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              | LOUISE ABBÉMA.
 
 The climb to the top of 47. Rue Lafitte,   near the 
Grand Opéra, where Mdlle. Louise Abbéma, the well-known   painter,
 is, to use the American term, “located,” fairly takes away the visitor’s 
 breath. In Paris, however, people do not think as much of stairs as we lazier 
  Londoners, who are apt to grumble if there is no lift should we be required 
  to mount three storeys; besides, Mdlle. Abbéma has charm and brightness 
  sufficient to attract anyone au cinquième, and thus, despite 
 her lofty  situation, has never tu complain of being loft to solitude. On 
 the occasion  of my visit I was received by her mother, a delightful elderly 
 lady, who speaks excellent English, and who, regretting her daughter’s absence, 
 engaged me to return punctually at one o’clock, when she was expected home. 
 I came, of course. The artist had just finished déjeuner, and
 jumped up from table to give me a friendly hand-shake and invite me into
her studio. This is a large room divided in two, or perhaps I should say,
two rooms thrown into one, and well lighted. The prevailing tint is sage-green,
 against which the rich and sombre colourings of couches and cushions show
 to advantage. The low hearth, with its green tiles, is surmounted by an
over-mantel  of dark wood, handsomely carved, and having a grotesque Japanese
mask of bronze inserted as a centre ornament. Above stand two Chimeras in
wood, and between them on the wall is stretched some fine Japanese embroidery.
 Antique pottery, panels, and fragments of stuff from Eastern looms combine
 with the heavy Turkish rugs on the floor to give a distinctly Eastern stamp
 to the apartment.
 
 | LOUISE ABBÉMA.[Nous portons en italiques les mots en français dans le texte]
 
 La pente pour atteindre le 47, rue Lafitte, près
 de l’Opéra, où Mlle Louise Abbéma, la célèbre
 peinte, est —  pour utiliser un terme américain
— “localisée”, coupe littéralement le souffle
 à tout visiteur. A Paris, cependant, les gens ne comptent pas le
nombre  de marches comme le font les Londoniens paresseux, capables de grommeler
s’il n’y a pas d’ascenseur pour atteindre trois étages. Bien plus,
Mlle Abbéma a le charme et l’éclat suffisants pour attirer
n’importe qui au cinquième, et ainsi, malgré cette situation
élevée, elle ne se plaint jamais de la solitude. Lors de ma
visite, j’ai été reçue par sa mère, une agréable
femme d’un certain âge qui parle un excellent anglais et qui, regrettant
 l’absence de sa fille, m’a conseillé de revenir à treize heures
tapantes, heure à laquelle elle était attendue à la
maison. Je suis revenue, bien sûr. L’artiste, venait d’achever son
            déjeuner, elle a quitté la table avec élan
 pour me serrer chaleureusement la main et m’inviter à découvrir
son studio. C’est une grande pièce divisée en deux, ou il serait
préférable de mentionner deux pièces transformées
en une seule, bien éclairée. La teinte dominante est un vert
pâle, sur lequel les couleurs riches et sombres des divans et coussins
se trouvent rehaussées. La partie basse, avec ses carreaux verts,
est surmontée par une étagère de bois sombre, taillée
à la main, avec un masque japonais grotesque en bronze placé
comme ornement central. Au-dessus, se trouvent deux Chimères en bois,
et entre elles sur le mur une broderie japonaise fine est étalée.
Des poteries antiques, des panneaux et fragments de tissus en provenance
de l’Orient se combinent avec de lourdes couvertures turques au sol pour
donner à l’appartement un cachet typiquement oriental.
 
