Corpus Historique Étampois
 
Terrier
À tire d’ailes, Étampes en 1923
Abeille d’Étampes du 5 janvier 1924
     
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Logo de l’Abeille d’Étampes en 1924

     Au seuil de l’année 1924, l’un des frères Terrier que nous navons pu identifier avec certitude, soit Léon (1869-1937) ou Auguste (1873-1932), propose aux lecteurs de L’Abeille d’Étampes un bilan de l’année 1923 qui vient de s’écouler, pour ce qui concerne du moins Étampes et sa région. Cette synthèse de l’actualité locale, si subjective soit-elle, a naturellement une valeur irremplaçable pour l’histoire locale du XXe siècle étampois, et c’est pourquoi nous la mettons à la disposition de tous les historiens comme de tous les curieux de l’histoire du Sud-Essonne.
Bernard Gineste, 2018
  
 Terrier
À tire d’ailes, Étampes en 1923
Abeille d’Étampes du 5 janvier 1924
 

À tire d’ailes
Étampes en 1923



   Année d’activité, et, malgré les difficultés économiques, année prospère, heureuse... Dans chacune de nos petites cités, se sont constitués des groupements d’intellectuels, de commerçants, jeunes gens, qui ont, en dehors de toute idée politique ou confessionnelle, organisé des réunions artistiques, des fêtes sportives, des conférences, des expositions, des foires... Et il en est résulté un intéressant mouvement économique, intellectuel, touristique dont notre arrondissement et ses habitants ont largement bénéficié et bénéficieront encore.

   L’âme de ce mouvement est notre aimable sous-préfet, M. Moine. Qu’il nous pardonne de porter atteinte à sa modestie; mais comment ne pas dire qu’après avoir lancé l’an dernier ce mouvement, il a continué d’en être le grand animateur, se rendant à toutes les manifestations, à toutes les cérémonies, aplanissant toutes les difficultés par ses démarches en haut lieu, apportant ses encouragements, ses conseils et ses relations artistiques aux organisateurs... Nous sommes certain d’être l’interprète de tous en souhaitant garder longtemps M. Moine à la tête des services administratifs de l’arrondissement.

   Procédons par série: dans le domaine artistique, nous citerons les Ballets Suédois, les Chœurs Ukrainiens, le Gala musical des Mutilés, la Matinée-Concert des Dames françaises; et, plus modestes, mais souvent délicieuses, les soirées d’amateurs données par les Sociétés locales de Milly, de Maisse, et surtout de La Ferté-Alais, où chante, hiver comme été, la vaillante Cigale...

   Dans le domaine intellectuel, Étampes bénéficia de conférences ravissantes: Léo Claretie, Louis Madelin, Vincent d’Indy, Jean Périnard, Mme Jehan d’Ivray, Pierre de Nolhac, Jean Aubry, Tristan Bernard, charmèrent, chacun dans son genre bien personnel, des centaines d’auditeurs enthousiasmés.

   Dans le domaine sportif, il faut signaler le succès des coupes et challenge André Bloch et Bouilloux-Lafont, du Rallye-Aérien de Villesauvage, de la course à l’américaine d’Angerville, et de tous ces matches locaux, courses, lâchers de pigeons, qui amènent dans notre pittoresque arrondissement des milliers de Parisiens, amoureux de la nature, amis fidèles qui reviennent aux beaux jours et villégiaturent chez nous. L’été particulièrement beau de 1923, a valu à Étampes, à Méréville, à La Ferté-Alais, à Milly, de nombreux hôtes; une fois de plus, nous réclamons ce Syndicat d'initiative qui, par une heureuse et intelligente réclame, fera valoir le charme, sinon grandiose du moins fort reposant, de nos verdoyantes campagnes.

   Dans le domaine patriotique, — le moins favorisé des dieux, sans doute, car il connut, cette année encore, des averses torrentielles, — il faut citer l’inauguration des monuments aux morts de Morigny-Champigny et de d’Huison-Longueville, les fêtes du drapeau de Bouville, Boutigny, Morigny-Champigny. Le monument d’Étampes, retouché et complété, sera sans doute inauguré en 1924... Mieux vaut tard que Jamais... Ce qui n’empêche pas d’ailleurs nos Sociétés locales et notre Municipalité de le fleurir magnifiquement aux grands anniversaires.

   La plus importante des manifestations agricoles de l'année fut la foire des plantes médicinales de Milly; deux ministres et de nombreux savants l’honorèrent de leur présence; elle aura créé un important débouché aux cultivateurs- herboristes de la région qui ont compris tout l’intérêt que présente ce genre de culture.

