CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
 
Léon Guibourgé
 Le Château Fort
Étampes ville royale, chapitre VII.1
1957

Le château vers 1410-1415 (dessin d'Albert Mayeux, 1912, carte postale Paul Allorge Ee7 n°12)

ÉTAMPES, VILLE ROYALE
Étampes, chez l’auteur, 1957
chapitre VII.1, pp. 223-226.
Le Château Fort
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Léon Guibourgé      LE CHATEAU FORT: SON DONJON, SES REMPARTS, SES PORTES, SON ÉGLISE: NOTRE-DAME DU FORT.

     Le voyageur qui passe à Etampes remarque tout d’abord la grosse tour en ruines qui domine la ville. On l’appelle la «tour de Guinette», vieux nom venant de guigner, guetter. Elle servait en effet de guet pour la défense. Elle faisait partie d’un ensemble de fortifications couvrant la colline.

     On peut se faire une idée de cette grande forteresse par les gravures et les descriptions qui nous restent. Une des plus anciennes reproductions est une miniature d’un livre de prières dit Les Très riches Heures du Duc de Berry, qui fut comte d’Etampes.

     A quelle époque fut construite cette forteresse? Le moine Helgaud, au XIe siècle, dans sa chronique «Vie du roi Robert» parle d’Etampes-le-Chatel, ce qui suppose que la ville avait un château ou forteresse. Ce roi l’aurait bâti ou reconstruit vers l’an 1020. Et le roi Philippe Auguste aurait, au XIIe siècle, achevé la construction et bâti le donjon. La forteresse avec sa tour est donc dans son ensemble du XIIe siècle.

Dessin de Léon Marquis, d'après une ancienne peinture consezrvée au Musée d'Etampes (1881)      Etampes avait son château fort, mais la ville elle-même était fortifiée, principalement la partie qu’on appelait Etampes-le-Chatel. Cette partie était entourée d’une ceinture de murs, garnis de meurtrières, de tourelles, de bastions et de fossés. Au XVIe siècle, les remparts avaient été remis en état et huit portes principales permettaient d’entrer dans la ville. [p.224]

     Faisons le tour de ces remparts en nommant les portes que nous rencontrerons. Nous partons de la porte Saint-Jacques, appelée ainsi à cause de la rue Saint-Jacques qui passait dessous. Cette porte était l’une des plus élevées, flanquée de deux tours réunies par un portail voûté avec un pavillon au toit aigu. Descendons vers la rivière par la rue des Remparts qui longe la promenade du Port. Nous arrivons à la porte Evézard, ouvrant sur la rue du même nom, une des plus anciennes; elle remonte au XIIIe siècle; on l’appelait encore porte de la Couronne. Nous voici à la rivière que nous remontons et nous sommes à la porte Saint-Pierre, qui donne sur le quartier du même nom.

Dessin de Léon Marquis (1881)

     A partir de cet endroit, toujours en remontant la rivière, le long de la promenade des Prés, voici des vestiges de fortifications assez bien conservés, avec la tour de Jean le Batard, la tour du Loup et les Portereaux. De ce côté, il y avait deux portes la porte Saint-Fiacre où est aujourd’hui la rue Magne, et la porte Saint-Gilles près du Marché-Franc. Les Portereaux, où se trouvent les vannes qui réglaient la hauteur des eaux dans les fossés, formaient un coin des remparts spécialement fortifié. Ensuite ceux-ci remontaient vers la ville en suivant la rue du Filoir. Ici, en pleine ville, on aboutissait à la porte Saint-Martin. C’était la plus fortifiée et qui eut le plus à souffrir durant le siège de 1652 à l’époque de la Fronde. L’emplacement de cette porte s’appelle encore de nos jours «la Bastille».


Dessin de Léon Marquis (1881)

     Le mur d’enceinte continuait jusqu’au coteau de Guinette, à l’endroit où est actuellement le Pont Saint-Jean et là suivait le coteau, pour arriver à la Porte Dorée, ensuite à la Porte du Château, et enfin retrouvait un peu plus loin la Porte Saint Jacques. De ce côté, le chemin de fer actuel à emprunté l’emplacement des fossés.

     Ainsi la ville d’Etampes-le-Chatel se trouvait complètement entourée de remparts et de fossés. Les portes des remparts étaient munies de pont-levis et défendues chacune par deux tours. Les fossés en moyenne avaient 20 mètres de largeur.

     Dans l’intérieur de la ville, l’église Notre-Dame elle-même était fortifiée. En 1353, à l’époque de la guerre de Cent Ans, «cette église, dit dom Fleureau fut environnée de larges fossez en la place desquels il y a aujourd’hui des maisons bâties et elle servait de retraite aux habitants qui s’y deffendoient vaillamment, d’où elle a pris le nom de Notre-Dame du Fort».

     En outre, les faubourgs Saint-Martin et Saint-Pierre étaient également environnés de murailles avec quelques portes qui n’étaient pas toujours fortifiées. [p.225]

     En somme Etampes dans son ensemble avec ses fossés, ses murailles, ses tourelles, ses principales portes fortifiées et son château fort, était une forteresse redoutée des ennemis.

     LA TOUR DE GUINETTE DESCRIPTION: SA FORME, SES ÉTAGES, SON RÔLE, SES MOYENS DE DÉFENSE.

