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Texte établi, traduit
et illustré par Bernard Gineste |
Le jeudi 20 février 1237, la paroisse de Notre-Dame d’Étampes
est divisée en deux par décision de l’archevêque de
Sens Gautier Cornu. A cette occasion nous entrevoyons le paysage urbain
d’Étampes au début du XIIIe siècle. Cette charte avait
déjà été éditée en 1683 par
Dom Basile, mais avec quelques erreurs, dont l’une surtout empêchait
de bien comprendre cette division. On notera aussi un point qui n’a pas
été remarqué jusqu’à ce jour: c’est que la ville
ne paraît fortifiée, à la date de notre charte, que par
des fossés. B.G.,
14 décembre 2008 (1ère édition)
Saisir des textes anciens est une tâche fastidieuse et il ne faut pas décourager ceux qui s’y attellent en les pillant sans les citer. |
INTRODUCTION La redécouverte par Frédéric Gatineau du Cartulaire de Notre-Dame d’Étampes, recueil de la fin du XVe siècle qui s’était égaré depuis un siècle dans les méandres des archives départementales de Versailles puis de Chamarande, a déjà permis de reconstituer un texte extrêmement important pour l’histoire d’Étampes, celui de la charte d’Henri Ier en 1046. Voici maintenant un autre texte important pour la reconstitution du paysage urbain étampois deux siècles plus tard. Dom Basile Fleureau, père de l’histoire étampoise, comme dans le cas précédent, en avait déjà donné une édition, moins fautive d’ailleurs que celle de la charte de 1046; cependant l’examen du texte du cartulaire nous permet d’améliorer sensiblement celui de Fleureau, en corrigeant surtout une erreur de lecture qui empêchait jusqu’à présent de comprendre pleinement la manière dont avaient été divisées les deux paroisses, et le paysage urbain sous-jacent. Sous la direction de Clément Wingler a été publié en 2008 un livret d’exposition relatif à l’église et à la paroisse de Saint-Basile d’Étampes, intitulé Saint-Basile, pages de chronique. C’est à ce jour le seul ouvrage entièrement à cette paroisse de la ville, qui fut pourtant la plus riche et la plus dynamique pendant plusieurs siècles. J’ai donné à cette occasion (p.4) une première traduction du texte de cette charte qui reposait sur le texte latin de Fleureau, corrigé seulement de ses fautes les plus évidentes. Elle est désormais périmée et avantageusement remplacée par celle que je donne ici, sur la base d’un texte latin désormais entièrement corrigé. De plus, la datation que j’avais alors adoptée est fausse (1227), comme l’a montré un examen plus attentif du texte de la date, qu’il s’impose aussi de corriger (en 1237). On donne ici la traduction du texte latin édité enfin pour la première fois de manière critique. B.G., 17 décembre 2008
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NOTES
Axes définis par la charte de Gautier Cornu
comme relevant désormais de la paroisse Notre-Dame.
(0) Remarques sur le texte de Fleureau. Son texte ne présente aucune caractéristique qui permette de supposer qu’il a disposé d’une autre source que notre cartulaire, et il semble bien en effet que ce soit sa source, en raison notamment de la mauvaise lecture qu’il a fait des mots rua vineis, en lesquel il a cru reconnaître le mot bizarrement anachronique, à tous points de vue, de Manuel: cette lecture s’explique notamment par l’abréviation utilisée par notre copiste pour l’élément final -is, abréviation qui ressemble à un L cursif, et que Fleureau n’a pas reconnue non plus à la fin du mot Februaris, qu’il a transformée (et normalisée) en -io. Eu conclusion, l’édition de Fleureau ne présente aucun intérêt pour l’établissement du texte lui-même. (1) Sur Gautier Cornu, archevêque de Sens de 1222 à 1241, voyez notre Annexe 1. Il faut noter de plus que le Cartulaire de Notre-Dame d’Étampes conserve cinq chartes de cet archevêque, ou le citant, toutes chartes que nous rééditerons ultérieurement. La première est de mars 1210, alors qu’il n’est que chanoine de Notre-Dame de Paris, sur un accord entre les chapitres de Notre-Dame et Sainte-Croix (n°XIII, pp. 7-8). La deuxième est d’avril 1225 et concerne l’achat de la dîme de Tignonville par les chanoines (n°CVI, pp. 128-129). La troisième est de 1228 et concerne un arbitrage entre l’archidiacre d’Étampes et les chanoines de Notre-Dame (n°XLVI, pp. 29-31) avec un vidimus du 14 novembre 1346 d’un original de 1228 concernant la même affaire (n°XLVII, pp. 31-32) La quatrième revient en janvier 1230 sur la dîme de Tignonville (n°CV, pp. 127-128). La cinquième est de février 1237: c’est notre présente division des deux paroisses (n°XXI, p. 12, renvoyant sans la renouveler à l’édition fautive de Fleureau, Antiquitez, p. 404). (2) Pierre, archidiacre d’Étampes, est par ailleurs cité par trois chartes du Cartulaire de Notre-Dame d’Étampes à l’occasion d’un conflit qu’il eut avec les chanoines de Notre-Dame en 1228-1229 (n°XLVI, pp. 29-31; n°XLVII, pp. 31-32; n°XLVIII, pp. 32-34). (3) Guillaume, chantre de Notre-Dame d’Étampes. Il y a bien de la probabilité, écrit Fleureau (Antiquitez, p. 351), que le premier Chantre qui