André Duchesne
Généalogie de l’ancienne famille de Bouville
1622
AVERTISSEMENT. Nous donnons ici une saisie
de ce texte qui en respecte l’orthographe d’origine. On ne modernise que
la typographie, la casse et les graphies (on aére des paragraphes trop
compacts, on économise les majuscules, et on distingue le i du j comme
le u du v selon l’usage contemporain, c’est-à-dire en fonction
de la prononciation, et non pas de la place dans le mot). — B.G.
juillet 2014
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Il ne sera
pas hors de propos, de rapporter icy semblablement la généalogie
de l’ancienne famille de Bouville, tirée de deux anciens registres
domestiques, des arrests de la Cour, et de quelques Chartes de l’abbaye de
Villiers prés la Ferté-Alés.
Le plus ancien que je remarque avoir porté le
surnom de Bouville, est Jean seigneur de Bouville I. de ce nom, mentionné
entre ceux qui tenoient de la chastellenie d’Estampes au temps des roys Philippe
Auguste et sainct Louys. Il laissa deux fils, à sçavoir Hugues
de Bouville qui suit, et Jean de Bouville chevalier pere de Jeannot de
Bouville seigneur de Gravelle, et de Guillaume de Bouville chanoine
en l’Eglise de Rheims.
Hugues de Bouville I. du nom, chevalier, seigneur
de Bouville et de Farcheville, eut pareillement deux fils nommez Hugues et
Jean de Bouville. Hugues aisné continua la lignée.
Et Jean son frère, valet du roy Philippes
le Bel, fut marié à une dame appellée Agnes, de laquelle
il ne procréa point d’enfans.
Hugues de Bouville II. du nom, premièrement
seigneur de Bouville et de Farcheville, puis aussi de Milly en Gastinois,
de Boisses, de la Chapelle la Royne, de Balleu, et autres lieux, tant par
acquisitions faites de diverses personnes, que par eschanges, ou récompenses
de services, tint un grand ranc à la cour du roy Philippes le Bel*. Car il fut l’un de ses chevaliers et chambellans,
et employé par luy en de grandes affaires. Albert roy des Romains
l’honora semblablement de son ordre de chevalerie, par lettres expédiées
au mois de décembre l’an mil deux cents quatre-vingts dix-neuf. Et
depuis il s’acquist encore ceste gloire, que de mourir aux pieds du roy Philippes
son maistre, en combatant généreusement pour la défense
de son Estat à la bataille de Mont [p.467]
en Peulle contre les Flamens l’an mil trois cents quatre. Ce fut luy qui
fist construire la maison de Farcheville, telle qu’on la void aujourd’huy
à deux petites lieuës d’Estampes, y fonda une chapelle, et par
son testament passé le lundy apres la sainct Barthélemy apostre
l’an mil trois cents deux, ordonna de plus cent livres de rente pour en fonder
quatre autres à l’honneur de Monsieur sainct Louys Roy de France,
en l’eglise de Nostre Dame de Milly.
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BOUVILLE
Bouville.
D’argent à une fasse de gueulles chargée de trois annelets
d’or.
* La Chronique ms.de Nangis,
les gr. Annal. de Fr. en la vie du roy Philippes de Bel, et les Chron. de
Fl. qui le surnomment mal de Bournonville.
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Dés
l’an mil deux cents quatre-vingts deux il avoit espousé Marie de Chambly
fille d’Oudart de Chambly chevalier, seigneur de Gandelus, et chastelain
de Mante, et de Marie sa femme. Duquel mariage sortirent plusieurs fils et
filles, sçavoir est Jean, Hugues, Oudart, Jean, Guiot, Jeanne, Lorette,
Ysabeau, et Marguerite de Bouville. Des deux premiers sera parlé cy-apres.
Oudart de Bouville troisiesme fils deceda en jeunesse.
