Jean Acarie, huissier du Parlement
de Paris
Rapport sur sa mission
à Orléans via Étampes
avril 1562
Proces-Verbal fait par l’Huissier envoyé par le Parlement de
Paris, an Prince de Condé, pour luy porter la Réponse de cette
Cour, à la première Lettre qu’il luy avait écrite*.
|
*
Titre donné par le premier éditeur,
Secousse, avec ces références: “Reg. du Conseil du Parlement
de Paris, cotté VI.XX.XV. fol. 158.r°. 159v° &160.r°.
Voy. Cy-dessus p. 279 l’Arrêt du Parlement de Paris, du 14. d’Avril”.
|
CEDICT jour*, la Court, Grand’Chambre, du Conseil
& Tournele Assemblées, ayant commandé à Jehan Acarie
Huissier en icelle Court, cy-devant envoyé porter quelque Pacquet
à Orléans, à Messire Loys de Bourbon Prince de Condé*, faire son
Procès Verbal de diligence par luy faictes, l’a faict & signé,
tel qu’il s’en suict.
|
*
Du 28. d’Avril [1562] (note de Secousse).
* Louis Ier de Bourbon-Condé (1530-1569) alors général
en chef de l’armée protestante (B.G.).
|
L’an mil cinq cens soixante-deux, le Mardy vingt-uniesme jour d’Avril, après
Pasques, suivant l’Ordonnance & Injonction Verballe faicte de Nosseigneurs
de la Court de Parlement scéant en la Grande-Chambre de ladicte Court,
à moy Jehan Acarie Huissier d’icelle, pour la part du Pacquet de
ladicte Court, à Monseigneur le Prince de Condé estant en
la Ville d’Orléans; ledict jour acompaigné de Michel Hucher
Huissier en la Court des Aydes, suis parti en Poste de la Ville de Paris,
garny d’un Brevet de Passeport, signé, Dumas Controlleur Général
des Postes, portant Addresse & Mandement aux Postes puis* la Court jusques à Orléans ne faire
faulte de me bailler trois Chevaulx, [p.336] pour aller pour les affaires du Roy** audict Orléans;
|
*
depuis (note de Secousse)
**
Le roi Charles IX a douze ans. C’est alors
sa mère Catherine de Médicis qui tente de défendre les
intérêts de la royauté (B.G.).
|
lequel Brevet, arrivant à Estampes, j’ay présenté à
Symon-le-Long* Poste dudict lieu, affin de me
fournir Chevaulx, suivant ledict Mandement; ce qu’il m’a resfusé, sinon
que premièrement je luy eusse fourny de Mandement ou permission de
Mons.r De Monstreul**, lequel il
ma dict estre Lieutenant pour le Roy audict Estampes, & qu’il luy estoit
commandé de par ledit Sr. Monstreul, de faire parler à luy
tous Courriers passans;
au moyen dequoy, me suis en la compaignée
transporté par devers ledict Sr. Monstreul, auquel j’ay monstré
le Brevet cy-dessus, & icelluy supplié commander audict Poste,
me fournir promptement Chevaulx; àquoy il m’a dict qu’il avoit charge
expresse du Roy, laquelle du jourd’huy luy avoit esté réytérée,
de ne laisser passer aulcun, si ne luy monstroit Mandement exprès
du Roy, & qu’il failloit qu’il sceust ma Charge, & veist mon Pacquet:
|
*
Ces bizarres traits d’union sont certainement
le fait du premier éditeur. Simon Lelong est cité dans ces
fonctions lors de la rédaction de la Coutume d’Étampes
en 1556: “Simon le Long, chevaucheur tenant la poste pour le Roy à
Estampes. Henri le Long aussi chevaucheur d’escurie” (Coustumes des bailliage
et prevosté d’Estampes, Paris, Jean
Dallier, 1557, p. 40) (B.G.).
