CORPUS HISTORIQUE ETAMPOIS
 
 Dom Basile Fleureau 
Du Monastere des Religieuses de la Congregation de Nôtre-Dame. 
Antiquitez d’Estampes II, 19
1668
 
Saint Pierre Fourier (1565-1640)
Manuscrit de Pierre Fourrier
Saint Pierre Fourier (1565-1640) et l’un de ses manuscrits
 
     Dans ce chapitre Dom Fleureau fait presque moins œuvre d’historien que de journaliste puisqu’au moment où il écrit, vers 1668, le couvent des Religieuse de Notre-Dame, dont la première pierre a été posée en 1665, est en cours de construction depuis trois ans sur le site de l’actuel Crédit Agricole.

     La saisie des textes anciens est une tâche fastidieuse et méritoire. Merci de ne pas décourager ceux qui s’y attellent en les pillant sans les citer.
     
Les Antiquitez de la Ville et du Duché d’Estampes
Paris, Coignard, 1683
Seconde partie, Chapitre XIX,
pp. 445-447.
Du Monastere des Religieuses de la Congregation de Nôtre-Dame.
 
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SECONDE PARTIE, CHAPITRE XVIII. 
Du Monastere des Religieuses de la Congregation de Nôtre-Dame.
 
LE Monastere des Religieuses de la Congregation de Nôtre-Dame est situé dans la méme Paroisse de saint Gilles proche de celuy des Cordeliers. Le Venerable Serviteur de Dieu, Pierre Fourrier, dit vulgairement le Curé de Mattincourt est l’Instituteur de cette nouvelle Congregation aussi-bien que le Reformateur des Chanoines reguliers de la Congregation de Nôtre Sauveur. Ce qu’il avoit veu dans son Cloître & dans sa Paroisse luy [p.446] avoit fait juger qu’il y a des corruptions innombrables dans monde & que Dieu y est griefvement offensé. Cette connoissance l’affligea extrémement, & sa charité luy fit souhaiter de toute l’étenduë de son ame d’arracher & de reformer autant qu’il pourroit ces desordres. Aprés avoir imploré les lumieres du saint Esprit pour connoître les moyens les plus propres & les plus assurez pour obtenir heureusement la fin qu’il s’étoit proposée, & aprés plusieurs serieuses considerations, il conclud qu’il n’y avoit point de meilleur expedient que de prendre la jeunesse dés la sortie du berceau pour l’instruire en la vertu, en même temps qu’elle s’avance en l’aage; afin que des enfans bien instruits succedant à de vieux pecheurs, le monde change de face en peu d’années.

     Pour en venir à bout il crût que le moyen le plus propre & le plus avantageux, étoit que des Religieux de fon Ordre prissent soin gratuitement, de l’éducation & de l’instruction des jeunes garçons, pour imprimer sur la tendresse de leurs cœurs l’amour de la vertu & l’horreur du vice: & d’établir en l’Eglise de Dieu une nouvelle religion de filles pour enseigner aussi gratuitement celles de leur sexe. Dans cette resolution, visitant un jour des filles devotes, qui demeuroient ensemble dans une maison, à Matincourt, il leur ouvrit insensiblement son cœur, & leur fit entendre que Dieu les avoir assemblées & choisies du reste du monde pour faire une seule chose. C’est (leur dit-il) que Dieu veut qu’en toutes vos actions & vos entreprises vous regardiez ce qui luy est le plus agreable, & l’ayant reconnu, vous quittiez toute autre chose pour faire celle-là, si vous voulez le faire.
Saint Pierre Fourier (1565-1640)
Saint Pierre Fourier (1565-1640)


       Il poursuivit son discours & découvrit à ces devotes filles l’excellence de l’Ordre qu’il meditoit d’établir par la noblesse de sa fin. Le nombre des filles qui s’étaient assemblées étant suffisant pour peupler un Monastere, sur les difficultez qui se trouverent d’en fonder à Matincourt, Madame Judith d’Aspremont, Dame aussi illustre en pieté qu’elle l’étoit pour la noblesse de sa naissance donna son logis de saint Mihiel tres riche & magnifique, & situé en l’un des plus beaux endroits de la ville, pour étre employé à ce premier établissement, qui fut fait avec la permission de Erric de Loraine Evêque de Verdun, & bien-tôt suivy d’un autre à Nancy, que Charles de Loraine Cardinal & Legat autorisa par ses Bulles. Ce dernier fut le premier où l’on établit la clôture, & où l’on fit les vœux solemnels & ensuite à saint Mihiel. De ces deux Monasteres ont pris leur origine ceux de ce nouvel Ordre que nous voyons [p.447] en plusieurs villes de France, en presque toutes les villes de Loraine, & dans quelques-unes des Païs-Bas.

