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John L. Jambor, minéralogiste canadien, a découvert et identifié entre 1961 et 1966 plusieurs minéraux inconnus jusqu’alors parmi des échantillons collectés en 1924 à Madoc, en Ontario. Comme il a nommé l’une de ces nouvelles espèces guettardite, en l’honneur du célèbre minéralogiste étampois Jean-Étienne Guettard (1719-1791), nous lui avons demandé, et il a très aimablement accepté de nous raconter l’histoire de cette découverte. |
Découverte de la guettardite En 1961, alors que je procédais à la remise à jour du fichier de référence de la Commission Géologique pour les spectres corpusculaires des sulfosels, j’examinai le matériel qui avait été collecté presque quarante ans plus tôt lors de l’entreprise de cartographie de Wilson. Il devint vite évident qu’on était en présence d’un assemblage de minéraux unique en son genre, et une étude systématique en fut entreprise. Plusieurs week-ends, je fis le voyage de Madoc en voiture pour forcer la chance, ce qui n’était pas facile, parce que beaucoup de temps s’était écoulé et que la carte de Wilson n’était pas à une échelle très détaillée. Cependant le site originel fut redécouvert en 1963, et dans la suite la Commission Géologique y recueillit une grande quantité de marbre contenant des grains de sulfosel épars; ces échantillons constituaient un matériel très prisé que des collectionneurs accepteraient volontiers d’échanger contre des espèces minérales non encore représentées dans les collections de la Commission Géologique. Dans les descriptions qui furent publiées des minéraux de Madoc, plusieurs nouveaux noms de minéraux furent introduits. L’un de ces noms fut consacré au nom de la localité qui avait fait connaître l’espèce, à savoir la madocite. Un autre le fut à mon ancien professeur de minéralogie, R. M. Thompson. Mais comme le nom de thompsonite avait déjà été donné en bonne et due forme à un autre minéral, et comme l’une des caractéristique de ce minéral est d’être toujours maclé («twinned» en anglais, littéralement «jumelé» en français), le nom choisi fut twinnite. D’autant plus que Thompson signifie ‘fils de Thomas’, et que Thomas signifie en araméen ‘jumeau’ (twin). Dans mes jeunes années l’histoire de la géologie m’avait beaucoup intéressé et j’avais lu plusieurs livres sur le sujet. La série de Madoc fournissait l’occasion d’honorer quelques uns des pionniers de la science géologique, et c’est pourquoi furent choisis les noms de guettardite, de sorbyite, de launayite et de playfairite. La guettardite est très proche de la twinnite, et bien qu’une légère différence de composition ait été attribuée à ces deux minéraux lors de leur première description voici quarante ans, on considère aujourd’hui qu’elles ont la même composition, et qu’elles sont polymorphes. John L. Jambor
septembre 2003 (trad. B. Gineste, vérifiée et corrigée par un minéralogiste spécialiste des sulfosels) |
NOTES
[1] Le spectre corpusculaire d’une
molécule est l’analyse de sa composition par le moyen des rayons
X. [2] Jean-Étienne Guettard (1719-1791), botaniste, minéralogiste et géologue français né à Étampes (qui a aussi donné son nom au genre botanique guettarda et à un astéroïde). [3] John Playfair (1748-1819), mathématicien et géologue écossais, auteur de Illustrations of the Huttonian Theory of the Earth. [4] Henry Clifton Sorby (1826-1908) chimiste et géologue anglais, fondateur de la métallographie. [5] Louis de Launay (1860-1938), géologue français, spécialiste de l’origine des gisements métalliques. [6] Robert Mitchell Thompson (1918-1967), professeur de minéralogie à l’Université de Colombie Britannique, dont Jambor fut élève lors de ses années d’études [7] Allusion à l’Évangile selon Saint-Jean, XX, 24: l’un des douze apôtres de Jésus se dénommait Thomas, mais on l’appelait aussi Didymos. Or, comme toutes les Bibles annotées le précisent, tant Thomas en araméen (langue vulgaire de la Palestine à l’époque de Jésus-Christ) que Dydymos en grec (langue dans laquelle fut écrit le Nouveau Testament) signifient «jumeau». Preuve s’il en fallait que la culture religieuse n’est pas chose morte dans les milieux scientifiques anglo-saxons. (Bernard Gineste)
[8] Des espèces minérales sont
qualifiées de polymorphes lorsqu’elles ont la même
composition chimique, mais des structures cristallines différentes.
