CORPUS HISTORIQUE ÉTAMPOIS
 
 
A. D.
La campagne de Saint-Arnoult.
Souvenir de la Révolution de 1830
Abeille d’Étampes, 1876
 
   
Notre-Dame d'Etampes en 1825
Saint-Basile d'Etampes dans les années 1830

     Récit par un Étampois, non identifié pour l’instant mais de bonne famille, de l’expédition de quelques centaines d’Étampois en direction de Rambouillet, où s’était réfugié Charles X après l’insurrection des Trois Glorieuses, le 2 août 1830.
B.G., octobre 2008
  
  Secteur concerné sur la carte de Cassini
D'Étampes à Saint-Arnoult, sur la carte de Cassini (édition de 1815)
 
A. D.
Abeille d’Étampes
LXV/42, pp. 1-2.
(samedi 14 octobre 1876)
La Campagne de Saint-Arnoult.
Souvenir de la Révolution de 1830.



     Il y a aujourd’hui plus de quarante-six ans, le 2 août 1830, à huit heures du matin, la ville d’Étampes était fort agitée: le bruit courait dans la ville que Charles X, détrôné les 27, 28 et 29 juillet (1), revenait de Rambouillet sur Paris avec les gardes du corps, la garde royale et les suisses (2); déjà la guerre civile était dans nos murs.
     (1) Il s’agit des trois journées d’insurrection parisienne appelées les Trois glorieuses.

     (2) Rumeur populaire, parmi d’autres, et sans fondement. Le 2 août, Charles X, retiré à Rambouillet, abdique, et convainc son fils d’abdiquer à sa suite. Il confie à son cousin le duc d’Orléans la tâche d’annoncer que son abdication se fait au profit de son petit-fils le duc de Bordeaux, faisant du duc d’Orléans le Régent. Le dit Louis-Philippe annonce aux Chambres réunies les abdications de Charles X et du dauphin, mais sans mentionner qu’elles ont été faites en faveur du duc de Bordeaux. Charles X se sépara de ses gardes du corps le 14, à Valognes, sur la route de Cherbourg et de l’exil.

     Un officier d’ordonnance du lieutenant général du royaume (3) était arrivé chez une personne notable de la ville (4), disant: «Je viens faire appel à votre patriotisme; employez votre influence pour que vos concitoyens marchent sur Rambouillet, afin d’empêcher le retour de Charles X.»


     (3) Le 30 juillet, en début d’après-midi, les députés ont adopté une proposition rédigée par Benjamin Constant qui «prie S.A.R. Mgr le duc d’Orléans de se rendre dans la capitale pour y exercer les fonctions de lieutenant général du royaume». Louis-Philippe accepte cette charge dès le lendemain 31 juillet.

     (4) L’auteur ne semble ici s’appuyer que sur une rumeur.

     Mon frère vint m’éveiller pour m’apprendre cette nouvelle.

     Vêtu d’un mauvais habit, coiffé d’un chapeau gris, armé d’un fusil de munition (5) et mes poches bourrées de cartouches, je courais vers la mairie: je rencontrai M. Mainfroy fils (6), place Notre-Dame; déjà on battait la générale (7) dans toute la ville, nous ajoutâmes à ce vacarme le bruit des cloches de Notre-Dame, nous nous mîmes à tirer les cordes comme deux fous. Bientôt survint le sonneur en chef Loiseau (8), fort effarouché d’entendre ces cloches résonner sans son concours et faire une musique qui manquait absolument d’harmonie.

     M. Vinache, médecin (9), nous rejoignit sur la place de l’Hôtel-de-Ville.
     (5) Ce n’est que dans sa 6e édition (1832-1835) que le Dictionnaire de l’Académie française ajoute à l’article “munition” le paragraphe suivant: «Fusil de munition, Fusil de gros calibre, qui est l’arme ordinaire des soldats d’infanterie, et auquel s’adapte une baïonnette».

     (6) Un Nicolas Mainfroy est échevin d’Étampes dès 1648. Maxime Legrand, dans une notice de 1909, range cette famile avec “tout ce que le pays comptait de vieilles familles”. Selon Marquis (Les Rues, p. 95), “c’est en 1825 que furent établis à Étampes les premiers moulins dits à l’anglaise (...) et le moulin Branleux d’en bas par M. Théodore Mainfroy.”

     (7) La générale, selon l’Encyclopédie, est “une marche particuliere ou une certaine maniere de battre le tambour, par laquelle on avertit les troupes de se tenir prêtes à marcher ou à combattre. (…) Ainsi faire battre la générale, c’est faire battre le tambour pour que tout le monde prenne les armes”.

