Corpus Latinum Stampense
 
Thibaud, évêque de Paris
Autorisation dun achat de dîme
Paris, 1146
   
Eglise de Longpont (Gravure de L. Gaucherel)
Statue de Notre-Dame (Gravure de L. Gaucherel)
Portail de l'Eglise de Longpont (Gravure de L. Gaucherel)
    
     En 1146, l’évêque de Paris Thibaud (1143-1159) autorise et certifie la vente déguisée d’une part de dîme de Montlhéry aux moines de Longpont.

     La saisie des textes anciens est une tâche fastidieuse et méritoire. Il ne faut pas décourager ceux qui s’y attellent en les pillant sans les citer.

 
Thibaud, évêque de Paris
Charte en faveur des moines de Longpont
Paris, 1150
1. Première traduction (2008)

     Sciant tam presentes quam futuri quod
     Que les gens présents autant qu’à venir sachent ceci.
     Guillelmus Cuchivis (1), miles de Monte Leterici, partem suam ex integro id est sextam decime, que est in parochia Britiniaci, dedit in elemosinam (2) monachis cluniacensibus ecclesie sancte Marie de Longo Ponte, uxore sua & filio majore natu & fratre suo, Hugone, hoc idem concedentibus,       Guillaume Cochevis (1), chevalier de Montlhéry, a donné en aumône (2) aux moines clunisiens de l’église Notre-Dame de Longpont l’intégralité de sa part, c’est-à-dire le sixième, de la dîme qui se lève dans la paroisse de Montlhéry, et que son épouse, son fils aîné et son frère Hugues ont consenti à la dite donation.
     & tam diu monachi, absque omni calumpnia, predictam decimam possideant, donec ipse Guillelmus aut heres ejus XVim libras Proveniensis monete monachis persolvat, quas a domno Petro, priore ejusdem loci, sub presenti cyrographo accepit: quod si moneta mutata fuerit, VIIm marcas & dimidiam puri probatique [p.69] argenti monachis restituat.
     Et que les moines jouissent de la dite dîme sans aucune contestation jusqu’à ce que le dit Guillaume ou son héritier ait réglé les quinze livres en monnaie de Provins qu’il a reçues de dom Pierre, prieur du dit établissement, comme l’atteste le présent acte; et si cette monnaie a subi une altération, qu’il rende sept marcs et demi d’argent pur et certifié.
     Hujus donationis & conventionis ego Teobaldus, Dei gracia parisiensis episcopus, testis sum, &, quia decima de feodo nostro est, ita esse concedimus; &, ut ratum in posterum perseveret, sigilli nostri episcopali auctoritate confirmamus.
     De cette donation et convention, moi Thibaud, par la grâce de Dieu évêque de Paris, je suis témoin; et, parce que cette dîme relève de notre fief, nous avons autorisé qu’il en soit ainsi. Et pour que cela demeure établi à l’avenir, nous le certifions par l’autorité de notre sceau.
     Quod si quis super hoc monachos inquietare temptaverit, usque tercio admonitus si non emendaverit, anathematis gladio feriatur.
     Si quelqu’un se risquait à inquiéter les moines à ce sujet, quand il aura été averti à deux ou trois reprises, qu’il soit frappé du glaive de l’anathème.
     Testes etiam huic negocio plures interfuerunt (3): ex parte Guillelmi: Hugo, frater ejus; Guido Chamilli; Nanterius de Orceaco; Garinus, filius Aymonis de Maciaco; Guarinus, filius Pagani de Alneto; Hungerius de Castris; ex parte autem monachorum: Arnulfus, major; Bernardus, famulus; Robertus, stabularius; Johannes, filius Garnenii, famuli.      Les témoins de cette affaire ont été nombreux (3). Du côté de Guillaume: son frère Hugues, Guy Chamilli, Nantier d’Orsay, Garin fils d’Aimon de Macy, Garin fils de Payen de Launay, Hongier de Châtres [aujourd’hui Arpajon]. Et du côté des moines: le régisseur Arnoux, le domestique Bernard, le palefrenier Robert, Jean le fils du domestique Garnier.
     Actum est publice in sede nostra, Parisius, anno millesimo C° XL° VI° incarnationis Domini, Ludovici vero secundi anno regni XV° (2), episcopatus vero nostri IIII°.
     Cela s’est fait à notre évéché, à Paris, l’an 1146 de l’incarnation du Seigneur, 15 du règne de Louis II, et 4 de notre épiscopat.


