Essais historiques sur
la ville d’Étampes
Étampes, Fortin, 1837, tome 2
Chapitre XXI et Notes II et III, pp. 129-142 & 213-220. |
Étampes de 1652 à 1774
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CHAPITRE VINGT-UNIÈME
ÉTAMPES
DE 1652 A 1774
Chapitre XXI: Suite des ducs ou duchesses d’Étampes. —
Règne de Louis XV. —
Passage et réception de princes et princesse
à Étampes. —
Note II: Tableau historique et chronologique
indiquant la filiation des divers suzerains d’Étampes. — Note III: Délibération
municipale sur la venue du roi le 20 février 1745.
Les événemens divers rapportés dans nos derniers
chapitres, nous ont fait perdre de vue la filiation et la suite des possesseurs
du duché d’Étampes. Il est temps de revenir sur ce sujet, et
de 1’épuiser cette fois par quelques nouveaux détails sur la
transmission de ce domaine, depuis le règne de Henri III jusqu’à
nos jours. |
Duchesse de Montpensier
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Marguerite de Valois
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Nous avons
laissé le duché d’Étampes entre les mains de la duchesse
de Montpensier (Catherine de Lorraine, sœur du duc de Guise) (1). Henri III l’ayant recouvré, en fit don,
en 1582, à Marguerite de Valois, reine de Navarre, sa sœur, comme complément
de la dot qu’il lui [p.130] avait promise par
son contrat de mariage avec Henri de Bourbon (1).
Marguerite de Valois, devenue reine de France, posséda ce même
duché quelque temps encore. Elle le céda ensuite à Gabrielle
d’Estrées, duchesse de Beaufort et marquise de Monceaux (1598). Cette
noble dame, dont le nom se lie dans l’histoire à celui de Henri IV,
laissa en mourant le duché d’Étampes à son fils César,
duc de Vendôme (1599). Ce dernier le transmit à son fils Louis
de Vendôme, duc de Mercœur, lors du mariage de ce seigneur avec Laure
Victoire Mancini, nièce du cardinal Mazarin (1654).
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(1) Voir page 92.
(1) Lettres-patentes du
8 juillet 1582 [Montrond s’appuie dans ce paragraphe
sur le seul Fleureau, Antiquitez d’Estampes, Paris, Coignard, 1683,
qui édite le texte des deux donations, pp. 261-266 (B.G.)].
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Louis de Vendôme,
qui dans la suite devint lui-même cardinal, laissa le duché d’Étampes
aux mains de son fils Louis-Joseph. Ce dernier prince mourut sans postérité:
mais le souvenir des belles qualités qui le rendirent l’un des plus
fermes soutiens du trône de Louis XIV, vivra à jamais dans l’histoire,
et fera briller le nom de Vendôme d’un éclat immortel. Après
avoir glorieusement réparé en Italie (1704-1705), par ses victoires
sur le prince Eugène, les échecs du maréchal de Villeroy,
il porta sa bravoure en Espagne, et dit aux grands de ce pays qui délibéraient
sur le rang dont ils devaient l’honorer: «Tout rang m’est bon;
je ne viens pas vous disputer le pas; je viens sauver votre roi».
Il le sauva en effet, sa présence valut une armée à
Philippe V, qui, privé de tout secours sentait chanceler sur sa tête
sa couronne mal affermie. [p.131]
Le nom seul de Vendôme attira vers lui une foule
de volontaires; des sommes d’argent lui furent apportées avec un enthousiasme
général. Il ramena le roi à Madrid, et vainqueur des
alliés à la célèbre bataille de Villaviciosa,
il assura pour jamais la couronne d’Espagne sur la tête du petit-fils
de Louis XIV (10 décembre 1710). Après la bataille, le roi ne
sachant sur quelle couche reposer sa tête: Prince, lui dit Vendôme;
je vais vous faire donner le plus beau lit sur lequel jamais
souverain ait couché; et sur-le-champ il fit faire un matelas
des étendards et des drapeaux enlevés à l’ennemi. Ce
valeureux guerrier mourut deux ans après comblé d’honneurs,
et fut enterré à l’Escurial dans le tombeau des infans d’Espagne
(1712).
