi Pontis omnes justicias & consuetudines ad easdem ferias pertinentes, pedagio & conductu nostro excepto.
     De plus le marché (1) de Montlhéry qui aura lieu avant l’octave se tiendra à Longpont comme aussi la foire. Nous avons mis dans la main (2) du susdit prieur Pierre, et de l’église de Longpont, toutes les juridictions et tous les droits coutumiers relatifs à la dite foire, à l’exception du péage et de notre droit de sauf-conduit.
     De Monte autem Leherico hospitantibus ad easdem nundinas venientibus vel ab eisdem redeuntibus ne aliquis minister noster aliquas justicias faciat, nisi eos in presenti forisfacto invenerit, instituimus.
     Quant à ceux des habitants de Montlhéry qui viendront à la dite foire ou qui en reviendront, nous avons décrété qu’aucun de nos officiers n’en tirera justice, à moins qu’il ne les prenne en flagrant délit.
     Dum autem ipsi mercatores in castello nostro erunt, si aliquid vendiderint vel emerint, theloneum nostrum & quod consuetudinarium est habebimus.
     Cependant, tant que les dits négociants seront dans notre place forte, s’ils y vendent ou achètent quelque chose, nous percevrons notre tonlieu et nos droits coutumiers.
     Pretaxatus vero prior totusque ecclesie illius conventus karitative (3) nobis donaverunt quod anniversarium patris nostri nostreque matris pariterque nostrum, post obitum nostrum, in ecclesia sancte Marie Longi Ponti quotannis celebraretur. 
     Quant au susmentionné prieur et à toute la communauté de ce monastère, il nous ont accordé par charité (3) que l’anniversaire de notre père et de notre mère, ainsi que le nôtre après notre décès, serait célébré chaque année dans l’église Notre-Dame de Longpont.
     Verum, ut hoc ratum & [p.65] firmum permaneat in sempiternum, scripto commendari, sigilli nostri auctoritate muniri nostrique nominis subter inscripto karactere corroborari precepimus.
     Et pour que cela reste établi et ferme à jamais, nous avons ordonné de le mettre par écrit, de le garantir par l’autorité de notre sceau et de le certifier par le monogramme de notre nom porté ci-dessous.
     Actum publice, Stampis, anno incarnati Verbi millesimo C° XL° II°, regni vero nostri VI°, astantibus in palacio nostro quorum nomina subtitulata sunt & signa:      Fait publiquement à Étampes, l’an de l’incarnation du Verbe 1142 et 6 de notre règne, en présence dans notre palais de ceux dont ont été portés les noms et les marques.
     Signum Radulfi, Viromandorum comitis, dapiferi nostri. S. Guillelmi, buticularii. S. Mathei, camerarii. S. Mathei, constabularii.
     Marque de notre sénéchal Raoul comte de Vermandois. Marque du bouteiller Guillaume. Marque du chambrier Mathieu. Marque du connétable Mathieu.
     Data per manum Cadurci, cancellarii.
     Donné par la main du chancelier Cadurque.
Sceau de Louis VII
Sceau de Louis VII


NOTULES

     (1) Précisons ici le sens de trois mots, forum, feriae et nundinae.
     
Forum désigne en latin classique, essentiellement, la place où se tenait le marché. Il garde en latin médiéval le sens de marché, généralement hebdomadaire.
    
Feriae est en latin classique au pluriel et signifie “jours consacrés au repos, jours fériés, fêtes”. En latin chrétien, il a parfois été utilisé au singulier, feria, pour désigner les jours de la semaine en évitant les dénominations d’origines païenne (ainsi mercredi, “jour de Mercure” devenait la 4e férie). En ancien français, il a donné feire (attesté dès vers 1130 selon le Dictionnaire historique de Rey), d’où le moderne foire, parce que les grands marchés à date et lieu fixes se tenaient alors à l’occasion de fêtes religieuses. Ici le mot est clairement une transposition de l’ancien français feire, “foire”, bien qu’il soit au pluriel, par influence du pluriel de nundinae autant que par référence au pluriel original du latin classique. Plus bas il revient spontanément au singulier, puis à nouveau au pluriel. Dans le mandement aux chevaliers de Montlhéry, on a le singulier, plus proche de la langue parlée.
Cérémonie d’hommage féodal (XIIIe siècle)     
Nundinae (où l’on sous-entendait au départ feriae) désignait originellement le marché qui se tenait à Rome tous les neuvièmes jours, c’est-à-dire selon notre façon de compter, tous les huits jours; puis tout marché ou trafic. C’est ici un mot de latin savant, sans substrat en français ancien. (B.G)

     (2) Mettre un bien dans la main de quelqu’un, c’est ce qu’on appellera plus tard la lui donner à fief, par allusion au geste rituel de l’hommage.