     La renommée des grands fruits que ce nouvel Ordre apportoit dans les villes où il étoit érably, excita Octave de Bellegarde Archevêque de Sens d’heureuse memoire, d’en procurer l’établissement dans son Diocese. Il s’adressa au Venerable Instituteur qui accorda aux instantes prieres de ce Prelat, que des Religieuses de la maison de saint Mihiel allassent l’an 1629. faire un fondation en la ville de Provins: & d’autres au mois de Janvier 1630. en faire une en celle d’Estampes, lesquelles ont esté depuis suivies de deux autres fondations dans la ville de Nemours, & dans celle de Joigny. Ce zelé Prelat se rendit luy-même à Estampes, fit la benediction de la Chapelle, qui avoir esté preparée dans une maison qu’on avoir louée dans la grande ruë proche de l’Eglise de S. Basile. Depuis ces Religieuses ayant achepté des maisons au milieu de la ville, elles s’y retirerent l’an 1634. & l’an 1649. elles les quitterent pour aller au lieu où elles font presentement, où elles ont commencé à faire bâtir un tres-beau Monastere, dont la premiere pierre de l’Eglise a esté posée en grande ceremonie le jeudy septiéme jour de May, de l’an 1665. par Jean Chesnay Curé de saint Basile d’Estampes à qui Louis Henry de Gondrin Archevêque de Sens, en avoit donné le pouvoir: puis la Chapelle basse de cette Eglise ayant esté achevée la premiere, elle fut benîte avec les ceremonies accoutumées, en l’honneur de saint Joseph Epoux de la sainte Vierge, le jeudy vingt-troisiéme jour de Septembre, de l’année suivante par le même Jean Chesnay Curé de saint Basile & Doyen de la Chrétienté au détroit d’Estampes, suivant la commission qu’il en avoir receuë du même Archevêque.

Scène de la vie de saint Pierre Fourrier (Eglise d’Épinal © 1962 Pierre Estève & CMN)
Scène de la vie de saint Pierre Fourrier
(Eglise d’Épinal, © 1962 Pierre Estève & CMN)


 
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NOTES

     Le Venerable Serviteur de Dieu, Pierre Fourrier. Saint Pierre Fourier (ou Fourrier, on trouve les deux orthographes) n’a été béatifié qu’en 1730 et canonisé qu’en 1897.

     S
itué dans la méme Paroisse de saint Gilles proche de celuy des Cordeliers. Précisément au Carrefour dit depuis des Religieuses et sur l’actuel stade du Filoir. La révolution chasse les religieuses et on élève sur leur terrain un magasin de subsistance, aujourd’hui le Crédit Agricole. A leur retour elles s’installent sur le terrain de l’ancien couvent des Cordeliers qui en avaient été spoliés commme elles, où elles élèvent de nouveaux bâtiments, dont on les spolie à nouveau en 1901, en les chassant pour la deuxième fois d’Étampes, qui sera définitive. Voyez l’Annexe qui suit.

