Abeille d’Étampes
Le pillage de l’église de Lardy
N° du 10 avril 1920
Le Pillage de l’église
de Lardy
Il est des actes qui n’inspirent que le mépris:
celui qui a été commis dans la nuit du mercredi au jeudi de
la semaine sainte, en l’église de Lardy, est de ceux-là! Quoi,
en effet, de plus stupide, de plus grossier, de plus méprisable,
que d’exercer une rage sacrilège sur des objets, simplement parce
que ces objets ont un caractère religieux? Ah! le beau courage qu’ils
ont déployé, les vandales, en s’acharnant, dans une sécurité
qu’ils savaient être complète, sur des toiles peintes, sur
des statues, sur des vêtements, sur des livres!
Et s’ils n’avaient commis des dégâts s’élevant
à plusieurs milliers de francs, on serait tenté de demander
à la Justice d’ignorer des êtres aussi vils, aussi pleinement
stupides!
Ces gens-là — des ivrognes, s’ils ne sont des
sectaires, mais dans l’un ou l’autre cas, certainement des brutes! — ces
gens-là ont voulu, par un exploit qu’ils jugeaient brillant, faire
parler d’eux, se donner figure d’hommes d’action! Ils se sont lourdement
trompés. Aux yeux de tous les honnêtes gens, quelle que soit
l’opinion religieuse qu’ils professent, les pillards de l’église de
Lardy n’apparaîtront que comme de tristes individus, aussi sots que
méchants, mais aussi méprisables pour ceci que pour cela.
*
* *
Voici les faits:
Le 1er avril, à 6 heures 15, en entrant à
l’église pour sonner l’Angelus, M. Audry (A.), sacristain, constata
avec stupeur que, au cours de la nuit, des individus avaient pénétré
dans l’église et s’étaient livrés à de graves
déprédations: quatorze tableaux du « Chemin de Croix
», peints sur toile, avaient été lacérés
à l’aide d’un instrument tranchant et jetés pêle-mêle
sur les dalles; dans la sacristie, tous les ornements et objets sacerdotaux
gisaient, déchirés ou piétinés, sur le parquet,
dans le plus grand désordre; enfin, la corde de la cloche avait été
coupée à la hauteur d’un deuxième étage et les
troncs avaient été fracturés.
M. Audry s’empressa d’avertir M. le Maire et le garde
champêtre, tandis que le jeune Jaouen était dépêché
auprès de M. l’abbé Ollivier (A.), curé desservant
la paroisse de Lardy depuis le 20 juin 1918, mais habitant à Janville,
faute d’avoir trouvé un logement en sa paroisse.
M. Piollaine, maire de Lardy, puis M. l’abbé
Ollivier, se rendirent aussitôt à l’église et firent les
constatations suivantes: la grille du vitrail, placée à gauche,
au-dessus de la porte d’entrée du clocher, avait été
descellée et jetée à terre, au bas de cette porte ; les
malfaiteurs avaient essayé de rentrer dans l’église par cette
petite fenêtre; mais ils avaient dû y renoncer. Alors ils avalent
songé à fracturer une porte. Mais laquelle? Les passants pouvaient
les gêner s’ils choisissaient la grande porte, fermée à
clef, comme d’habitude, le soir, à 9 heures, par M. Audry; ils s’attaquèrent
plutôt à la petite porte du clocher, à peu près
certains de n’être pas dérangés, les maisons entourant
l’église étant inhabitées. A l’aide d’une pince, formant
levier, ils exercèrent sur cette porte une puissante pesée;
le plâtre, scellant la gâche, fut arraché et la porte
céda. Ayant fracturé ensuite très facilement la porte
intérieure donnant accès dans le bas-côté nord
du bâtiment, les malfaiteurs purent pénétrer sous les
voûtes de l’église et s’y livrer aux plus stupides actes de
vandalisme. Quatorze stations du «Chemin de Croix», belles toiles
peintes, mesurant 1 mètre sur 0 m. 30, furent lacérées
et jetées sur le sol; un candélabre, style Empire, haut de 1
mètre, en cristal et en cuivre, don de ducs ayant habité au
château d’Argentré; une girandole de l’autel principal, une petite
lampe de sanctuaire, furent brisés; le tabernacle de l’autel de la
Vierge fut fracturé; enfin la corde de la cloche fut coupée.