     (8) Je n’ai rien trouvé à cette heure sur ce personnage.

     (9) A. Pillas a édité en 1911 (Archives municipales d’Étampes, AA 398),  “Le Pilote, chanson allégorique chantée au banquet de la Revue du mars 1831 à Étampes par M. Vinache” (32 vers imprimés). Frédéric Gatineau (Étampes en lieux et places, 2003) signale par ailleurs qu’au cimetière Notre-Dame ancien “la colonne torse du monument funéraire du docteur Alexandre Thermidor Vinache (mort en 1836 à 41 ans) honore celui qui s’est dévoué pendant l’épidémie de choléra en 1832.”
     Trois à quatre cents individus étaient rassemblés sur cette place; les uns habillés en gardes nationaux (10), les autres vêtus en bourgeois (11), tous plus ou moins mal armés et équipés et tous criant bien fort. Quelle cohue, mon Dieu!
     (10) A partir de juillet 789, les milices bourgeoises ont été transformées en gardes nationales. Sur les gardes nationaux étampois (Étampes en Révolution, 1989, passim).

     (11) C’est-à-dire en civil, avec les habits caractéristiques de la classe bourgeoise. A Étampes les citoyens dits actifs, seuls capables d’appartenir à la garde nationale, étaient ceux dont la contribution directe dépassait 2 livres et 5 sols (ibid., p. 231) ; on voit qu’en août 1789 en sont exclus officiellement “les journaliers et les petits artisans” (ibid., p. 59).
     Qui commandait? Je n’en sais encore rien aujourd’hui. Était-ce Michel Boivin, le fils du maire (12), coiffé de son bonnet de grenadier (13); était-ce Raimbert Délivré (14), le chef orné de son ourson de chasseur (15), tous deux lieutenants de la garde nationale; était-ce un ancien militaire, beau-frère d’un nommé Pilfert (16), dont je ne me rappelle plus le nom, mais dont le rôle était bien changé, car en 1820 il commandait à la procession des missionnaires, lorsqu’elle fit le tour de la ville et s’écriait: Portez croix! — Reposez croix! (17)

     Enfin on se mit en route en chantant et en se promettant de faire des prouesses si on rencontrait les satellites du tyran. Quelle fanfaronnade! Un compagnie de quarante soldats nous eût mis en fuite après cinq minutes de combat.
     (12) Jean-Gilles Boivin-Chevallier, maire d’Étampes de 1826 à 1831 puis à nouveau de 1831 à 1834 (selon Wingler).

     (13) Colback, bonnet à poil dit aussi bonnet d’ourson, pièce d’uniforme caractéristique de cette unité.
 
    (14) Je n’ai rien trouvé pour l’heure sur ce Raimbert Délivré.

     (15) Les unités de chasseurs portaient aussi un colback, sorte de bonnet à poil en forme de cône tronqué renversé.

     (16) Le patronyme Pilfert ou Pillefert est attesté dans le secteur.

     (17) D’après des notes inédites de Frédéric Gatineau, elle aurait plutôt eu lieu en 1821, et “se conclut le 15 décembre par la plantation de la Sainte Croix portée par 100 hommes  au carrefour St Basile: elle mesurait 45 pieds de hauteur” (Archives municipales, FA 356-359).
Selon Madeleine Lassère, “La révolution de Juillet balaie les croix de mission orgueilleusement dressées sur les places de ville: destruction du Calvaire du Mont-Valérien, destruction des croix d’Auxerre, Provins, Beaune ou Reims, destruction d’ailleurs plus politique qu’antichrétienne. L’article de L’Ami de la Religion qui relate les faits à Reims est en cela particulièrement éclairant: les manifestants animés de la haine du jésuitisme, dénoncent avant tout la collusion entre la hiérarchie ecclésiastique et le parti ultra.” (Villes et cimetières en France de l’Ancien Régime à nos jours, Paris, L’Harmattan, 1997, pp. 169-170).
     En arrivant en face de Champ-Doux (18), le vieux Fontaine, perruquier de la rue de la Juiverie (19), ancien membre du Comité de Salut public en 1793 (20), fatigué déjà, disait d’un air comique: «Que le diable emporte le gouvernement provisoire!»
     (18) Aujourd’hui Champdoux, autrefois Chandou, ferme de la commune d’Étampes, à gauche sur la route de Dourdan.

     (19) Je n’ai rien trouvé pour l’instant sur ce Fontaine perruquier.