     Jeudy septiéme jour de May, de l’an 1665. Rappelons que Fleureau rédige son ouvrage en 1668.
B.G.
ANNEXE
Frédéric Gatineau: LA CONGRÉGATION
(Étampes en lieux et places, 2003, p. 40)

     La «Congrégation Notre-Dame» des chanoinesses régulières de Saint-Augustin a été fondée au 17e siècle par Saint Pierre-Fourrier. Une communauté s’établit à Étampes dès 1630. Après avoir occupé plusieurs maisons de la ville, la «Congrégation» s’installe en 1649 dans le quartier Saint-Gilles, sur le site du carrefour des Religieuses et de l’actuel stade du Filoir. A la Révolution, leurs biens sont vendus. Les locaux servent de prison durant la période révolutionnaire. Sur le terrain on crée le magasin de subsistance. En 1807, une communauté parvient à revenir à Étampes. Les sœurs rachètent alors l’ancien couvent des Cordeliers et réouvrent une école de filles. Les bâtiments sont reconstruits en 1844, la chapelle est rebâtie en 1864. En 1901, les religieuses sont à nouveau chassées. Leurs biens sont rachetés par la famille Bouilloux-Lafont qui lotira l’ensemble du terrain. Seuls subsistent quelques vestiges de cette «deuxième» Congrégation. Le grand bâtiment du 4 rue Bouilloux-Lafont était une partie du pensionnat bâti vers 1863. Les fenêtres sont décorées de petits frontons trilobés. La maison du 3 bis et la salle du 3 ter rue Léon-Grenier figurent sur le plan du Couvent avant la démolition. La chapelle occupait l’emplacement compris entre les n° 6 et n° 5 rue Léon-Grenier. Le grand bâtiment du cloître occupait à peu près l’emplacement de la rue Laurent-Chenu.

Source: Basile Fleureau, Les Antiquitez de la ville et du Duché d’Estampes, pp. 445-447. Saisie: Bernard Gineste, 2006.
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE

Éditions

 
     Édition princeps: Dom Basile FLEUREAU, «Du Monastere des Religieuses de la Congregation de Nôtre-Dame», in ID., Les Antiquitez de la ville, et du Duché d’Estampes avec lhistoire de labbaye de Morigny et plusieurs remarques considerables, qui regardent l’Histoire generale de France [in-4°], Paris, J.-B. Coignard, 1683 [Réédition en fac-similé: Marseille, Lafittes reprints, 1997], pp. 445-447.
 
     Réédition numérique: Bernard GINESTE [éd.], «Dom Fleureau: Du Monastere des Religieuses de la Congregation de Nôtre-Dame (1668)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-17-fleureau-c19.html, 2006.


Sur la Congrégation de Notre-Dame à Étampes

Saint Pierre Fourier (1565-1640)      
    
Léon GUIBOURGÉ«La Congrégation de Notre-Dame», in ID., Étampes, ville royale [in-16 (20 cm); 253 p.; armoiries de la ville en couleurs sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Étampes, chez l’auteur (imprimerie de la Semeuse), 1957 [Dont une réédition en fac-similé: Péronnas, Éditions de la Tour Gile, 1997], pp. 166-169. 
     Dont une réédition électronique en ligne:
Bernard GINESTE [éd.], «Léon Guibourgé: Les Cordeliers à Étampes (1957)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-20-guibourge1957etampes503congregationnotredame.html, 2004.

     Frédéric GATINEAU, «Congrégation (La)», in ID., Étampes en lieux et places. Toponymie de la ville et de la commune d’Étampes [29,5 cm sur 21; 150 p.; dictionnaire alphabétique de 2327 entrées; 252 photographies noir et blanc; 11 plans; couverture couleur; broché], Étampes, Association A travers champs, 2003, p. 40. [dont la saisie ci-dessus].

     Jacques GÉLIS, «Religieux et religieuses à Étampes aux XVIIe et XVIIIe siècles» (7 illustrations), in ID. [dir.], Église et Société dans le Pays d’Étampes, Étampes, Association Étampes-Histoire [«Les Cahiers d’Étampes-Histoire» 7], 2005 [ISSN 1291-7791; 10 € en 2005], pp. 4-24, spécialement pp. 11-15 & 21-24 [On notera seulement que la légende de l’illustration de la page 12 doit être rectifiée: il s’agit des locaux du XIXe siècle sur le site de l’ancien couvent des Cordeliers],

Saint Pierre Fourier (publications antérieures à l’ouvrage de Fleureau)

Scène de la vie de saint Pierre Fourrier (Eglise d’Épinal © 1962 Pierre Estève & CMN)      Pierre FOURIER, La Règle de saint Augustin, à l’usage des religieuses de son ordre, dittes de la congrégation de Nostre-Dame. Déclarations tirées des derniers règlements [in-12], Nancy, 1647.