** Successeur
mal connu et successeur sans doute éphémère de Jean
Cassegrain, qui était passé au protestantisme et sera condamné
à mort pour trahison le 25 vovembre 1562 par le Parlemennt de Paris,
par contumace semble-t-il (Mémoires de Condé, 1743,
tome 4, p. 122).
|
luy ay remonstré que mon Pacquet estoit de ladicte Court, addressant
audict Seigneur Prince, scellé du Scel d’icelle Court, & soubzscript
de Monsieur Du Tillet* Greffier d’icelle; &
que ayant le Brevet de Passeport à luy cy-dessus exhibé, il
n’avoit que veoir ne** congnoistre
sur ledict Pacquet, ne** ce qui estoit
des affaires d’entre ledict Sr. Prince & ladicte Court; le suppliant
de ne riens entreprandre sur ladicte Court, & de se déporter
de congnoistre plus avant du contenu ou dict Pacquet, pour éviter
que le sécret de la Court ne soit divulgué, & au mescontantement
qui pourroit advenir, tant de la part de ladicte Court, que du dict Seigneur
Prince, s’il en faisoit ouverture:
|
* Jean du Tillet, sieur de La Bussière, greffier du
parlement de Paris de 1521 à sa mort en 1570, juriste et historien
français (B.G.).
* ni (B.G.)
|
à quoy il a dict que ladicte charge luy estoit expresse &
commandée du Roy; & sur ce, a ouvert ledict Pacquet, & d’icelluy
faict lecture, puis me la rendu, & commandé audict Poste me fornir
Chevaulx; ce que ayant faict, ay continué chemin;
|
|
& le lendemain vingt-deux.me dudict moys, huict heures du matin,
présenté ledict Pacquet avecques les recommendations de la
Compaignie, selon qu’il m’estoit commandé,
audict Seigneur Prince, trouvé en ladicte Ville d’Orléans;
& sur la cause de l’ouverture de mon Pacquet par luy demandée,
*que ledict Sieur De Montreul avoit
ce fait audit Estampes, nonobstant mes Rémonstrances; dont ledict
Seigneur Prince me commanda faire Procès verbal , & en advertir
ladite Court.
|
*
app. lui ay dit (note de Secousse).
|
Depuis ayant ledict Seigneur faict lecture de la Lectre estant audict Pacquet,
sur ma supplicacion de donner Responce ou descharge [p.337] de ladite réception, ou
s’il luy plaisoit, me dire que eusse à retourner, m’adict qu’il vouloit
faire Responce à ladicte Court, & que ladicte Court avoit délibéré
sur ce qui luy estoit escript, & qu’il y vouloit penser de sa part,
me commandant retourner vers luy le lendemain matin:
|
|
ce que voulant faire entendre à ladicte Court, me suis transporté
par devers Jehan le Roy manyant la Poste* soubz Philippes Levesque
chevaulcheur, son beau-pere, pour luy bailler Lectres, & les faire tenir
en dilligence à ladicte Court; à quoy il m’a dict, comme aussi
a faict la femme dudict Levesque, qu’il n’y avoit plus de Poste assise audict
Orléans, & qu’elle estoit à Sainct Pere-Avy, sur le chemin
de Chateaudun; & ne se vouldroient charger de faire tenir aucun Pacquet
pour les réferches*, arrestz & ouvertures
qui se font de tous Pacquetz;
|
*
chargé du soin de la Poste (note de Secousse).