Louis Joseph de Vendôme avait épousé,
en 1710, Marie-Anne de Bourbon, fille de Henri-Jules de Bourbon, prince de
Condé, et de Marie-Anne de Bavière, et petite-fille du grand
Condé. Après lui, sa veuve demeura en possession du duché
d’Étampes jusqu’en 1718, où cet héritage échut
à sa mère, Anne Palatine de Bavière, douairière
de Condé, qui le transmit elle-même à la descendance
de cette illustre maison.
L’une de ses filles, Louise-Elisabeth
de Bourbon, a été duchesse d’Étampes; son nom se retrouve
dans un grand nombre de pièces historiques de cette époque.
Elle fut mariée le 4 juillet 1713, à Louis-Armand prince de
Conti, et porta dans cette autre branche de la maison de Bourbon, le duché
d’Étampes. De là il passa par alliance et partage à
celle d’Orléans, lors du mariage de Louise-Henriette de Bourbon-Conti,
avec Louis-Philippe [p.132] d’Orléans,
aïeul du roi actuel Louis-Philippe Ier (1752). Suivant des actes de
1770, les sentences du bailliage d’Étampes, à cette époque,
étaient rendues au nom de Mgr. Louis-Philippe d’Orléans, tuteur
honoraire de Mgr. le duc de Chartres. Enfin le 23 juin 1779, par suite d’un
partage de la succession de la princesse de Conti, entre Louis-Philippe Joseph
d’Orléans, et la duchesse de Bourbon, sa sœur, les domaines d’Étampes
et de La Ferté-Aleps échurent à ce prince pour la somme
de 480,000 livres. À la révolution de 1789, le duc d’Orléans,
Louis-Philippe-Joseph, était encore possesseur du duché d’Étampes.
Le titre et les attributions attachées à cette dignité,
périrent entre ses mains avec tant d’autres institutions ou coutumes
que les bouleversemens politiques de cette époque entraînèrent
comme un irrésistible torrent (1).
Après
les époques si fertiles en événemens que nous avons
parcourues dans les précédens chapitres, l’histoire laisse
la ville d’Étampes dans une heureuse et paisible obscurité.
Ainsi sous le long règne de Louis XV, libre des discordes civiles,
notre cité ne fut plus exposée au choc violent des partis qui
se heurtaient naguère sur son territoire, et s’en disputaient l’importante
possession. Désormais sa position géographique ne fut plus pour
elle que le sujet de réjouissances et de fêtes.
Placée sur la route de l’Espagne avec qui la maison [p.133] royale de France entretenait d’intimes relations,
depuis qu’une de ses branches régnant sur ce beau royaume, il n’y avait
plus de Pyrénées, elle eut de nombreuses occasions de voir
passer au milieu d’elle ou de recevoir dans ses murs de hauts et nobles personnages.
Nous choisissons entre ces divers passages,
celui de l’Infante reine, Marie-Anne-Victoire d’Espagne, âgée
de cinq ans, venant à Paris pour épouser Louis XV qui n’en
avait que douze (1722). Nous joindrons en outre ici quelques détails
sur le séjour que Louis XV et le dauphin son fils firent à
Étampes en 1745, pour y recevoir une autre Infante d’Espagne, Marie-Thérèse,
mariée à ce dernier prince. Les registres déposés
à la mairie de cette ville ont conservé sur ces deux événemens
quelques souvenirs qui offriront peut-être de l’intérêt
à nos lecteurs.
Nous transcrivons littéralement, à l’égard
du premier, une pièce consignée dans les archives, et dont la
rédaction offre une sorte de naïveté où l’on trouve
quelque charme.
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Gabrielle d’Estrées
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César de Vendôme
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Louis de Vendôme
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Louis-Joseph de Vendôme
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Marie-Anne de Bourbon
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Louise-Elisabeth de Bourbon-Condé
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Louise-Henriette de Bourbon-Conti
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Louis-Philippe d’Orléans
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(1)
Voir aux Pièces justificatives le tableau de la filiation des souverains
d’Étampes [ici].
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PASSAGE DE L’INFANTE REINE EN CETTE VILLE, AVEC LA
CÉRÉMONIE DE RÉCEPTION.
— «Ce jourd’hui vingt-sept
février 1722, sur les ordres et nouvelles adressées au maire
et échevins de cette ville du passage de l’Infante reine, ils auraient
fait convoquer une assemblée générale huit jours auparavant,
tant pour se préparer de quelle manière elle serait reçue,
que pour le présent de ville qui lui serait fait, où il fut
arrêté que tous les officiers de la bourgeoisie et habitans,
[p.134] se mettraient sous les armes
depuis six heures du matin jusqu’au départ, et que le présent
serait fait par les maire et échevins en corps.