a eu l’honneur d’être le Chef de l’Eglise & du Chapitre de Nôtre-Dame, après que nos Roys se sont reservez [sic] la dignité d’Abbé, ç’a esté un nommé Guillaume, dont il est parlé dans l’accord fait, l’an 1210, entre les Chapitre de Nôtre-Dame, & de sainte-Croix (éd. Alliot, n°XIII & n°XIV, pp. 7-8, mars 1210): dans le titre de la division des Paroisses de Nôtre-Dame et de saint Basile de l’an 1226. (éd. Alliot, n°XXI, p. 12, 1226, qui renvoie à l’édition de Fleureau, Antiquitez, p. 404) & dans l’accord fait entre le Chapitre de son Eglise et l’Archidiacre d’Estampes en l’Eglise de Sens de l’an 1229 (éd. Alliot, n°XLVI, pp. 29-31, 1228 et n°XLVIII, pp. 32-34, vidimus du 12 juin 1280 d’un original de 1229). Je n’ay rien vû qui puisse justifier si ce Guillaume, Chantre, est le même que Guillaume le Bel, qui est aussi qualifié dans un titre de l’an 1232. concernant le lieu de Chandoux (éd. Alliot, n°XCV, pp. 118-119, janvier 1233). L’Obituaire de cette Eglise marque le decez de Guillaume le Bel, Chantre, au vingt-deuxiéme jour d’Avril, sans dire l’année. Il y faut ajouter une charte de juillet 1226 qui a échappé à l’attention de Fleureau (éd. Alliot, n°LXXXIII, pp. 97-98). (4) Guillaume curé (capicerius) de Notre-Dame. Le texte porte littéralement chevecier (capicerius). C’est à ma connaissance le plus ancien curé connu de Notre-Dame. (5) Maître Guillaume, prêtre de Saint-Basile d’Étampes. On notera que ce personnage, inconnu par ailleurs, n’a pas d’autre titre, au moment de la séparation des paroisses, que celui de prêtre. C’est dès lors le premier curé de Saint-Basile en titre. (6) Sur notre ordre (de mandato nostro). Il est assez apparent que les intérêts des nouveaux paroissiens et ceux de l’archevêque, dont l’autorité s’est progressivement restaurée à partir du XIe siècle dans tout le diocèse, se sont rencontrés pour progressivement réduire l’autorité et la puissance d’un chapitre originellement fondé vers l’an mil, au bénéfice de ses cadets, par une noblesse locale qui tenait le pays en coupe réglée. (7) Ainsi que nous avons constaté qu’il était porté dans leur charte (sicut in eorum litteris patentibus contineri perpeximus). Ce texte a été légèrement altéré par Fleureau (sicut in eorum patentibus litteris perspeximus), qui n’a pas su déchiffrer semble-t-il le mot contineri. (8) Depuis le moulin de la Rue aux Vignes (a molendino de rua vineis). Fleureau a commis ici une faute de lecture très dommageable pour ceux qui n’ont jusqu’ici que son texte à leur disposition. Il a lu: a molendino de Manuel. Sa faute s’explique très bien à partir du texte de notre cartulaire. Il a pris d’une part, les lettres ru- (qui se touchent l’une l’autre) pour un m- initial. D’autre part il n’a pas reconnu l’abréviation finale du -is, qu’il a prise pour un L cursif (ce qui est totalement étranger à l’usage de notre copiste: voyez la finale du mot Darnatal ci-contre à droite). Enfin il a lu les lettres intermédiaires, -uine-, de façon erronée, -nue-, sans prendre garde que le mot avait un jambage en trop pour autoriser cette lecture. L’abréviation du -is final que Fleureau n’a pas reconnue est assez rare, mais elle apparaît bien dans le même acte pour le mot februaris (ci-contre à gauche), que Fleureau n’a pas reconnue non plus, et qu’il aurait de toute façon il est vrai corrigée, car cette terminaison obscurément abrégée est qui plus est grammaticalement fautive. Elle apparaît aussi au moins dans le titre de la première copie de la charte de 1046 pour le mot servientis (ci-contre à droite). Elle m’avait d’ailleurs donné beaucoup de fil à retordre et je ne l’avais comprise qu’après quelques jours de réflexion, car elle n’est pas fréquente dans notre cartulaire. Le tour latin de rua vineis calque évidemment, en mauvais latin, l’ancien français de la rue aux Vignes. Ce toponyme a survécu de nos jours sous la forme modernisée de rue de la Vigne. On verra plus loin que la rue au Comte (qui a survécu telle quelle jusqu’à aujourd’hui) est rendue dans un meilleur latin par vicus comitis. On constate souvent dans le latin des XIe et XIIe siècles des flottement entre vicus et rua pour rendre l’ancien français rue, qui n’a pas alors clairement le sens moderne de voie de communication intra-urbaine. En 1046 déjà les chanoines de Notre-Dame faisaient état d’une vigne qu’ils possédaient sous les remparts de la ville. Le moulin en question est donc très évidemment celui qui s’est appelé ultérieurement le moulin Sablon. Il faisait déjà la frontière entre les paroisses de Notre-Dame et de Saint-Martin. Quand la paroisse Saint-Gilles sera détachée de la paroisse Saint-Martin (à une date qu’on ne connaît pas encore), il marquera jusqu’en 1905 la limite de ces trois paroisses: Notre-Dame, Saint-Basile et Saint-Gilles. (9) Jusqu’aux Moulins Neufs (usque ad molendinos novos). Il s’agit peut-être d’après le contexte du moulin appelé plus souvent de Darnatal, à une époque où on l’aurait doté, au moins pour un temps, de deux roues. La même situation s’est apparemment reproduit au moins au début du XIXe