Place du Marché-Notre-Dame.
— Commence à la place du Petit-Marché,
en face l’ancienne collégiale Notre-Dame, et va jusqu’à la rue
Sainte-Croix.
C’est sur cette place, longue, mais étroite,
qu’a lieu, tous les samedis, le marché pour le beurre, les volailles,
les légumes et autres denrées. Anciennement, ce marché
avait lieu non seulement le samedi, mais encore tous les jours de la semaine.
Sous le règne de Louis XIV, on voyait, dit-on
sur cette place, une halle qui allait de la rue Sainte-Croix à la rue
de l’Ancienne-Comédie.
On voit toujours une ancienne auberge du Cheval-Rouge,
et l’auberge moderne: au Rendez-vous des Bons-Enfants.
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Une halle occupait
le côté, situé vers la rue Sainte-Croix, de cette place,
appelée au XVIIIe siècle «rue Regratterie, autrement dit
le marché Notre-Dame (1)», sans doute par corruption de Regrattier
(épicier, vendeur de sel), qui est aussi le nom d’une ancienne famille
noble.
Le 8 septembre 1792, les sans-culottes plantèrent
sur cette place un arbre de la liberté.
Le samedi 18 août 1793, jour de marché,
le nommé Louis Devoté, âgé de vingt-cinq ans, matelot,
est resté exposé sur cette place de neuf heures du matin à
trois heures de relevée, en exécution d’un jugement du tribunal
criminel de Versailles du 22 avril précédent, qui le condamne
«à huit années de fers et à l’exposition pendant
six heures, pour usage d’un faux ordre de route.»
Sous la Révolution, la place Notre-Dame s’appelait
place de l’Unité.
|
(1) Archives départementales.
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Rue Baugin. — De la rue de la Cordonnerie à
la promenade du Port. Elle s’appelait autrefois rue de l’Hospice,
[p. 171] parce qu’elle longe en effet cet
établissement dans toute sa longueur.
Dans sa séance du 18 juin 1877, le conseil municipal
d’Étampes a décidé que cette rue s’appellerait rue Baugin,
en souvenir du philanthrope qui légua au commencement du siècle
une somme de 50 000 fr. à l’hospice d’Étampes, somme qui servit
à construire un bâtiment pour les vieillards, et connu sous
le nom d’Asile Baugin.
Pierre-François-Cantien Baugin est né
à Étampes.
C’est au coin des rues Baugin et de la Cordonnerie,
à côté de Notre-Dame, qu’est situé l’Hôtel-Dieu,
desservi par les religieuses de l’ordre des Augustines d’Étampes (1).
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(1) V. les notes 112, 123.
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L’établissement
hospitalier était situé primitivement dans l’église même
de Notre-Dame, vers le côté gauche, et s’appelait au XIIe siècle
l’aumônerie de Notre-Dame.
L’Hôtel-Dieu était desservi par des frères
laïques jusqu’au commencement du XVIe siècle, et ce n’est que
vers l’année 1537 que le maire et les échevins y établirent
des religieuses de l’ordre de Saint-Augustin, qui sont en général
des personnes de la ville.
L’hospice se compose actuellement d’une file de grands
bâtiments longeant la rue Baugin et joignant deux autres bâtiments
à angle droit avec les premiers.
Ces bâtiments forment deux grandes cours et sont
terminés par un beau jardin allant jusqu’à la promenade du Port.
La chapelle qui forme la façade principale remonte
presque à l’origine de l’établissement; c’est ce qui résulte
de l’inscription suivante, gravée au-dessus de la porte d’entrée:
MDLIX
AMEN DICO VOBIS, QUANDIU
FECISTIS UNI
EX
FRATRIBUS MEIS MINIMIS, MIHI FECISTIS.
(Mathieu,
xxv.)
«Je
vous le dis en vérité, ce que vous aurez fait pour un de mes
frères les plus infirmes, c’est à moi-même que vous l’aurez
fait.»
Le clocheton qui est au-dessus de la chapelle des religieuses
[p. 172] contient une cloche ancienne
qui porte cette inscription en lettres gothiques:
NOUS FUSMES FAICTES
L’AN MIL Vc L ET FU
NOMMÉE
LAZARE PAR ….. AMIS.
Son diamètre est de 52 centimètres et
sa hauteur de 45 centimètres.