Le quatriesme Jean de Bouville, dit de Navarre,
pour ce qu’il nasquit en ce Royaume pendant un voyage que son pere y fist,
eut par partage de l’an mil trois cents dix-sept les terres d’Ascheres en
Beausse, de Cendismaisons, et de Varennes lés Monstereul.
Et Guiot de Bouville cinquiesme mourut devant
qu’estre en âge.
L’aisnée des filles appellée Jeanne
de Bouville fut mariée au mois de juin l’an mil trois cents neuf
à Jean de Culant fils aisné de Renoul seigneur de Culant &
de Chasteauneuf sur Cher, auquel elle porta en dot les chasteau et seigneuries
de Rommefort et de Savigny, sous l’estimation de quatre cents livrées
de terre.
Lorette de Bouville deuxiesme fille trespassa
jeune.
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La troisiesme
dite Ysabeau de Bouville fut conjointe avec Jean d’Ormoy chevalier
seigneur de Villiers pres la Ferté-Alez, fils de Jean d’Ormoy chevalier
seigneur de Villiers, et d’Alienor de Trie sa femme. Le contract de leur
mariage est du premier jour de juin l’an mil trois cents quatorze. Et par
iceluy Hugues de Bouville frère d’Ysabeau luy promist bailler aussi
quatre-cents livrées de terre, qui depuis furent assignées
par Pierre de Guineville, ou Guienville, et Pierre de Chardonnay chevaliers,
à Melun, sainct Memer, Boissy lés Mondeville, et autres lieux.
D’eux vinrent trois filles seulement, Alienor d’Ormoy premièrement
religieuse en l’abbaye de la saincte Trinité de Caen, puis mariée
à Guillegaud de Chasteauneuf chevalier; Agnes d’Ormoy femme de Jean
Paynel chevalier, seigneur de Montpipeau,qui n’en eut point d’enfans: et
Marie d’Ormoy alliée à Jean des Essars chevalier seigneur d’Ambleville,
qui à cause d’elle plaida contre Guillegaud de Chasteauneuf mary d’Alienor
d’Ormoy pour les successions de feus Jean d’Ormoy et d’Ysabeau de Bouville
leurs pere et mere.
Finalement Marguerite de Bouville quatriesme
et derniere fille de Hugues II. seigneur de Bouville fut religieuse en l’abbaye
de Poissy.
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ORMOY
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Jean
de Bouville II. du [p.468] nom chevalier,
eut en partage les seigneuries de Milly, de Balleu et autres, et succéda
à son pere en l’office de chabellan du roy Philippes le Bel. Estant
jeune, il accompagna Charles de France comte de Valois au voyage de Flandres,
et par traité du dimanche avant la S. Martin d’hyver l’an mil deux
cents quatre-vingts treize espousa Marguerite de Bomés fille unique
et héritière de Thibaut seigneur de Bomés en Berry,
et de Marguerite dame de Blazon et de Mirebeau sa première femme.
A cause de laquelle alliance il fut aussi seigneur de Blazon et de Mirebeau.
Mais la mort l’empescha d’en jouyr plus de treize ou quatorze années.
Car il deceda l’an mil trois cents huit, et par son testament fait le lundy
avant l’Ascension au mesme an institua deux prébendes en l’Eglise
de Milly, outre les quatre desja fondées par son pere.
Marguerite de Bomés son espouse le survesquit,
n’ayant de luy que deux filles, qui demeurèrent en la tutele de Jean
seigneur de Linieres, et de Pierre de Chambly dit Grismouton, chevaliers,
apres que leur mere eut repris alliance avec Jean comte de Roucy.
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L’aisnée
d’icelles filles nommée Blanche de Bouville fut mariée
à Olivier de Clisson fils d’autre Olivier seigneur de Clisson et d’Ysabeau
de Craon sa femme. Car ceux qui ont escrit, que ce fut Olivier fils de Blanche,
lequel espousa Ysabeau de Craon, se sont trompez, et le temps y resiste manifestement.
