À tire d’ailes
Étampes en 1924
Les peuples heureux n’ont pas d’histoire... Concluons-en
que, en 1924, malgré les apparences, les habitants de l’arrondissement d’Étampes ont été
parfaitement heureux, car leur histoire sera courte. Le chroniqueur de fin
d’année a beau feuilleter et refeuilleter son carnet de notes quotidiennes,
il n’y trouve que bien peu de ces faits saillants qui font date dans l’histoire
d’une cité.
Est-ce à dire que les bonnes volontés qui,
tout de suite après la guerre, essayèrent d’infuser un peu
de vie artistique dans nos centres agricoles et de créer un mouvement
commercial plus intense, se soient lassées? Nous ne le pensons pas;
nous croyons plutôt que les difficultés économiques
sont causes du ralentissement dans l’effort toujours nécessaire,
du manque d’enthousiasme sans quoi rien n’est possible, des restrictions
pécuniaires qui paralysent toutes les meilleures volontés.
Mais ces difficultés ne subsisteront sans doute
pas toujours et Étampes, qui verra très probablement, en
1925, sa ligne de voie ferrée électrifiée, ne voudra
pas marquer le pas, alors que toutes ses voisines sauront bénéficier
des bienfaits du Progrès...
Passons aux faits; domaine politique, d’abord: en janvier,
les délégués sénatoriaux vont à Versailles
et, après une lutte très chaude, envoient au Sénat
M. Cornudet. Le 11 mai, les citoyens vont aux urnes et manifestent, comme
dans toute la France, leur désir d’orienter la politique vers la gauche;
dans la presque totalité des communes, un groupe de communistes, plus
ou moins important, coopéra à l’élection de Marty comme
député de Seine-et-Oise.
Les élections municipales, pour toutes les communes,
et cantonales, pour Étampes et Milly, nous diront dans quatre mois
si les électeurs sont toujours dans les mêmes opinions.
Domaine économique: l’arrondissement reste foncièrement
agricole; quelques industries nouvelles se créent bien de ci, de
là, mais la vie économique garde sa prospérité,
son activité, grâce aux agriculteurs qui savent moderniser leur
outillage et profiter des avantages inhérents à l’emploi de
l’électricité. À signaler l’installation de l’électricité
à Milly, ville de progrès, toujours à la tête du
mouvement, et qui s’est vu honorer par le Gouvernement en la personne de
son maire, M. Aubry, promu chevalier de la Légion d’honneur.
Milly organisa en juin une admirable manifestation économique,
la Foire aux Plantes médicinales de Milly, qui fut un réel
succès.
Domaine judiciaire: nos gendarmes, toujours actifs; nos
agents et gardes champêtres, toujours vigilants, ont assuré
d’une façon parfaite l’ordre et la sécurité dans l’arrondissement;
quelques rixes, provoquées notamment par les nombreux ouvriers étrangers;
quelques querelles entre voisins; quelques farces de pochards alimentèrent
la rubrique locale; à signaler toutefois quelques graves accidents
d’automobiles, une explosion à la Fonderie Lory; enfin, trois plus
importantes affaires: deux pour mort d’homme, une pour mœurs, qui furent
jugées aux assises de Seine-et-Oise.
Domaine des fêtes: toutes nos Sociétés
locales organisèrent leurs manifestations habituelles, bals, concerts,
épreuves sportives; les «Enfants de Guinette», section
masculine, au concours de Clermont-Ferrand, section féminine, au
concours de Rennes; l’«Espérance», au concours de Dieppe,
ajoutèrent de nouveaux lauriers aux nombreux qu’ils possèdent;
notre Musique municipale donna de fréquents concerts, mais, en fin
d’année, elle subit une crise de direction — M. Condom ayant donné
sa démission — crise de direction qui parut un instant mettre son
existence même en péril.
Nos sapeurs-pompiers — à qui nous souhaitons pour
1925 la moto-pompe de leur rêve (il ne faut pas désespérer:
les habitants de Guinette ont bien fini par avoir leur poste d’eau) — nos
Associations amicales, nos Sociétés de Croix-Rouge, nos Patronages
donnèrent de nombreuses preuves de leur vitalité. La Société
d’horticulture organisa une exposition magnifique; enfin — et surtout —
un groupe d’artistes de la région nous donna, à l’occasion
de la Saint-Michel, une exposition d’œuvres d’art qui fut unanimement appréciée
par les connaisseurs.
Avec la grande Fête de la Mutualité de Milly,
la magnifique Fête des Fleurs d’Étampes, que Mlle Terminet
présida comme Duchesse, nous clôturerons la liste des fêtes
populaires.
Reste la grande et pieuse manifestation du Souvenir, l’inauguration
du Monument aux Morts de la Grande Guerre, qui valut à notre cité
l’honneur de recevoir en ses murs le général Nollet, ministre
de la Guerre, et le général Gouraud, gouverneur militaire
de Paris.
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L’année 1924 comptera parmi les plus grises de l'après-guerre.
Le temps fut maussade, comme le reste... La vie fut chère; les transactions
commerciales difficiles. On n’en travailla pas moins, avec l’espoir de voir
enfin le bout des difficultés... 1925 sera-t-elle une meilleure année?
Nous le souhaitons pour tous nos lecteurs, à qui le chroniqueur
dévoué adresse ses compliments et ses vœux.
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L’Abeille d’Étampes
114/1 (3 janvier 1925), p. 1 (article non signé).
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