«Pour cet effet, sous le commandement de M. Rousse
d’Inville, colonel, et autres officiers de la bourgeoisie, les dits officiers
et habitans des mieux faits habillés et équipés le plus
uniformément qu’il a été possible, au nombre de plus
de six cents, se sont assemblés ce jourd’hui sept heures du matin,
devant l’hôtel-de-ville, et les principaux officiers s’étant
retirés dans la chambre commune de l’hôtel-de-ville, fût
arrêté par Messieurs de ville que tout le corps de la bourgeoisie
partirait aux fifres, tambours et trompettes, et irait à l’hôtellerie
des Trois Rois, logement destiné à l’Infante, pour recevoir
la distribution des postes que chacun occuperait, où allant toute la
troupe fut examinée et passée en revue par M. Bignon, intendant
de Paris, qui était logé chez M. Rousse, procureur du roi, et
venu la veille avec autres personnes de qualité, pour être présent
au passage, dont ils furent très contents, et en complimentèrent
les officiers de la bourgeoisie et Messieurs de ville. Etant donc arrivés
à l’hôtel des Trois Rois, il fut arrêté que depuis
cet endroit jusqu’à l’Ecce homo, les dits habitans sous le
commandement de leurs officiers seraient postés pour ce passage par
deux rangs de chaque côté de la rue par laquelle l’Infante devait
passer, ce qui a été suivi et exécuté avec tout
le bon ordre et régularité possible; ensuite M. l’intendant
auquel avait été rendu visite par Messieurs de ville en corps
et présenté leur présent de ville composé de
vin, truites, brochets, et écrevisses et cotignac qu’il reçut
avec joie, vint (avec les [p.135]
musiciens qui l’avaient accompagné) à l’hôtel-de-ville;
ils examinèrent le présent qu’ils trouvèrent digne d’être
présenté à une reine, de quoi il complimenta Messieurs
de ville, aussi bien que d’avoir fait paver, sabler les rues, accomoder
les portes par lesquelles l’Infante devait passer. Dans le même temps
Messieurs les maire et échevins délibérèrent
en présence de mon dit sieur l’intendant qu’ils iroient à la
première porte de la ville du côté de Saint-Martin, pour
y attendre l’Infante, ce qu’ils firent sur les midi, une heure, accompagnés
de leur greffier, et de tous les anciens échevins et officiers en
robes, manteau et rabat, où ils attendirent jusqu’à trois heures,
pendant que mon dit sieur l’intendant examinait encore les troupes et la
manière comme elles étaient postées qu’il trouva
en bon ordre, dans lequel temps M. Desgranges, maître des cérémonies,
vint joindre Messieurs de ville, et l’Infante arrivait, et passé la
porte où elle était attendue, le dit Desgranges donna ordre
que l’on fit arrêter le carrosse dans lequel elle était avec
Mesdames de Ventadour et de Soubise, où M. Gabriel Pichonnat, maire
en titre, fit sa harangue à l’Infante reine, dont madame de Ventadour
le remercia:
«Madame,
«— Celui
qui tient les jours des rois et des reines entre ses mains nous procure
aujourd’hui l’avantage de vous assurer nos respects les plus humbles et
de rendre à Votre Majesté nos hommages; souffrez donc qu’au
même moment nous lui disions que les siècles les plus reculés
nous apprennent que plusieurs personnes [p.136]
de votre rang destinées à la couronne dans un âge aussi
tendre que le vôtre ont fait le bonheur de leurs peuples; nous espérons
que vous ferez le nôtre: je m’aperçois que nous tremblons à
la vue d’une reine dont l’âge est si peu avancé parce que nous
croyons notre bonheur très éloigné, mais rassurons-nous
et soyons persuadés que le seul sourire d’une reine pour ainsi dire
encore dans le berceau, portée entre les bras de sa gouvernante, a
plus de force sur l’esprit d’un roi que les discours les plus polis et les
plus énergiques. Nous supplionsVotre Majesté de vouloir bien
accepter le présent que nous lui offrons, seule marque d’une soumission
entière.» —
«Après quoi Messieurs
de ville suivirent et entrèrent à l’hôtel, ou après
avoir attendu environ une demi-heure montèrent au premier appartement
où ils entrèrent et furent présentés à
l’Infante par mon dit sieur Desgranges, à laquelle ils présentèrent
leur présent qui était dans une grande manne d’osier en forme
de brancard; au milieu duquel était une patisserie en pyramide de quatre
dauphins, une couronne dessus avec les armes de France et d’Espagne en peinture
dorée; autour de cette pyramide étaient gâteaux, tourtes
de différentes manières, confitures sèches et liquides,
cotignac, massepains, biscuits, dragées [p.137]
de différentes sortes, oranges, citrons, fruits de toute espèce
et des plus exquis, liqueurs aussi de différentes façons, et
généralement tout ce qui pouvait se présenter à
une reine, le tout bien arrangé et symétrisé dans le
brancard, le tout venant de Paris. Ilse présenta aussi des truites,
brochets vifs et écrevisses séparément du présent.
