À tire d’ailes 
       Étampes en 1921 
                    
                                                                 
                                            
             
       Tout s’efface, au cours de cette année, devant les
 pieuses  cérémonies du Souvenir. Villes et villages ont vu
revenir ceux  de leurs enfants qui, tombés sur les champs de bataille,
avaient pu  être identifiés et inhumés par les soins
de l’autorité  militaire. Et ce furent partout des foules recueillies
qui, ayant à  leur tête les premiers représentants de
la cité, accompagnèrent,  des gares aux cimetières,
les cercueils recouverts des drapeaux tricolores  et les parents inconsolés
des sublimes héros.  
                  
        Nombreux aussi furent les villes et les villages qui eurent 
  la satisfaction de pouvoir dresser, sur leur plus belle place, grâce 
  à la générosité de leurs habitants, le Monument 
  commémoratif élevé à la mémoire des morts
  de la guerre. Plus ou moins importants, tous ces monuments étaient 
  rendus d’une égale valeur symbolique par la liste des noms qui, gravés
  dans la pierre, resteront impérissables. Inaugurations à
Gironville,   Cerny, Bouville, Ballancourt, Saint-Cyr-la-Rivière, Fontaine-la-Rivière,
  Boissy-la-Rivière, Puiselet-le-Marais, Auvers-Saint-Georges, Chalou-Moulineux,
  Moigny, Boutigny, Soisy-sur-École, Etréchy, Bouray, Pussay,
  Maisse, Janville-sur-Juine, Videlles, Courances, Dannemois, Méréville,
  Angerville, Milly, inaugurations patriotiques, solennelles, auxquelles
prirent   part, dans un beau mouvement d’union sacrée, toute la population,
 groupée autour des ministres, sénateurs, députés,
 sous-préfet, représentant le gouvernement.              
                  
        En ce qui concerne Étampes, le Conseil municipal 
arrêta   définitivement son choix sur un imposant monument dont 
le sculpteur,   M. Benneteau, est prix de Rome.  
                  
        Ces cérémonies revêtirent un éclat 
  tel qu'elles éclipsèrent forcément les autres fêtes 
  locales. Toutefois, les sociétés, les municipalités 
 s’ingénièrent et parvinrent à organiser des concerts, 
 bals, foires très réussis et très goûtés: 
 citons entre autres la fête des Eaux et le concours de pompes à 
 Etréchy; la fête du drapeau à Cerny; la fête des 
 Mutilés, la Fête des Fleurs du quartier Saint-Gilles, avec une
 reine, Mlle Champy; le bal travesti de la Musique municipale; enfin la Saint-Michel,
 particulièrement brillante grâce à une organisation
parfaite  et un grand concours de forains.              
                  
                 
         Les sportsmen ne se contentèrent
  pas de faire des prouesses sur les stands et les terrains de jeux; ils
se   produisirent fréquemment en public et nous offrirent l’occasion
d’admirer   leur performance, leurs jarrets et leurs biceps dans le challenge
Bloch,  la course cycliste d’Angerville, les poses plastiques sur les places
publiques   à l’occasion des fêtes de quartiers, la matinée
des Enfants  de Guinette, les concerts et les concours où ils recueillirent
de superbes palmes. Le grand event de l’année sportive fut la Coupe
aéronautique  Deutsch de la Meurthe, courue à Villesauvage
et malheureusement endeuillée  par la mort du vaillant pilote de Romanet. 
                  
        Les artistes de tous ordres se livrèrent eux aussi 
 à  d’heureuses manifestations: belles auditions musicales de l’orchestre 
 Schvartz;  divertissantes soirées récréatives à 
 Milly, La  Ferté, Méréville, organisées par des
 amateurs  ayant l’étoffe de vrais artistes; intéressante exposition
 de  peinture de M. Thiriet au Collège; enfin importante exposition
 horticole  et agricole où nos jardiniers, maraîchers et fleuristes,
 montrèrent  qu’ils avaient autant de bon goût que de savoir
professionnel. 
                  
        Il n’est pas jusqu’à nos entrepreneurs de spectacles 
  qui ne firent un gros effort pour atteindre au beau; la tournée Baret
  ne nous donna que des chefs-d’œuvre et dans nos cinémas, l’Alhambra 
  — bel établissement moderne édifié sur le terrain de
  l’ancienne Congrégation — et le Casino, il ne fut projeté 
que  des films français et de grande valeur instructive, morale. 
                  
        Faut-il croire à une heureuse régénération 
  des mœurs? Ce bel élan des jeunes vers les sports et les arts ne 
peut  que donner de grands espoirs. Constatons déjà une réelle 
  diminution des crimes et délits; pas de faits sensationnels à 
  notre Parquet. Quelques cambrioleurs, quelques braconniers, trop encore 
de  mercantis, furent châtiés comme il fallait, par nos nouveaux 
  magistrats, MM. Fraigneau, président; Sée, procureur de la 
 République; Régnié, lieutenant de gendarmerie, assisté 
 de M Laduré, greffier. Un châtiment exemplaire fut infligé 
 aux pilleurs de gare..., bénéficiaires d’autre part de la loi
 d'amnistie. Reste à punir maintenant l’assassin Warin qui tua à
 Milly le père de famille Sauvé. 
                  
