CORPUS HISTORIQUE ETAMPOIS
 
 Charles VII et son Conseil des finances
Octroi pour cinq ans aux Étampois des revenus de la gabelle
12 juin et 5 août 1456
     
Sceau de Charles VII
 
     Trois ans après la fin de la guerre de Cent Ans, le roi constate que la ville d’Étampes est tellement dévastée qu’elle n’a plus les ressources nécessaires à la restauration du système routier. Il y affecte pour cinq ans les revenus de la gabelle. Ce mode de financement sera en fait indéfiniment prorogé tout au long du XVIe siècle.

      La saisie des textes anciens est une tâche fastidieuse et méritoire. Merci de ne pas décourager ceux qui s’y attellent en les pillant sans les citer.
     
Archives municipales d’Étampes, AA 150 Octroi pour cinq ans aux Étampois
des revenus de la gabelle
 
 
Introduction
 
     Paul Dupieux est certainement l’un des trois historiographes à qui Étampes doit le plus, avec dom Basile Fleureau et Charles Forteau, et c’est pourtant, comme eux, l’un des moins lus. Il a édité, en marge de ses études sur le seizième siècle étampois, une cinquantaine de pièces justificatives datées de 1456 à 1598. Nous les mettrons toutes en ligne progressivement pour les intégrer à notre cartulaire virtuel du pays d’Étampes. Voici les deux plus anciennes, qui datent de la période où s’amorce la reconstruction de la ville, peu de temps après la fin de la guerre de Cent Ans.

     En raison de contraintes matérielles, Dupieux avait pris édité séparément ces pièces justificatives: tous les édits royaux l’ont été dans le Bulletin du comité des travaux historiques de 1930-1931, tandis que les autres documents ont été donnés dans une Annexe de son étude sur Les Institutions royales au pays d’Étampes. Nous réunissons ici l’édit royal du 12 juin 1456 et le mandement du 5 août suivant qui en est comme un décret d’application.

     Le point qui nous intéresse le plus dans ce document peu remarqué de l’historiographie étampoise est une courte phrase qui est une des seules allusions explicites que nous ayons à la situation absolument catastrophique de la ville au terme de la guerre de Cent Ans, décrite comme suit par le roi lui-même: la dite ville a esté par bien longtemps come inhabitée et jusques à naguères qu’elle est un peu repeuplée.

B.G., 22 septembre 2010.

     

Édit royal du 12 juin 1456

1456, 12 juin; Le Vivier.

     Octroi de Charles VII à la ville d’Etampes, pour cinq ans, de vingt deniers tournois sur chaque minot de sel vendu au grenier établi par la roi dans cette ville, afin de les employer à la remise en état de ses chaussées et pavés.
     (Original sur parchemin aux Arch. municip. d’Etampes, sans cote.*)

     * Ces archives ont été enfin classées en 1991 par Anne-Marie Chabin, et ces deux pièces ont reçu la cote AA 154 (“Octroi sur le sel pour la réparation des murailles [sic]: lettres patentes de Charles VII et lettres de publication des conseillers généraux des comptes, 1456”) [B.G].
     Charles, par la grace de Dieu roy de France, à nos amez et féaulx, les généraulx conseillers par nous ordonnez sur le fait et gouvernement de toutes noz finances, salut et dilection.

     Noz bien amez, les bourgeois, manans et habitans de la ville d’Estempes nous ont fait remonstrer que, à l’occasion des grans guerres et divisions qui dès longtemps ont esté en nos royaume, la dite ville a esté par bien longtemps come inhabitée et jusques à naguères qu’elle est un peu repeuplée, et ce néantmoins les chaussée et pavé de la dite ville sont tellement disuniz que, pour iceulx mectre en estat et réparation telle [p.246] que les chevaulx et charroy y puissent convenablement passer, leur conviendra faire plusieurs fraiz, mises et despences, et qu’ilz ne pourroient faire du leur, obstant les autres grands charges et affaires qu’ils ont à supporter, sans avoir et lever aucun aide, si come ilz nous ont fait dire et remonstrer, requérant sur ce nostre provision.