     (3)
Karitative, “par charité”, c’est-à-dire “par pur amour chrétien” signifie techniquement qu’il ne s’agit ni d’une transaction ni même d’un contre-don, mais d’une marque désintéressée d’amour entre chrétiens; on nie avoir passé une transaction, car il ne saurait être question, du moins en théorie, d’acheter des prières ou des messes (B.G.).

 
Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
2. Texte et notes de Marion (1879)

     In nomine sancte ac individue Trinitatis. Ego Ludovicus (1), Dei gratia, rex Francorum & dux Aquitanorum, notum facimus universis, presentibus pariter & futuris, quoniam nostram adiere presentiam domnus abbas Macharius Mauriniacensis & Petrus, prior sancte Marie Longi Pontis, humiliter deposcentes quatenus, pro animarum patris mei & matris mee predecessorumque meorum remedio, nundinas quasdam, quas ferias vulgariter appellamus, ecclesie sancte Marie Longi Pontis in perpetuum possidendas concederemus. Quorum peticionem misericorditer amplectentes, ecclesie sancte Marie Longi Pontis nundinas, a vigilia nativitatis beate Marie que colitur in septembri usque ad octabas continue (2) perdurantes, concessimus. Forum quoque de Monte Leherico, quod infra octabas evenerit, apud Longum Pontem sicut & feria tenebitur. Remisimus etiam in manu jamdicti Petri, prioris, & ecclesie Longi Pontis omnes justicias & consuetudines ad easdem ferias pertinentes, pedagio & conductu (3) nostro excepto. De Monte autem Leherico hospitantibus ad easdem nundinas venientibus vel ab eisdem redeuntibus ne aliquis minister noster aliquas justicias faciat, nisi eos in presenti forisfacto invenerit, instituimus. Dum autem ipsi mercatores in castello nostro erunt, si aliquid vendiderint vel emerint, theloneum nostrum & quod consuetudinarium est habebimus. Pretaxatus vero prior totusque ecclesie illius conventus karitative nobis donaverunt quod anniversarium patris nostri nostreque matris pariterque nostrum, post obitum nostrum, in ecclesia sancte Marie Longi Ponti quotannis celebraretur. Verum, ut hoc ratum & [p.65] firmum permaneat in sempiternum, scripto commendari, sigilli nostri auctoritate muniri nostrique nominis subter inscripto karactere corroborari precepimus. Actum publice, Stampis, anno incarnati Verbi millesimo C° XL° II°, regni vero nostri VI°, astantibus in palacio nostro quorum nomina subtitulata sunt & signa: Signum Radulfi, Viromandorum comitis (4), dapiferi nostri. S. Guillelmi, buticularii. S. Mathei, camerarii. S. Mathei, constabularii.
     Data per manum Cadurci, cancellarii.
1142.

     (1) Louis VII le Jeune.








     (2) Du 7 au 15 septembre.



     (3) Conductus est le droit payé au seigneur pour la sauvegarde des marchandises amenées à la foire. (Voy. du Cange: v° Conductus, 2.)








     (4) Raoul Ier, dit le Vaillant, & le Borgne. — 1102 — 1151.




        
Source du texte: L’édition de Jules Marion (1879).
 
   
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE ET PROVISOIRE
 
Éditions (seront davantage précisées ultérieurement)

     Jules MARION, Le Cartulaire du Prieuré de Notre Dame de Longpont de l’ordre de Cluny au diocèse de Paris, publié pour la première fois avec une Introduction et des Notes. XIe-XIIe siècle [in-8°; 371 p.; 3 planches; texte latin; index], Lyon, A. Louis Perrin  & Marinet, 1879, n°III, pp. 64-65.
     Dont une réédition numérique en mode image par la BNF sur son site Gallica, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k111131d
, en ligne en 2008.

     Bernard GINESTE [éd.], «Louis VII: Don d’une foire aux moines de Longpont (Étampes, 1142)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cls-12-louis7longpont1142.html, 2008.
 
 Textes corrélatifs

     Bernard GINESTE [éd.], «Louis VII: Don d’une foire aux moines de Forges-les-Bains (1140)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cls-12-louis7forgeslesbains1140.html, 2008.

     Bernard GINESTE [éd.], «Louis VII: Mandement aux chevaliers de Montlhéry (sans doute à Étampes en 1142)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cls-12-louis7chevaliersdemonthery1142.html, 2008.

 

Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.

    
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