CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
 
Léon Guibourgé
La Paroisse Saint-Pierre d’Étampes
Étampes ville royale, chapitre IV.1
1957
 
Le Prieuré en 1903 (carte postale Berthaud frères n°41)
Le Prieuré en 1903 (carte postale Berthaud frères n°41)

ÉTAMPES, VILLE ROYALE
Étampes, chez l’auteur, 1957
chapitre IV.1, pp. 139-148.
La Paroisse Saint-Pierre, son étendue
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Léon Guibourgé      ORIGINE DU PRIEURÉ DE SAINT-PIERRE

     Dom Basile Fleureau, le vieil historien d’Etampes, nous dit dans son précieux ouvrage Les Antiquités d’Etampes que l’église Saint-Pierre est une des plus anciennes d’Etampes:

     «Au temps de Clovis II, deuxième fils de Dagobert Ier, vers 634, raconte-t-il, un saint homme nommé Léodeboldus, abbé de la célèbre abbaye de Saint-Aignan d’Orléans, de l’ordre de Saint-Benoît, ayant formé le dessein de bâtir un monastère à Fleury-sur-Loire, Sa Majesté lui en accorda la propriété et la seigneurie à condition que celui-ci lui céderait en échange et compensation sa ville et seigneurie d’Attigny; cette ville est située sur l’Aisne et proche de Soissons. Léodeboldus ayant accepté cette proposition, Fleury-sur-Loire devint, grâce à son admirable situation, la résidence favorite de quelques-uns de nos rois. Sitôt que ce saint homme eut pris possession de ce lieu qu’il désirait, il fit construire une église et un monastère où il assembla plusieurs religieux sous la conduite d’un grand serviteur de Dieu nommé Mammolus.
     «Dans le but de subvenir à leur entretien, il leur laissa de grands biens en divers lieux, entr’autres tout ce qu’il avait acquis à Etampes d’une nommée Albune, ses terres et prés en totalité... C’est ce qui donna dans la suite occasion aux religieux de ce nouveau monastère de venir à Etampes pour y fonder une église sous le vocable du Prince même des Apôtres et d’y bâtir un monastère où, depuis, ils envoyèrent douze religieux, sous la conduite et direction d’un
[p.140] prieur nommé Pierre d’Etampes, pour y établir la communauté qui a duré fort longtemps...»

     Voici donc les religieux bénédictins établis à Etampes. Ils construisent un monastère et une église sur les terres données par la dame Albune. Autour du monastère, qui prend le nom de prieuré, ayant à sa tête un prieur, des maisons se construisent, et le prieuré devient le centre d’une nouvelle paroisse: la paroisse Saint-Pierre.

     Dom Fleureau ajouta qu’il n’a pu découvrir la date précise de ces événements: «Il est néanmoins probable, dit-il, que l’église et le monastère furent bâtis vers la première race de nos rois et que le monastère fut détruit vers la fin de la deuxième, car s’il eût subsisté durant la troisième, on serait renseigné sur son histoire ultérieure, puisque nous connaissons celle de ses origines».

     Ainsi nous apprenons par Dom Fleureau que le monastère disparut vers la fin de la dynastie carolingienne. C’est l’époque des invasions normandes; Rollon lui-même, aux dires du chroniqueur Guillaume de Jumièges, entra dans Etampes en 911, détruisit la ville et emmena comme prisonniers un grand nombre de ses habitants. Mais les premiers rois capétiens devaient relever notre ville.

     Les moines, en effet, revinrent, reconstruisirent leur monastère et l’église, et nous voyons qu’en 938 le pape Léon VII, à la prière d’Odon, abbé de Fleury-sur-Loire, et de Hugues, duc des Francs, confirme l’inaliénabilité des biens de l’abbaye affectés à l’entretien des moines, à savoir, entr’autres, des terres d’Etampes. Et c’est l’abbé de Fleury qui a le droit de nomination à la cure. Le curé est alors, ou le prieur du monastère de Saint- Pierre, ou un prêtre séculier, c’est-à-dire un prêtre ordinairement de la ville d’Etampes, un chanoine ou un chapelain.