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              | “I am sorry,” said Mdlle.  Abbéma, “that none of my work is here
now.  I daresay you know I am  holding an exhibition of paintings at the
Georges  Petit Gallery, so have nothing to show you. You must go there if
you are curious.” 
 | — Je suis désolée, m’a 
 dit Mlle Abbéma, mais aucune des mes œuvres ne se trouve ici. J’ose
 vous dire que j’ai une exposition de peintures à la galerie Georges
 Petit, aussi je n’ai rien à vous montrer. Vous devrez vous y rendre
 si vous êtes curieuse. 
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              | I shall certainly visit it,  Mademoiselle, but I have already seen a great
 deal of your work elsewhere.  You must rcmember that many paintings from
your brush have been exhibited  in London, and I have a distinct recollection
of your fine portrait of Madame  Sévérine at last year’s Exhibition 
 of Journalists in the Rue  de Sèze.” 
 | — Je la visiterai certainement, Mademoiselle,
 mais j’ai déjà vu un grand nombre de vos peintures ici ou
là.  Vous devez savoir que beaucoup de vos tableaux ont été
exposés  à Londres et j’ai le souvenir notamment d’un portrait
de Madame Sévérine,  présenté l’an passé
à l’exposition des journalistes,  rue de Sèze. 
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              | “Ah! you know Sévérine?
  She is one of my greatest friends. What a woman! So clever! So original!” 
 “I  have not that pleasure.  Unfortunately, she is not in Paris just now.”
 
 “No;  the doctors have sent  her to the South for her health. Her chest is
delicate.  You want to know something about my life and work? Well, read
what she says.”
 
 | — Ah! Vous connaissez Sévérine?
 C’est une de mes meilleures amies. Quelle femme! Quelle intelligence! Quelle
 originalité!. 
 — Je n’ai pas eu ce plaisir. Malheureusement,
 elle n’est pas à Paris en ce moment.
 
 — Non, les docteurs l’ont envoyée
 dans le Midi pour raison de santé. Ses bronches sont délicates.
Vous  voulez en savoir plus sur ma vie et mon travail? Eh bien, lisez ce
qu’elle  en dit.
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              | Having found me a confortable  place on a pillow-strewn divan, and placed
 in my hands a book of press-cuttings,  which she opened at a particular
page,  Mdlle. Abbéma took a rocking-chair  beside me and smoked a
cigarette  while I read. She is a little woman, this  well-known artist,
a woman rather  Oriental in type. One cannot call her pretty,  with her marked
features and  black hair combed flatly on her forehead almost  to her eyebrowns,
but she  is eminently interesting. Her dark eyes sparkle  with intelligence,
her quick  movements, her animated conversation, and her  mobile expression
make up an interesting whole. She dresses like an Englishwoman,  in a tailor-made
gown, with shirt, waistcoat, and tie; and, though she does  not speak a woud
of the tongue that her mother uses so fluentlv, is very English in her unconventionality. 
 | M’ayant trouvé
 un lieu confortable sur un divan couvert d’oreillers et placé dans
 mes mains un recueil d’extraits de presse qu’elle a ouvert à une
page  précise, Mlle Abbéma s’est assise dans une rocking-chair
près  de moi et s’est mise à fumer une cigarette pendant que
je lisais. Cette artiste bien connue est une petite femme, plutôt de
type oriental. On ne peut la définir comme jolie, avec ses traits