* recherches (note
de Secousse).
|
& le Jeudy vingt-troisiesme en suivant, me suis retiré
par devers ledict Seigneur Prince & Monsieur l’Admiral*, & Sieur
D’Andelot**, & iceulx
sollicitez & suppliez de ladicte Responce, descharge ou congé;
leur rémonstrant que la Court vacquoit Samedy prochain à cause
de la Feste Sainct Marc***, & que pour le debvoir,
il me failloit estre à Paris demain matin huict heures, sur peine
d’estre blasmé;
lequel Seigneur Prince
m’a dict qu’il ne me pouvoir expédier que dedans huy pour tout le
jour, & que demain matin, il me bailleroit fa Responce, & voulloit
qu’elle feust par moy portée à ladicte Court, laquelle il
advertiroit de mon séjour;
& ledict jour de lendemain
vingt-quatreiesme jour dudict moys, me suis addressé audict Seigneur
Prince lequel m’a dict avoir faict dresser sa Responce, & que dedans
ce jour il me la feroit délivrer par Houllier fon Sécrétaire;
& peu après, me suis retiré par devers ledict Sécrétaire
Houllier, lequel m’a dict qu’il dressoit sadicte Responce, & eusse à
me trouver au Logis dudict Seigneur Prince, à l’heure de troys heures,
pour luy faire signer;
à laquelle
heure, me suis transporté audict Logis où il m’a esté
dict par ledict Sécretaire, qu’il falloit attendre le retour de Mons.r
l’Admiral, lequel estoit allé disner à deux lieues d’Orléans,
au lieu de l’Isle, & qu’il seroit au soupper dudict Seigneur Prince,
& que je me y trouvasse à sept heures;
ce que j’ay faict, &
y ayant attendu jusques à heures de dix à unze heures du soir,
m’a esté dict par lesdidz Seigneur Prince & Admiral, qu’ilz me
expédiroient le lendemain matin; & ledict lendemain vingt-cinquiesme,
me fuis aussi addresé ausdictz Seigneurs [p.338]
Prince & Admiral, estans au Conseil, & iceulx suppliez de ma dicte
expédition, descharge ou congé, & bailler hommes pour me
faire sortir hors ladicte Ville;
|
*
Gaspard II, comte de Coligny, dit Monsieur l’Amiral
(1519-1572) (B.G.).
** François de Coligny d’Andelot (1521-1569), frère
cadet de l’Amiral (B.G.).
*** Saint Marc est le saint patron
des notaires (B.G.).
Louis Ier de Bourbon Condé ()
|
à quoy ledict Seigneur Prince m’a dict qu’il falloit que demourasse
jusques à la rellevée* dudict
jour, & qu’il me feroit bailler ma Responce, & ung sien Gentilhomme
pour me conduire hors icelle Ville;
|
*
après-disner (note de Secousse)
|
& ledict jour de rellevée, me suis suivant ce que dessus, retiré
par devers ledict Seigneur Prince, lequel sur les six heures du soir, m’a
baillé sa Responce & Pacquet, & chargé icelluy présenter
à ladicte Court, avecques ses recommandations; & de ce faire, demandé
Recepicé, & promesse signée de ma main; ce que luy ay accordé
& icelluy Pacquet & recommandations présentez à
ladicte Court, le Lundy vingt-septiesme jour dudict moys d’Avril, environ
l’heure de sept heures du matin: tesmoin mon Seing manuel cy-mys, les an
& jour dessusdictz.
|
|
|
BIBLIOGRAPHIE PROVISOIRE
Éditions
Original: Registre du Conseil du Parlement de Paris, coté VI.XX.XV.
f°158r°, 159v° et 160r° [d’après SECOUSSE 1743].
Édition:
Denis François SECOUSSE, Mémoires de Condé, ou Recueil
pour servir à l’histoire de France, contenant ce qui s’est passé
de plus mémorable dans le Royaume, sous le règne de François
II et sous une partie de celui de Charles IX, où l’on trouvera des
preuves de l’Histoire de M. de Thou, augmentés d’un grand nombre
de pièces curieuses qui n’ont jamais été imprimées
[5 volumes in-4°; portraits gravés; plans (il existe un prospectus
de 1739)], Londres, C. Du Bosc et G. Darrés, 1743, tome 3, pp. .
Autre éditeur: Londres & Paris, Rollin fils, 1743.