     (20) Selon Étampes-Histoire (Étampes en Révolution, p. 155), ce Comité est apparu à Étampes à partir de mai 1793, et il s’occupait surtout de la réquisition et du contrôle de l’économie de guerre.
     A hauteur de Boissy-le-Sec (21) , M. Desrosiers (22) nous apporta quelques paniers de vin qu’on but aux cris de: Vive la Charte! (23) Vive la Liberté!

     A la Forêt-le-Roy (24), on fit halte pour rafraîchir des gosiers que le patriotisme et la chaleur de 32 degrés avaient desséchés; halte encore aux Granges-Saint-Père (25), toujours à cause de la chaleur et du patriotisme.

     Là, Henry et Auguste Duverger (26) nous rejoignirent; ils étaient en cabriolet (27); je pris place près d’eux et nous gagnâmes les devants pour annoncer à Dourdan (28) l’arrivée du flot populaire.

     On passa deux heures à Dourdan; on mangea un peu et on but beaucoup, il faisait si chaud! Puis, bien qu’on eût appris que Charles X avait quitté Rambouillet (29), et qu’on pouvait retourner à Étampes, on persista à vouloir marcher contre l’ennemi: cela se conçoit, il avait disparu et il n’y avait plus de danger à courir.

     (21) C'est-à-dire au carrefour de la route de Boissy, voyez la carte de Cassini ci-dessus, et sutout ci-dessous.

     (22) Je n’ai rien trouvé pour l’instant sur ce Desrosiers.

     (23) Vive la Charte! C’était le cri de ralliement des insurgés de 1830. Il s’agissait de la charte constitutionnelle accordée par Louis XVIII le 4 juin 1814, qui faisait de sa royauté française une monarchie constitutionnelle, que mit à mal à la fin de son règne un Charles X nostalgique de la monarchie absolue de droit divin.


     (24) La Forêt-le-Roi, à 11 km d’Étampes sur la route de Dourdan.

     (25) Les Granges-le-Roi, à 15 km d’Étampes sur la route de Dourdan.

     (26) Léon Marquis (pp. 351-352) cite un Alexis-Jean-Henri Duverger, général de brigade, né à Étampes le 14 décembre 1755, mort le 14 janvier 1830. Un actemis en ligne par un généalogiste signale un Auguste Duverger domicilié à Étampes encore vivant le 11 août 1889, âgé de 70 ans, ancien vannier (témoin de la naissance de son petit-fils Albert, fils de son fils Auguste âgé de 35 ans (ce dernier employé du chemin de fer, domicilié 3 rue de l’Ile Maubelle). Agé en 1830 d’environ 11 ans il était peut-être le fils de notre homme. C’est à vérifier. Un Théodore-Adrien Duverger a été  officier de la garde nationale en 1790, puis vice-président du district d’Étampes, puis commissaire et répartiteur des impôts, puis en 1797 président de l’administration municipale jusqu’au 4 septembre (cf. Étampes-Histoire, Étampes en Révolution 1789-1799, Étampes, 1789, pp. 223-224). Auguste et Henry sont peut-être ses fils.

     (27) Un cabriolet est une voiture à cheval légère, à deux roues.

     (28) Dourdan, à 18 km d’Étampes.

     (29) Charles X en fait ne passa que la nuit du 2 au 3 à Dourdan. Citons ici Michel de Decker: “Et, au départ de Rambouillet, le roi sans couronne disposerait également d’une escorte de treize mille hommes, autant dire d’un cortège interminable qui n’allait pas passer inaperçu sur les chemins de l’Île-de-France et de la Normandie. Rambouillet-Cherbourg! Il ne faudra pas moins de 13 jours  à cette immense smalah royale pour effectuer le long trajet sur des routes détrempées, car l’été de 1830 est resté dans les annales comme ayant été un été pluvieux.” («La Marche funèbre de Charles X», ici, en ligne en 2008).

     En quittant Dourdan et aux portes de cette ville, nous rencontrâmes deux ou trois cavaliers, en tenue d’écurie (30), avec cinq ou six chevaux ayant seulement une couverture et un bridon (31); ces hommes se sauvaient et ne savaient où aller.
     (30) A titre indicatif, la cavalerie de la garde impériale disposait de dix tenues différentes: “tenue de campagne, tenue de route, tenue de charge, tenue de service, tenue de quartier, tenue d’écurie, tenue de société, tenue de ville, tenue de grande parade”.

     (31) Un bridon est selon Littré une bride très simple à mors articulé, dont on se sert au lieu de la bride ordinaire, pour les chevaux de tirage commun, pour les chevaux de course, pour ceux que l’on promène ou que l’on conduit à l’abreuvoir.