marqués et sa chevelure noire platement ramenée sur le front
pratiquement jusqu’à  ses yeux bruns, mais elle est hautement attirante.
Ses yeux sombres brillent  d’intelligence, ses mouvements rapides, sa conversation
animée et  son expression versatile en font un personnage très
intéressant.  Elle s’habille comme une Anglaise, dans une robe réalisée
par  un tailler, avec une chemise, un gilet et une cravate, et bien qu’elle
ne  parle pas aussi couramment que sa mère, elle s’avère très
 anglaise dans son anticonformisme. 
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              | Having completed my stolen  survey, I fixed my attention on the printed
page  before me, sparkling with  all Sévérine’s crisp, epigrammatic
 brillianee, and outspoken,  terribly outspoken — but that is what Mdlle.
Abbéma likes. From it  I learned that the vivacious little lady was
born at Etampes, near Paris.  She is the great-granddaughter of Louise Conta,
a charming singer in her day, and of Louis de Narbonne, himself son of Louis
XV.— bâtard  de Bourbon — so that royal blood, albeit under
the bar sinister, runs  in the veins of the gifted Frenchwoman. | Ayant achevé
 mon observation à la dérobée, j’ai fixé mon
attention  sur la page imprimée devant moi, exhumant le style tranchant
de Sévérine,  épigrammatique, lumineux et franc, terriblement
franc — mais c’est que Mlle Abbéma
adore. J’ai ainsi appris que cette petite femme très vive est née
à Etampes, près de Paris. Elle est l’arrière petite-fille
de Louise Conta, une chanteuse de charme, et de Louis de Narbonne, lui-même
fils de Louis XV —             bâtard de Bourbon —
aussi du sang royal, quoique  lié à une vision tragique, coule
dans les veines de cette Française  bien douée. 
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              | Sérérine declares  the first impression Mdlle. Abbéma
 make. On one is that of a man, “un petit abbé Janséniste,”
 the youthful scion of a noble family,  eourtly, rusé, versed in the
 wiles of the world. and seeing through  them: stern, daring, adventurous
under a polished exterior; capable of leading  troops into action like his
elder brothers if need be, but, on the whole,  a man of peace. “She has fateful
 face,” said Sévérine, with  long, dark, obliquely-set eyes,
 like those of a Buddhist idol” And then she  goes on to trace the early
life  and subsequent career of her friend. 
 | Sévérine
 décrit la première impression que suscite Mlle Abbéma.
 Pour l’un, c’est celle d’un homme, “un petit abbé janséniste”, le jeune rejeton d’une famille
noble, courtois, rusé et versé dans les artifices du monde,
et observant à travers eux: sévère, téméraire,
 aventureux sous un aspect lisse, capable s’il était nécessaire
 de mener des troupes à l’action comme ses frères plus âgés,
 mais surtout un homme de paix. “Elle a un visage prophétique,
 dit Sévérine, avec des yeux longs, sombres et implantés
 en oblique, comme ceux d’une idole bouddhiste”. Et elle poursuit pour retracer
 l’enfance et la carrière de son amie. 
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              | I laid 
aside the book. 
 “It  is charming,” I said,  and charmingly written. “The only objection I
have  to make to it is that,  having read Sévérine’s view of
you,  it is difficult to detach  oneself from her impressions, and to regard
you  in any other light.”
 