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François de Troy: Louis XV et l’Infante d’Espagne (1723)
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«Ce
présent fut mis à terre par ordre de l’Infante qui, après
l’avoir bien examiné et trouvé très beau, aussi bien
que toute la cour, prit1a couronne et la voulant passer dans son bras la
laissa tomber à terre qui se cassa en plusieurs morceaux; et ensuite
prit aussi les petits étendards qui ornaient le brancard, 1es donna
à plusieurs personnes et dit que c’était pour la guerre: après
quoi Messieurs de ville se retirèrent et furent deux heures après
saluer Madame de Ventadour et M. Desgranges, dans chacun leur appartement,
auxquels ils firent leur présent de ville en vin, poisson et écrevisses,
et ensuite retournèrent à l’hôtel-de-ville où
ils firent une collation médiocre à cause des ordres qu’ils
avaient à donner pour que la nuit se passât en bon ordre, ce
qui fut suivi avec de grandes réjouissances pendant toute la nuit,
et dans une aussi bonne discipline qu’il pouvait y avoir dans les troupes
réglées, jusqu’ au lendemain neuf heures du matin que l’Infante
partit de cette ville, que Messieurs de ville furent saluer à la porte
Saint-Jacques qui était ornée comme celle de Saint-Martin de
verdure lierres et couronnes (1).» — [p.138]
|
(1)
L’union qui se préparait sous de si heureux auspices ne se réalisa
point. Par suite d’une double alliance, l’infante avait été
échangée dans l’île des Faisans, proche des Pyrénées,
contre mademoiselle de Montpensier, fille du duc d’Orléans, régent,
accordée au prince des Asturies. Mais la jeune princesse ne devint
pas reine de France. Elle fut logée au Louvre dans le pavillon qui
porte encore aujourd’hui le nom de jardin de l’Infante. Elle retourna
en Espagne en 1725, et épousa le prince du Brésil en 1729.
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SÉJOUR
DU ROI LOUIS XV ET DU DAUPHIN A ÉTAMPES (1745).
Le jeune dauphin Louis de France, fils de Louis XV
et de Marie Leczinska, à peine âgé de 16 ans, avait été
fiancé à Marie-Thérèse, infante d’Espagne. Cette
alliance nouvelle remplissait de joie les fidèles serviteurs de l’héritier
du trône, vers lequel la jeune épouse s’avançait comme
en triomphe en traversant les provinces de la France.
Dès que le roi apprit son approche de la capitale,
il partit lui-même avec son fils et un nombreux cortège, et vint
jusqu’à Étampes, à la rencontre de la jeune princesse.
Les habitans, suivant les ordres de leurs magistrats
et des officiers de la cour venus à l’avance, avaient fait d’immenses
préparatifs pour recevoir dignement d’aussi augustes personnages. On
disposa pour le roi la maison de M. Rousse de Saint-André, située
rue Saint-Antoine, en face du collège des Barnabites; pour le dauphin,
celle de M. Lepetit, située dans la même rue; et pour l’infante
[p.139] la maison de M. l’abbé
Hémard de Donjouan, rue de la Juiverie (1).
Le 19 février de nouveaux
seigneurs de la cour arrivèrent à Étampes, avec de nombreux
gardes de la maréchaussée. Le lendemain 20,400 hommes des gardes
françaises et autant de Suisses furent distribués dans les divers
quartiers. Le même jour, à 5 heures du soir, le roi arriva à
Étampes accompagné de M. le dauphin, de MM. le duc de Chartres,
le comte de Charolais, le comte de Clermont, le prince de Conti, le duc de
Penthièvre, le prince de Dombes, de tous ses ministres et autres grands
officiers de sa couronne, et suivi d’un gros détachement militaire
de toute sa maison (2).