Le contract de mariage de ladite Blanche se fist à Forest lés
Milly en Gastinois l’an mil trois cents vingt, en la présence du roy,
de Jean comte de Roucy, et d’Amaury de Craon oncle et curateur d’Olivier
de Clisson, qui consentit qu’elle fust douée de mille livres de rente
sur les terres de son nepveu.
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CLISSON
F. Aug. du
Pas en la geneal. de Craon pag. 756. et aill.
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Elle mourut
l’an mil trois cents vingt-neuf, mere d’Olivier III. seigneur de Clisson,
qui prist à femme Jeanne de Belleville fille de Maurice seigneur de
Belleville, de Montagu, la Ganache, Palluau, Chasteaumur, Beauvoir sur mer,
et autres terres, et de Letice de Partenay sa seconde femme. De laquelle alliance
sortirent Olivier de Clisson connestable de France, et Jeanne de Clisson
dame de Belleville et de Montaigu mariée à Jean Harpedene chevalier,
seigneur de Montendre, dont la postérité prist le surnom de
Belleville.
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BELLEVILLE
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Ce dernier
Olivier seigneur de Clisson, la Ganache, Palluau, Chasteaumur, et Beauvoir
sur mer, nasquit en Avril le jour de sainct Georges, fut fait chevalier à
ce jour, et encore mourut à mesme jour l’an mil quatre-cents sept;
ne laissant que deux filles de Béatrix de Laval sa première
femme, à sçavoir Béatrix de Clisson conjointe avec Alain
vicomte de Rohan, et Marguerite de Clisson femme de Jean de Chastillon dit
de Bretagne comte de Penthevre.
La seur de Blanche de Bouville ayeulle dudit Connestable
de Clisson, eut nom Jeanne de Bouville, et fut mariée à
Gualeran de Meulanc [p.469] chevalier, avec
lequel elle vivoit l’an mil trois cents vingt-neuf.
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Voyez
cy-dev. p 246.
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Hugues
de Bouville leur oncle, III. de ce nom, fils puisné de
Hugues de Bouville et de Marie de Chambly, tint les Seigneuries de Bouville,
de Farcheville, de la Chappelle la Royne, et autres, et fut aussi chevalier
et chambellan des roys Philippes le Bel, Louys Hutin, et autres leurs successeurs.
Dés l’an mil deux cents quatre-vingts treize y
eut mariage accordé entre luy d’une part, et Marguerite des Barres
fille unique de Guillaume des Barres dit Haguenier, chevalier, seigneur de
Dyant et de S. Demetre en Calabre, et de Perrenelle de Mortery son espouse,
fille de feu Jean de Mortery chevalier, d’autre part. Lequel accord fut traité
par Jean et Anseau de Mortery freres, et Jean des Barres seigneur de Champront
chevaliers, oncles de ladite Marguerite: presens et consentans à ce
maistre Geofroy le Bouteiller archidiacre en l’Eglise de Sens, Anseau le
Bouteiller, Jean de Beaumont, Guillaume des Barres, Jean de Soisy, chevaliers;
Gillet de Mortery, et Perreau de Villeblovain escuyers, tous amis et parens
d’icelle.
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L’an mil
trois cens treize Huges de Bouville son mary fonda une Chappelle à
l’honneur de sainct Jean Baptiste en l’Eglise de Nostre Dame de Villiers
lés la Ferté-Alez: et peu apres fut envoyé ambassadeur
en Hongrie, pour amener Clemence fille de Charles Martel roy de Hongrie, au
roy Louys Hutin, qui l’espousa l’an mil trois cents quinze. De-là,
il enrichit sa chappelle de Farcheville de divers ornements précieux,
par lettres passées l’an mil trois cents vingt et un. |
Les
grandes Annales de Fr. en la vie du roy Louys Hutin.