siècle. Selon Frédéric Gatineau (Étampes en lieux et places, 2003, p. 46) , on trouve sur ce site, en 1838, deux moulins, le moulin inférieur et le moulin supérieur (AD91 7S 26). Mais il peut s’agir aussi des moulins, plus loin, de l’Île-Maubelle et du Port, les chanoines de Notre-Dame se réservant toute la rivière, y compris les moulins, et les meuniers. (10) Le Perray (Petrosum). Le Peray, fondu en 1935 dans la nouvelle Rue de la République, est la partie de cette voie qui va du pont sur la rivière d’Étampes jusqu’au pont sur la Juine, limite des paroisse Notre-Dame et Saint-Pierre. (11) La porte Évezard (porta Evrardi). Ont aussi porté ce nom, de part et d’autre de cette porte, hors de la ville, le faubourg Évezard, et, en ville, la rue qui s’appelle encore Évezard, qui va jusqu’au Quatre-Coins, après laquelle elle est continuée par la rue de la Tannerie. A mon sens, ce nom vient d’Évrard III du Puiset, qui était possessionné dans le secteur à la fin du XIe siècle, au moins à Morigny, comme nous le savons avec certitude, puisque Philippe Ier lui a racheté vers 1096 le site du couvent de Morigny. La porte d’Évrard était donc sans doute celle qui conduisait au fief de ce seigneur alors très puissant, spécialement pendant l’éclipse de l’autorité royale qui caractérisa la fin du règne de Philippe Ier. (12) La maison de Robert des Prés (domus Roberti de Pratis). On rencontre ultérieurement à Étampes plusieurs personnages portant ce patronyme, mais à une date trop éloignée pour pouvoir envisager sérieusement une même lignée. Les Prés qui ont donné son nom à ce personnages sont très certainement à localiser près de l’actuelle Promenade des Prés, en contrebas du centre-ville, secteur où ont brouté bien des bêtes à laine jusqu’au début du XXe siècle, comme en témoignent bien des cartes postales. (13) La rue au Comte (vicus comitis). Nous voyons ici que notre charte rend le français rue tantôt par rua (rue aux vignes, rua vineis), tantôt par vicus (rue au comte, vicus comitis). Ce flottement est bien représenté ailleurs. Ainsi par exemple pour le toponymes du type Rue Neuve ou Neuve Rue, rendus en Espagne autant qu’en France alternativement par Rua Nova ou Vicus Novus. Ce secteur a peut-être été anciennement, c’est-à-dire également à la fin du XIe siècle, un fief du comte de Montlhéry. On notera cependant qu’il peut également tirer son nom de celui d’une famille étampoise plus récente dite le Comte, car on note en 1278 la présence à Étampes d’un censitaire des dames de Longchamp (AD91, E 3869) appelé Jean Lecomte (Inventaire-Sommaire des archives de Seine-et-Oise, série E, tome II, p. 277b: Johannes le Conte); en 1477-1478 d’un Perrin le Conte (AD91 E3595, cf. Ibid, p. 287b); en 1509 d’un Robin le Conte (E3597, ibid. p. 289b). (14) La maison de feu Girard Hatte (domus deffuncti Girardi Hatonis). Fleureau a omis le prénom de ce personnage. En fait le latin Hatto rend clairement ici un patronyme, d’ailleurs bien représenté encore de nos jours, soit sous la forme Hatton (qui est le cas régime de ce nom en ancien français), soit sous la forme Hatte (qui représente son cas sujet), seule représentée à Étampes ultérieurement. On peut d’ailleurs se demander s’il ne s’agit pas ici déjà de la famille étampoise Hatte ou Hacte ou Haste, documentée au moins à partir du XVe siècle, sans que nous puissions savoir pour l’instant s’il existe un lien généalogique entre le Girard Hatte du XIIIe siècle et les Hattes étampois des XVe et XVIe siècles. Citons par exemple: 1) un certain Jehan Haste le jeune censitaire des dames de Longchamp à Étampes en 1464; Jehan Hacte le jeune en 1465 (AD91 E3894, cf. Inventaire-Sommaire des archives de Seine-et-Oise, série E, tome II, p. 287a bis); Jehan Hacte en 1477-1478 (E3895, ibid. p. 287b); Jehan Hacte en 1482 (E3896, ibid. p. 288a); les hoirs (héritiers) de Jehan Hacte en 1509 (E3897, ibid. p. 289a); 2) Un François Haste, censitaire des mêmes, cité chaque année comme tel dans une série complète qui va de 1532 à 1541 (E3899, ibid. p. 292a, 292b, 293b, 294a, 295a, 295b, 296a, 297a, 297b et 298b); 3) un certain Esprit Hacte, censitaire des mêmes en 1535 et 1536 et 1537 et 1538 en même temps que François Haste, écrit toujours Hacte (sauf en 1357, Esprit Hate, ce qui tend à démontrer que le c, come le s, étaient purement graphiques) sans doute pour distinguer deux familles ou deux branches de la famille; il n’est plus cité de 1539 à 1541 (E3899, ibid. p. 294a, 295a et 296a), mais quand la série des censiers reprend à partir de 1561, nous retrouvons M. Esprit Hacte (E3900, ibid. p. 299b), qualifié M. Hacte procureur du roy en 1563 (ibid., p. 300b) et M. Esprit Hacte procureur du roy en 1564 (ibid., p. 301b). Lorsque la série reprend en 1569 il n’est plus mentionné; sa veuve en revanche est mentionnée en 1580 comme censitaire des mêmes: Marie Paulmier veuve de Esprit Hacte, vivant, procureur du roy à Estampes (E3901, ibid. p. 306a), et encore en 1592, Marie Paulmier veufve de Me Esprit Hacte, procureur du roy à Estampes (E3903, ibid., p. 307a); elle est citée aussi comme censitaire au Bourgneuf, entre 1580 et 1585, Marie Paulmier, veuve d’Esprit Hacte, vivant, procureur du Roi au bailliage et duché d’Etampes (E3834, ibid., p.256a). Elle est encore mentionnée deux fois sans date comme censitaire au fief des Harengois, Marie Paulmier, veuve d’Esprit Hacte, procureur du roi au bailliage d’Etampes; Marie Paulmier, veuve d’Esprit Hacte, procureur du roi à Etampes, fille et héritière en partie de feu Giles Paulmier, procureur à Etampes (E3855, p.270b, bis). Esprit Hacte était receveur du domaine du bailliage en 1556 (Coutume d’Étampes, procès verbal de l’assemblée du 2 septembre 1556, cité par Monique Chatenet, Étampes un canton..., 1999, note 466, p. 283). 