     Jusqu’au XVIe siècle, date à laquelle commencent les registres paroissiaux, nous ne savons rien de la vie paroissiale du quartier Saint-Pierre. Dom Fleureau lui-même, qui vivait au xvIIe siècle, prétend, comme nous l’avons rapporté, qu’il n’avait aucun renseignement. Mais à partir de cette époque, grâce aux registres paroissiaux, nous pouvons nous faire une idée de la vie paroissiale.

     D’abord, quelle était l’étendue de la paroisse qu’on appelait le bourg Saint-Pierre? Le bourg Saint-Pierre faisait suite à la rue du Perray, aujourd’hui rue de la République, et formait l’antique «Petrosum» séparé de l’agglomération principale d’Etampes par l’enceinte fortifiée qui s’ouvrait à son extrémité [p.141] par la porte Saint-Pierre, laquelle, malgré son nom, ne faisait pas partie du bourg. Ce dernier, cependant, était également fortifié, si l’on en juge par les anciens remparts, indiqués sur le plan cadastral, au-dessus de la ruelle Saint-Symphorien. La Juisne et les deux murailles allant des remparts à cette rivière, devaient fermer les deux autres côtés du faubourg, lequel avait deux portes fictives, celle de Pithiviers et celle de la Ferté-Alais. L’une de ces portes au moins n’existait plus à la fin du XVIIIe siècle. On lit, en effet, dans un avis de pavage des rues d’Etampes de 1783 ce qui suit: «Rue de Lalun, où passe actuellement la route de Fontainebleau par la Ferté-Alais, depuis le coin de M. Durnoutous, jusqu’au coin de l’Eglise Saint-Pierre, où était l’ancienne porte de la ville...»

     Entourée de remparts, la paroisse Saint-Pierre était assez restreinte comme étendue, mais le prieuré, qui était le siège d’une seigneurie, outre les fiefs de la Mairie et du Bourgneuf situés dans la paroisse, avait pour dépendances: Boisseaux, Saint-Benoît, Bellesauve et Dhuisson, hameaux assez éloignés du quartier Saint-Pierre.

     LE PRIEURÉ, SON CIMETIÈRE ET SON ÉGLISE.

     L’endroit appelé «le Prieuré» est sur l’emplacement de l’ancienne ferme du Prieuré Saint-Pierre, dans lequel il y eut jusqu’à vingt-quatre religieux. Le Prieuré appartenait encore en 1793, aux Chartreux d’Orléans, après avoir appartenu aux religieux de Fleury-sur-Loire.

     Le cimetière, comme d’habitude, entourait l’église. Une partie de ce cimetière s’appelait le Cimetière des Bretons. Il contenait un demi-quartier de vignes près de l’église et appartenait à la fabrique Saint-Pierre. Il fut vendu comme bien national, le 2 janvier 1792, à Jacques Thibault, chaufournier, pour 105 livres. Rappelons que l’on donnait au cimetière Saint- Pierre le nom de «Cimetière des Bretons» à cause des soldats de l’armée du duc de Bretagne, allié de Charles le Téméraire, contre le roi de France, soldats qui, malades ou blessés après la bataille de Monthléry furent recueillis à Etampes. La plupart moururent, et on les enterra à Saint-Pierre dans l’endroit qui prit le nom de «Cimetière des Bretons». On donne d’ailleurs encore le nom de «Bretagne» ou «Hameau de Bretagne» au groupe de maisons environnantes.

     Il y avait auprès du Prieuré un bâtiment de quatre perches [p.142] qui servait d’audience ou d’auditoire au bailli et appartenait à la Révolution à l’émigré Charles-Jean-Marie de Valori.