NOTULES

     (1) Ce nom de Guillaume Cochevis chevalier de Montlhéry apparaît souvent dans le Cartulaire de Longpont sous les graphies
Guillermus, Guillelmus ou Willelmus Cochivi, Cochivit, Cuchevi, Cuchivis ou Cuchivith. Il est cité par quinze de ses chartes (éd. Marion, chartes n°7, 19, 54, 89, 107, 111, 112, 150, 151, 154, 169, 225, 227, 296 et 307). Cependant il s’agit au moins de deux représentants successifs de la même famille. Le plus souvent ils sont témoins, mais aussi parfois donateurs (ou vendeurs déguisés), dont deux autres fois de dîmes (chartes n°150 et 169).
     Nous essaierons plus tard d’en éclaircir la généalogie, spécialement parce que cette famile est alliée à une famille étampoise: nous trouvons que vers 1110 un certain Ourson fils de Normand d’Étampes est neveu de Guillaume Cochevis (charte n°225, p.198: Urso filius Normanni de Stampis, nepos jamdicti Guillelmi).
     En tout cas l’étymologie du surnom est claire: Littré encore connaît le cochevis (on ne prononce pas le -s), qui s’appelle aussi alouette crêtée ou de Brie, ou des chemins, ou cornue, ou encore grosse alouette huppée. Son nom scientifique est Alauda cristata Linnæus, 1758.
Sa dénomination cochevis, “vis (visage) de cochet (petit coq)” lui vient de sa huppe en forme de crête. Le Lexique de l’ancien français de Godefroy donne une graphie cochevieux (où la terminaison est peut-être à interpréter comme diminutive), avec deux sens: “sorte d’alouette” et “imbécile” (B.G.).

     (2) Il s’agit clairement d’un achat, et encore le vendeur se réserve-t-il le droit de racheter cette dîme si ses finances venaient à s’améliorer. Le droit canonique interdit très rigoureusement ce genre de trafic: aussi affirme-t-on toujours avec le même aplomb sidérant qu’il s’agit d’une donation, alors même que tout ce qu’on en dit indique le contraire sans la moindre ambiguité.

     
(3) Sur tous les personnages cités, nous indiquerons ce qu’on peut en savoir une fois tout le Cartulaire traduit.


Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
2. Texte et notes de Marion (1879)


     Sciant tam presentes quam futuri quod Guillelmus Cuchivis, miles de Monte Leterici (1), partem suam ex integro id est sextam decime, que est in parochia Britiniaci, dedit in elemosinam monachis cluniacensibus ecclesie sancte Marie de Longo Ponte, uxore sua & filio majore natu & fratre suo, Hugone, hoc idem concedentibus, & tam diu monachi, absque omni calumpnia, predictam decimam possideant, donec ipse Guillelmus aut heres ejus XVim libras Proveniensis monete monachis persolvat, quas a domno Petro, priore ejusdem loci, sub presenti cyrographo accepit: quod si moneta mutata fuerit, VIIm marcas & dimidiam puri probatique [p.69] argenti monachis restituat. Hujus donationis & conventionis ego Teobaldus, Dei gracia parisiensis episcopus, testis sum, &, quia decima de feodo nostro est, ita esse concedimus; &, ut ratum in posterum perseveret, sigilli nostri episcopali auctoritate confirmamus. Quod si quis super hoc monachos inquietare temptaverit, usque tercio admonitus si non emendaverit, anathematis gladio feriatur. Testes etiam huic negocio plures interfuerunt: ex parte Guillelmi: Hugo, frater ejus; Guido Chamilli; Nanterius de Orceaco; Garinus, filius Aymonis de Maciaco; Guarinus, filius Pagani de Alneto; Hungerius de Castris; ex parte autem monachorum: Arnulfus, major; Bernardus, famulus; Robertus, stabularius; Johannes, filius Garnenii, famuli.
     Actum est publice in sede nostra, Parisius, anno millesimo C° XL° VI° incarnationis Domini, Ludovici vero secundi anno regni XV° (2), episcopatus vero nostri IIII°.
1146.