 “Mais  c’est comme ça  que je veux être envisagée!”
cried  the painter; and that is why I quote Sévérine.
 
 | J’ai laissé
 de côté l’ouvrage. 
 — C’est charmant, ai-je dit, et bien
écrit. La seule objection que j’ai à y faire, c’est qu’ayant
 lu le point de vue de Sévérine sur vous, il devient difficile
de se détacher de ses impression, et de vous observer sous un autre
éclairage.
 
 — Mais c’est comme ça que je
 veux être envisagée! s’est écriée la peintre;
 et c’est pourquoi je cite Sévérine.
 
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              | “She 
 says you lived in Italy  in your childhood, and there first manifested a 
taste for art.” 
 “Yes;  my father was connected  with the Italian railways. We lived first
at Bologna,  then at Rimini, and  then at Ancona. I copied here an animal,
and there a  peasant, and the first  idea of my family was to have me taught
painting on china; but I hate it —oh, how I hated it! Devedeux, a pupil of
Décamps,  took pity on me, and made me work at drawning for three
ycars.”
 
 | — Elle dit que vous avez vécu
en Italie durant votre jeunesse, et que c’est là que s’est manifesté
 tout d’abord votre goût pour l’art. 
 — Oui, mon père travaillait pour
 les chemins de fers italiens. Nous avons d’abord habité Bologne,
puis  Rimini et enfin Ancône. J’ai fais ici la copie d’un animal, et
là  un paysan, et la première idée de ma famille fut
de m’apprendre  la peinture sur porcelaine mais j’ai détesté
cela — Oh combien je l’ai exécrée!
 Devedeux, un élève de Décamps, m’a pris en pitié
 et m’a fait travailler le dessin durant trois années.
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              | “Is it true that an old sorcerer  predicted that you would be a famous artist?” 
 “Yes; it is a curious story.  When I was a little girl of ten we were staying
 in Brittany, at Morlaix, in Finistère, and one day I went for a drive 
 with a friend, a young woman painter for whom I had a prodigious admiration. 
 She had just had some of her work hung in tlie Salon, and I looked on her 
 as a genius. As the child  of the party, I got the place of honour on the 
 box-seat of the coach, and  when we had driven some way, who should get into
 the vehicle but an old doctor  from Roscoff, who was believed by the country
 people to be a wizard. I believc  he at once spoke about me to my companion;
 but from my position I could hear  nothing of this. Howevcr, when we descended,
 he drew me to one side and said:        ‘Tu seras non seulement tout
ce  que tu souhaites, mais tout ce que celle-ci dont la carrière est
finie  eût souhaité d’être’.”
 
 | — Est-il vrai qu’un vieux
sorcier a prédit que vous deviendriez une artiste renommée? 
 — Oui, c’est une histoire étrange.
 Quand j’étais petite, à l’âge de dix ans, nous étions
 en Bretagne, à Morlaix, dans le Finistère, et un jour, je
suis  partie avec une amie, une jeune peintre pour qui j’avais une profonde
admiration.  Elle venait de voir certaines de ses peintures accrochées
au Salon  et c’était pour moi un génie. Comme enfant de cette
soirée,  j’ai eu la place d’honneur, sur le siège supérieur
de la calèche  et après avoir parcouru une certaine distance,
un vieux docteur de  Roscoff est monté dans le véhicule, considéré 
 par les habitants comme un magicien. Je pense qu’il avait parlé de
 moi auparavant à mon amie, mais de ma position, je ne pouvais rien
 entendre. Cependant, quand nous sommes descendus, il m’a attiré vers
 lui et m’a dit: “Tu seras non seulement tout ce que
tu souhaites, mais tout ce que celle-ci, dont la carrière est finie,
eût souhaité d’être”.
 
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              | “How very extraordinary! And was your friend’s career really over?” 
 “Yes,  though we did not know  it at the time. She married soon after that
a man  who had no sympathy with  art, and who put every obstacle in her way.
On the threshold of success she  was stricken down by illness, and died after 
the birth of her child.”
 
 | — Très extraordinaire,
 en effet! Et la carrière de votre amie s’est achevée réellement? 
 — Oui, bien que nous le sachions
pas à  l’époque. Elle s’est mariée peu après
avec un homme sans grande intérêt pour l’art, et qui a mis des
obstacles à  son activité. Sur le pas de la porte du succès,
elle sombra  dans la maladie et elle est morte après la naissance
de son enfant.
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              | “Was that all the old doctor  told you?” 
 “By  no means. He made some  rcmarkable predictions as to my future life.
Much  of what he said has already  been accomplished, and  I confidently 
expect  the fulfilment of the rest.”
 
 | — C’est ce que le vieux docteur
 vous avez prédit? 
 — Pas du tout. Il avait fait
des prédictions  remarquables sur mon futur. Une grande partie de
ce qu’il a annoncé  est déjà survenue et j’attends avec
confiance l’accomplissement  du reste.
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              | “And how did events come about?” 
 “As  far as my art life is  concerned, through the fact that I attracted
the notice  of Carolus Duran in the Louvre, where I was copying the well-known 
‘Infanta’  of Velasquez.  He took an interest in me, a gamine of fourteen. 
Previous   to that I had been studying under Chaplin, but I then lift him 
and worked   for Carolus Duran and Henner.”
 
 | — Et comment ces événements
 se sont-ils concrétisés? 
 — En ce qui concerne ma vie
artistique,  à travers le fait que j’ai attiré l’attention
de Carolus Duran  au Louvre, alors que je réalisais une copie de la
fameuse ‘Infante’ de Velasquez. Il s’est intéressé
à moi, une gamine de quatorze ans. Avant cela, j’avais étudié
sous la direction de Chaplin, mais je l’ai alors quitté pour travailler
pour Carolus Duran et Henner.
 