4) Girault Hacte est échevin d’Étampes en 1555, alors que le maire est Ferry Alleaume (Clément Wingler, Liste des maires maires...) et encore au moins en 1556 (Christian Renoux, Étampes et ses édiles 1594-1789, DEA, Université de Paris I, 1985, cité par Chatenet, ibid.); 5) Louis Hacte est en 1556 un bourgeois en vue d’Étampes (cité par Chatenet, ibid.). 6) entre 1571 et 1576 est mentionné comme censitaire des mêmes un Hérosme Hacte (E3901, ibid., p. 303a), qui n’est plus cité en 1577-1578; 7) en même temps que la veuve d’Esprit est citée en 1592 un Pierre Hacte, advocat (E3903, ibid., p. 307a); qui est aussi cité en même temps qu’elle comme censitaire au Bourgneuf, entre 1580 et 1585, Pierre Hacte, avocat à Etampes (E3834, ibid., p.255) 8) un marchand Oudin Hatte, dont la stèle funéraire du XVIe siècle est conservée dans l’église Saint-Gilles; 9) une certaine Jeanne Hacte, veufve de François Cheron, est propriétaire en 1599 de l’hôtel dit Diane de Poitiers (Monique Chatenet, op. cit., p.149). (15) La maison de Sainte-Croix d’Orléans. Selon Frédéric Gatineau (op. cit., p. 119), sous l’Ancien Régime, l’hôtel Sainte-Croix, situé à l’angle des rues Sainte-Croix et de la Tannerie, fut une dépendance de l’Hôtel de Mesnil-Girault, qui était lui-même le siège de la justice du chapitre de Sainte-Croix d’Orléans en Étampois (AD78 1Q 353). On distingue en 1605 (Archives diocésaine d’Évry, n°1) les hôtels du Grand Mesnil-Girault et du Petit Mesnil-Girault, que Gatineau localise alors “à l’angle de la rue de la Tannerie et de l’actuelle place de l’Ancienne Comédie”, ou encore “sur la portion Est de la place de l’Ancienne Comédie” (Gatineau, ibid., pp. 63 et 95). Vers 1590, Chardon mentionne une “rue de Mesnil-Girault” que Gatineau situe, d’après “le plan de la Boucherie de 1761”, sur la portion Est de l’actuelle place de l’Ancienne Comédie. (16) La maison qui fut celle de Roi de Corbeil. Cette expression semble signifier que le dit Roi de Corbeil est décédé ou n’est plus propriétaire des lieux. En 1274, les archives des dames de Longchamp (AD91, E 3867) mentionnent une censitaire étampoise qui est peut-être sa bru, si son mari apparemment défunt, Bertaud, était bien le fils de Roi de Corbeil, «Dame Colinne, fame Bertaut, fiuz de Roy» (Inventaire-Sommaire des archives de Seine-et-Oise, série E, tome II, p. 275). En tout cas nous avons là une attestation contemporaine de cet anthroponyme à Étampes, anthroponyme qui était d’ailleurs peut-être à à mon sens au départ, plutôt qu’un sobriquet, une évolution de l’anthroponyme Hrodwig, prononcé Roué, réinterprété Roy, de même que beaucoup de Roux sont en fait des Raoul, Hrodulf. (17) La maison de Sainte-Croix d’Étampes. Selon Frédéric Gatineau (op. cit., p. 119), le chapitre de Sainte-Croix a tenu jusqu’à la Révolution une maison sise au carrefour formé par les rues Sainte-Croix et de la Roche-Plate: ce doit être notre point de repère (AD78 1Q 353). (18) La maison de Saint-Denis. Cette demeure appartenait à l’abbaye de Saint-Denis-en-France, possessionnée à Étampes même, et en Beauce, avec deux granges à Monnerville et Guillerval, sans parler plus au sud de domaines à Rouvray-Saint-Denis, Toury, et surtout Angerville (cf. Michel Martin, Le Pays d’Étampes, tome I, 2003, p. 111, alléguant aux Archives Nationales le dossier LL 1241-1242). Je n’ai pas trouvé pour l’heure d’indication sur la localisation de cet hôtel. (19) Includatur. Le copiste auteur du cartulaire a commencé par écrire excludatur, puis a réécrit, par dessus les lettres ex-, in-, d’une manière assez brouillonne. (20) La maison de Racicot. Ce Racicot est inconnu par ailleurs, autant que je sache. Cet anthroponyme de formation obscure a survécu ici et là comme patronyme (Racicot, Rassicot, Racicotte, Rassicaud, Recicaud, Ressicaud). (21) La maison du mégissier Obert (domus Oberti alutarii). En mettant une majuscule à Alutarii, Fleureau semble interpréter ce mot comme un patronyme, ce qui n’est pas absolument impossible; mais c’est clairement au moins au départ un nom de métier, celui d’alutier, c’est-à-dire de mégissier. Le métier du mégissier était de blanchir les peaux, c’est-à-dire d’en ôter les poils, en employant pour ce faire le mégis, composition d’eau, de cendre et d’alun. Quant à l’alun, c’est un sel astringent, du sulfate acide d’alumine et de potasse, ou