     Pour ce est il que nous, les choses dessus dites considérées, désirans les dites chaussées et pavé estre tenues en estat et repparation, à iceulx supplians avons octroyé et octroyons de grace espécial par ces présentes que, jusques au terme de cinq ans prouchain venans, à compter du jour de la date de ces présentes, tout le sel, qui sera vendu et distribué ou grenier à sel par nous establi à Estampes, soit vendu par le grenetier du dit grenier à la creue de vingt deniers tournois sur chacun minot de sel
*, oultre et pardessus nos droit de gabelle et cellui du marchant, pour iceulx deniers estre convertiz et emploiez ès repparations et emparemens des ditz pavé et chaussée d’icelle ville d’Estampes et non ailleurs.

     Si vous mandons que les ditz supplians vous faictes, souffrez et laissez plainement et paisiblement joïr et user de nos présent grace et octroy, en faisant vendre par le grenetier dudit grenier, durant ledit temps et terme de cinq ans, tout le sel estant en icelluy, à la dite creue de vint deniers tournois sur minot de sel, et les ditz vint deniers tournois bailler aus ditz supplians, ou à leur procureur et receveur pour eulx, pour convertir, ainsi que dit est, sans leur faire ou donner ne souffrir estre fait ou donné aucun destourbier ou empeschement au contraire.
Un radeur mesure le sel (gravure du XVe siècle)
Gravure sur bois 15e siècle: un radeur mesure le sel
(Jean Favier, Paris au XVe siècle, Paris, Hachette, 1974, p. 274)
     * Le minot, moitié de la mine, valait selon certains auteurs environ 39 litres;  c’était aussi une quantité de sel dont l’achat annuel était obligatoire pour un certain nombre d’habitants variable selon les époques et les lieux [B.G].
     Et par rapportant ces présentes avecques quittances desditz supplians ou de leur dit procureur ou receveur, nous voulons tout ce que paié et baillé leur en aura esté estre alloué ès comptes et rabatu de la recepte du dit grenetier du grenier d’Estempes par nos amez et féaulx gens de nos comptes, auxquelz vous mandons ainsi le faire sans difficulté.

     Donné au Vivier (1), le XIIe jour de juing, l’an de grace mil CCCC cinquante six, et de nostre règne le XXXIIIIme.

Par le roy en son conseil:
ROLANT.*
     (1) Le Vivier, Seine-et-Marne, arr. de Meaux, cant. de Crécy-en-Brie, comm. de Courtevroult. [note de Dupieux].

     * Un édit du roi contre Jacques Cœur en date de Bois Sire-Amé le 14 juillet 1455 est pareillement signé A. Rolant (éd. Buchon, Choix de Chroniques et mémoires sur l’histoire de France, Paris, Desrez, 1838, p. 653), et de même encore contre les habitants de la franchise du marché Saint-Gilles d'Étampes du 7 novembre 1471 (éd. Gineste 2010, § 23) [B.G].
     

2. Lettres de publication de cet édit, 4 août 1456

II. — 1456, 5 août.

     Mandement des généraux des finances au grenetier du grenier à sel d’Etampes de donner aux habitants de cette ville vingt deniers tournois sur chaque minot de sel vendu, pour les employer à la réfection de la ville, conformément aux lettres patentes de Charles VII, en date du 12 juin 1456.
     (Original aux Arch. municip. d’Etampes, sans n° ni cote.*)
     * Aujourd’hui coté AA 154 (“Octroi sur le sel pour la réparation des murailles [sic]: lettres patentes de Charles VII et lettres de publication des conseillers généraux des comptes, 1456”) [B.G]
     Nous, les generaulx conseillers du roy nostre sire sur le fait et gouvernement de ses finances, veues les lettres patentes du roy nostre dit seigneur ausquelles ces presentes sont attachées sous l’un de nos signetz, par lesquelles et pour les causes dedens contennues, le dit seigneur a ottroyé aux bourgeois, manans et habitans de la ville d’Estampes et jusques à cinq ans prouchains venans, à compter du jour et date des dites lettres, ils puissent avoir et prendre vint deniers tournois sur chacun minot de sel qui sera vendu et distribué ou grenier à sel de la dite ville d’Estampes, pour les deniers qui en yseront estre convertiz et employez es reparacions et emparements du pavé et chaussée de la dite ville et non ailleurs,

