Oscar-Joseph Fanyau et Ernest-Isaac Bossard
Victoire sur la constipation à Châlo-Saint-Mars
témoignage publicitaire, 1893
Nous donnons ici un récit publicitaire, mais non pas imaginaire,
dû à un pharmacien lillois et relatif à des événements
survenu à Châlo-Saint-Mars au début de 1893.
Ce récit constitue pour son auteur un élément
de variation dans une série de textes analogues. Tous sont intitulés
Le sort de l’ange doré, avec la même introduction
et la même conclusion. Ils varient seulement par l’insertion d’un
témoignage à chaque fois différent, de manière
à constituer une sorte de feuilleton publicitaire dans tous les différents
journaux de province où ils furent publiés de 1894 à
1897 environ. Il semble qu’après cette dernière date Fanyau
a renouvellé son stock de témoignages, et que celui de la
belle-sœur d’Ernest Bossard disparaît alors, remplacé par
le récit de faits plus récents.
Nous mettons en deux Annexes quelques données
d’abord sur Ernest Bossard et sa famille, puis sur la vie et l’entreprise
d’Oscar Fanyau.
Bernard Gineste, juillet 2015
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LE SORT DE L’ANGE DORÉ
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Dans une grande et brillante procession religieuse à Rome on
remarquait un bel enfant représentant un ange. Son corps était
entièrement doré des pieds à la tête, et sous les
rayons du soleil il brillait comme une statue d’or. Deux jours plus tard il
rendait le dernier soupir. Quelle fut la cause d’une mort si subite? Les plus
savants médecins de l’époque — nous parlons d’il y a
trois cents ans — ne purent le deviner.
Actuellement même, nous ne connaissons pas mieux
la nature des anges que ne la connaissaient les vieux Romains, mais nous
en savons bien plus long sur la nature du corps humain. Etant donné
ce fait, tâchons de comprendre ce qui transforma ce petit enfant en
un ange véritable.
Sur notre table sont quelques lettres qui peuvent servira
éclaircir cette question. Dans ces lettres il s’agit d’un M. Bossart,
de Chalo St. Mars, par Etampes (Seine-et-Oise), âgé de trente-huit
ans. Il courait les risques de vie et de santé qui naissent d’une
grande activité et d’une initiative énergique dans les affaires.
Il était souvent obligé de faire de longues courses en voiture
qui occupaient toute sa journée.
De prime abord il semble que ce serait là une
garantie contre la maladie. Erreur profonde! intelligent comme vous l’êtes,
cher lecteur, vous ne tarderez pas à en comprendre la raison.
Au début de l’année dernière (1893),
M. Bossart remarqua que sa santé laissait à désirer,
il souffrait de maux d’estomac, et il s’aperçut qu’ils augmentaient
à la suite de chaque repas. Après un court laps de temps,
son appétit diminua et il mangea beaucoup moins qu’il n’en avait
l’habitude. Tout le monde pourrait prédire ce qui s’ensuivit. Il
maigrit beaucoup et perdit ses forces; il cessa d’être l’homme d’affaires
actif et énergique qu’il avait été auparavant.
Malgré les remèdes qu’il prenait, la
maladie de M. Bossart empirait. Au nombre des symptômes accompagnant
sa maladie se faisait remarquer une constipation continuelle. Or, comme
nous le savons tous, les intestins ont pour fonction d’emporter des matières
solides, des tissus usés ou des aliments non digérés
dont le corps n’a que faire. Quand l’action des intestins se dérange
ou s’affaiblit, toutes ces matières impures restent en fermentation
dans le corps. Le long tube intestinal se bouche, ainsi que parfois un tunnel
de chemin de fer est bouché lorsqu’un accident vient jeter deux trains
l’un sur l’autre dans ces longs et sombres passages. Des poisons se forment
alors et se répandent par la circulation dans le corps entier. Ces
poisons, agissant sur les nerfs, amènent de violents maux de tête
et d’autres désordres nerveux. M. Bossart en était atteint;
de plus il se plaignait de transpirer d’une manière excessive. Pendant
un mois, il dut cesser complètement ses courses d’affaires.
Heureusement Madame Denizet, sa belle-sœur, eut l’heureuse
idée d’essayer le remède fameux qu’on appelle Tisane américaine
des Shakers, importé d’Amérique par M.Oscar Fanyau, pharmacien
à Lille (Nord). C’est elle qui écrit à M. Fanyau pour
lui en dire les effets: «Votre merveilleuse Tisane a eu chez M. Bossart
l’effet auquel on s’attendait. Il a retrouvé son appétit et
ses forces, et a cessé de transpirer à l’excès: trois
flacons de Tisane lui ont rendu la santé. Nous vous sommes infiniment
reconnaissants et vous autorisons à publier ces faits. (Signé)
Veuve Denizet. Chalo St. Mars, par Etampes (Seine et Oise), le 17 juillet
1893.»
Un mot de plus seulement: le petit enfant doré
de la procession romaine mourut d’nne transpiration rentrée, amenée
par la dorure dont tout son corps était recouvert; et M. Bossart
souffrait de ce que ses intestins, ses reins et sa peau ne suffisaient pas
à chasser tous les poisons amenés par la dyspepsie ou indigestion
chronique. C’était là sa seule et véritable maladie.
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Pour recevoir gratis et affranchie une brochure illustrée contenant
tous les détails écrire à M. Fanyau, à Lille (Nord).
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Prix du flacon 4 fr. 50: ½ flacon, 3 fr. 00 Dépôt
— Dans les principales pharmacies, Dépôt Général
— Fanyau pharmacien, Lille, Nord (France).