d’ammoniaque. D’après le contexte, la maison de ce mégissier se trouvait dans la rue de la République, face à celle du dénomé Racicot au point de rencontre des deux paroisses, sans doute au niveau du débouché actuel de la rue Baugin. (22) Darnatal. C’est la section de l’actuelle rue de la République qui va de Notre-Dame au pont sur la rivière d’Étampes. Ainsi que je l’ai montré en 2005 dans le Cahier d’Étampes-Histoire n°7, pp. 119-120, ce toponyme signifiait en ancien français les Nouveaux Étaux, et permet de localiser le site originel de la Boucherie de Philippe Auguste, qui fut ultérieurement déplacée à l’angle que font la place Notre-Dame et la rue Sainte-Croix. (23) La Regratterie (regrataria). Littré nous dit qu’anciennement les regrattiers étaient ceux qui vendaient le sel à petite mesure, dans les pays de gabelle, et que ce fut ensuite le métier de ceux qui vendaient en détail, de seconde main, des marchandises de médiocre valeur. Quoi qu’il en soit, cette dernière signification, en somme, de détaillants, s’accommoderait bien du fait qu’on appelait au XVIIe siècle alternativement la Regratterie Petit Marché Notre-Dame, sans doute, me semble-t-il, par opposition au marché de Saint-Gilles, qui était surtout fréquenté par des marchands en gros. Selon Frédéric Gatineau (op. cit., p. 107), on retrouve ce nom de Regratterie en 1605 pour désigner une portion de la Place Notre-Dame (Archives diocésaines n°1) et en 1663 comme nom alternatif, ainsi qu’on vient de le dire, du Petit Marché Notre-Dame (AD91 E 3772); on trouve aussi au XVIIe siècle la forme rue Regratine (AD91 E 3835). Ajoutons-y, dès les environs de 1590, une mention par Étienne Chardon, lieutenant de la prévôté d’Étampes, dans son Traicté des noms et surnoms des rues de la ville et fauxbourgs d’Estampes (édité ici) de La rue du Marché, autrement ditte la rue de la Regraterie. C’est à mon avis, tout simplement, la place Notre-Dame elle-même. (24) La Fautrerie (Cartulaire: Frautreria, Fleureau: Frauteria). L’orthographe (ici reconstituée hypothétiquement) et l’étymologie de ce toponyme posent problème, mais non pas son identification. Il s’agit d’une voie correspondant approximativement à l’actuelle rue Baugin, du moins pour ce qui est de son commencement, à partir des remparts; mais, comme l’indiquent d’une part la situation actuelle du portail de Notre-Dame, qui lui était jadis perpendiculaire, et les trouvailles archéologiques successive de Xavier Peixoto, cet axe a été ultérieurement dévié par l’extension des bâtiments de l’Hôtel-Dieu. La Fautrerie débouchait originellement devant Notre-Dame, et trouvait son prolongement dans la Regratterie, c’est-à-dire dans la place Notre-Dame. L’étymologie de ce toponyme pose problème. Notre texte porte Frautreria. 1) Fûterie? Selon Frédéric Gatineau, on trouve en 1515 Feutrie (AD91, H dépôt 1 B), en 1605 Fusterie (Registre des biens de Notre-Dame, Archives diocésaines d’Évry n°1), en 1644 Futerye (Registre des biens de Notre-Dame, Archives diocésaines d’Évry n°3, et au XVIIIe siècle, Feusterie (forme datée sans référence ni plus précision du XVIIIe siècle, p. 17). Ces quatre graphies représentent une série très homogène et concordante désignant théoriquement une fûterie. La fûterie est le travail du bois, spécialement pour fabriquer des fûts et des tonneaux, activité indispensable dans un pays de vignoble comme l’est alors Étampes, et qui n’est pas encore localisée à ma connaissance. Il est beaucoup d’autres exemples de rue de la Fusterie dans d’autres villes de France, comme encore aujourd’hui à Bordeaux (Gironde), à Perpignan, Céret et Olette (Pyrenées-Orientales), à Limoux (Aude), à Sauve et Anduze (Gard), à Orange (Vaucluse), à Saint-Sulpice-la-Pointe (Tarn), à Genève (Suisse), sans parler d’une reu de la Petite-Fûterie à Orange (Vaucluse), d’une place de la Fûterie à Vienne (Isère), d’un cours de la Futerie à Vernon (Eure), d’une rue Fûterie à Bauduen (Var), etc. Malheureusement cette hypothèse simple et claire rencontre une grosse difficulté, dont la principale est précisément la leçon de notre cartulaire, Frautreria. 2) Feutrerie? Il y faut ajouter celle que donne vers 1590 Étienne Chardon dans Traicté des noms et surnoms des rues de la ville et fauxbourgs d’Estampes (édité ici): “La rue de la Feustrerie, le long de l’Hotel-Dieu”. Dans ce répertoire est porté de plus en marge “Feutriere”, ce qui doit signifier qu’on l’appelait aussi la rue Feutrière. Il est clair que cette graphie relativement ancienne reflète une tout autre interprétation du toponyme, à savoir qu’on aurait eu là un secteur voué à la fabrication du feutre. Cette hypothèse est en première analyse également très vraisemblable car il existe et a existé plusieurs rues de la Feutrerie en France et en Belgique, au moins à Recquignies (Nord), à Auvelais (région wallonne de la province belge de Namur). Une feutrerie (Feltraria) est mentionnée à Chartres dès le début du XIIe siècle (entre 1116 et 1129, par le Cartulaire de Saint-Père, p. 317) et elle avait bien donné son nom à une rue (Bibliothèque