   Dans le domaine public, si La Ferté-Alais baptisa ses cloches, Boutervilliers fêta ses eaux. Maisse déroula sa cavalcade, Étampes fit quelque chose de grandiose: elle reçut Paris, en la personne de sa Reine des Abeilles et de ses demoiselles d’honneur; et ce fut une princesse d’Étampes qui reçut la gracieuse Majesté et sa suite: la Fête des Fleurs 1923, donnée au bénéfice des Mutilés de l'arrondissement, fut un triomphe pour notre ville, pour son Union des Commerçants, pour son Comité des Fêtes et pour son premier magistrat, M. Marcel Bouilloux-Lafont, qui, à peine rentré du Brésil, accepta la présidence de cette fête et s’y donna avec un tel enthousiasme, une telle délicatesse, une telle générosité qu’on peut dire qu’il fut le principal artisan de son succès...

   Ne quittons pas le domaine des réjouissances sans parler de l’habituelle réussite de la Saint-Michel; des joyeuses fêtes de quartier et des beaux succès qu’obtinrent notre Musique municipale à Dives-sur-Mer, nos sapeurs-pompiers à Avranches, nos gymnastes à Rouen et à Laon, nos jeunes concitoyennes des Enfants de Guinette à Monte-Carlo.

   La vie industrielle, commerciale, agricole se ressentit fort heureusement de cette activité; s’il ne se créa pas de nouvelles industries, celles existant déjà l’an dernier triomphèrent des difficultés créées quotidiennement par l’Ad-mi-nis-tra-tion et l’Électricité, — l’une et l’autre multipliant leurs mauvais tours pour faire damner les pacifiques citoyens. La prospérité de nos régions agricoles n’en alla pas moins croissant et elle croîtra sans cesse, surtout si l'électrification du réseau du P. O. est chose rapidement faite, comme on peut l’espérer en voyant la rapidité des travaux entrepris à proximité d’Étréchy.

   Nul ne chôma dans la région, pas même les cambrioleurs; l’année 1923 fut en effet illustrée par quelques audacieux cambriolages, accomplis en pleine ville; nos gendarmes se multiplièrent, ainsi que nos agents dont le chef, le regretté M. Alfred Cayen, commissaire de police, usa ses forces dans l’accomplissement de sa tâche. Il fut remplacé par M. Brossier, l’actif commissaire d’Ablis.

   Nos gendarmes ruraux eurent à enquêter sur les coutumiers délits de chasse, querelles de voisins, vols de poules, etc. Ils le firent avec un dévouement qui, pour être obscur, n’en est pas moins utile, puisqu’il assure la tranquillité et la sécurité dans nos campagnes. À signaler, dans le domaine judiciaire, la tragédie de Valpuiseaux qui fit deux victimes, l’assassin s’étant fait justice.

   Quand nous aurons fait mention du récent déraillement, il ne nous restera plus à pénétrer que dans un seul domaine: celui de la politique: les électeurs de l’arrondissement ont eu à voter pour remplacer deux députés décédés: MM. Messier et Georges Aimond; la grande majorité a porté ses suffrages sur MM. Franklin-Bouillon et Goust, candidats de l’Union des gauches, qui battirent les deux candidats du Bloc national, MM. André et Fillios. Les électeurs du canton d’Étampes, ayant à remplacer M. Lory, conseiller d’arrondissement, décédé presque subitement, donnèrent leur confiance à l’un des plus sympathiques enfants d’Étampes, M. Marcel Duclos. Enfin, les conseillers municipaux désignèrent les délégués qui auront à choisir, demain, un remplaçant à M. Poirson, sénateur, décédé.

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   Année de beau soleil, de belle récolte et pourtant de pain cher... Il n’y eut cependant pas de miséreux; les quelques petites infortunes furent toujours soulagées par les admirables Sociétés de Secours mutuels et de Croix-Rouge de notre ville.

   Comment, dès lors, ne pas souhaiter que 1924 ne soit tout bonnement que le prolongement de 1923? Avec quelques améliorations, bien entendu, sur le prix des œufs et du pot-au-feu, l’odeur du gaz et la puissance de l’électricité, la perception des impôts et la création des bains- douches, etc., etc.

   Souhaits plus difficilement réalisables, sans doute, que ceux de bonheur et de prospérité que forme, pour chacun de ses ami lecteurs, au seuil de cette année nouvelle, leur chroniqueur dévoué.
L’Abeille d’Étampes 113/1 (5 janvier 1924), p. 1 (article non signé).


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SourceL’Abeille d’Étampes 113/1 (5 janvier 1924), p. 1 (saisie de Bernard Gineste, 2018).
BIBLIOGRAPHIE

Éditions

     Léon ou Auguste TERRIER, «À tire d’ailes, Étampes en 1923», in L’Abeille d’Étampes 113/1 (5 janvier 1924), p. 1.

     Bernard GINESTE [éd.], «Terrier: À tire d’ailes, Étampes en 1923
», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-20-terrier1924etampesen1923.html, 2018.


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