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(1)
La première de ces maisons, qui avait autrefois un immense jardin,
a été convertie en plusieurs habitations particulières
dont la principale est occupée par M. Boivin-Bonté. On n’a
pu avoir de notions fixes sur la seconde, que tout fait présumer néanmoins
être une maison d’architecture intérieure assez ancienne, située
en face du moulin à sablon, et habitée aujourd’hui par M. Branlant.
La troisième est occupée par la famille de M. Petit de Laborde,
ancien officier supérieur d’artillerie.
(2) Reg. des délibérations
de l’Hôtel-de-ville.
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La milice
bourgeoise, composée de 600 hommes était sortie, enseignes
déployées, par la porte dite des Capucins, et elle vint former
une haie sur la route que les princes devaient suivre. Leur brillant cortège
entra au bruit des cloches, des tambours. et des acclamations du peuple,
par la porte de la Couronne, aujourd’hui porte Évezard,
richement décorée d’un arc de triomphe et ornée de
l’inscription latine, non opibus altas sed fide superat [p.140] urbes*.
Les princes furent conduits jusques à leur logis comme en triomphe.
Le soir de brillantes et nombreuses illuminations éclairèrent
la ville (1). Le maire et les échevins
vinrent offrir au roi et au dauphin les vins d’honneur. Il y eut ensuite grand
jeu chez le roi, ou furent admis les principaux habitans d’Étampes.
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*
Ce vers qui se donne les apparence d’un
hexamètre ne respecte pas en réalité les règles
de la prosodie latine (on y trouve trois syllabes brèves qui devraient
être longues: le -bus de opibus, le fi- de fide
et le su- de superat). Il doit s’agir du remaniement maladroit
d’un hexamètre classique que je n’ai pas su identifier. Traduction:: «Elle l’emporte sur des villes considérables,
non par ses richesses, mais par sa fidélité.» (B.G.)]
(1)
Voir la note aux pièces justificatives [ici].
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Le 21
février (dimanche), les princes entendirent la messe dans l’église
des Barnabites , et à 11 heures du matin, suivis de leurs officiers,
ils allèrent au devant de madame la dauphine qu’ils rencontrèrent
à Mondésir. Le carrosse de la jeune princesse s’arrêta
aussitôt; elle en descendit, et s’étant mise à genoux
aux pieds du roi: «Sire, lui dit-elle, je vous salue comme l’une de
vos plus humbles sujettes, et je prie Votre Majesté de vouloir bien
me regarder comme l’un de ses enfans…». Le monarque la releva, et lui
dit en l’embrassant: «Ma fille, je vous donne pour époux le
plus puissant prince de ma cour». Le dauphin témoigna hautement
la joie que lui causait la vue de la jeune infante, âgée de
treize ans seulement, et parée de toutes les grâces et de toutes
les vertus. On se remit ensuite en marche et l’on rentra dans Étampes
par le faubourg de Saint-Martin, au milieu d’une haie de soldats et des cris
joyeux de tout le peuple des environs accouru sur les pas du royal cortège
(2).
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(2)
Sur la porte Saint-Martin on avait placé l’inscription suivante: huc
adventat amor; veniet mox pignus amoris. [Il s’agit
là d’un hexamètre dactylique de bonne facture: «Ici l’Amour
s’approche; bientôt viendra un gage d’amour.» (B.G.)]
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Madame
la dauphine fut conduite ainsi en grande pompe jusque dans la rue de la Juiverie,
où était situé [p.141]
l’hôtel qui devait la recevoir. Le soir il y eut chez elle souper et
jeu, auxquels assistèrent un grand nombre de hauts seigneurs et de
nobles dames. Le lendemain, 22 février, le roi, le dauphin et la
dauphine, après s’être rendus ensemble à l’église
de Saint-Basile (1), sortirent de la ville par
la porte de la grande rue Saint-Jacques, et se dirigèrent vers Sceaux.