de Chartres, ms. 1014, p. 203, textes cités par Geneviève Aclocque, Les Corporations, l’industrie et le commerce à Chartres du onzieme siècle à la Révolution, Paris, A. Picard, 1917, p. 5). Cette rue s’est appelée (selon une page web dont les allégations restent à vérifier, à cette adresse): rue Feutrerie au XIVe s. et, au XVIe siècle, rue de la Feutrerie, rue de la Fusteyrie et rue de la Fusperie (sans parler de dénominations alternatives comme rue aux Follets et rue des Béguines). Si cette solution est la bonne, il faut conjecturer que Fleureau a eu raison de corriger le texte Frautreria, mais qu’il l’a mal corrigé, et qu’au lieu de Frauteria, comme il l’a fait, il aurait dû porter Fautreria. En effet, on trouve un ancien français fautre pour feutre (Littré cite en ce sens le vers 279 de la chanson de geste Raoul de Cambrai, remaniement du XIIe siècle d’un récit du Xe): “chapel de fautre”. Selon le Dictionnaire historique de Rey (2e édition), feutre est une réfection (vers 1130) de feltre (fin XIe siècle) ou fieltre, issu lui-même du francique*filtir, “étoffe obtenue à partir de poils ou de laine”, qui a aussi produit le latin médiéval filtrum (VIIIe siècle), source de notre mot “filtre”. 3) Frauderie? Ce qui complique encore notre affaire, c’est qu’il existe encore d’autres dénominations, quoique tardives, qui s’accordent partiellement avec celle de notre cartulaire, Frauteria et spécialement avec son Fr- initial. Ce sont les graphies Frusterie, attestée en 1773 (Archives municipales 1) et Fruterie, attestée en 1790 (Archives municipales 1G 2). Cette évolution avec déplacement du R de la deuxième à la la première syllabe pourrait s’explique comme une altération tardive par métathèse, dont la ressemblance avec la graphie anormale de notre cartulaire serait une pure coïncidence. On peut aussi imaginer que l’altération par Fleureau de cette graphie Frauteria en Frauteria reflète peut-être la prononciation de sa propre époque (il rédige ses Antiquitez vers 1668), qui serait déjà celle qu’on trouve ensuite au XVIIIe siècle, Frusterie en 1773 et Fruterie en 1790. Une hypothèse alternative qui ne me convainc guère moi-même serait qu’on serait en présence rue de la Frauderie et/ou de la Frustrerie, avec contamination entre ces deux appellations alternatives et synonymique, c’est-à-dire d’un lieu où selon la rumeur publique on fraudait (ou, synonyme: frustrait) l’octroi. Le Lexique de l’ancien français de Godefroy atteste bien un ancien Frauderie, synonyme de Fraude. Quand au verbe frustrer, emploi savant au latin classique qui n’est guère attesté qu’à partir de 1330 selon le Dictionnaire historique de Rey, il a concurrencé à partir de ce moment le verbe frauder, d’étymologie voisine, spécialement dans la langue du droit; ainsi, frustrer l’octroi est une locution traditionnelle bien attestée par le Littré. Or nous sommes bien dans une rue qui touche aux remparts, et il existe bien aussi une rue de la Fraude au moins à Mouscron, en Belgique. On pourrait donc peut-être aussi corriger notre manuscrit en Frauderia, et supposer que les interprétations ultérieures concurrentes de ce mot en Fûterie ou Feutrerie n’en sont que des réinterprétations erronées. Mais cette hypothèse est bien alambiquée. Conclusion. Le plus vraisemblable me paraît que le nom original de cette voie a été la Fautrerie, c’est-à-dire la Feutrerie, mais que ce mot n’a plus été compris lorsque le secteur a changé d’activité, au point que notre copiste du XVe siècle l’a altéré par négligence en Frautrerie, et qu’il a été altéré ensuite autrement en Feutrie ou Futrie et de là interprété, erronément, Fûterie, sans parler d’autres altérations qui ne présentent pas de sens clair. (25) Jusqu’aux fossés (usque ad fossata). Ce lieu-dit est peut-être documenté dès la fin du XIe siècle où il donne son nom vers 1094 à un certain Baudry du Fossé (Baldricus de Fossato), témoin de deux transactions du moine Thion Chef-de-Fer (Voyez notre édition en ligne de ces Notices de Thion Chef-de-Fer). La première fois (clairement à Étampes) il est cité juste après un Robert du Cimetière (Rotbertus de Cimiterio). Il s’agit peut-être cependant de lieux-dits localisés à Saint-Martin. Mais on notera surtout qu’on ne prend par point point de repère les murs de la ville, qui apparemment n’existent pas encore. La ville ne paraît en effet alors fortifiée que par des fossés à cette date. Voyez la note suivante. (26) Tout ce qui s’étend au-delà des fossés (Quidquid continetur extra fossata). Il faut noter ici comme très important que l’extérieur de la ville proprement dite n’est pas qualifié extra muros, mais seulement extra fossata. La ville n’a visiblement pas de murailles en 1237, et de fait c’est en vain que Xavier Peixoto a recherché en 2008, rue Pavé, des murailles de cette époque qu’y avaient localisées très hypothétiquement d’anciens érudits étampois. (27) Villeneuve. Villeneuve était une création de Louis VI, en 1169, du côté de Montfaucon, dans le cadre d’une tentative pour créer un nouveau noyau urbain étampois; il n’en