Le bâtiment qui fait suite à la chapelle
date de 1652 et a été bâti en partie à l’aide
d’un don de Jacques Petau, lieutenant général d’Étampes.
L’Hôtel-Dieu avait deux chapellenies fondées
au XIIIe siècle et rapportant 10 livres parisis de revenu.
En 1648, le revenu de 1’Hôtel-Dieu était
de 15 000 livres, et celui de la chapelle de 60 livres (1).
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(1) Pouillé
de Sens. V. la note 42
|
Cet établissement
rendit de grands services surtout dans les moments de guerre et d’épidémie.
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Le remède
de la Sœur d’Étampes, contre le choléra, a fait le tour du monde
(2).
L’Hôtel-Dieu d’Étampes a 117 lits et un
revenu de 61 116fr.
L’épisode le plus remarquable concernant cette
maison remonte à l’année 1652.
Ce fut à cette époque que les prêtres
de la Mission envoyés par saint Vincent de Paul arrivèrent à
Étampes, où on ne voyait que des hommes ou plutôt que
des spectres desséchés, livides, défigurés, et
à qui les corps morts qu’ils trouvaient entassés soit aux portes
de leurs villes, soit dans l’enceinte de leurs murailles, faisaient sentir
par avance toute la rigueur de leur destinée. Ce fut ce premier objet
d’horreur que les missionnaires leur ôtèrent de devant les yeux.
Comme ils ne trouvaient à Étampes que des personnes abattues
de langueur, il fallut chercher au loin des hommes forts et robustes, qui
se chargèrent d’enlever du milieu des rues des monceaux de fumier,
lesquels servaient de sépulture aux hommes, aux chevaux et à
tout ce qui était mort depuis le premier séjour que les troupes
avaient fait dans la ville. [p. 173]
Les loups dévoraient non seulement les cadavres
que les cimetières rejetaient, mais encore les vivants; l’un d’eux
dévora trois femmes. Alors on vit apparaitre à Étampes
les aéreux, sorte de vidangeurs de cadavres qui débarrassèrent
les rues des monceaux d’horribles ordures, et l’accumulation en était
si grande qu’en juin 1653, une année après la guerre, ils ne
purent faire autre chose que de vider l’infection des maisons dans les rues…….
Les missionnaires rétablirent l’hôpital
d’Étampes, où ils établirent une marmite pour plus de
deux cents pauvres, et c’est sans doute en mémoire de cet acte charitable
qu’une partie de l’établissement a conservé le nom de salle
Saint-Vincent-de-Paul. |
(2) V. la note F
|
On fit venir des
Sœurs de charité, car personne à Étampes ne pouvait aider
les missionnaires dans leur besogne, au point qu’on ne put trouver dans la
ville une femme pour veiller une Sœur malade (1).
Dans l’envoi de l’argenterie des églises et couvents
d’Étampes, le 25 novembre 1792, à la Monnaie de Paris, par les
administrateurs et procureur syndic du district, nous voyons figurer l’Hôtel-Dieu
d’Étampes pour:
Une lampe en argent pesant 9 marcs 6
onces 5 gros;
Une croix d’autel, 11 marcs 4 gros;
Un encensoir, une navette avec sa cuillère et sa chaîne,
4 marcs 5 onces 7 gros et demi;
Un bénitier et goupillon, déduction faite de
2 gros pour le crin non ôté, 5 marcs 1 once 4 gros;
Deux burettes et leur plat d’argent, 5 marcs;
Six chandeliers d’autel, 58 marcs 6 gros.
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(1) Vie de saint
Vincent de Paul, par l’abbé Collet. – Id., par l’abbé Maynard
– Magasin. Charitable
|
Place du Petit-Marché. —
Entre la place précédente et l’église Notre-Dame. Ainsi
nominée parce que c’est le petit marché où l’on vend
tous les samedis la viande et le poisson, par opposition au marché
Saint-Gilles, grand marché pour la vente des blés, chevaux et
autres bestiaux (2). [p. 174]
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(2) Fleureau, p.
99
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Sous les premiers
rois, le marché à la viande et au poisson se tenait le jeudi.