Signalé: Léon MARQUIS, Les
Rues d’Étampes et ses monuments, Étampes, Brière,
1881, pp. 118-119:
“Au XVIe
siècle, nous voyons à la tête de la poste aux chevaux
d’Étampes Symon-le-Long. Le 21 avril 1562, l’huissier du parlement
de Paris, porteur d’un mandement pour réquisitionner des chevaux
de Paris à Orléans, se vit refuser trois chevaux par ledit
Symon, sous prétexte que ses papiers n’étaient pas tout à
fut en règle [Mémoires de Condé.]. [p.118] Ce
Simon-le-Long est indiqué dans le procès-verbal de la rédaction
de la coutume d’Etampes, le 20 septembre 1556: «Simon-le-Long, chevaucheur,
tenant la poste pour le Roy à Estampes, Henry-le-Long, aussi chevaucheur
d’écurie». [Coutume d’Étampes.].”
Réédition
numérique: Bernard GINESTE [éd.], «Jean Acarie, huissier
du Parlement de Paris: Rapport sur sa mission à Orléans via
Étampes (avril 1562)», in Corpus Étampois,
http://www.corpusetampois.com/che-16-1562acarie.html, 2010.
Sur
les différentes édition du recueil dit Mémoires de
Condé
Premières éditions
de Londres et Amsterdam: Mémoires de Condé, ou recueil
pour servir à l’histoire de France, contenant ce qui s’est passé
de plus mémorable dans ce royaume sous les règnes de François
II et Charles IX. Nouvelle édition [6 volumes in-12; il existe
un prospectus in-4° (Londres C. du Bosse & J. Nillor et Cie, 1739)],
Londres, C. Du Bosse, 1740; autre édition: Amsterdam, aux dépens
de la compagnie, 1740.
Deuxième édition de Londres:
Denis François SECOUSSE (1691-1754) [éd.] & Louis de CONDÉ
prince de BOURBON (1530-1569) [premier auteur], Mémoires de Condé,
ou Recueil pour servir à l’histoire de France, contenant ce qui s’est
passé de plus mémorable dans le Royaume, sous le règne
de François II et sous une partie de celui de Charles IX, où
l’on trouvera des preuves de l’Histoire de M. de Thou, augmentés
d’un grand nombre de pièces curieuses qui n’ont jamais été
imprimées [5 volumes in-4°; portraits gravés; plans
(il existe un prospectus de 1739)], Londres, C. Du Bosc et G. Darrés,
1743. Autre éditeur: Londres & Paris, Rollin fils, 1743.
Premier supplément de Lenglet: Nicolas
LENGLET DU FRESNOY (abbé, 1674-1755) [éd. et annotateur du
recueil], Mémoires de Condé, servant d’éclaircissement
et de preuves à l’histoire de M. de Thou. Tome sixième, ou
Supplément, qui contient la Légende du cardinal de Lorraine,
celle de Dom Claude de Guise et l’Apologie et procès de Jean Chastel,
et autres, avec des notes historiques, critiques et politiques [in-4°],
La Haye, P. de Hondt, 1743.
Ce tome 6 est souvent réunis aux cinq premiers
et paraît avoir été vendu avec eux par Rollin à
Paris.
Deuxième édition du supplément:
Nicolas LENGLET DU FRESNOY [éd.], Mémoires de Condé,
tome sixième. Nouvelle édition, augmentée non-seulement
de nouvelles remarques, mais encore des deux pièces suivantes: 1°
l’Anti-Cotton, où l’on prouve que les jésuites sont les auteurs
de l’assassinat de Henri IV; 2° l’assassinat du roi, ou maximes du Vieil
de la montagne Vaticane et de ses moines assassins, pratiquées en
la personne de Henri le Grand; accompagnées d’amples remarques historiques
et critiques [5 parties en 1 volume in-4°], Paris aux frais et dépens
de l’éditeur, 1745.
Sur le XVIe siècle étampois
Toute critique,
correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution
welcome.
|