résulta qu’un hameau qui vivota quelques siècles, avant de se réduire à deux fermes (sur le plan de 1827, cité par Gatineau, op.cit., p. 132), puis de disparaître complètement. (28) ad jus parrochiale Beate Marie specialiter de cetero pertinebit. Fleureau a curieusement laissé de côté deux termes techniques que peut-être il n’a su déchiffer, parrochiale, «paroissial», et specialiter, «spécialement, en propre». Il s’agit pourtant d’une formule consacrée, dont voici trois exemples du temps actuellement en ligne: nec aliquid sibi usurpare quod percineat ad jus parrochiale (charte de 1202, cliquez ici); super rebus ad jus parrochiale pertinentibus (charte de 1209 de Pierre II, évêque de Paris, cliquez ici); cum de jure pertineat ad jus parrochiale (charte de décembre 1220, cliquez ici, page 59); etc. (29) Specialiter. Nouvelle omission par Fleureau de cet adverbe insignifiant, que décidément il n’a pas déchiffré. (30) Le cimetière. Ce cimetière où se trouvait la chapelle Saint-Jacques, a survécu jusqu’en 1790 selon Gatineau (op. cit., p. 34). Lorsque seront précisément datées les sépultures trouvées en 2007 rue de la République, dont certaines sont apparemment du XIe siècle, nous aurons un terminus ante quem pour l’établissement du cimetière hors-les-murs près de la chapelle Saint-Jacques. (31) Saint-Jacques (juxta Sanctum Jacobum). Le site de cette chapelle, et du futur cimetière, à savoir le hameau de Bedegon, avait été donné au chapitre de Notre-Dame par Philippe Ier. 1) La charte de Philippe Ier, publiée en 1683 par Fleureau (Antiquitez, p. 405), n’a donc pas été rééditée par Alliot (Cartulaire, n°XXXIX, p. 26), mais seulement en 1908 par Maurice Prou, qui la date de 1101-1104 (Recueil des actes de Philippe Ier, 1908, p. 378-379). Notre seule source est encore notre Cartulaire, au folio XV. 2) Une bulle de Luce III du 27 octobre 1185 en fait mention, ecclesiam sancti Jacobi quæ est apud Bedegon (éd. Fleureau, Antiquitez, pp. 347-348). 3) Notre cartulaire conserve aussi deux chartes de Philippe Auguste relatives à la fondation de deux chapellenies en ce sanctuaire, l’une de 1191 (n°XXXIV, p. 24, éditée par Fleureau, Antiquitez, p. 406; cf. Léopold Delisle, Catalogue des actes de Philippe Auguste, 1856, n°360), l’autre de 1193 ou 1194 (n°XL, p. 26, éditée par Fleureau, Antiquitez, p. 407; cf. Delisle, op. cit., n°408). 4) Un pouillé du diocèse de Sens rédigé vers 1350 en fait également mention: capella de Bedegon... capella sancti Jacobi de Bedegon... capella alia in dicta ecclesia de Bedegon et capella alia ibidem (cité ici d’après des notes manuscrites inédites de Frédéric Gatineau). 5) Le Cartulaire conserve encore un Acte pris par le chapitre de Notre-Dame contre l’archevêque de Sens (Tristan de Salazar) pour maintenir son droit de célébration et d’offrande, le 25 juillet, dans la chapelle de Saint-Jacques de Bédégon du 25 juillet 1484 (n°LXXVII, pp. 83-85: “au lieu de la chappelle de sainct Jacques, près le cymetière hors de la ville d’Estampes”). 6) Étienne Chardon, lieutenant du prévôt, la mentionne comme suit vers 1590: La chapelle Saint-Jacques-de-Bedegon, dedans le cimetiere des paroisses Notre-Dame et Saint-Basille, hors et proche la porte Saint-Jacques (Traicté des noms et surnom des rues). 7) Fleureau raconte sa destruction par les Frondeurs assiégés, en mai 1652, comme suit: Tous les Edifices tant dedans que dehors la ville proche des murailles furent rasez, même les murailles des clôtures des Cimetieres, quoy qu’elles fussent fort basses. Ceux qui entreprirent d’abatre la Chapelle de saint Jacques de Bedegon, qui est au bout du Cimetiere, du côté de Paris, furent par un effet visible de la divine Justice, écrasez sous les ruines (Antiquitez, p. 275; ce récit a été rédigé en 1668). (32) M° CC° XX[X]° sexto. Sur cette correction du millésime de 1226 en 1236, voyez notre note (34). (33) Au mois de février (mense februaris). Ici encore Fleureau n’a pas reconnu l’abréviation par laquelle notre copiste rend parfois la finale -is. Il l’avait lu plus haut -l (Manuel au lieu de rua Vineis), il la lit ici -io (mense Februario). Le nom de mois de février est bien en latin, originellement, un adjectif de la première classe (februarius); on devrait donc avoir effectivement mense februario, voire mense februarii; mais notre manuscrit porte décidément la faute mense februaris, qu’on trouve parfois en latin médiéval, et moderne, comme vous le verrez en cherchant dans un moteur de recherche mense-februaris ou mensis-februaris. Rappelons par ailleurs qu’en ancien style, l’année commençant en mars ou à Pâques, février 1226 signifie, d’après notre comput actuel, février 1227. Mais, comme le montre la note suivante, le millesime 1226 est décidément une erreur de notre copiste. (34) Au lendemain des Cendres. Cette datation présente une grave difficulté qui oblige à corriger le millésime. En effet le mercredi des Cendres, premier du jour du carême, tombe quarante jours avant Pâques. Or, la Pâques tombant en 1227 le 11 avril, le mercredi des Cendres tombait nécessairement le 3 mars, et non pas en février. 