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              | “Oh, you told me nothing of your time with Chaplin?” 
 No?  Well, with him I had one of my earliest and most valued triumphs.”
 
 “In  what way?”
 
 | — Oh, vous ne m’avez rien dit
 de votre passage chez Chaplin? 
 — Non? Eh bien avec lui, j’ai
connu un  de mes premiers et plus importants triomphes.
 
 — De quelle sorte?
 
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              | “One day I painted something  wherein I tried to carry out an idea of my
own. The other studients were shocked at my departure from tradition, and
prophesied that when Chaplin came round he would make unlike matters unpleasant
for me. Well, he came and sat before my casel for [p.38] 
       a long time in silence, while the others waited to hear me crushed.
 Then he said, ‘Ça, mon enfant, c’est du Manet.’ There was
a  titter, and he turned round sharply and addressed the others, ‘Oui, 
j’ai  dit du Manet, c’est-à-dire quelque chose de beau. Vous autres, 
les  malignes, vous ferez en perpétuité des chaplinades  de 
demoiselles  en rose avec des tourterelles et des rubans bleus! Elle, cette 
 petite, ira  plus loin, beaucoup plus loin. C’est une personnelle’.” 
 | — Un jour, je peignais un sujet
 où j’essayais de suivre mes propres idées. Les autres étudiants
 furent étonnés de mon écart par rapport à la
tradition et ont prédit que lorsque Chaplin passerait, il ferait des
commentaires désobligeants sur mon attitude. Il est arrivé
et s’est assis devant mon chevalet pour un long moment de silence, tandis
que les autres attendaient que je sois terrassée. Puis il a dit, “Ça, mon
enfant, c’est du Manet”. Il y eut des rires étouffés, 
 il s’est brusquement retourné et s’est adressé aux autres. “Oui, j’ai dit du
 Manet, c’est-à-dire quelque chose de beau. Vous autres, les malignes, 
 vous ferez en perpétuité des chaplinades de demoiselles en
 rose avec des tourterelles et des rubans bleus! Elle, cette petite, ira
plus  loin, beaucoup plus loin. C’est une personnelle”. |  
              | “And you really have no work  here to show me?” 
 “Nothing  but this,” and Mdlle.  Abbéma sought amidst half-finished
studies till she found what she  wanted. “It is a portrait of my grandmother,
who is still living and still  beautiful at the age of eighty-four. She is
an Englishwoman, and married,  at sixteen, my grandfather, Captain d’Astoin, 
who was in command of the Corps  des Pages du Roi.” A lovely old lady, 
in truth, she seemed, with her smooth checks, fresh complexion, and white 
hair.
 
 | — Et vous n’avez aucune peinture
 à me montrer maintenant? 
 — Rien que cela, et Mlle Abbéma
 a fouillé parmi ses œuvres à moitié achevées 
jusqu’à trouver ce qu’elle cherchait. C’est le portrait de ma grande 
mère,  qui est toujours en vie et toujours très belle à 
l’âge de 84 ans. Elle est anglaise et s’est mariée, à 
l’âge de seize ans, à mon grand père, le capitaine d’Astoin, 
qui commandait le Corps des Pages du Roi.
 
 Une délicieuse vieille dame, en vérité,
 avec ses joues lisses, son teint frais et ses cheveux blancs.
 