En l’année 1360, lors des guerres avec les Anglais
qui pillaient toute la France, «on transféra la tenue du marché
Saint-Gilles dans la paroisse Saint-Basile, au-dessous du château et
en la place qui est devant l’église Notre-Dame. La place du Petit-Marché
n’est qu’une faible partie de cette grande place, qui n’existait déjà
plus du temps de Fleureau, car il y avait déjà des maisons
sur une partie de son emplacement (1).
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(1) Fleureau, p. 97, 98.
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C’est sur cette
place qu’a lieu tous les mardis et vendredis, durant huit mois de l’année,
le marché à la criée pour le poisson venant du train
de marée.
C’est là également qu’a lieu, depuis longtemps,
le 25 juin de chaque année, la louée ou location des domestiques
des deux sexes pour travailler dans les fermes.
Cet usage ne se pratique pas le même jour dans
les localités voisines: ainsi, à Rouvres, la louée a
lieu le 24 juin.
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Rue de l’Ancienne-Comédie.
— Va de la place du Marché-Notre-Dame à la place Dauphine. Son
nom lui vient de l’ancienne Comédie ou théâtre d’Étampes,
qui était situé derrière l’auberge du Coq-en-Pâte.
Jean-Baptiste Cizos y jouait en octobre 1824, lorsque
naquit sa fille, qui devint une actrice célèbre connue plus
tard sous le nom de Rose Chéri.
La rue de l’Ancienne-Comédie s’appelait encore
en 1840 rue du Petit-Marché, parce qu’il s’y tenait alors un marché;
anciennement elle s’appelait rue Dauphine, et plus anciennement encore rue
des Oisons.
Au coin de cette rue et de celle du Petit-Mesnil -Girault
était une auberge du Lion-d’Or, détruite en 1850. On voit maintenant
un boucher sur son emplacement.
Place Dauphine.
— Au bas et à gauche de la rue Sainte-Croix. On y remarque d’abord
l’ancienne auberge à l’enseigne du Coq-en-Pâte, dont nous avons
déjà parlé. [p. 175]
En face de cette auberge est l’hôtel Saint-Yon,
maison particulière, ancienne résidence de la famille de Saint-Yon.
Elle se compose d’un grand bâtiment carré joint à deux
ailes en retour formant une cour d’entrée.
On y remarque ses deux tourelles surmontées de flèches
élégantes, les fenêtres sculptées de sa façade,
les chimères des entablements, les grosses poutres en chêne
sculpté qui décorent les plafonds des grandes salles, et de
belles peintures intérieures où le talent d’un jeune artiste,
M. Bizot, a représenté quelques monuments d’Étampes et
des environs.
Sur une ancienne plaque en marbre noir encastrée
sur la façade, on lit ces mots:
HOSTEL
DE
SAINT-YON.
Une pierre blanche, encastrée, l’année
l879, à droite de la façade en regard de la précédente,
montre les armoiries de la famille de Saint-Yon: «d’azur à la
croix lozangée d’or et de gueules, cantonnée de 4 cloches d’argent
bataillées d’azur.»
La majeure partie des bâtiments remonte au XVIe
siècle; mais il y a des parties plus anciennes. En 1870, M. Dujoncquoy,
propriétaire actuel, y fit faire par l’architecte de l’église
Saint-Martin d’importants travaux de restauration et de nouvelles constructions.
La place Dauphine n’a guère qu’un demi-siècle
d’existence, car en 1825 on voyait sur son emplacement:
1° La rue du Petit-Mesnil-Girault, qui commençait
en face de l’hôtel Saint-Yon et allait rejoindre la rue du Puits-de-
la-Chaîne en faisant un coude;
2° Le grand et le petit hôtel de Mesnil-Girault,
qui appartenait aux Chartreux d’Orléans;
3° La Halle ou Boucherie, très ancien bâtiment
dont le rez-de-chaussée contenait les étaux des bouchers, et
le premier étage la salle des plaids ou d’audience. Cette grande boucherie,
établie par Philippe-Auguste, quand les trois autres qui étaient
à Saint-Pierre, à Saint-Gilles et à Saint-Martin furent
reconnues insuffisantes, a [p. 176] été
démolie en 1763, s’il faut en croire une note manuscrite du temps sur
un exemplaire du livre de dom Fleureau. Il est probable que la halle fut
reconstruite, car un bâtiment appartenant à la communauté
des bouchers fut vendu comme bien national, le 7 vendémiaire an V,
à Nicolas Lelièvre, pour 1119 fr. (1).
|
(1)
Fleureau, p. 27, 212. – Archives départementales. – V. la note G.