1226 ne convient pas mieux car Pâques tombait alors le 19 avril, et le mercredi des Cendres le 11 mars. Pour que le jeudi lendemain du mercredi des Cendres tombe en février, il faut que Pâques ne tombe pas elle-même après le 8 avril. Sous l’archiépiscopat de Gautier Cornu, c’est-à-dire de 1222 à 1241, voici les années qui répondent à ce critère: 1222 (Pâques le 3 avril), 1225 (Pâques le 30 mars), 1228 (Pâques le 26 mars), 1230 (Pâques le 7 avril), 1231 (Pâques le 23 mars), 1233 (Pâques le 3 avril), 1235 (Pâques le 8 avril), 1236 (Pâques le 30 mars, et le mercredi des Cendres le 19 février), 1238 (Pâques le 4 avril), 1239 (Pâques le 27 mars), 1241 (Pâques le 31 mars). Notre cartulaire porte M° CC° XX° sexto. Le nombre des unités, six, porté en toutes lettres dans notre copie, l’était aussi sûrement dans l’original. Il nous faut donc choisir comme de loin la plus vraisemblable la date de 1236, et supposer que l’original portait en fait M° CC° XXX° sexto. Il ne faut pas oublier de plus que l’année commence alors soit à Pâques, ou en mars. Notre charte date donc selon toute apparence du jeudi 20 février 1237. (35) Actée par le chapitre. Cette note du Cartulaire, ou de sa source, signifie qu’il a existé une autre version de la même charte, faite et contresignée par le chapitre, qui n’a pas été recopiée parce que son texte était identique à celui qui venait de l’être. Axes définis par la charte de Gautier Cornu
comme relevant désormais de la paroisse Notre-Dame.
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ANNEXE 1
Édition princeps de cette charte par Fleureau Antiquitez d’Estampes (1683), p. 404.
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ANNEXE 2
Honoré Fisquet Gautier Cornu, archevêque de Sens La France Pontificale: Sens et Auxerre (1865)
Honoré FISQUET, «Gauthier III Cornu (1222-1241)», in ID., La France pontificale (Gallia Christiana). Histoire chronologique et biographique des archevêques et évêques de tous les diocèses de France depuis l’établissement du christianisme jusqu’à nos jours, divisée en 17 provinces ecclésiastiques [22 volumes in-8°, 1864-1873]. Métropole de Sens. Sens et Auxerre [472 p.], Paris, E. Repos, 1865, pp. 57-59. Dont une réédition numérique en mode image par la BNF sur son site Gallica, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k204176g, en ligne en 2008. Dont la présente édition numérique en mode texte, décembre 2008. |
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Source du texte: Cartulaire
de Notre-Dame d’Étampes, fin XVe siècle. |
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Original: Charte de février 1232, perdue. Copie: Cartulaire de Notre-Dame d’Étampes [registre en papier de format in-quarto, comptant 189 folios, dont 66 seulement ont été utilisés pour recopier, à l’extrême fin du 15e siècle, un ensemble de 114 pièces datées de 1046 à 1495], conservé en 2006 aux Archives départementales de l’Essonne, à Chamarande, sous la cote 1 J 448, folio 8 r°. Édition princeps: Dom Basile FLEUREAU (religieux barnabite,1612-1674), Les Antiquitez
de la ville, et du Duché d’Estampes avec l’histoire de l’abbaye
de Morigny et plusieurs remarques considerables, qui regardent l’Histoire
generale de France [in-4°; 622 p.; rédigé entre 1662
et 1668; publication posthume par Dom Remy de Montmeslier], Paris, J.-B.
COIGNARD, 1683 [dont une réimpression: Marseille, Lafittes reprints,
1977; édition numérique en cours: Corpus Étampois,
http://www.corpusetampois.com/index-fleureau.html,
depuis 2001], p. 404.
Édition critique numérique: Bernard GINESTE [éd.], «Gautier Cornu, archevêque de Sens: Division des paroisses Notre-Dame et Saint-Basile d’Étampes (20 février 1237)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cls-13-gautiercornu1237division.html, 2008. Sur
Gautier Cornu
Honoré FISQUET, «Gauthier III Cornu (1222-1241)», in ID., La France pontificale (Gallia christiana), histoire chronologique et biographique des archevêques et évêques de tous les diocèses de France depuis l’établissement du christianisme jusqu’à nos jours, divisée en 17 provinces ecclésiastique [22 volumes in-8°: Aix, Arles, Embrun (2e édition, 1868); Bayeux et Lisieux (1866); Béziers, Lodève, Saint-Pons-de-Tonières (1870); Bordeaux (1867); Chartres (1873); Cambrai (1869); Digne et Riez (1870); Évreux (1865); Gap (1868); Lyon (1867); Maguelone, Montpellier, Agde (1868); Nevers et Bethléem (1866); Paris et histoire de Notre-Dame (1864); Paris, doyens (1866); Reims (1864); Rouen (1866); Séez (1866); Sens et Auxerre (1865); Soissons et Laon (1867); Troyes, Moulins (1866)], Paris, E. Repos, 1864-1873, tome «Métropole de Sens. Sens et Auxerre», 1865, pp. 57-59. Dont une réédition numérique en mode image par la BNF sur son site Gallica, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k204176g, en ligne en 2008. Dont la présente édition numérique en mode texte, http://www.corpusetampois.com/cls-13-gautiercornu1237division.html#fisquet, décembre 2008. |
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