Ainsi la calcite et l’aragonite correspondent à deux formes cristallines
distinctes du carbonate de calcium CaCO3
(Remarque: lorsque le polymorphisme ne concerne que deux espèces,
on parle plus communément de dimorphes).(Un minéralogiste)
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Texte original
For several years in the 1920s, Geological Survey of Canada field parties under the supervision of M.E. Wilson mapped the area around Madoc, Ontario. Part of the effort was directed toward examination of the economic mineral deposits, especially those of fluorite. Field notes provided by Dr. Wilson revealed that on July 5, 1924, one of his assistants examined a cluster of small prospect pits in marble near Madoc. Impregnation of the marble by pyrite [FeS2], sphalerite [(Zn,Fe)S], and jamesonite [Pb4FeSb6S14] was noted, and about a kilogram of sample was collected. This material was brought to the Geological Survey in Ottawa, and although no detailed mineralogical examination was carried out, sufficient work was apparently done to indicate that the assemblage contained an unidentified sulfosalt mineral. In 1961, when in the process of updating the Geological Survey’s reference file of X-ray patterns for sulfosalts minerals, I examined the material that had been collected almost 40 years earlier during Wilson’s mapping project. It soon became evident that a unique mineral assemblage was present, and a systematic study was begun. On several weekends I drove to Madoc to search for the occurrence, which was not easily found because of the lapsed time and because Wilson’s map was not on a detailed scale. However, the original site was found in 1963, and subsequently the Geological Survey collected a large amount of marble containing grains of disseminated sulfosalts; the samples were considered to be valuable material that collectors would be willing to exchange for species that were not yet represented in the Survey’s mineral collection. In the published descriptions of the Madoc minerals, several new mineral names were introduced. One of the names was for the type locality (hence, madocite), and one was my former mineralogy professor, R.M. Thompson. The name thompsonite, however, was already in use for a mineral in good standing; consequently, because a characteristic feature of the mineral is that it is always twinned, the name chosen was twinnite. Thompson is ‘son of Thomas’, and Thomas in Aramaic is ‘a twin’. In my earlier years I was quite interested in the history of geology, and I had read several books on the subject. The Madoc suite presented an opportunity to recognize some of the historic contributors to the science of geology, and that is why the names guettardite, sorbyite, launayite, and playfairite were chosen. Guettardite is closely related to twinnite, and although slightly different compositions for the two minerals were given in the original descriptions 40 years ago, the two are now thought to have the same composition and are polymorphs. John L. Jambor
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© Mineralogic Record 1982
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Description sommaire
La guettardite est un sulfosel (anglais sulfosalt), dont
la formule chimique est Pb (Sb,As)2
S4, où Pb représente le plomb (38,60% de la masse
moléculaire), Sb l’antimoine (24,95%), As l’arsenic
(12,56%) et S le soufre (23,89%). Les cristaux de guettardite
peuvent contenir, en matière d’impuretés, du cuivre (Cu),
occasionnellement du fer (Fe). |
J. L. JAMBOR, «New lead sulfantimonides from Madoc, Ontario. 2 Mineral descriptions» [«Nouveaux sulfantimonides de Madoc en Ontario. Deux descriptions minéralogiques»], in The Canadian Mineralogist 9 (1967), pp. 191-213. ?, «?», in American Mineralogist 53 (1968), pp. 1425-?. G. BRACCI, D. DALENA, P. ORLANDI, G. DUCHI & G. VEZZALINI, «Guettardite from Tuscany, Italy: a second occurrence» [«Guettardite de Toscane (Italie): deuxième trouvaille»], in The Canadian Mineralogist 18 (1980), pp. 13-15. J. L. JAMBOR, J. H. G. LAFLAMME & D. A. WALKER, «A re-examination of the Madoc sulfosalts» [«Réexamen des sulfosels de Madoc»], in Mineralogic Record 13 (1982), pp. 93-100 [L’image que nous mettons en ligne provient de cette publication et nous a été aimablement communiquée par László Horváth par un courriel du vendredi 12 décembre 2003 15:33]. Robert GAIT, «Mineral Species from Canadian Type Localities, an Annotated List» [«Espèces minérales dont le type a été découvert dans des localités canadiennes. Une liste annotée»], The Canadian Mineralogist 21 (1983), pp. 145-157 [article dont se nourrit une page web anonyme, «Minerals First Discovered in Ontario (based upon Gait, 1983)», http://www.ontariominerals.com/type.mins.htm, en ligne en 2003]. Jeffrey de FOURESTIER, «The naming of mineral species approved by the Commission on new minerals names of the International Mineralogical Association. A brief history» [«Comment les dénomination d’espèces minérales sont acceptées par la Commission de l’Association Internationale de Minéralogie pour les noms de nouveaux minéraux. Bref historique»], in The Canadian Mineralogist 40 (2002), pp. 1721-1735 [dont une édition en ligne au format PDF, http://www.geo.vu.nl/users/ima-cnmmn/CNMMNhistory.pdf, en ligne en 2003], spécialement p. 1727: «1966: 66-012 = Mckinstryite, 66-015 = Madocite, 66-016 = Veenite, 66-017 = Twinnite, 66-018 = Guettardite, 66-019 = Playfairite, 66-020 = Sterryite, 66-021 = Launayite». Robert F. MARTIN [éd.], László HORVÁTH [auteur, minéralogiste amateur né en 1931], Minerals Species Discovered in Canada and Species Named after Canadians [382 p. (dont un cahier de 16 pages couleurs); 3 parties; 7 appendices; index; «Espèces minérales découvertes au Canada et espèces dénommées d’après des noms de Canadiens»], Ottawa, The Canadian Mineralogist [«Special Publication» 6], 2003 [ISBN 0-921294-40-9; $45]. Dont une recension en anglais par Igor V. PEKOV, du département de minéralogie de l’université Lomonosov de Moscou, in Mineralogical Almanac, http://webcenter.ru/~minbooks/reviews.html, en ligne en 2003, ci-dessous traduite en français:ANONYME, «Guettardite», in All Minerals of the World / Tous les minéraux de la terre, http://euromin.w3sites.net/mineraux/GUETTARDITE.html, en ligne en 2003. ANONYME, «Guettardite», http://www.sci.qut.edu.au/minerals/mineral%20general%20descriptions/G/guettarditepcd.htm, en ligne en 2003. David BARTHELMY, «Guettardite», in ID., Mineralogy Database, http://www.webmineral.com/data/Guettardite.shtml, en ligne en 2003. Jolyon RALPH, «Guettardite», in ID., MinDat.org, http://www.mindat.org/min-1768.html, en ligne en 2003. Bernard GINESTE [éd.], «John L. Jambor: La Guettardite (1966)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cse-guettardite.html, 2003. Toute critique ou contribution
seront les bienvenues. Any criticism or contribution welcome.
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