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Au coin de la place
Dauphine et de la rue de la Tannerie existe une maison qui était une
ancienne auberge, et dont l’enseigne de Saint-Jean consistait en un bas-relief
sculpté sur sa façade.
Cette place fut appelée successivement: place
Royale, de l’Ancienne-Comédie et Dauphine.
|
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Rue de la Tannerie. — Réunit
la place Dauphine à la rue Darnatal. Ancienne rue de tanneurs et de
marchands de laine, qui occupaient en 1790 presque toutes les maisons de celle
rue.
Une tannerie importante se voyait encore jusque vers
1820, en face la place Dauphine. C’était anciennement la rue principale
de la ville. Fleureau nous apprend qu’au XVIIe siècle «le chapitre
Sainte-Croix d’Orléans avait sur Menil-Girault, Ormoy… justice haute,
moyenne et basse, laquelle il fait exercer à Étampes, en une
maison assise au bout de la rue de la Tannerie, dite maison de Sainte-Croix
d’Orléans ou de Menil-Girault.» (2). Cette maison a évidemment
donné son nom à la rue du Petit-Menil-Girault, appelée
aussi ruelle de la Boucherie (3).
|
(2) Fleureau, p. 37.
(3) Archives départementales
|
Un petit hôtel du Menil-Girault,
qui fut vendu comme bien national le 16 novembrc 1791, et qui appartenait
au chapitre Sainte-Croix d’Étampes, n’était probablement autre
que ladite maison de Menil-Girault. Ce petit hôtel fut vendu à
Michel Laglace pour 4 650 fr., et était situé rue de la Coutellerie,
nom donné alors à la rue de la Tannerie (4).
|
(4) Archives départementales.
– V. la note G
|
André Rimbault,
ancien principal du collège, est né rue de la Tannerie, le
5 mai 1814, en face l’hôtel Saint-Yon (5). [p.
177]
Pendant la Révolution, cette rue s’appelait rue de
la Montagne, ensuite rue de la Salle jusque vers 1815 (1).
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(5) V. le chapitre Biographie.
(1) Archives communales.
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Rue du Puits-de-la-Chaîne. —
Va de la rue de l’Ancienne-Comédie à la rue Darnatal. Ainsi
nommée à cause d’un ancien puits en pierres de taille, couvert
en dôme, qui se trouve à sa rencontre avec la rue Darnatal.
Pendant la Révolution, elle s’appelait rue Brise-Chaîne
(2).
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(2) Id.
|
Rue Darnatal. — Dans le prolongement
de la rue de la Cordonnerie et allant jusqu’à la rivière. Le
moulin Darnatal, d’où lui vient son nom, existait déjà
du temps du roi Robert; on l’appelle aujourd’hui le Grand-Moulin. Il faisait
partie du domaine royal et appartenait au prince d’Orléans en 1753,
lorsqu’il y eut contestation entre les meuniers des moulins Darnatal et
Notre-Dame.
Pierre-Innocent Gérosme en était propriétaire
le 17 avril 1787, lorsqu’il lui fut permis d’y établir une deuxième
roue. Ce moulin, confisqué au prince Louis-Philippe d’Orléans
à la Révolution, fut vendu comme bien national le 26 prairial
an IV, avec une maison à côté et 75 perches de pré,
à Etienne Gérosme, moyennant 159 655 fr. (3).
|
(3) Archives départementales.
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Ce dernier en était
propriétaire le 30 avril 1807, concurremment avec Louis-Pierre Chevalier,
lorsqu’ils demandèrent l’autorisation de le démolir et de le
réédifier, et en même temps de refaire le pont Darnatal.