Sur leur route, ils rencontrèrent la reine qui s’était avancée
vers eux jusqu’à Longjumeau. De Sceaux, les princes et les princesses
allèrent à Venai11es, où fut célébrée
la cérémonie d’un mariage qu’environnaient de toutes parts
les prestiges de la joie et du bonheur; le dauphin brillant alors de jeunesse
et d’avenir, ignorait, hélas! que son union avec l’infante serait
de courte durée, et que lui-même atteint par la mort au milieu
de sa carrière, ne monterait jamais sur un trône dont il était
plus digne encore par ses vertus et ses talens que par l’éclat de
sa naissance (2). Sous le règne de Louis
XV, dans l’hiver de l’année 1753 et le printemps de 1754, la ville
d’Étampes, naguère [p.142] le
théâtre de fêtes et de réjouissances, devint la
proie d’un nouveau fléau qui n’était point celui de la guerre
mais qui non moins que le fer meurtrier d’un ennemi, désola ses infortunés
habitans. Un mal épidémique, sorti du sein de la vallée
d’Étampes, s’étendit sur la ville et sur tous les environs;
la consternation et l’effroi régnaient de toutes parts. Quelques médecins
accourus de la capitale, donnèrent des soins empressés et généreux
aux malheureux qu’avait atteints le funeste fléau; l’un d’eux, M. Meyserey
a consigné vers cette époque, dans un journal spécial
de médecine, un rapport détaillé sur cette singulière
maladie. Nous y renvoyons le lecteur curieux et avide de pareilles impressions,
mais nous épargnerons aux autres la vue de ces tableaux douloureux
dans ces Essais, où déjà trop souvent sans doute l’aspect
de tristes et sanglantes infortunes est venu affliger leurs regards (1).
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(1)
Le curé de Saint-Basile de cette époque (M. Rivet) a consigné
sur le registre de l’état civil qu’il tenait alors, la station du roi
et de toute la cour dans son église: il y est dit que selon l’usage
il lui fut donné un demi-écu d’or pour
la messe que le roi y entendit, et un autre demi-écu d’or pour la
messe qu’il avait également entendue la veille, dans l’église
des Barnabites, qui relevait de la paroisse Saint-Basile.
(2) Louis, dauphin de France,
fils de Louis XV, surnommé le vertueux Dauphin, mourut le 20 mars 1763
à l’âge de 36 ans. Marie-Thérèse, infante d’Espagne,
sa première femme, était morte en 1746, dix-huit mois à
peine après le jour où elle s’était unie à l’héritier
de la couronne de France.
(1) Voyez lettre de M.
Meyserey, médecin ordinaire du roi, au sujet des maladies qui ont
régné à Étampes pendant l’hiver de 1753 et au
commencement du printemps de 1754. (Journal de médecine, t. I, octobre
1754, page 262-268.)
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Chapitre XXI: Suite des ducs ou duchesses d’Étampes. —
Règne de Louis XV. —
Passage et réception de princes et princesse
à Étampes. —
Note II: Tableau historique et chronologique
indiquant la filiation des divers suzerains d’Étampes. — Note III: Délibération
municipale sur la venue du roi le 20 février 1745.
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Tableau historique
et chronologique indiquant la filiation des divers suzerains d’Étampes.
(Princesses, comtes, ducs et duchesses, etc.) (1).
(Chapitre XXI, page 132.)
Le territoire d’Étampes, ainsi que nous l’avons
dit ailleurs, n’avait cessé jusqu’au treizième siècle
de faire partie du domaine de la couronne. L’histoire nous apprend que depuis
Philippe Ier, les rois y nommaient un vicomte pour y percevoir leurs droits
et exercer leur juridiction. On cite parmi eux Gui, fils de Hugues du Guiset.
Ce seigneur, qui demeura toujours fidèle à la fortune de son
prince Louis-le-Gros, avait acquis ce titre de vicomte d’Étampes [p.214] par son mariage
avec la fille de Marchis qui possédait déjà cette dignité.
On pourrait conclure de là, dirons-nous encore, que cette charge, du
moins à cette époque, était héréditaire
et non une simple commission.
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(1)
Nous ne pouvons qu’indiquer dans ce tableau les noms et titres des divers
suzerains d’Étampes. Nous renvoyons pour les détails historiques
concernant la transmission de ce territoire entre les mains de ses différens
possesseurs, aux chapitres divers de cet ouvrage.
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1° Blanche de Castille, reine de France,
suzeraine d’Étampes. Année 1240.