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Et le roy
Philippe de Valois voulant aucunement recognoistre les services qu’il avoit
rendus tant à luy qu’à ses prédécesseurs, ordonna
est sa faveur l’an mil trois cents trente-trois, que ses villes et terres
de la Chapelle la Royne, d’Escorcy, de sainct Verain, de Nanteau sur Lunain,
ou le Nain, de Diant, et de Villeblovain, ne peussent estre mises hors la
main royalle, et que les possesseurs d’icelles ne fussent tenuz à
l’avenir d’en faire hommage à d’autres qu’au roy. Ce que Philippes
le Bel avoit desja pareillement octroyé à Hugues de Bouville
son pere, pour les seigneuries de Bouville, de Villiers, de Farcheville,
de Milly, et de Boisses, par lettres de l’an mil deux cents quatre-vingts
quinze.
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De
luy et de Marguerite des Barres sa femme issirent plusieurs enfans, desquels
voicy les noms, Huet de Bouville mort jeune l’an mil trois cents vingt-et
un: Jean, Guillaume, Hugues, Esmery, Wancelin, Charles, tous mentionnez plus
amplement cy-apres; et Marie de Bouville conjointe avec Geofroy de
Chauvigny seigneur de Voullon en Berry, frere d’André de Chauvigny
chevalier, seigneur de Chasteau-Raoul, et Vicomte de Brosse, par contract
passé le huictiesme jour d’octobre l’an mil trois cents vingt-huict.
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Jean de Bouville III. du nom renonça [p.470] au droit d’aisnesse, qui luy pouvoit appartenir
en la succession de ses pere et mere, et au portement des armes plaines de
Bouville, lesquelles il céda à ses autres freres. Il fut seigneur
de Dyant; et vivoit encore l’an mil trois cents cinquante-quatre, prenant
la qualité de chevalier.
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Guillaume de Bouville surnommé Haguenier, seigneur
de Bouville, de Boisses, et autres lieux, servit le roy Jean contre les Anglois,
et mist le siege devant la forteresse des Tounelles en Gastinois, avec le
seigneur d’Aigreville, Jean des Barres, et Guillaume du Plessis, l’an mil
trois cents cinquante neuf. Mais l’entreprise leur succéda si mal,
qu’ils y furent tous pris prisonniers par Edouard Prince de Galles, qui les
envoya en Angleterre; où j’estime que nostre Guillaume mourut sans
laisser aucune lignée. Car depuis ce temps on ne trouve plus aucune
mention de luy.
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Les
Annales de Fr. en la vie du roy Jean.
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Hugues, Esmery, et Wancelin de Bouville, qui est Wenceslaus,
moururent aussi sans hoirs procréez de leurs corps.
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Et par leur décès toute la succession escheut à
leur jeune frere appellé Charles de Bouville. Cestui-cy fut
chevalier, conseiller, et chambellan du Roy Charles V. qui l’establit gouverneur
du Dauphiné aux gages de deux mille florins par an; et l’an mil trois
cents soixante-neuf l’envoya avec Aimery evesque de Paris en Ambassade à
Francfort pour traiter le mariage de Catherine de France sa fille avec l’Infant
Rupert comte palatin du Rhin, duc de Bavieres. Un registre des plaidoieries
de la Cour tesmoigne qu’il estoit preudomme, non robeur, ny pillart. Et
que quand il mourut au Dauphiné, sçavoir est l’an mil trois
cents quatre-vingts-deux, l’en ne luy trouva que huict cents francs, qui
furent despendus en son obseque. Il avoit espousé Ysabeau du Més,
qui le survesquit, et trespassa l’an mil trois cents quatre-vingts seize,
n’ayant point eu d’enfans de luy non plus. |
Guy
Pape en ses Decisions Delphinales le nomme mal Charles de Bonnelle.
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Ainsi
la ligne masculine de Bouville finie, Julian des Essars fils aisné
de Jean des Essars seigneur d’Ambleville, et de Marie d’Ormoy sa femme, succeda
aux seigneuries de Bouville, de Farcheville, de Boisses, et autres, comme
plus prochain héritier, à cause d’Ysabeau de Bouville son ayeulle
maternelle, tante de Charles dernier seigneur desdites terres.
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