Le Prieuré en 1908 (carte poste de Théodule Garnon n°513)       Terminons par un mot sur l’église paroissiale. Elle était sur l’emplacement actuel du vieux cimetière Saint-Pierre. Le mur qui est au fond de ce cimetière formait un des côtés de l’église. On voit encore contre ce mur trois demi-colonnes qui devaient soutenir les arceaux de la voûte.

     A la suite de ce mur et en dehors du cimetière se trouve une porte en pierre assez bien conservée, dite «porte du Prieuré». Nous savons que les bâtiments du Prieuré et de l’église, à la suite des guerres, furent détruits et restaurés plusieurs fois. Les vestiges qui restent paraissent dater de l’époque de la Renaissance, c’est-à-dire à la fin du XVIe siècle. Toutefois, on a pu dans la restauration se servir d’anciennes pierres.

     L’église Saint-Pierre n’avait pas l’importance des autres églises d’Etampes. Elle était toutefois surmontée d’un beau clocher. «Une personne âgée, la veuve Chartier, rapporte M. Léon Marquis, nous a dit que son père avait été marguillier à cette église. Elle y a rendu le pain bénit dans son enfance. D’après elle, il y avait une belle flèche, deux rangs de piliers, une grande porte principale et une porte latérale donnant sur le cimetière. Le clocher contenait quatre grosses cloches et une petite, et dans l’église il y avait 49 bancs.»

     L’église fut démolie en 1804 au mépris, d’un mémoire imprimé en 1791, présenté à l’administration du district pour la conservation de cette église, par un grand nombre d’habitants de la paroisse et par l’abbé Perrier, curé, député à l’Assemblée Nationale.

     UN CURÉ DE SAINT-PIERRE AU XVIIe SIÈCLE: CLAUDE FONTAINE.

     Les premiers curés qui ont desservi le quartier Saint-Pierre ont été naturellement les moines bénédictins du prieuré qui avaient construit l’église Saint-Pierre. Dans la suite, les curés furent choisis parmi les prêtres de la ville, parmi les chapelains ou les chanoines. L’absence de registres jusqu’au XVIe siècle ne permet pas de donner des précisions à ce sujet. Mais à partir de cette époque, nous pourrions donner le nom de tous les curés. Contentons-nous d’en choisir un qui a été spécialement remarqué dans son ministère et de rapporter à cette occasion quelques faits intéressants trouvés dans la rédaction de ses actes paroissiaux. [p.143]

     Dans les registres, on remarque d’abord que la rédaction des actes a’est pas faite suivant un modèle réglementaire comme de nos jours, mais que la rédaction en est laissée à la fantaisie ou à l’inspiration du curé.

     En 1584, quand commencèrent les registres, on voit, comme curé de Saint-Pierre, Nicolas Charier, chanoine de l’église Sainte- Croix. En 1630, c’est un chapelain de Notre-Dame. Il s’appelle Cantien Chassecuiller et il note, dans un registre de 1642, que le mardi 25 mars «son très cher frère Robert Chassecuiller, prestre», est mort dans l’abbaye de Morigny dont il était un des religieux. Nous verrons qu’un de ses neveux deviendra vicaire puis curé de Saint-Pierre.

     En 1654, son successeur, appelé Fontaine, est celui qui nous intéresse le plus. Il est prodigue de réflexions dans la rédaction des actes de ses registres. Ainsi, il se lamente sur la mort de son archevêque. 11 faut savoir qu’à cette époque Etampes dépendait de l’archevêché de Sens. Il écrit: «Le mercredi des Quatre Temps de l’année 1671, Mgr notre archevêque, messire Louis Henri de Gondrin, est décédé en l’abbaye de Chaumes-en-Brie, et son corps a été transporté en son église métropolitaine de Sens où il a été inhumé. Depuis quelques années il estait de temps en temps tourmenté de dissentrie, mais sur la fin du mois d’aoust, il tomba dans une fièvre double tierce très violente qui, en 26 jours, nous l’a enlevé. O la grande perte, ô mon Dieu, d’avoir perdu un tel père et pasteur. O mon bon Jésus, regardez votre Eglise en pitié et donnez-nous un homme selon votre cœur.»