La reine Blanche de Castille, femme de Louis VIII, et
mère de saint Louis, reçut des mains de son fils, pour en jouir
vie durant, la terre et seigneurie d’Étampes, avec celles de Pontoise,
de Dourdan, de Corbeil et de Melun. Ces domaines lui furent concédés
en dédommagement de son douaire, dont elle s’était désistée
en faveur de son fils Robert, lors du mariage de ce prince avec Mathilde,
fille aînée de Henri I, duc de Brabant. A la mort de Blanche
de Castille, en 1252, la seigneurie d’Étampes rentra dans le domaine
de la couronne.
2° Marguerite
de Provence, reine de France, suzeraine d’Étampes. 1272.
En 1272, la seigneurie d’Étampes fut détachée
de nouveau du domaine de la couronne, pour composer avec d’autres terres le
douaire de la reine Marguerite de Provence, femme de saint Louis. A la mort
de cette princesse, en 1295, ce territoire retourna entre les mains des rois
de France.
3° Louis d’Évreux,
fils du roi Philippe-le-Hardi, seigneur apanagiste d’Étampes. 1307.
Le roi Philippe-le-Hardi avait ordonné en mourant,
que Louis, comte d’Évreux, son fils, fut apanagé de 15,000 livres
de pension annuelle, assignées sur des terres nobles en baronnie. Ce
fut en payement de cette [p.215] que ce seigneur reçut de Philippe-le-Bel, son frère,
la jouissance perpétuelle pour lui et ses descendans, de la prévôté
et châtellenie d’Étampes, d’Évreux, Gien et autres lieux.
4° Charles d’Évreux,
premier comte apanagiste d’Étampes. 1319.
Charles d’Évreux, second fils de Louis d’Évreux,
lui succéda dans la possession de la baronnie d’Étampes. Ce
fut en son honneur que Charles IV, dit le Bel, son cousin, érigea cette
baronnie en comté.
Érection de la baronnie d’Étampes en comté,
sept. 1327.
5° Louis II,
d’Évreux, fils de Charles d’Évreux, 2e comte d’Étampes.
1336.
6° Jean de France,
duc de Berri et d’Auvergne, et 3e fils du roi Jean, 3e comte d’Étampes.
1384.
(Voir tome II, pages 5 et 6, les détails concernant
la transmission du comté d’Étampes entre les mains de Jean de
France, duc de Berri.)
7° Étampes
sous la domination de la maison de Bourgogne.
1° Philippe le
hardi, duc de Bourgogne.
2° Jean sans peur, id.
3° Philippe le bon, id.
4° Jean de Bourgogne, Comte de Nevers.
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Comtes d’Étampes.
(Voir chap. XIII
et XIV.)
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8° Arrêt
du parlement de Paris, qui réunit le comté d’Étampes
à la couronne. 1478.
9° Jean de Foix,
vicomte de Narbonne, comte [p.216] d’Étampes. 1478.
10° Gaston de
Foix, duc de Nemours, comte d’Étampes. 1500.
Mort au siège de Ravenne en 1512.
11° Retour du
comté d’Étampes au domaine de la couronne. 1512.
12° Anne de
Bretagne, reine de France , comtesse d’Étampes. 1513. (Voir chap.
XV.)
13° Claude de
France, comtesse d’Étampes. 1514.
Morte à Blois en 1524. (Voir chap.
XV.)
14° Retour du
comté d’Étampes au domaine de la couronne. 1524.
15° Anne de
Pisseleu, comtesse, puis duchesse d’Étampes. 1534.
Érection du comté d’Étampes en
duché. 1536.
16° Retour du
duché d’Étampes au domaine de la couronne. 1547.
17° Diane de
Poitiers, duchesse d’Étampes. 1553. (Voir chapitre XVI.)
18° Retour du
duché d’Étampes au domaine de la couronne. 1559.
19° Jean de
Brosses ou de Bretagne, mari d’Anne de Pisseleu, recouvre le duché
d’Étampes en 1562, et le conserve jusqu’à sa mort en 1564.
20° Retour du
duché d’Étampes au domaine de la couronne. 1564.
21° Jean Casimir,
fils de Frédéric III, électeur palatin, devient duc d’Étampes,
par suite d’un traité de paix conclu avec les Calvinistes, au secours
desquels il était venu avec une armée. 1576.
22° Catherine
de Lorraine, duchesse de Montpensier, [p.217] duchesse d’Étampes. 1578.
23° Marguerite
de Valois, femme de Henri de Bourbon, et depuis Henri IV, duchesse d’Étampes.
1582.