La demande fut accordée par suite des considérations
suivantes prises par l’ingénieur des ponts-et-chaussées: «La
maîtrise veut régler la hauteur de l’eau, afin d’empêcher
que la rue Basse ne soit inondée lors de la fonte des neiges, grandes
pluies et orages… baissé les déversoirs, parce que l’eau montait
souvent jusque sur le pavé de la rue Basse… La rue Darnatal est très-étroite
dans toute sa longueur, au point même qu’il peut a peine y passer
deux voitures. Cette rue, qui conduit au faubourg Saint-Pierre et à
la [p. 178] route de La Ferté,
est très-passagère, et par suite très-embarrassée
au droit du moulin Darnatal, par rapport a celles qui chargent et qui déchargent
en cet endroit. L’ingénieur pense que c’est le moment de profiter de
la reconstruction du moulin pour faire mettre toutes les maisons d’un même
côté de la rue dans l’alignement, chose facile, puisque les
propriétaires du moulin sont d’accord à ce sujet…
«Ce reculement doit être de 1 m. 90 dans
toute la longueur des bâtiments du moulin. L’ingénieur propose
aux propriétaires une indemnité de 1 000 fr.
«… A 1’un des côtés du pont Darnatal,
il existe une petite place vague où était autrefois un abreuvoir,
aujourd’hui servant d’égout pour recevoir les eaux de Guinette, des
rues de la Cordonnerie, Darnatal et du Petit-Marché-Notre-Dame…
«Le pont demandé sera en outre d’une grande
utilité pour la commune et les propriétaires voisins du pont
de l’Isle-Maubelle (1)…»
|
(1) Manuscrit des moulins.
|
Au n° 9 de la rue
Darnatal est une maison ancienne qui était autrefois une auberge; il
y a peut-être un siècle qu’elle ne l’est plus. Le temps a respecté
son enseigne: A l’Arche-de-Noé, et une madone en pierre finement sculptée
dans une niche au-dessus de laquelle est la curieuse inscription:
L’original de cette image
Est
un chef-d’œuvre si parfait,
Que
l’ouvrier qui l’a fait
S’est
renfermé dans son ouvrage.
Le
sens énigmatique rappelle, selon M. de Montrond, le mystère
de l’Incarnation, ou bien, s’il faut en croire les habitants du quartier,
l’ouvrier de cette madone a été, selon son désir, enterré
dans ce mur (2). D’après une tradition, c’est dans l’auberge de l’Arche-de-Noé
que logèrent les ouvriers qui ont travaillé à l’église
Notre-Dame au XIVe siècle lorsqu’elle a été fortifiée.
|
(2) De Montrond, Essais, t. II, p. 35.
|
Il y avait encore dans
cette rue une maison appelée la Sorbonne, qui aurait appartenu, dit-on,
à Robert Sorbon, fondateur de la Sorbonne et confesseur de saint Louis.
Cette maison, située rue du [p. 179] Puits-Mauconseil,
appartenait à la fabrique Notre-Dame et fut vendue le 31 décembre
1792 comme bien national. Ceci semble indiquer l’existence d’une rue qui
rejoignait sans doute la rue Mauconseil à l’endroit où il y
a un puits (1).
|
(1) Archives départementales.
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Le péage qui était
perçu par le roi Louis-le-Gros «sur les marchands qui achetaient
et vendaient dans Étampes-le-Châtel» se payait sans doute
à l’entrée des ponts situés dans cette rue (2). |
(2) Fleureau, p. 483.
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Nous pensons que
l’ancienne rue Saint-Louis, qui devint à la Révolution la rue
des Trois-Couleurs, était la rue Darnatal, à cause de l’auberge
de l’Image-Saint-Louis qui était située au coin de cette rue
et de la place du Petit-Marché.
Rue Mauconseil. — Va de la rue Évézard
à celle du cloître Notre-Dame. Si la rue Mauconseil ou des Mauvais-Conseils
a la même origine que celle de Paris portant ce nom, cela voudrait dire
que c’était autrefois une rue mal famée.
Rue Île-Maubelle.
— Rue allant du moulin Darnatal à la promenade
des Prés. C’est en même temps la route nationale n° 191
de Mantes à Corbeil par La Ferté-Alais. Elle est dans l’Ile-Maubelle
formée par la rivière d’Étampes et le ruisseau des Dames.
A l’extrémité de cette rue étaient les murs d’enceinte
de la ville et la porte Saint-Pierre.
A gauche et au-dessous du moulin Darnatal est celui
de l’Ile-Maubelle ou Berchère, qui était un moulin à
foulon établi par ce dernier en 1792.
Un manuscrit de l’époque nous apprend que le
moulin Darnatal avait deux roues (27 messidor an II).