     Dans sa paroisse, le curé Fontaine est très zélé. Il ramène au bercail les brebis égarées: «Le 16 janvier 1686 s’est présenté en notre église Henri Voras, âgé de 26 ans, soldat de la Cie de M. Meunier, capitaine du régiment suisse en garnison à Etampes, lequel après avoir été suffisamment instruit s’est présenté en notre église pour faire abjuration de l’hérésie et profession de la foi de l’église catholique, apostolique et romaine, ce qu’il a fait entre mes mains par le ministère de Ernest Jodore, soldat de la même compagnie, qui en a fait la lecture en son nom, attendu que ledit Voras ne sait pas lire, et ensuite lui ay baillé l’absolution de l’excommunication, en vertu des pouvoirs à moi accordés par MM. les vicaires généraux de l’Archevêché, le siège vacant.»

     Notre bon curé, d’autre part, veille avec soin aux baptêmes, mariages et sépultures de ses paroissiens. Sa sollicitude va surtout aux membres de sa famille. Voici l’acte de décès de son frère «Cejourd’huy trentième et dernier de juin 1659, jour de la commémoration de saint Paul, à l’heure de midi, est trépassé [p.144] Nicolas Fontaine, mon unique frère, en ma maison presbytérale. Le jeune homme était chirurgien de profession, avait fait son apprentisage [sic], voyagé dans toute la France, Hollande, Zélande, Suède et Angleterre, voyages qui lui ont causé la mort, après une grosse maladie qu’il eust à Londres, estant étudiant et se disposant à l’examen de chirurgie pour se faire maistre en cette ville; une inflammation s’empara de lui quy le fist souffrir cinq mois entiers, depuis le 2 février jusqu’à ce dict jour auquel il a rendu l’âme à son Dieu, âgé de 23 ans, et a été enterré cejourd’huy 1er juillet par moi, en notre cimetière, dans la sépulture de nos ancêtres maternels, n’ayant demandé ny recherché aucune pompe, pour seulement qu’on priast Dieu pour luy à l’autel. Sa vie a été chrétienne, mais sa mort sainte. Il a expiré entre mes bras et ceux du R. Père Gamard, procureur de la Chartreuse d’Orléans. Il était fils de feu Denys Fontaine, archer de la maréchaussée, mon très honoré Père mort le 19 novembre 1651, et de feue Marguerite Boulemier, décédée en décembre 1648. Celle-ci avait pris naissance en cette paroisse et son père mon ayeul est enterré avec ses parens dans notre cimetière, avec lesquels repose le mien frère. Quant à mon père et ses père et mère, ils sont enterrés au cimetière Saint-Basile. Je les recommande tous aux prières des lecteurs.»

     En 1687, le curé Fontaine tombe malade. «Pendant ce temps, dit-il, trois enfants ont été inhumés en notre cimetière, moy fort malade, scavoir: une petite fille de Paris, en nourrice chez la veuve Baudry, un enfant à Claude Vénard, vigneron, et l’autre à Cantien Fayé.» Il doit résigner ses fonctions. L’année suivante, il meurt d’après l’acte suivant: «Le 29 mars 1688 a esté inhumé au cimetière de cette église vénérable et discrète personne, messire Claude Fontaine, prestre, cy-devant curé de cette paroisse, lequel après 34 ans de services qu’il a rendus dignement en cette paroisse, est décédé, après avoir reçu les sacrements, âgé de 59 ans.»

     UN VICAIRE DE SAINT-PIERRE AU XVIIe SIÈCLE: DAVID CHASSECUILLER.