     Nous les fîmes descendre, on s’empara des chevaux, Michel Boivin et Raimbert Délivré, toujours coiffés de leurs bonnets à poil, malgré la chaleur caniculaire, en enfourchèrent chacun un, et nous eûmes deux commandants à cheval; une autre personne monta sur le troisième cheval et ramena les autres à Étampes. Ce fut la seule conquête des Étampois pendant cette campagne.
Bonnet à poil de grenadier
Bonnet de grenadier

     Dans la forêt nous rencontrâmes les patriotes de Dourdan qui, partis avant nous, revenaient sans avoir combattu; ils nous dirent que nous ne dépasserions pas Saint-Arnoult (32), Charles X ayant quitté Rambouillet.

     L’un d’eux, M. Godechèvre, percepteur à Dourdan (33), vêtu en garde national, fut bousculé par un garçon tanneur (34) qui était ivre; cet individu voyait en M. Godechèvre un garde royal, nous eûmes beaucoup de peine à l’arracher de ses mains.

     Quant à ce percepteur des contributions, agent du gouvernement déchu, il eût mieux fait de rester chez lui que de prendre les armes contre ce gouvernement qui le faisait vivre depuis vingt ans.

     (32) Saint-Arnoult-en-Yvelines, à plus de 8 km de Dourdan, et à 26 km d’Étampes.

     (33) Nous connaissons deux Godechèvre ou plutôt Codechèvre originaires de Dourdan. Le premier, Pierre-Augustin Codechèvre, marchand bonnetier et président du tribunal de commerce de Dourdan, né le 7 novembre 1746 et mort le 4 septembre 1831, fut brièvement maire de cette ville du 5 octobre 1793 au 4 janvier 1794 ; mais il avait 84 ans en 1830. Le second, Charles Félicien Codechèvre, finit ses jours cabaretier à Saint-Arnoult. Le Cercle généalogique de Saint-Arnoult-en-Yvelines a mis en ligne l’acte de décès de sa femme Michelle Chauveau, originaire de Ceton (Orne) et morte âgée de 50 ans le 4 novembre 1834, “femme Charles Félicien Godechevre”. Lui-même meurt le 3 février 1840 âgé de 78 ans, “cabaretier, de Dourdan, veuf de Marie Michelle Fauveau”: il devait être né vers 1762 et avoir 68 ans en 1830. («Table de décès de 1830 à 1834», ici, et «Table de décès de 1840 à 1844», ici, en ligne en 2008). Il doit donc s’agir encore d’un autre Codechèvre, percepteur en 1830.

     (34) La tannerie était à Étampes une activité importante, concentrée dans le secteur où se trouve la rue de la Tannerie. Le comportement de ce garçon tanneur aviné illustre clairement aux yeux de notre auteur, de meilleure naissance, la dangerosité des classes populaires dans les situations de crise.

     Enfin, nous arrivâmes à Saint-Arnoult, dont l’entrée était gardée par des soldats qui avaient passé du côté du peuple et qui nous empêchèrent d’aller plus loin.

     Un orage se préparait; je revins avec mes obligeants camarades, Henry et Auguste, jusqu’à Dourdan, et prévoyant du tapage de la part de quelques centaines d’individus, échauffés par de nombreuses libations (35), j’allai trouver M. Boivin, maire de Dourdan (36), et je lui fis part de mes craintes; il fit distribuer des vivres et nous prîmes des mesures pour diriger vers Étampes, après un certain temps, le flot des Étampois.


     (35) Une libation est dans l’antiquité l’action de répandre soit du vin ou un autre fluide tel que la farine en l’honneur d’une divinité. Littré qualifie de “familier” l’emploi imagé de ce mot au pluriel, pour désigner des “coups de vins”.
 
     (36) Il s’agit de Denis Aubin Boivin, notaire, né le 17 février 1767 à Authon-la-Plaine et mort à Dourdan le 23 mai 1843, maire de cette ville du 26 février 1826 au 9 juillet 1843.

     Je me chargeai de voir Michel Boivin à l’arrivée, et de l’engager à presser le départ.

     Vers sept heures, nos gens arrivèrent et j’allai trouver mon ami Michel. Il était à cheval, à la tête de sa colonne, sur la place, et je lui fis part de ce dont nous étions convenus. Il me répondit, avec cette politesse qu’on lui connaissait et que sa dignité de chef de bataillon aurait dû mitiger: «Tu m’embêtes!»

Carriture de l'embarquement de Charles X à Cherbourg
Caricature: Charles X embarque à Cherbourg
     Dans le même moment, je rencontrai Constantin Gresland (36) qui ne savait où dîner et coucher; un grand orage se préparait; sur ma demande, M. Leduc, quincaillier sur la place de Dourdan (38), nous offrit l’hospitalité et nous fit partager son dîner.