La veuve Gérosme, propriétaire du moulin
national Darnatal, demanda à la commune la permission de poursuivre
Berchère pour l’exhaussement sans ses ordres du moulin de l’lle-Maubelle
et du lavoir de l’hospice (4 pluviôse an V).
Le moulin de l’Ile-Maubelle appartenait primitivement
à l’imprimeur Dupré-Démollière: or, en 1792, Couturier,
pour cause de patriotisme, lui enjoignit par lettre de livrer son moulin
à vil prix [p. 180] à son ami
Berchère, membre du comité révolutionnaire, menaçant
de le lui confisquer et de le dénoncer comme suspect. Dupré
jugea à propos de céder à la force; mais quand le calme
fut rétabli, porteur de la lettre compromettante de Couturier, il
présenta ses plaintes à l’administration municipale, et il
y eut même un procès qui se termina par l’allocation d’une juste
indemnité à l’ancien propriétaire (1).
Plus tard, il est enjoint à Berchère de détruire
une usine qu’il a indûment fait construire sur la rivière de
Coquerive, et de rétablir dans le délai d’une décade
le lavoir de l’hospice dans son état primitif (5 brumaire an VI) (2).
|
(1)
V. la note 94.
(2)
Manuscrit des moulins
|
On appelait autrefois
rue de l’Ile-Maubelle la rue à gauche allant au moulin de ce nom et
qui est située sur les anciens remparts. Anciennement, elle s’appelait
rue de Coquerive, sans doute parce qu’elle mène à l’allée
de Coquerive.
|
|
Promenade des Prés. — L’une des belles
promenades de la ville passant dans les prés et longeant les anciens
remparts. On remarque surtout les ruines des murs fortifiés, deux
tours et un petit fort quadrangulaire garni de mâchicoulis: la première
tour vers la rue du Perray s’appelle tourelle à Jean-le- Bâtard,
la deuxième tour du Loup, et le fort est connu sous le nom de Portereaux.
La majeure partie de ces murs d’enceinte a été démolie
en 1833.
La section de cette promenade allant de la rue du Perray
à la première tour s’appelait autrefois quai du Pont-aux-Dames.
La rivière des Prés l’arrose dans toute
son étendue; les arbres séculaires dont elle est plantée
y produisent une agréable fraicheur. Le paysage y est très varié:
ici un jardin, un marais; là une pépinière, une maisonnette,
un lavoir; plus loin, un château, une usine. Tout cela contribue à
faire de ce lieu un site enchanteur.
En face la place Saint-Gilles, il y a sur cette promenade,
depuis 1867, une grande place plantée d’arbres et servant pour le marché
aux bestiaux qui s’y tient tous les premiers samedis du mois, et où
il se vend jusqu’à vingt mille moutons. Le premier [p. 181] marché eut lieu le 4 juillet l868,
et la recette pour l’octroi fut de 420 fr. 6.
La Société d’horticulture d’Étampes
vient d’établir à côté de ce marché un
jardin d’expérience appelé jardin Guettard, ouvert au public
depuis le 27 juillet 1879. On y voit le buste du célèbre naturaliste
étampois, dû au ciseau de M. Richou.
|
|
Jean-Baptiste de
Poilloue, comte de Bonnevaux, né à Étampes (1), l’un
des bienfaiteurs de cette ville, mort le 8 mai 1863, à quatre-vingt-cinq
ans, avait sa résidence en cet endroit; c’est pourquoi le nom de
Bonnevaux a été donné à la belle avenue moderne
de 650 mètres de longueur, allant au pont sur la Juine appelé
pont de pierre, et au chemin vicinal n° 7 d’Étampes à Ormoy.
A droite de cette avenue, et non loin du marché
aux bestiaux, est situé le tir d’Élampes, qui a été
inauguré le 1er août 1880.
Après le jardin Guettard, dans la propriété
Bonnevaux, est la fabrique de lampes modérateur, système Gautier,
occupant une quinzaine d’ouvriers, et fondée à Étampes
en 1864.
En face la rue de Pont-Quesneaux, on voit sur cette promenade
une usine à gaz établie en 1870, accompagnée d’un confortable
établissement de bains. Plus loin est la nouvelle école communale
de garçons dont l’ouverture aura lieu en octobre 1881.