     (1) A propos de cette qualification de miles de Monte Leterici voyez plus haut la charte IV, note 2.

     (2) Dans cette charte, les années du règne de Louis VII sont comptées, non pas comme dans la charte précédente, à partir de la mort de son père, mais à partir de son association au trône, en 1131; mode de compter fréquemment employé dans la chancellerie de ce prince. On remarquera la désignation de secundus (Louis deuxième ou Louis le Jeune), donnée ici à Louis VII, par opposition avec son père, Louis le Vieux, auquel il avait été associé pendant six ans.




        
Source du texte: L’édition de Jules Marion (1879).
 
   
BIBLIOGRAPHIE SOMMAIRE ET PROVISOIRE
 
Éditions

     Jules MARION, Le Cartulaire du Prieuré de Notre Dame de Longpont de l’ordre de Cluny au diocèse de Paris, publié pour la première fois avec une Introduction et des Notes. XIe-XIIe siècle [in-8°; 371 p.; 3 planches; texte latin; index], Lyon, A. Louis Perrin  & Marinet, 1879, n°VII, pp. 68-69.
     Dont une réédition numérique en mode image par la BNF sur son site Gallica, http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k111131d
, en ligne en 2008.

     Bernard GINESTE [éd.], «Thibaud, évêque de Paris: Autorisation du rachat d’une dîme par les moines de Longpont (1146)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cls-12-thibauddeparis1146longpont.html, 2008.
 
Texte corrélatif

     Bernard GINESTE [éd.], «Thibaud, évêque de Paris: Charte en faveur des moines de Longpont (1150)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/cls-12-thibauddeparis1150longpont.html, 2008.


Sur Thibaud

     Antoine Martial LE FÈVRE (prêtre du diocèse de Paris, bachelier en théologie), Calendrier historique et chronologique de l’église de Paris contenant l’origine des paroisses, abbayes, monastères, prieurés, collégiales, etc de Paris; la mort des évêques, archevêques, et des hommes illustres du diocèse; les événemens dignes de remarque: les conciles tenus à Paris, les hérésies qui y ont été condamnées; la prélature parisienne; le tout sous le titre des patrons de chaque église, suivant le jour de leurs fêtes, et rectifié sur les titres originaux et sur plusieurs manuscrits authentiques, avec une table alphabétique pour une plus grande commodité [in-8°; IX+598+XXXI p.], Paris, Claude Hérissant fils, 1747, p. 16.
     Dont une réédition numérique mise en ligne par Google, à cette adresse, en ligne en 2008.
     Dont l’extrait qui suit:


     Extrait: «VII. Janvier. — 8. Janvier. Mort de Thibaud évêque de Paris, l’an 1159. Mort de Mort de Thibaud évêque de Paris, Thibaud succéda à Estienne de Senlis dans le siége épiscopal de Paris. Avant que d’être évêque, Thibaud étoit prieur de Saint-Martin des Champs. Il se trouva au concile de Soissons, l’an 1155. Il obtint du roi Louis VII. plusieurs privilèges en faveur de l’Eglise de Paris. Thibaud mourut le 8. de Janvier l’an 1159. & fut enterré dans l’église de saint Martin des Champs».
 

Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.

    
Explicit
 
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