     Le lendemain au matin, après avoir passé quelques heures dans les cafés, les cabaret et les maisons particulières, nos camarades se mirent en route, mais l’orage éclata et ils furent trempés dedans, dehors, dessus et dessous.

     (37) Constantin Gresland. Sur la famille Gresland, il faut noter avec Frédéric Gatineau (Étampes en lieux et places, 2003), la présence au Cimetière de Notre-Dame ancien de la sépulture de cette famille Gresland, qui a tenu le moulin de la Pirouette; la première sépulture conservée date de 1853. Léon Marquis (Les Rues, p. 81) note par ailleurs qu’un Auguste-Édouard Gresland fut adjoint du maire Théodore-Alexis Charpentier, avec lui nommé le 7 février 1850, et avec lui révoqué en novembre 1851. Mais la destinée particulière de Constantin Gresland est intéressante en elle-même. En 1852 il racheta une filature de coton à Maromme (Seine-Maritime) et la reconvertit en corderie de mèches à bougies, en ajoutant une machine à vapeur aux deux roues hydrauliques existantes (selon la Base Mérimée). En 1866, il construisit de plus en pleine campagne, à Notre-Dame-de-Bondeville (Seine-Maritime) une nouvelle filature spécialisée dans la fabrication de mèches à bougie, surnommée “l’usine des champs”, qui a survécu jusqu’en 1997 (Base Mérimée), date à laquelle mon frère Laurent y a acheté un superbe bobinoir.

     (38) Je n’ai rien trouvé pour l’instant sur ce Leduc, quincaillier à Dourdan.

     Nous envoyâmes chercher des chevaux et une voiture de poste (39), et Constantin Gresland et moi arrivâmes à Étampes après les autres, sans doute, mais heureux d’avoir trouvé asile à Dourdan.
     (39) Une voiture de poste, une diligence, ancêtre de nos autocar, voire de nos taxis.


     Hélas! nous pouvions dire comme Dubois à Danville, dans l’École des vieillards (40):
     Nous avons fait, Monsieur, une belle campagne!

     En arrivant à Étampes, je voulus décharger mon fusil, mais la lumière (41) était bouchée, l’amorce seulement prit feu trois ou quatre fois de suite, et le fusil ne partit point.

     Quel beau combattant j’aurais fait!

     Mon fusil ne voulant point partir me prouvait qu’il était moins bête que moi et que j’aurais dû faire comme lui.
     (40) L’Ecole des vieillards est une comédie en cinq actes du poète Casimir Delavigne (1793-1843), représentée le 6 décembre 1823 par les comédiens ordinaires du roi, qui connut un grand succès populaire et valut à son auteur une place à l’Académie française en 1825. Esprit indépendant, il avait refusé une pension offerte par Charles X, ainsi que la Légion d’honneur, et il composa en 1830 un hymne à la gloire des victimes des Trois Glorieuses et en faveur de Louis-Philippe.
     Le vers cité ici est le tout premier de l’acte V; mais c’est en réalité Valentin, domestique de Danville, qui prononce cette réplique, il n’y a pas de personnage appelé Dubois dans cette pièce, à moins qu’il ne s’agisse du nom de l’acteur qui interprétait ce personnage le jour où l’auteur l’a vu jouer.

     (41) La lumière d’un canon ou d’un fusil était le petit trou par lequel où mettait le feu à la poudre.
     A. D.
     29 Septembre, jour de la saint Michel (42).

     (42) On ne sait pas pourquoi la date du saint est mentionnée; on notera cependant que qu’il existe à Étampes depuis le XIIe siècle une foire Saint-Michel, à l’occasion de laquelle peut-être ce témoignage aura été donné, pour une raison indéterminée.
   

Toute correction, critique ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
Sources: l’Abeille d’Étampes du 14 octobre 1876, texte saisi et annoté par Bernard Gineste, octobre 2008.
   
BIBLIOGRAPHIE PROVISOIRE
      
Édition

     A. D., «La campagne de Saint-Arnoult. Souvenir de la Révolution de 1830», in L’Abeille d’Étampes 65/42 (samedi 14 octobre 1876), pp. 1-2.

     Bernard GINESTE [éd.], «A. D.: La campagne de Saint-Arnoult. Souvenir de la Révolution de 1830 (1876)», in Corpus Étampois, http://www.corpusetampois.com/che-19-18300802abeille1876.html, 2008.


La Forêt-le-Roi sur la Carte de Cassini de 1756
Carte de Cassini (édition de 1815)



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