Un peu plus avant dans la prairie, sur une chute du
Juineteau, est le moulin moderne de Baccanal. A l’origine, c’était
un moulin à blé, ayant une paire de meules et produisant trois
sacs de farine, transformé vers 1875 en usine à fabriquer les
couvertures, laquelle a été supprimée par suite de faillite
en 1879.
L’origine du mot Baccanal vient sans doute du bas canal
formé par le bras artificiel du Juineteau, par opposition au cours
d’eau ou canal supérieur, situé plus haut dans la ville.
Les bains et le moulin Baccanal sont de la paroisse
Notre-Dame, tandis que les maisons de la promenade des Prés, situées
un peu plus haut, sont de la paroisse Saint-Gilles.
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(1) Le comte de Bonnevaux, son père,
figurait en 1789 à l’Assemblée des trois états.
|
C’est
auprès du moulin qu’il avait été question d’établir
la machine destinée à élever l’eau dans la ville. Un
avant-projet a été dressé a cet effet par M. Guiard,
ingénieur des ponts et chaussées [p.
182]. Dans sa session de février 1877, le conseil municipal
a voté un emprunt de 220 000 fr. pour faire face à ces travaux.
Un jardin marais d’un demi-arpent, situé près
le pont aux Dames, appelé le Petit-Versailles, et qui appartenait à
la Congrégation, fut vendu comme bien national, le 19 septembre 1791,
à Pierre Robillard, moyennant 1 580 fr. (1).
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(1) Archives départementales.
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Carrefour au Chat et impasse au Chat. — A droite,
au bout de la rue de la Cordonnerie et en face la chapelle de l’Hôtel-Dieu.
Il y a dans l’impasse une porte en pierres de taille dont les matériaux
proviennent de la démolition de l’une des portes latérales de
la collégiale Sainte-Croix.
Une maison dite du Petit-Écu, située dans
ce carrefour, et composée de deux corps de logis, cour et jardin en
terrasse, plus dix arpents de terre et pré, le tout au chapitre Notre-Dame,
fut vendue, le 2 juillet l791, comme bien national, à Germain Hingé,
moyennant 9 300 fr. (2)
|
(2) Id.
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Rue des Remparts. — De la rue Saint-Jacques
à la rivière, et de la rivière à la rue Ile-Maubelle.
Cette rue passe sur les anciens remparts de la ville qui ont été
abattus petit à petit, notamment en 1833, l 860 et 1871. Ces murs,
qui avaient 2 mètres d’épaisseur et étaient percés
de nombreuses meurtrières pour le canon, étaient flanqués,
entre la porte Évézard et la porte Saint-Jacques, d’une belle
tour ronde à deux étages, séparés par des voûtes.
La route de Dourdan, qui suivait autrefois les rues
Saint-Jacques et de la Cordonnerie, suit aujourd’hui la rue des Remparts
jusqu’à la rue Évézard.
La partie allant de la rue de l’lle-Maubelle à
la rivière s’appelait autrefois rue de Coquerive.
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Rue du cloître Notre-Dame.
— Va de la rue Darnatal à la rue Mauconseil, et de cette rue à
l’Hôtel-Dieu, en faisant presque le tour de l’église Notre-Dame.
C’est dans cette rue qu’était situé autrefois le cloître,
cet ensemble de maisons où logeaient les [p.
183] chanoines de la collégiale. Il n’y a pas vingt-cinq
ans, la première partie de cette rue jusqu’à la rue Mauconseil
s’appelait rue de la Châsse, sans doute à cause de la châsse
ou reliquaire des corps saints qui est dans l’église, le long d’un
mur qui la sépare de cette rue.
Pendant la Révolution, la rue de la Châsse
devint. rue de la Refonte, et le cloître Notre-Dame le passage Républicain.
Une maison dite de la Chantrerie, située dans le cloître et appartenant
au chapitre Notre-Dame, fut vendu comme bien national, le 25 juin 1792 à
l’Hôtel-Dieu, moyennant 2 650 fr. (1). Une autre maison, située
audit lieu, appelée la Maîtrise et appartenant au même,
fut vendue ledit jour à Claude-Simon Roussel pour 4 000 fr.
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(1) Archives départementales.