      CONGRÉGATION DE NOTRE-DAME [éd.], Usages des religieuses de la congrégation de Notre-Dame servans d’éclaircissement à la constitution du R. P. Pierre Fourier,... leur instituteur, tirez de ses écrits, avec la règle de S. Augustin... [in-12; pièces liminaires; 300 p.], Chaalons, 1690.

     Pierre FOURIER, Les Vrayes constitutions des religieuses de la congrégation de Nostre Dame... par le T.R.P. Pierre Fourier,... [in-16; pagination multiple; planche; portrait], sans indication de lieu, sans indication d’éditeur, 1649.

     R.P. Jean BEDEL, La Vie du révérend Père Pierre Fourrier, composé par le R. Père Jean Bedel [in-12], Paris, Lambert, 1666.  Autres édition [in-8°], Toul, J. Laurent & J.-F. Laurent, 1674.

     P.-A. PERCHERON [éditeur posthume] & Pierre FOURIER [rédacteur], Exercices journaliers pour les principales actions de la journée, de la vie et de la mort religieuse à l’usage des religieuses de la congrégation de Nostre-Dame, revus, corrigés et augmentés par Pierre Fourrier de Mataincourt
, édité par l’abbé P.-A. Percheron [in-16; VII+300 p.], Paris, F. Muguet, 1675. Rééditions: Paris, A.-M. Lottin l’aîné, 1779; [in-16; IV+212 p.] Rheims, Brigot, sans date; [in-12; 208 p.], Rheims, Brigot, 1817; [in-18; 216 p.], Rheims, Delaunoy, 1820. 1821. 1825; [in-18; 242 p.], Rheims, Regnier, 1828; [in-32; 336 p.] Évreux, Imprimerie de l’Eure, 1902.

Correspondance de Saint Pierre Fourier
(où se trouvent des lettres adresées à la communauté étampoise)

Saint Pierre Fourier (1565-1640)      Hélène DERRÉAL (1903-1989) [éd.], Madeleine CORD’HOMME (1899-1986) [collaboratrice] & René TAVENEAUX (1911-2000) co-préfacier], Pierre Fourier. Sa correspondance: 1598-1640, recueillie, classée et annotée par Hélène Derréal, en collaboration avec Madeleine Cord’homme, et le concours de l’Association de recherches historiques Pierre-Fourier [29 cm; 5 volumes: t.1 (1986): CX+501 p. (28 novembre 1598 - 25 décembre 1624); t.2 (1987): 600 p. (début janvier 1625-6 mai 1628); t. 3 (1988): VI-653 p. (11 mai 1628-29 décembre 1633); t.4 (1989): 602 p. (3 janvier 1634-1er mars 1640); t.5 (1991): 197 p. (1er mars 1640-12 décembre 1642; tables et index, établis par Renée Gérardin, Marie-Hélène Français, Marie Herriau, etc.); illustrations; textes en français et en latin, les lettres en latin étant suivies d’une traduction en français; bibliographie: t.5, pp. 187-193], Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1986-1991.

Ouvrages récents

     René TAVENEAU (1911-2000) [éd.], Saint Pierre Fourrier. La pastorale, l’éducation, l’Europe chrétienne. Textes choisis et commentés par René Taveneaux [24 cm; 225 p.; textes extraits pour la plupart de la correspondance de saint Pierre Fourier; bibliographie pp. 23-24; index], Paris, Messene [«Religio memori»], 1995.

      Marie-Claire TIHON, Saint Pierre Fourier [19,5 cm sur 13,5; 304 p.; illustrations; préface de René Taveneaux], Paris, Cerf, 1997.

      Marie-Claire TIHON, Un maître en éducation, Saint Pierre Fourier [21 cm; V+338 p.; illustrations; bibliographie pp. 329-335], Paris, Éditions Dom Bosco [«Sciences de l’éducation»], 2002.

     CONGRÉGATION DE NOTRE-DAME, «Notre histoire» [5 pages web], in ID., Congrégation Notre-Dame. Chanoinesses de Saint Augustin [site officiel], congregation-notredame.cef.fr, en ligne en 2006.


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