                 
         Si nos gendarmes ne furent pas
constamment   sur la route à la poursuite des bandits, ils furent
bien souvent appelés  à aider nos vaillants pompiers qui, eux,
furent souvent «à  la pompe». L’année sèche
de 1921 semble avoir battu les  records des incendies; à Étampes,
l'importante imprimerie La  Semeuse dut d’échapper à un désastre
complet grâce  au dévouement et à la célérité
de nos dévoués sapeurs et de son personnel. Quant aux bois
qui s’étendent de Maisse à Milly, c’est bien aux pompiers de
ces deux villes et des communes avoisinantes qu’ils doivent d’embellir encore
les riantes vallées de l’Ecole et de l’Essonnes. 
                  
        D'ailleurs, toutes nos sections furent récompensées 
  dans les concours de la région et M. Colrat, sous-secrétaire 
  d’État, président le Congrès annuel qui se tint à 
  Étampes, leur décerna des félicitations officielles. 
                  
        Faut-il croire la rumeur publique qui accuse des nombreux 
 incendies  de bois notre brave C. G. B.? Il est certain que des flancs de 
 ses locomotives  bien vieillottes s’échappent souventes fois des escarbilles
 enflammées?  Mais ne nous plaignons pas; les inconvénients 
de l’exploitation n’empêchent  pas le tramway départemental de
rendre de grands services et c’est  avec joie que furent saluées la
remise en service de la ligne Étampes-Arpajon  et l’ouverture de la
ligne Morigny-Bouville-La Ferté-Alais. Il ne reste qu’à souhaiter
une légère diminution des tarifs, vraiment excessifs. La question
a été posée à plusieurs reprises au Conseil général;
elle ne manquera pas d’y revenir.              
                  
        Puisque nous en sommes au Conseil général,
 nous  dirons que l’arrondissement
  a perdu, en août, un de ses plus respectés et écoutés
  représentants au sein de l’Assemblée départementale:
  M. Georges Dufour, mort subitement «sur la brèche»,
en   inaugurant le monument au Soldats morts de Fontaine et Saint-Cyr-la-Rivière. 
  Les électeurs du canton de Méréville lui donnèrent 
  comme remplaçant en octobre, M. Sarre, socialiste unifié, 
ancien  adjoint au maire de Monnerville.  
                  
        Deux autres élections au cours de l’année:
 celle  de M. Aubry, comme maire de Milly, en remplacement de M. Chagot,
démissionnaire,   et celle du Conseil municipal de Chalou-Moulineux,
également démissionnaire   et réélu en entier.
             
     Un gros travail, qu’eurent à faire, en avril, les la administrations 
  municipales tut celui du Recensement général. La population 
  de l’arrondissement qui atteignait, en 1911, le chiffre de 42.897 habitants, 
  s’est trouvée ramenée, en 1921, à 40.850, soit une 
diminution  de 2.047 habitants, au détriment plus principalement des 
villages. 
                  
                                                                 
                
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         Tels sont succinctement résumés
  les faits saillants de l’année écoulée. Peu de faits
  divers, mais beaucoup de travail dans toutes les branches de l’activité
  régionale: l’industrie a tenu bon malgré la crise et si quelques
  usines ont dû fermer, d’autres se sont créées: porcelainerie
  d’Étampes, vinaigrerie d’Étampes, atelier d’estampage de
Saint-Michel,   atelier mécanique du moulin Braban, agrandissement
de l’imprimerie   «La Semeuse», nombreux ateliers de bonneterie,
notamment à   Étréchy, qui se voit dotée, grâce
aux efforts  persévérants de sa municipalité, de l’électricité;
 à Méréville, signalons la laiterie Chariot et la fabrique
 de perles Jossard, etc.; dans la vallée de l’Essonnes, la création 
d’importantes tourbières. Le commerce a fait un gros effort pour satisfaire 
à toutes les demandes et, ayant conscience de remplir honnêtement
 sa mission, il a chargé son groupement, «l’Union des Commerçants»,
 de défendre ses intérêts devant des pouvoirs publics
trop souvent incompétents; les agriculteurs ont, eux aussi, marché
 dans la voie du progrès et nombreux sont ceux qui ont adhéré
 au Syndicat agricole d’électricité du canton de La Ferté-Alais
 et des communes limitrophes; enfin les sociétés de Secours
mutuels, de Croix-Rouge, de Prévoyance, d’Anciens Combattants, de
Vétérans, de Mutilés, ont, sous la direction de comités
dévoués, recruté de nouveaux membres et agrandi le cercle
de leurs bienfaits. 
                  
        Année point trop malheureuse, point trop stérile, 
  en résumé; et par les temps difficiles que traverse le Monde, 
  c’est une heureuse constatation. Aussi, pour terminer, le chroniqueur de 
 fin d’année souhaitera-t-il, une année 1922 au moins aussi 
bonne que l’année expirée et à chacun de ses aimables 
lecteurs, à chacune de ses charmantes lectrices, le maximum de bonheur 
et de joie. 
                    
                    
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                     L’Abeille d’Étampes 111/1 (7 janvier 1922), p. 1
   (article non signé). 
                   
                   
                   
                   
      Logo de l’Abeille d’Étampes en 1921 
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