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Les chanoines avaient
établi, dès le XIIe siècle, une école où
un maître enseignait la grammaire et les arts libéraux; mais
ce ne fut qu’au temps du roi François Ier, dit le père des lettres,
qu’on a établi à Étampes, l’an 1564, une maison où
des chanoines instruisaient gratuitement la jeunesse. Telle est l’origine
du collège actuel d’Étampes (2).
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(2) Fleureau, p. 422.
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Rue Evezard. — Dans le prolongement
de la rue de la Tannerie. L’endroit où elle commence s’appelle les
Quatre-Coins; à son autre extrémité, limitée
par le Port, était autrefois la porte Évézard.
Rue très ancienne, car la grande route de Paris
y passait, et même la voie romaine. La rampe actuelle de la rue Saint-Jacques,
déjà très forte, et qui a été adoucie à
plusieurs reprises, suffirait à démontrer que presque tout
le roulage se faisait autrefois dans la rue Évézard. Ceci est
du reste une tradition du pays.
Autrefois rue du Sauvage, à cause d’une ancienne auberge à
l’enseigne du Sauvage qui était à gauche, vers le milieu de
cette rue. A droite, près des Quatre-Coins, on voyait, il y a peu d’années,
un ancien hôtel à l’enseigne de la Ville-de-Rouen. A côté
est la maison Delahaye-Gabaille, où l’on a établi en octobre
1880 un petit séminaire diocésain, dirigé par M. l’abbé
Desrues. [p. 184]
Avenue de Coquerive. — Va de la promenade
du Port au moulin des Fontaines. C’est une magnifique avenue de 350 mètres
de longueur en ligne droite. Jusqu’au commencement de l’année 1878,
elle était plantée d’une triple rangée de peupliers
de la plus belle venue. Ces arbres, qui avaient une trentaine d’années,
atteignaient presque tous leur maximum de grosseur; le conseil municipal a
décidé qu’ils seraient abattus.
Profitons de l’occasion pour nous unir à une
partie des commerçants demandant que des études soient faites
et soumises aux autorités compétentes, à l’effet de
faire passer par l’avenue de Coquerive la route nationale n°191, ce qui
la rectifierait sans trop de dépenses.
Le nom de cette avenue remonte loin, puisque, d’après
Fleureau, les Allemands, en 1652, «avaient leur infanterie du côté
des Prez, depuis les Portereaux jusques vers le coing de Cocquerive (1).»
Cette
avenue appartient à la ville depuis le commencement du siècle,
par suite d’un échange avec un riche habitant d’Étampes, nommé
May.
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(1)
Fleureau, p. 274.
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Rue du Perray. — Fait suite à la rue
de l’Île-Maubelle, et conserve son nom jusqu’à la Juine.
Rue très ancienne, menant au faubourg Saint-Pierre;
elle existait déjà au XVe siècle sous ce nom de Perray,
Petrosum, qui veut dire chaussée élevée de pierres. Elle
traverse la prairie en passant par les quatre bras du Juineteau, avant d’arriver
au pont sur la Juine, appelé anciennement le Pont-aux-Lièvres.
Au bout d’une allée à gauche de cette
rue, et sur le principal bras du Juineteau, est le moulin mixte du Perray
ou de Coquerive, datant de 1814.
Également à gauche, avant le moulin de
Coquerive, il y avait autrefois sur le Juineteau une autre usine qui a été
supprimée.
Dans cette rue il y a trois auberges: à droite,
au n° 6, celle portant pour enseigne à l’Étoile, autrefois
à l’Étoile-du-Point-du-Jour, auberge très-ancienne où
s’arrêtaient à la fin du dernier siècle [p. 185] les chevaux des convois militaires, ainsi
qu’il résulte d’un procès-verbal manuscrit du 16 brumaire an
IV , signé Levasseur, commissaire des guerres du district (1).
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(1) Manuscrits particuliers.
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C’est aussi à
cette auberge que logeait, en octobre 1870, le commandant de place prussien.
A gauche, au n° 19, est celle du Chariot-d’Or, avec
une enseigne représentant un chariot doré.
Au n° 71, est l’auberge du Sapeur-Pompier.
Au n° 30, depuis 1879, est une troisième
école des Frères des écoles chrétiennes.
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Plan du quartier Notre-Dame sous l’Ancien Régime (Léon
Marquis, 1881)
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