     Autrefois, les curés de la paroisse Saint-Pierre d’Etampes avaient, pour les assister dans leur ministère, un ou plusieurs vicaires. Le curé Fontaine, dont nous avons précédemment parlé, eut, entre autres, comme vicaire David Chassecuiller, de l’année 1665 à 1669. [p.145]

     Ce David Chassecuiller était le neveu de Cantien Chassecuiller, le prédécesseur de M. Fontaine. Celui-ci faisait grand cas de son prédécesseur. Au moment de son installation, il écrivait de lui: «Messire Cantien Chassecuiller estant mort le 13 février 1654, je luy ai succédé immédiatement et ai pris possession du bénéfice le jour du vendredy saint de la même année. Le dict Chassecuiller avait été curé vingt-cinq années: homme d’honneur et de mérite, fort regretté de toute sa paroisse et de toute la ville. Il est enterré en l’église Sainte-Croix de cette ville, dont il avait été chantre depuis un an. Requiescat in pace.»

     Le neveu David Chassecuiller devait marcher sur les traces de son oncle en devenant comme lui curé de Saint-Pierre. Après avoir été quatre années vicaire à Saint-Pierre, il devint doyen du chapitre Sainte-Croix. Il fut ensuite désigné pour succéder à M. Fontaine, son ancien curé. A la fin du registre parroissial [sic] de l’année 1667, on peut lire: «Icy finissent les baptêmes faits par messire Claude Fontaine et son vicaire, du temps qu’il y a esté curé de Saint-Pierre, et le 29 décembre j’ai pris possession de la cure.» Signé: Chassecuiller.

     Devenu curé de Saint-Pierre à son tour, David Chassecuiller imita son ancien curé dans son zèle envers ses paroissiens, principalement envers les malheureux. C’est ainsi qu’il note ce décès:
     «Le 25 mai 1699 est mort un pauvre homme mendiant de cette paroisse, subitement, lequel avant de mourir a dit à quelques-uns de mes paroissiens qu’il avait fait ses Pâques et que les religieuses de l’Hôtel-Dieu n’avaient voulu le recevoir. Je lui ai trouvé dans sa poche un chapelet et un liard et dans son bissac trois morceaux de pain. Il était âgé de 71 à 72 ans et a dit avant de mourir qu’il était originaire d’Epernon au diocèse de Chartres.»

     Mais notre curé n’était pas disposé à accorder la sépulture chrétienne à ceux qui mouraient dans l’impénitence, comme le témoigne l’acte de sépulture suivant: «Le 16 août 1695 a été inhumé au cimetière un nomme Boudet, lequel a été tué par Louis Boudet son propre frère et n’a pas eu un seul moment, le coup fait, de produire un seul sentiment de chrétien, ni dire un seul Jésus, Maria. Il est mort comme il a vécu, ayant été quatre années sans faire ses Pâques, et si j’avais été sur le lieu, il n’aurait pas été inhumé au cimetière; pourtant, il l’a été sans cérémonie, ni son de cloche, ni luminaire.»

     Dans la circonstance, notre curé de Saint-Pierre était absent pour cause de maladie. Sa santé était fragile et il lui arrivait souvent de se faire remplacer. C’est ainsi qu’en 1695, il est [p.146] remplacé temporairement par M. Voizot, doyen de Sainte-Croix, et en 1700 par le Frère François Lescuyer, religieux cordelier d’Etampes.

     En 1705 il meurt. Et voici son acte de sépulture:
     «Le mardy 3 février, sur les 3 heures du soir, est décédé en sa maison presbytérale, Messire David Chassecuiller, prestre, curé de l’église paroissiale Saint-Pierre, âgé de 67 ans 6 mois; le corps duquel a été aujourd’hui 4 février enlevé de sa maison par nous Claude-Nicolas Voizot, doyen de l’église collégiale Sainte-Croix, et par nous conduit en ladite église paroissiale Saint-Pierre, où nous avons observé les cérémonies en tel cas requises et accoutumées, et ensuite lait transporter le corps dudit défunt pour être inhumé au cimetière des paroisses Notre-Dame et Saint-Basile, sépulture de ses père et mère auprès desquels il a demandé d’être enterré.»

