CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
 
Léon Guibourgé
L’Hôtel de Diane de Poitiers
Étampes ville royale, chapitre III.6
1957
 
L'Hôtel de Diane de Poitiers en 1903 (carte postale Berthaud frères n°38)  
L'Hôtel Diane de Poitiers en 1903 (carte postale Berthaud frères n°38)

     On notera que plus personne ne croit plus aujourd’hui que l’Hôtel dit de Diane de Poitiers ait jamais appartenu à cette duchesse d’Étampes. C’est pure légende.
B.G.   
    
ÉTAMPES, VILLE ROYALE
Étampes, chez l’auteur, 1957
chapitre III.6, pp. 103-105.
L’Hôtel de Diane de Poitiers
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Léon Guibourgé      DIANE DE POITIERS, DUCHESSE D’ÉTAMPES: «SI BELLE QUE JE NE SACHE CŒUR DE ROCHER QUI NE S’EN FUT ÉMU».

     Après avoir visité la maison d’Anne de Pisseleu, première duchesse d’Etampes, non loin de là allons voir la maison de Diane de Poitiers, seconde duchesse. Il nous suffit de remonter la rue Sainte-Croix. Elle est à la hauteur de l’église Saint-Basile.

     C’est une belle construction de style Renaissance, dont la décoration serait due en partie au célèbre sculpteur, Jean Goujon. En quelle année a-t-elle été édifiée? Dans la cour intérieure, une fenêtre porte la date de 1554. Or nous savons que Diane de Poitiers fut duchesse d’Etampes en 1553. Ces deux dates coïncident bien.

Porte dans la cour de l'Hôtel d'Anne de Pisseleu (carte postale Paul Allorge n°52)      Examinons d’abord la façade. Cette façade harmonieuse et imposante, présente dans son milieu, une grande porte cintrée avec fronton triangulaire supporté par deux piliers aux chapiteaux corinthiens. De chaque côté, s’ouvrent de belles fenêtres ornées de fines sculptures, surtout celles du premier étage qui sont surmontées alternativement d’un fronton circulaire et d’un fronton triangulaire. Au-dessus, à la hauteur du toit, deux lucarnes avec ouvertures cintrées. De ci, de là, sous le porche en particulier, on voit les armoiries de Henri II et de Diane, avec les lettres H et D. entrelacées.

     A l’intérieur, il y a une petite cour dont le bâtiment de droite est intéressant. On y remarque une porte encadrée de colonnes corinthiennes cannelées, et surmontée d’un bas-relief représentant la descente de l’Esprit-Saint sur les Apôtres. Cette [p.104] porte devait être l’entrée d’un oratoire. Au-dessus, on aperçoit deux lucarnes formées de guirlandes de fruits avec au centre une tête d’animal et comme supportées par deux amours tenant des écussons et encadrés de deux sphinx.

     Actuellement cette belle demeure appartient à la Caisse d’Epargne d’Etampes, qui y a installé ses bureaux. Diane de Poitiers ne vint pas souvent l’habiter. Elle était trop préoccupée d’accompagner le roi qui avait ses châteaux sur les bords de la Loire.

     Diane, née en 1499, était fille de Jean de Poitiers, comte de Saint-Vallier, d’une illustre famille du Dauphiné. Parée de bien des charmes, elle devint fille d’honneur auprès de la reine Claude, fille de Louis XII, et à 15 ans, elle épouse Jean de Brézé, comte d’Anet et sénéchal de Normandie. Elle eut l’occasion de plaire à François Ier le jour où elle demanda la grâce de son père, condamné à mort pour avoir favorisé la fuite du connétable de Bourbon. Le roi lui accorda la grâce du coupable. A cette époque, le roi était sous les charmes d’Anne de Pisseleu.

     En 1537, Diane était devenue veuve. Elle jeta alors son dévolu sur le dauphin, le futur Henri II. Celui-ci se laissa faire. Elle avait 37 ans, et lui 19 ans, déjà marié à Catherine de Médicis.

     François Ier mort, Henri II mit Diane en avant. Il la créa duchesse d’Etampes à la place d’Anne de Pisseleu. On peut dire que Diane eut une grande influence sur l’esprit du roi. Elle l’entraîna dans une vie de luxe et de plaisirs. Cependant elle ne voulait pas se montrer trop efféminée, et manifestait des goûts sportifs. On rapporte que réveillée habituellement tous les jours à 6 heures, elle montait à cheval, faisait ainsi une ou deux lieues et rentrait ensuite dans ses appartements où elle lisait jusqu’à midi. Certains historiens sont allés jusqu’à relever les plus petits détails sur sa manière de vivre. Ils ont remarqué que même en hiver elle se lavait toujours le visage avec de l’eau de pluie et que dans sa toilette elle ne faisait jamais usage de parfums, et cependant ils ajoutent que Diane ne fut jamais malade et qu’elle conserva jusqu’à la fin l’éclat et la fraîcheur de la jeunesse. «Elle était si belle, dit le chroniqueur Brantôme, que je ne sache cœur de rocher qui ne s’en fut ému».