     consentons l’enterinement des dites lettres, en mandant par ces dites presentes au grenetier du dit grenier que, durant les ditz cinq ans, à comencer du jour de l’execucion de ces presentes, il vende le dit sel à la dite creue de XX deniers tournois sur chaque minot, et que les deniers qui en yseront soyent par le dit grenetier baillez aus ditz habitans ou à leur receveur pour eulx, pour estre convertiz et employez là et ainsi que dessus est dit, pourveu toutes voyes que iceulx habitans ou leur dit receveur pour eux seront tenus d’en rendre bon compte et reliqua, par devant les officiers du roy nostre dit seigneur, et autres qu’il appartiendra.

     Donné soulz nos ditz signetz, le cinquiesme jour d’aoust, l’an mil CCCC cinquante et six.

LE CLERC.


     
 
Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
BIBLIOGRAPHIE PROVISOIRE

Éditions

     LOUIS VII, Lettres [parchemin rédigé et signé par ROLANT], Le Vivier (Seine-et-Marne), 12 juin 1456, conservées aux Archives municipales d’Étampes sous la cote AA 154.

     CONSEIL DES FINANCES, Lettres [parchemin rédigé et signé par LE CLERC], Paris, 5 août 1456, conservées aux Archives municipales d’Étampes sous la cote AA 154.

     Paul DUPIEUX (archiviste-adjoint de la Seine), «Lettres royaux inédites concernant Étampes (1456-1573)», in Bulletin philologique et historique (jusqu’à 1715) du Comité des travaux historiques et scientifiques. Années 1930 et 1931, Paris, Imprimerie nationale, 1932, pp. 245-246 (pièce n°I).

     Paul DUPIEUX, «Documents», in ID., Les Institutions royales au pays d’Étampes (comté puis duché: 1478-1598), Paris, Mercier, 1931, p. 242 (pièce n°II).

     Bernard GINESTE, «Charles VII et son conseil des finances : Octroi aux Étampois des revenus de la gabelle pour cinq ans (12 juin et 5 août 1457)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-15-1457charles7sel.html, 2010.


     Image du radeur:
empruntée à la belle page
d’Odile Halbert, Histoire du grenier à sel de Pouancé, http://www.odile-halbert.com/Histoire/grenier/Grenier.htm, en ligne en 2010.

Sur le grenier à sel d’Étampes

     Bernard GINESTE [éd.], «Dom Fleureau: Du grenier à sel d’Étampes (1668)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-17-fleureau-b21.html, 2005.

     Léon MARQUIS, «La gabelle d’Étampes», in ID., «Exposé général», in ID., Les Rues d’Étampes et ses Monuments, Étampes, Brières, 1881, pp. 56-57. Dont une réédition numérique en mode texte par le Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-19-marquis-rues01.html#gabelle, 2004.

     Clément WINGLER [éd.], «Henri IV: Autorisation de lever la gabelle (Extrait du Registre du Conseil d’État, 15 mars 1608)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-17-16080315henri4autorisationgabelle.html, 2004.

     Bernard GINESTE, «Charles VII et son conseil des finances: Octroi aux Étampois des revenus de la gabelle pour cinq ans (12 juin et 5 août 1457)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-15-1457charles7sel.html, 2010.

     Bernard GINESTE [éd.], «Charles VIII et son conseil des finances: Nouvel octroi pour dix ans aux Étampois des revenus de la gabelle (27 février et 20 novembre 1491)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-15-1491charles8sel.html, 2010.


Étampes au XVe siècle

     Corpus Médiéval Étampois: XVe siècle (liste des documents et études mis en ligne sur le moyen âge étampois sur le site du Corpus Étampois)



Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
Source: L’édition princeps de Paul Dupieux saisie par Bernard Gineste en septembre 2010.
 
Explicit
   
SommaireNouveautésBeaux-ArtsHistoireLittératureTextes latinsMoyen Age NumismatiqueLiensRemerciementsAssociationNous écrire - Mail