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ANNEXE 1
Sur Ernest-Isaac Bossard
et Eugénie Juteau veuve Denizet
Signature de Bossard en 1890 lors de la naissance de
son fils Prosper
Ernest-Isaac Bossard est départ un sabotier qui vient s’installer
au lieu-dit Le Pressoir, au hameau de Chérel, commune de Châlo-Saint-Mars,
avec son épouse Eulalie Queudâne, chez sa cousine et belle-sœur Eugénie Juteau veuve Denizet,
mère de cinq jeunes enfants survivants.
En 1891 Bossard est toujours qualifié sabotier
tandis qu’Eugénie est rentière et chef de famille. Mais en
1896, Ernest est devenu chef de famille, il est qualifié beurrier,
et Eugénie beurrière. En 1901 il est devenu marchand de fromage,
tandis qu’Eugénie n’a plus que le titre de domestique.
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01. Acte de naissance de Prosper Bossard, fils
d’Ernest.
L’an mil huit cent quatre-vingt-dix, le lundi dix novembre, heure de
midi, par devant nous, Blot, Pierre Alfred, maire et officier de l’état
civil de la commune de Chalo-Saint-Mars canton et arrondissement d’Étampes,
département de Seine-et-Oise, a comparu le nommé Ernest Isaac
Bossard, sabotier, âgé de trente quatre ans, demeurant au hameau
de Chérel, commune de Chalo-Saint-Mars, lequel nous a présenté
un enfant du sexe masculin, qu’il nous a dit être né aujourd’hui,
à six heures du matin, en son domicile, de lui et de Eulalie Anastasie
Queudâne, sans profession, âgé de vingt-sept ans, son
épouse, avec laquelle il demeure, et auquel enfant il a donné
les prénoms de Prosper Louis. Les dites déclaration et présentation
ont été faites en présence de Louis Eugène Milochou,
maréchal, âgé de trente-trois ans, et de Louis Jules
Lartheau, maréchal, âgé de vingt-trois ans, tous deux
domiciliés en cette commune, et ont le déclarant et les témoins
signé avec nous le présent acte, après lecture faite.
– [Signé :] Bossard – Lartheau L. – Milochou – Blot.
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État-civil
de Châlo-Saint-Mars (saisie de B.G, 2015)
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02. La famille Denizet-Bossard lors du recensement
de Chalo-Saint-Mars de 1891
AD91 6M 64/1
03. La famille Denizet-Bossard lors du recensement de Chalo-Saint-Mars
de 1896
AD91 6M 64/2
04. La famille Denizet-Bossard lors du recensement
de Chalo-Saint-Mars de 1901
AD91 6M 65
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ANNEXE 2
Sur Oscar
Fanyau et sa tisane des Shakers
Oscar Joseph Fanyau né le 14 juillet 1847 à Roubaix,
et mort en détention à la citadelle
de Lille le 28 avril 1916, était pharmacien. Il s’était marié
au Cateau-Cambrésis le 14 janvier 1874 à Marie Josephine Bricout.
En 1883, pharmacien à Lille, il fit affaire
avec la très honorable secte américaine des Shakers, qui
produisait alors des produits médicinaux réputés.
Dès 1888 il se fit confier la distribution de leurs produits dans
toute la France mais aussi en Belgique, Hollande et Suisse, dans toute l’Europe
de l’Est ainsi que dans tout l’empire colonial français.
Il utilisa pour ce faire les techniques de marketing
les plus avancées de son temps: almanachs publicitaires, images chromo,
cartes postales publicitaires, simples réclames ou feuilletons publicitaires,
diffusant des idées simples et faisant miroiter des résultats
remarquables attestés par des témoignages marqués au
sceau du réalisme et de l’authenticité.
Il ne resta donc pas longtemps sans faire fortune.
En 1894 il acheta le château et le parc d’Hellemmes, commune voisine
de Lille dont il fut plus tard maire, de 1904 à 1912. En 1916, après
avoir vécu dans la cave de son château occupé par l’armée
allemande, il fut incarcéré par l’occupant avec le curé
pour avoir refusé, par pur patriotisme, de livrer à l’armée
allemande tout le cuivre dont il disposait. Il mourut en détention
à la citadelle de Lille le 28 avril 1916 à l’âge de
69 ans.
B.G., 2015
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Sources: Diverses
rééditions numériques en ligne du même texte invariable
dans plusieurs journaux de province de 1894 à 1897.
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BIBLIOGRAPHIE PROVISOIRE
Édition
1) Oscar FANYAU, «Le sort de l’ange doré», in Différents journaux anciens reproduisant le même
texte publicitaire, dont ceux-ci étaient déjà en ligne
en juillet 2015:
L’Express du Midi
4/1071 (12 décembre 1894), p. 3.
Le Petit Parisien 20/6711 (13 mars 1895),
p. 3.
L’Indicateur de la Savoie 17/880 (6
juin 1896), p. 4.
L’Écho de Vienne et de la région.
Journal politique, littéraire, d’annonces judiciaires et commerciale
2/25 (21 juin 1896), p. 3.
Journal de Vienne et de l’Isère
69/53 (3 juillet 1897), p. 2
Le Mémorial d’Aix 60/54 (8 juillet
1897), p. 3.
Le Moniteur viennois 105/5489-28 (9
juillet 1897), p. 3
Journal d’Annonay et de l’arrondissement
de Tournon 33/30 (10 juillet 1897), p. 3.
2) Bernard GINESTE [éd.],
«Oscar-Joseph Fanyau
et Ernest-Isaac Bossard: Victoire sur la constipation à Chalo-Saint-Mars
(1893)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/che-19-fanyau1893bossard.html,
2006.
Sur la tisane des Shakers
Stephen MILLER, «L’extrait de racines des Shakers», in Revue d’histoire
de la pharmacie 81/299 (1993), pp. 437-447
Toute correction, critique ou contribution sera
la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
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