     Son enterrement fut très simple. Il avait déclaré qu’il ne voulait pas être enterré dans l’église, l’église étant un lieu saint où doivent seulement reposer les saints et non les pécheurs comme lui. II avait en outre demandé que le luminaire et les autres frais d’inhumation fussent réduits au strict nécessaire.

     Sur une plaque de marbre provenant de l’église Sainte-Croix, conservée au Musée d’Etampes, on peut lire sa demande de quatre messes de fondation pour son oncle Cantien, pour son ancien curé Fontaine, pour lui-même et pour ses parents à célébrer dans l’église Sainte-Croix. II faut se rappeler que David Chasse- cuiller, tout en étant curé de Saint-Pierre, était resté chanoine du chapitre de la Collégiale Sainte-Croix d’Etampe.

     LE PRESBYTÈRE DE SAINT-PIERRE, L’ANCIEN ET LE NOUVEAU PRESBYTÈRE, LE DERNIER CURÉ.

     Longtemps, le presbytère de la paroisse Saint-Pierre fut situé rue de l’Alun. A la fin du XVIIIe siècle, il était en mauvais état. Au mois de septembre 1777, le curé du moment, Jean-Baptiste Barbier, adressa à la municipalité une requête afin de faire reconstruire le presbytère qui menaçait ruine. A cet effet, on convoqua les habitants du quartier à l’Hôtel de Ville. Parmi eux étaient présents: le chanoine François Grégis, délégué par le chapitre de Notre-Dame qui était propriétaire de la maison Jean-François Baron, aubergiste; Claude Béchu, meunier; Philippe Delisle, apothicaire. Ce dernier représenta que si les bâtiments étaient en péril, c’était la faute du curé qui avait [p.147] fait faire des fouilles pour avoir une cave. Un autre prétendit que leur mauvais état provenait de leur ancienneté.

     On ne se mit pas d’accord. L’affaire fut reprise le 16 août 1778. Le seigneur du Bourgneuf, M. de Valori, proposa un échange et offrit de faire construire un nouveau presbytère à ses dépens. La proposition fut acceptée.

     Pour faire l’échange proposé, M. de Valori dut d’abord acheter un terrain à Guillaume Renard, bourgeois d’Etampes, rue du Sablon, le 11 octobre 1778. Et c’est sur ce terrain que devait se construire le presbytère. Le contrat eut lieu le 6 août 1779.

     Ce contrat fut passé devant Marin Venard, notaire, garde-notes du roi, des ville, bailliage et duché d’Etampes.

     Il stipule que les curés et marguilliers de la paroisse Saint- Pierre, comparaissant par Jean-Baptiste Barbier, prêtre-curé Claude Béchu, marchand; Saunier, farinier; Jean-François Baron, aubergiste et laboureur; François Boucher, vigneron, et Claude Launay, aussi vigneron, tous marguilliers en charge:
     Cèdent à Charles-Jean-Marie, marquis de Valori, seigneur du Bourgneuf, haut-justicier et censier du prieuré Saint-Pierre d’Etampes, capitaine commandant au régiment royal Lorraine- Cavalerie, demeurant ordinairement en son château du Bourgneuf, étant alors à la suite dudit régiment, représenté par Etienne Chaillou de Lésy, avocat au Parlement, demeurant à Paris.
     Savoir: une maison sise au faubourg Saint-Pierre d’Etampes, ouvrant sur la rue de l’Alun, servant de presbytère, avec cour et jardin d’une contenance de 10 perches...
     De son côté, ledit marquis de Valori cède 3 quartiers de terre en ouche ou jardin, clos de murs en partie, sis au même faubourg Saint-Pierre, rue du Sablon, et appelé l’Ouche aux Bas-Ronds...
     De plus, il se charge de faire construire incessamment, à ses frais, sur lesdits 3 quartiers de jardin, une maison convenable et commode pour loger le curé de Saint-Pierre et ses successeurs.