Les malfaiteurs pénétrèrent ensuite
dans la sacristie dont ils bouleversèrent tous les meubles; les plus
beaux ornements sacerdotaux, les vases sacrés, le linge, les livres,
les chandeliers, les tentures mortuaires, les torchères de cuivre,
les bougies, en un mot, tous les objets représentant une valeur quelconque
furent déchirés, froissés, brisés et piétinés
sur le parquet où ils s’amoncelèrent dans un lamentable chaos;
il n’est pas jusqu’aux hosties qui n’eurent à souffrir de la rage
imbécile des vandales; elles furent coupées, jetées
sur le sol; empressons-nous de dire qu’elles n’avaient pas été
bénites et que, ainsi, les brutes ne s’acharnèrent que sur
de la simple matière farineuse!
M. l’abbé Ollivier estima, à première
vue, le montant des dégâts à près de 10.000 francs.
Le vol n’est certainement pas le mobile de cette stupide mise au pillage
d’une église; en effet, les troncs furent bien fracturés, mais
ils avaient été vidés la veille par M. le Curé,
et les malfaiteurs n’en éprouvèrent pas de déception,
puisqu’ils n’emportèrent aucun autre objet, de vente assez facile
cependant.
M. l’abbé Ollivier ne croit pas qu’ils aient
agi par vengeance ou par animosité contre lui; il ne se connait pas
d’ennemis d’aussi sotte et sauvage mentalité.
Il faudrait plutôt rechercher les coupables parmi
les individus étrangers au pays. Le Parquet d’Étampes qui,
dès le jeudi après-midi, s’était transporté sur
les lieux, a ouvert une enquête qu’il entend mener rapidement et à
bien; des traces digitales ont été relevées sur divers
objets; nos distingués magistrats, M. François, procureur de
la République, et M. Frotté, juge d’instruction, parviendront
certainement à tirer parti de ces indices et à frapper sévèrement
les coupables.
Quelques renseignements, un peu vagues, malheureusement,
ont pu être recueillis par les gendarmes.
C’est le jeune Guisnet Maurice, garçon boulanger
chez M. Pierre, qui entendit, vers 1 h. 30, des pas d’hommes dans la rue.
Ces hommes causaient assez bruyamment, ce qui amena le jeune garçon
à dire à son patron, en plaisantant:
— Voilà les voleurs des Aubrais qui sont par
ici! C’est aussi Mme Courtin qui, vers 2 h. 15, entendit marcher plusieurs
hommes, sur le chemin. Par contre, en gare de Lardy, aucun étranger
à la localité n’a été vu descendant du train ou
le reprenant.
Les vandales habitent la région, sinon Lardy
même; nous espérons leur rapide arrestation pour qu’ils répondent
devant la justice d’un acte de sauvagerie que rien ne peut excuser et pour
que la condamnation dont ils seront frappés fasse réfléchir
ceux qui voudraient les imiter. |
|
Annexe.
Écho de ce fait divers dans la presse
nationale
Il peut
être intéressant comment à cette date se répercute
dans la presse nationale un fait divers survenu dans la pays étampois
ou sur ses franges (et notamment avec quel degré d’entropie, d’erreur ou d’approximation). On remarquera
particulièrement comment se fait jour et se propage une datation erronée
des faits, qui est finalement comme canonisée par une publication
savante de la même année.
B.G., 2016
|
01. Le Petit Journal
20896 (2 avril 1920), p. 3.
|
Dernière heure.
[...] L’église de Lardy cambriolée — Des malfaiteurs ont pénétré
par effraction dans l’église de Lardy, près d’Etampes, la nuit
de mercredi à jeudi où ils ont forcé le tabernacle, les
troncs et les armoires de la sacristie. Ils ont enlevé tous les objets
destinés au culte d’une certaine valeur et ont brisé tous les
autres. Le montant du vol est important, et le parquet d’Etampes fait rechercher
activement les auteurs de ce pillage et de ces actes de vandalisme.
|
02. La Croix
11359 (3 avril 1920), p. 4.
|
Faits divers — [...]
L’église de Lardy cambriolée. — Des malfaiteurs ont pénétré
par effraction, dans l’église de Lardy, près d’Etampes, où
ils ont forcé le tabernacle, les troncs et les armoires de la sacristie.
Ils ont enlevé tous les objets destinés au culte d’une certaine
valeur et ont brisé tous les autre. On recherche les auteurs de ces
actes de vandalisme.
|
03. La Presse
5289 (6 avril 1920), p. 4.
|
A travers la banlieue.
— [...] Etampes. — La gendarmerie d’Etampes recherche activement des individus
faisant partie de la bande des cambrioleurs d’églises qui ont pillé
l’église de Lardy, près d’Etampes. Après avoir fracturé
les porter d’entrée, ils se sont acharnés sur les tableaux du
chemin de la croix qu’ils ont lacérés, puis se sont rendus dans
la sacristie où ils ont brisé tous les meubles et leur contenu.