     Le vieil historien d’Etampes, Dom Fleureau, nous donne dans son livre Les Antiquités d’Etampes, une description assez détaillée de la tour centrale du château fort d’Etampes.

Dessin de Viollet-le-Duc      «Au milieu de tous les édifices, écrit-il, était une cour et tout auprès une grosse tour servant de donjon, faite en forme de rose à quatre feuilles de 40 toises de tour et de 20 de hauteur; les murs de 12 pieds d’épaisseur dans laquelle était un escalier en forme de pied droit pour monter aux étages d’en haut de cette tour, au-dessus de laquelle s’élevait une tourelle qui servait d’eschauguette ou guérite pour découvrir les avenues et les environs du château. Il y avait un puits dans le bas qui montait jusqu’au premier étage, au-dessus du rez-de-chaussée de la tour. Tous ces édifices étaient couverts d’ardoise et de plomb, garnis de roses, de fleurons et d’autres embellissements dont il ne reste aujourd’huy qu’une partie de la Tour ou Donjon, où les vassaux du Duché d’Estampes vont rendre leurs hommages.»

     Essayons, après Dom Fleureau, de faire une description détaillée de l’intérieur.

     On pénétrait dans la tour par un pont-levis qui partait du mur d’enceinte proche de la tour et aboutissait un peu au-dessous du premier étage, dans une sorte de petit vestibule ou poterne à mi-étage. De ce vestibule partaient deux escaliers, l’un à gauche, l’autre à droite.

     L’escalier de gauche descendait au rez-de-chaussée de la tour, qui avait l’aspect d’une grande cave éclairée par de petites fenêtres. II y avait en outre un puits et des latrines. Une colonne centrale traversait le plafond en bois. Cette colonne montait jusqu’au deuxième étage.
Du vestibule de l’entrée, si l’on prenait l’escalier de droite, en montant de quelques marches, on arrivait au premier étage, dans une salle à quatre grandes fenêtres, avec son pilier central soutenant une voûte de pierre aux huit branches d’ogives. Ce plafond, d’après le style, construit au milieu du XIIIe siècle, [p.226] remplaçait le plafond primitif de bois. C’est de cette salle qu’on tirait l’eau du puits dont la cage montait jusque là.

     Retournons à l’escalier à vis qui, à travers la muraille, aboutissait au deuxième étage, haut de 13 mètres. Cet étage formait une grande salle qui servait d’habitation au commandant du château fort. Elle était éclairée par des hautes fenêtres s’évasant largement vers l’intérieur et chauffée par deux grandes cheminées. Quatre colonnes de pierre, avec chapiteau à volutes, supportant des ogives, soutenaient le plancher supérieur.

     Toujours par l’escalier à vis, nous arrivons au troisième étage. Cet étage était destiné à la défense et on y accumulait les projectiles et les armes. De plus, dans les quatre lobes de la tour, des échelles permettaient de descendre dans des sortes de tribunes situées entre le deuxième et le troisième étage, qui facilitaient ainsi la communication avec le deuxième étage, où se tenait le commandant. Celui-ci pouvait alors aisément donner ses ordres et envoyer des défenseurs aux créneaux en cas d’attaque.

     Ce troisième étage était donc crénelé. Il était surmonté d’un grand toit constitué d’un comble carré à quatre pentes, recouvert d’ardoises, et de quatre tourelles au-dessus des demi-tours. Le tout surmonté d’une échauguette très élevée où aboutissait l’escalier à vis.

     Nous avons dit que le château d’Etampes avait été commencé par Robert le Pieux au XIe siècle. Le donjon ne fut construit qu’au XIIe siècle et achevé au XIIIe siècle.

     Aujourd’hui, nous n’apercevons que les ruines imposantes du donjon. Dans les articles suivants, nous relaterons son histoire, fort intéressante. [p.227]

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BIBLIOGRAPHIE

Éditions
Léon Guibourgé
     Brochure préalable: Léon GUIBOURGÉ [chanoine, ancien archiprêtre d’Étampes, officier d’Académie, membre de la Commission des arts et antiquités de Seine-et-Oise, vice-président de la Société artistique et archéologique de Corbeil, d’Étampes et du Hurepoix], Étampes, la favorite des rois [in-16; 64 p.; figures; plan et couverture en couleur; avant-propos de Barthélémy Durand, maire; dessin de couverture de Philippe Lejeune], Étampes, Éditions d’art Rameau, 1954.

    
Édition princeps: Léon GUIBOURGÉ, Étampes, ville royale [in-16 (20 cm); 253 p.; armoiries de la ville en couleurs sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Étampes, chez l’auteur (imprimerie de la Semeuse), 1957.

    
Réédition en fac-similé: Léon GUIBOURGÉ, Étampes, ville royale [réédition en fac-similé: 22 cm; 253 p.; broché; armoiries de la ville sur la couverture; préface d’Henri Lemoine], Étampes, Péronnas, Éditions de la Tour Gile, 1997 [ISBN 2-87802-317-X].

    
Édition électronique: Bernard GINESTE [éd.], «Léon Guibourgé: Étampes ville royale (1957)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-20-guibourge1957etampesvilleroyale.html (33 pages web) 2004.


Toute critique ou contribution seront les bienvenues. Any criticism or contribution welcome.
Source: Léon Guibourgé, Étampes, ville royale, 1957, pp. 223-226. Saisie: Bernard Gineste, octobre 2004.
    
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