     M. de Valori tint sa promesse. Il fit, en effet, construire le presbytère vers la fin de l’année 1779. Trois ans après, en 1782, le nouveau presbytère avait déjà besoin de réparations. On y dépensa 2.000 livres qui furent recouvrées par une imposition sur tous les propriétaires de biens fonds de la paroisse. Mais, quelques années après, en 1789, c’est la Révolution. Le marquis de Valori, croit prudent, en 1791, de s’exiler. Ses biens sont déclarés nationaux et vendus en 1792. Le presbytère est vendu en dernier lieu, le 6 brumaire an V.

     Que devenait le curé de Saint-Pierre pendant cette époque [p.148] troublée? Il s’appelait Charles-César Périer. Il était né à Etampes en 1748. Il appartenait à une famille notable de la ville, On le nomma curé de Saint-Pierre en 1782. Au moment de la Révolution, en 1789, il fut élu pour représenter le clergé du baillage d’Etampes aux Etats Généraux de Paris.

Le Prieuré en 1903 (carte postale Berthaud frères n°41)      Mais bientôt, parce que prêtre, il fut arrêté comme suspect au moment de la Terreur et conduit à la maison des Récollets, à Versailles. Il n’en sortit que le 9 frimaire an III, par décision du Comité de Sûreté générale, prise sous la recommandation du citoyen Defranc, représentant du peuple, et sur les attestations de civisme et les certificats délivrés par les autorités de la ville d’Etampes.

     Aussitôt, il revint dans sa ville natale et se présenta, le 14 du même mois de frimaire, soit le 1er décembre 1794, devant l’assemblée municipale pour lui remettre copie de l’acte qui lui rendait la liberté et obtenir la levée des scellés apposés chez lui. Il mourut à Etampes, le 5 avril 1797. En tout cas, il ne mourut pas dans le presbytère. Celui-ci avait été vendu comme bien national, le 27 octobre 1796, au citoyen François Le Roux, demeurant à Paris, pour la somme de 5.400 francs.

     On dit que pendant la Révolution, le presbytère servit de lieu de réunion aux francs-maçons, il est probable que le sceau de la loge de l’Amitié, qui est au musée d’Etampes, vient de cet endroit. [p.149]
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BIBLIOGRAPHIE

Éditions

Léon Guibourgé      Brochure préalable: Léon GUIBOURGÉ [chanoine, ancien archiprêtre d’Étampes, officier d’Académie, membre de la Commission des arts et antiquités de Seine-et-Oise, vice-président de la Société artistique et archéologique de Corbeil, d’Étampes et du Hurepoix], Étampes, la favorite des rois [in-16; 64 p.; figures; plan et couverture en couleur; avant-propos de Barthélémy Durand, maire; dessin de couverture de Philippe Lejeune], Étampes, Éditions d’art Rameau, 1954.

    
Édition princeps: Léon GUIBOURGÉ, Étampes, ville royale [in-16 (20 cm); 253 p.; armoiries de la ville en couleurs sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Étampes, chez l’auteur (imprimerie de la Semeuse), 1957.

    
Réédition en fac-similé: Léon GUIBOURGÉ, Étampes, ville royale [réédition en fac-similé: 22 cm; 253 p.; broché; armoiries de la ville sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Péronnas, Éditions de la Tour Gile, 1997 [ISBN 2-87802-317-X].

    
Édition électronique: Bernard GINESTE [éd.], «Léon Guibourgé: Étampes ville royale (1957)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-guibourge1957etampesvilleroyale.html (33 pages web) 2004.

     Ce chapitre: Bernard GINESTE [éd.], «Léon Guibourgé: La Paroisse Saint-Pierre dÉtampes (1957)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-guibourge1957etampes401saintpierreparoisse.html, 2004.


Toute critique ou contribution seront les bienvenues. Any criticism or contribution welcome.
Source: Léon Guibourgé, Étampes, ville royale, 1957, pp. 139-148. Saisie: Bernard Gineste, octobre 2004.
    
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