24° Gabrielle
d’Estrées, duchesse de Beaufort, duchesse d’Étampes. 1598.
Maison de Vendôme.
25° César,
duc de Vendôme, fils naturel de Henri IV et de Gabrielle d’Estrées,
duc d’Étampes, en 1599.
26° Louis de
Vendôme et de Bourbon, duc de Mercœur, devient duc d’Étampes,
en 1654.
(Par un titre de son contrat de mariage avec Laure-Victoire Mancini, nièce
du cardinal Mazarin).
27° Louis-Joseph,
fils de Louis de Vendôme,duc d’Étampes, marié en 1710
à Anne de Bourbon, petite-fille du grand Condé. (Mort sans
postérité en 1712).
28° Marie-Anne
de Bourbon, veuve de Louis-Joseph de Vendôme, reste duchesse d’Étampes
en 1712.
29° Anne palatine
de Bavière, fille d’Édouard de Bavière, prince palatin
du Rhin, et veuve de Henri-Jules de Bourbon, fils du grand Condé,
devient duchesse d’Étampes en 1712.
30° Louise-Élisabeth
de Bourbon, princesse de Conti, duchesse d’Étampes.
31° Louise-Henriette
de Bourbon-Conti, femme de Louis-Philippe d’Orléans, duchesse d’Étampes.
1752.
32° Louis-Philippe-Joseph
d’Orléans, dernier duc d’Étampes. juin 1779. [p.218] [p.219]
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Blanche de Castille
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Marguerite de Provence
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Louis Ier d’Evreux
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Charles d’Evreux
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Louis II d’Evreux
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Jean de Berry
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Philippe le Hardi
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Jean Sans Peur
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Philippe le Bon
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Jean de Nevers
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Jean et Gaston de Foix
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Anne de Bretagne
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Claude de France
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Anne de Pisseleu
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Jean de Brosses
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Diane de Poitiers
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Jean Casimir
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Chapitre XXI: Suite des ducs ou duchesses d’Étampes. —
Règne de Louis XV. —
Passage et réception de princes et princesse
à Étampes. —
Note II: Tableau historique et chronologique
indiquant la filiation des divers suzerains d’Étampes. — Note III: Délibération
municipale sur la venue du roi le 20 février 1745.
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NOTE III.
[Délibération
municipale du 4 février 1745]
(Chap. XXI, p. 140.)
On trouve des détails précis et assez
curieux sur les illuminations et les frais que fit la ville en cette occasion,
dans une délibération du conseil de ville d’Étampes
du 4 février 1745, provoquée par M. de Gomberville, maire,
et M. Hochereau, échevin: on y décida que pendant le séjour
de la cour à Étampes, il serait fait une illumination brillante,
le premier jour depuis le logis du roi jusqu’à celui de Mgr. le Dauphin,
au moyen de trente caisses supportant des girandoles et les chiffres du roi,
garnies chacune de 250 lampions; le second jour, depuis l’hôtel occupé
par Mgr. le Dauphin jusqu’à celui où devait descendre madame
la Dauphine, le logis du roi se trouvant entre deux; cette seconde illumination
devait avoir lieu au moyen de 70 caisses pareilles à celles de la veille:
l’Hôtel-de-Ville devait être pareillement illuminé, et
les jardins des trois logis royaux éclairés pendant toute la
nuit par des terrines posées avec dessein. Le nombre des lampions nécessaires
fut évalué de vingt à vingt-deux [p.220] mille, et celui
des terrines à deux mille au moins, pour que l’illumination eût
son effet. L’adjudication de cette fourniture et de quelques ouvrages accessoires,
mise au rabais, fut faite le 7 février, au prix de 4.500 livres, à
M. Guestard, qui eut pour concurrent MM. Laumosnier et Villemain.
Il est dit dans cette délibération que
la ville n’est pas riche, que les dépenses du séjour du roi
ne seront que trop considérables, mais qu’il n’est pas possible de
moins faire en cette occasion, etc. (Voir la délibération du
conseil de ville du 4 février 1745.)
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Chapitre XXI: Suite des ducs ou duchesses d’Étampes. —
Règne de Louis XV. —
Passage et réception de princes et princesse
à Étampes. —
Note II: Tableau historique et chronologique
indiquant la filiation des divers suzerains d’Étampes. — Note III: Délibération
municipale sur la venue du roi le 20 février 1745.
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Demi-écu d’or de Louis XV
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