Ils se sont enfuis emportant un grand nombre de croix, de chandeliers, de
calices et divers objets de très grande valeur.
|
04. Le Rappel
18015 (6 avril 1920), p. 4
|
les pilleurs d’églises.
— La nuit dernière, des malfaiteurs ont cambriolé la petite
église de Lardy, près d’Etampes. Après avoir fracturé
les portes pour pénétrer dans l’église, les bandits se
sont livrés à plusieurs actes de vandalisme. De nombreux objets
de piété ont été dérobés. Bien
entendu, les troncs ont été brisés et leur contenu enlevé.
Les vandales ont encore lacéré plusieurs tableaux de valeur
et saccagé les meubles. Une enquête est ouverte par la gendarmerie
de Chamarande.
|
05. Le Matin
13167 (6 avril 1920), p. 2.
|
Les rats d’églises.
— Les pilleurs d’églises continuent à opérer dans le
département de Seine-et-Oise. L’autre nuit encore, ils se sont introduits
dans l’église de Lardy, arrondissement d’Etampes. Après avoir
fracturé les portes d’entrée ils ont dérobé un
grand nombre d’objets de, piété, défoncé les troncs
et lacéré tous tes tableaux du Chemin de la Croix. Ils ont
brisé dans la sacristie tous les objets qu’ils ne purent emporter.
|
06. L’Humanité
5858 (6 avril 1920), p. 2.
|
Départements.
— [...] Des cambrioleurs d’églises. — La gendarmerie d’Etampes recherche
activement des individus faisant partie de la bande de cambrioleurs d’églises
et qui, cette nuit, ont pillé l’église de Lardy près
d’Etampes. Après avoir fracturé les portes d’entrée,
ils se sont acharnés sur les tableaux du Chemin de Croix qu’ils ont
lacérés puis se sont rendus dans la sacristie où ils
ont brisé tous les meubles et leur contenu, ils se sont enfuis emportant.
un grand nombre de croix, de chandeliers, de calices et divers objets de
très grande valeur.
|
07. Le XIXe siècle
18015 (6 avril 1920), p. 4.
|
Faits divers. — les
pilleurs d’églises. — La nuit dernière, des malfaiteurs ont
cambriolé la petite église de Lardy, près d’Etampes.
Après avoir fracturé les portes pour pénétrer
dans l’église, les bandits se sont livrés à plusieurs
actes de vandalisme. De nombreux objets de piété ont été
dérobés. Bien entendu, les troncs ont été brisés
et leur contenu enlevé. Les vandales ont encore lacéré
plusieurs tableaux de valeur et saccagé les meubles.
|
08. Le Gaulois
45523 (6 avril 1920), p. 2.
|
Nouvelles enjeu de
mots. — Départements. — [...] L’église de Lardy (Seine-et-Oise)
a été pillée par des cambrioleurs et saccagée.
En effet, non contents de voler les objets du culte et de fracturer les troncs,
les bandits ont lacéré les tableaux.
|
09. Journal des
débats 96 (6 avril 1920), p. 3.
|
Faits divers — [...]
Une église au pillage. — Des malfaiteurs se sont introduits dans l’église
de Lardy, près d’Étampes, ont crevé les tableaux, défoncé
le tabernacle, renversé tes vases sacrés et brisé les
candélabres et les lampes. Ils ont déchiré les vêtements
sacerdotaux, les tentures mortuaires et les livres. Ils ont même coupé
les cordes des cloches. Les dégâts sont estimés à
dix mille francs.
|
10. Le Populaire
712 (7 avril 1920), p. 2.
|
Nouvelles de Province.
— [...] Les dévaliseurs d’églises — Versailles, 5 avril. — La
gendarmerie d’Etampes recherche activement des individus faisant partie de
la bande des cambrioleurs d’églises, et qui, cette nuit, ont pillé
l’église de Lardy, près d’Etampes. Après avoir fracturé
les portes d’entrée, ils se sont acharnés sur les tableaux du
Chemin de la Croix, qu’ils ont lacérés, puis se sont rendus
dans la sacristie, où ils ont brisé tous les meubles et leur
contenu. Ils se sont enfuis en emportant un grand nombre de croix, de chandeliers,
de calices et divers objets de très grande valeur.
|
11. Bulletin de
la Société de l’histoire de Paris et de l’Ile-de-France
47 (1920), p. 92.
|
Chronique de l’année
1920. — [...] 5 [sic] avril. [...] L’église de Lardy (Seine-et-Oise)
est pillée par des voleurs. [...] |
|