     Durant les douze années du règne de Henri II Diane vécut donc en souveraine, accompagnant presque toujours le roi dans ses déplacements ou dans ses diverses résidences. Au milieu des honneurs, elle conservait un caractère de fierté qui lui était comme naturel et qui lui valut sans doute la haine de nombreux ennemis. La reine Catherine de Médicis était irritée contre celle [p.105] qui lui avait enlevé le cœur de son époux et elle saisissait toutes les occasions de l’humilier, mais Diane par son habileté, déjouait toutes ses attaques.

     Mais tous ces avantages de la duchesse devaient disparaître bientôt par la mort subite du roi. Celui-ci, en effet, fut blessé à mort dans un tournoi en 1559 par un coup de lance de Montgommery. Il respirait encore quand la foule des courtisans s’écarta d’elle avec mépris. La reine Catherine de Médicis lui fit intimer l’ordre de rendre les joyaux de la couronne et de se retirer dans un de ses châteaux. «Le roi est-il mort, demanda fièrement Diane au messager de la reine ? — Non madame, répondit-il, mais il ne passera pas la journée. — Que mes ennemis sachent du reste, ajouta Diane, que quand ce prince ne sera plus, je ne les crains point. D’ailleurs, si j’ai le malheur de lui survivre longtemps, mon cœur sera trop occupé de la douleur de sa perte pour que je puisse être sensible aux chagrins qu’on voudra me donner.»

     Dès que le roi eut expiré, Diane fut chassée de la cour, et elle se retira dans son château d’Anet. Elle y vécut tranquille, résignée, mais toujours aussi fière dans sa mauvaise fortune qu’elle l’avait été au milieu des honneurs.

     Diane mourut au château d’Anet en 1569 dans sa 67e année. [p.106]

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BIBLIOGRAPHIE

Éditions

Léon Guibourgé      Brochure préalable: Léon GUIBOURGÉ [chanoine, ancien archiprêtre d’Étampes, officier d’Académie, membre de la Commission des arts et antiquités de Seine-et-Oise, vice-président de la Société artistique et archéologique de Corbeil, d’Étampes et du Hurepoix], Étampes, la favorite des rois [in-16; 64 p.; figures; plan et couverture en couleur; avant-propos de Barthélémy Durand, maire; dessin de couverture de Philippe Lejeune], Étampes, Éditions d’art Rameau, 1954.

     Édition princeps: Léon GUIBOURGÉ, Étampes, ville royale [in-16 (20 cm); 253 p.; armoiries de la ville en couleurs sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Étampes, chez l’auteur (imprimerie de la Semeuse), 1957.

     Réédition en fac-similé: Léon GUIBOURGÉ, Étampes, ville royale [réédition en fac-similé: 22 cm; 253 p.; broché; armoiries de la ville sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Péronnas, Éditions de la Tour Gile, 1997 [ISBN 2-87802-317-X].

     Édition électronique: Bernard GINESTE [éd.], «Léon Guibourgé: Étampes ville royale (1957)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-guibourge1957etampesvilleroyale.html (33 pages web) 2004.

     Bernard GINESTE [éd.], «Léon Guibourgé: L'Hôtel de Diane de Poitiers (1957)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-guibourge1957etampes306hoteldianedepoitiers.html, 2004.

Sur la Maison de Diane de Poitiers

     Bernard GINESTE [éd.], «Henri Stein: Jean Goujon et la Maison de Diane de Poitiers à Étampes (1890)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-19-stein1889goujon.html, 2006.

     Monique CHATENET, «L’Hôtel dit de Diane de Poitiers, 4 rue Saint-Croix», in Julia FRITSCH & Dominique HERVIER [dir.], Étampes, un canton entre Beauce et Hurepoix [316 p.; 10 contributeurs, 942 notes; 340 documents photographiques, la plupart en couleur; avec un résumé, with a summary, pp. 297-304], Paris, Éditions du Patrimoine, 1999, pp. 148-152 (& notes 460-475, pp. 283-284).


Toute critique ou contribution seront les bienvenues. Any criticism or contribution welcome.
Source: Léon Guibourgé, Étampes, ville royale, 1957, pp. 103-105. Saisie: Bernard Gineste, octobre 2004.
    
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