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              | “She has never lost her English  accent,” said her granddaughter. “But to
 come back to the subject of my work.  I am, as you know, largely a decorative 
 artist, and, besides my portraits,  have done panels in the Watteau style 
 for Comtesse Jacquemont; others, Japanese  this time, for Dieuvelleroy, and
 flower panels for Dr. Evans, a ceiling for  Georges Petit, and so on.  
          Je  sens en moi l’âme d’un peintre en bâtiments. 
 In the midst  of an important order I was stricken down with influenza, but
 struggled against it. I got through four mètres of decorations for
 a private house this year, and two ceilings, or sixty mètres in all.
 It was enormous. When I was finishing the ceiling for Georges Petit, the
subject  being ‘Music,’ I feel it. After struggling as long as possible, I
sent for  the doctor, and sait to him, ‘I will stay three whole days in bed,
and swallow  anything you give me, however nasty, but I must be well for
Thursday, when  my Exhihition opens.’ And on Thursday I put in an appearance 
at the Gallery,  but the effects still hang about me.” 
 | — Elle n’a jamais perdu son
 accent anglais, précise sa petite fille, mais pour revenir sur mon
 travail, je suis, comme vous le savez, plutôt une artiste de décoration
 et, à côté de mes portraits, j’ai réalisé
 des panneaux dans le style Watteau pour la comtesse Jacquemont, d’autres,
 de style japonais cette fois, pour Dieuvelleroy, et des panneaux de fleurs
 pour le Dr. Evans, un plafond pour Georges Petit, et ainsi de suite. Je
sens  en moi l’âme d’un peinte en bâtiments. Au milieu d’une
important  commande, j’ai été atteinte par la grippe mais je
me suis battue.  Je suis parvenue à réaliser quatre mètres
de décoration  pour une maison privée cette année, et
deux plafonds, de 60  mètres en tout. C’était énorme.
Quand j’ai achevé  le plafond pour Georges Petit, le sujet étant
la ‘Musique’,  je l’ai ressentie. Après
l’avoir combattue le plus longtemps possible,  je me suis rendu chez le médecin
et lui ai dit, “Je  vais rester trois jours complets
au lit, et avaler tout ce que vous allez  me donnez, même si cela n’est
pas bon, mais je dois être en bonne forme jeudi pour l’ouverture de
mon exposition”. Et le jeudi, j’ai pu faire une apparition
à la galerie mais les symptômes étaient toujours présents. 
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              | “What was your first exhibition  at the Salon?” 
 “A  portrait of my mother,  that you will see in the next room.”
 
 | — Quelle fut votre première
 présentation au salon? 
 — Un portrait de ma mère,
que vous pourrez voir dans la pièce suivante.
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              | “You sent some work to Chicago?” 
 “Yes,  ‘L’Amazone,’ bought  by the Duke Ernest of Saxe-Coburg.”
 
 | — Vous avez envoyé
des peintures à Chicago? 
 — Oui, ‘L’Amazone’,
 acheté par le duc Ernest de Saxe-Coburg.
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              | “You have been decorated,  have you not?” 
 “I  was created officier de l’Academie after exhibiting thc portrait 
of  my father. Carolus Duran, Henner, and Puvis de Chavannes asked it for 
me at the Ministry.”
 
 | — Vous avez été
 décorée, n’est-ce pas? 
 — Oui, j’ai été faite officier
 de l’Académie après l’exposition du portrait de mon père.
 Carolus Duran, Henner et Puvis de Chavannes l’on demandé pour moi
auprès du ministre.
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              | Mdlle. Abbéma  now showed me a fine etched portrait of her friend, 
 Augusta Holmes, the composer, with a bar of music from one of her operas 
beneath it; and one of Sarah Bernhardt, another intimate — a striking likeness, 
in red chalk, by Walter Spindler. My note-book was now full, and having exacted 
 a promise from Mdlle. Abbéma to come and see me on her approaching 
 visit to London, I bade her and her mother good-bye. 
 
 C. O’CONNOR ECCLES.
 | —  Mlle Abbéma m’a alors montré
 un beau portrait gravé à l’eau-forte de son amie, Augusta
Holmes,  compositeur, avec en dessous une mesure de l’un de ses opéras,
et un portrait de Sarah Bernhard, une autre de ses proches — une étonnante ressemblance,
 au fusain rouge, par Walter Spindler. Mon carnet de notes était désormais
 complet, et après avoir obtenu la promesse de Mlle Abbéma
de  venir me voir lors de sa prochaine visite à Londres, je l’ai saluée 
 ainsi que sa mère. 
 
  Charlotte O’CONNOR ECCLES.
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              | Source: The Sketch, 1895 saisi par B.G., 2007) | Traduction: Fr. B., janvier 2007. |  
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