Archives municipales d’Étampes,
L 1.14.
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Contrat
d’accensement de deux maisons
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On est mal
documenté sur l’histoire d’Étampes pendant la guerre de
Cent Ans (1337-1453). A mon avis, c’est que la situation a été
tellement catastrophique, surtout vers la fin de cette période,
que l’autorité publique n’y jouait pratiquement plus aucun rôle,
de sorte que la production d’actes écrits y avait presque disparu.
Récemment (1) j’ai défendu
l’hypothèse que dans les toutes dernières années de
ce conflit séculaire la ville s’était vidée d’au moins
les deux tiers de sa population, sinon des trois quarts.
L’amplitude de cette catastrophe démographique,
l’étendue des dégâts matériels, la dévastation
du paysage urbain nous sont révélées surtout indirectement,
par quelques documents postérieurs, qui montrent qu’il fallut
beaucoup de temps à la ville pour s’en relever. Ces documents sont
assez rares, et dispersés dans différents fonds d’archives
qui ont eux-mêmes souvent eu des histoires tourmentées.
Cette modeste pièce-ci
semble bien montrer que vingt-trois ans après la fin de cette guerre,
on trouve encore des maisons en ruine en plein centre ville.
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(1) A l’occasion d’une conférence,
le 17 octobre 2009, faisant un premier bilan des premières
données statistiques qui se dégagent de l’étude des
censiers du fief étampois de Longchamp de 1268 à 1511, dont
je prépare l’édition générale avec la précieuse
assistance de Jean-Marc Warembourg.
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1. Histoire du document
Nous éditons donc ici un contrat
d’accensement en date du 20 juillet 1480. Accenser un bien, c’est, pour
un seigneur, le donner à fief à un particulier ou à
une collectivité qui en aura désormais la jouissance héréditaire,
moyennant le versement annuel d’une redevance seigneuriale appelée
cens. En l’occurence le seigneur est ici le chapitre de Notre-Dame d’Étampes,
qui est possessionné un peu partout en ville, et les preneurs nous
sont connus par ailleurs comme un poêlier et un cordonnier.
Ce contrat rédigé sur parchemin
est conservé aujourd’hui aux Archives municipales d’Étampes
sous la cote L.1.14, et provient d’un fonds du musée, lui-même
d’origine indéterminée. Il porte au verso différentes
inscriptions qui sont les traces de son utilisation comme preuve judiciaire
au XVIe siècle, contre différentes personnes dont les noms
ne sont plus toujours clairement lisibles. Voici l’une d’entre elles (où
la lecture des patronymes est légèrement hypothétique):
“Tiltre et constitucion de rente de l’œuvre et fabrique de Nostre Dame d’Estampes,
contre Jacques Tiponneau mareschal, Loys Hersant et Jehan Tornu”; une autre:
“Vedie”; une autre: “Jacques Tiponnea[u], Jehan Tornu et la veuve feu Piere
Vedie”. Ce Pierre Védie est probablement un tabellion du même
nom qu’un censier des dames de Longchamp nous montre actif à Étampes
en 1511.
Le parchemin porte de plus trois cotes distinctes
et successives: au recto, “Vingthuitieme Cotte douze” (avec paraphe); au
verso, “Cote 37”, et, sur une étiquette provenant de la collection
du Musée, “L.14”. Outre cela, comme en raison de son format il était
plié en deux, à un moment indéterminé de son
histoire archivistique il a servi de couverture à une liasse et
porte par suite cette inscription: “Cinq pieces concernant quelques rentes
deues à l’œuvre”.
C’est, comme l’a noté une main postérieure
en haut à gauche du recto d’une pièce originale
en date du “20 juillet 1480”. Elle a été rédigée
et signée à la prévoté,
à l’époque du prévôt Jean Laurent, par François
Gombault, substitut du tabellion Pierre Fontaine, alors absent. Le garde
du sceau, Étienne Lepiat, y a porté comme d’usage le sceau
aux contrats, mais il ne reste plus aujourd’hui que la fente du parchemin
par où passait le lacs auquel il était appendu.
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Signature de François Gombault
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Il s’agit
donc sans nul doute d’une épave de l’important chartrier de Notre-Dame
d’Étampes, aujourd’hui presque totalement disparu. Ces archives
avaient été confisquées au chapitre de Notre-Dame
lors de la Révolution française. Mais, lors de la Restauration,
après 1815, elles furent malheureusement récupérées
par le clergé local, pour lequel elles ne représentaient
plus en réalité aucune utilité pratique. Dès
lors, elles furent livrées à l’abandon, et dispersées
ou détruites dans des circonstances indéterminées.
En 1905, lorsque les biens de l’église catholique furent à
nouveau confisqués, le fonds récupéré par les
autorités publiques s’élevait à peu de choses (2). Il serait d’ailleurs nécessaire
de faire un bilan de ce qui reste ici et là de cet ensemble documentaire
capital pour l’histoire de la ville d’Étampes.
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(2) On en sauva heureusement une pièce
majeure, à savoir un cartulaire de la fin du XVe siècle
où avait été recopiées de nombreuses pièces
anciennes, depuis lors conservé aux Archives départementales
de Seine-et-Oise, à Versailles, et aujourd’hui à celles
de l’Essonne, à Chamarande. Certaines pièces plus récentes
ont été conservées par les autorités ecclésiastiques
et se trouvent aujourd’hui aux archives diocésaines d’Évry.
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2. Objet de ce contrat
Quoi qu’il en soit, ce contrat d’accensement
concerne un pâté de maisons de l’actuelle rue de la République,
du côté des numéros impairs, entre les actuelles rues
Baugin et du Ronneau. A l’époque qui nous occupe, cette section
de la rue de la République s’appelait la rue de la Cordonnerie, nom
du reste qu’elle a conservé jusqu’en 1935. Aujourd’hui, ce pâté
de maisons comprend quatre unités d’habitation qui correspondent
aux numéros 27 à 33; cinq si l’on y ajoute le pignon du numéro
20 de la rue Baugin.
Il ressort des termes de notre document
que peu avant 1480 cet espace était réparti en deux lots
seulement. Le premier était accensé à la famille
Serveau. Il touchait à la rue Baugin, et à la rue de la République,
mais aussi à celle du Ronneau, enserrant donc par côté
et par derrière le deuxième de ces lots, qui faisait pour sa
part l’angle des rue de la République et du Ronneau.
Que se passe-t-il donc en 1480 pour ce deuxième
lot? Au premier abord, les choses ne sont pas très claires. Tout
d’abord, le contrat dont nous éditons ici le texte donne obligation aux deux
preneurs d’édifier l’un de ces bâtiments, à savoir
une masure, qui est pourtant présentée tout d’abord comme
préexistante? Comment faut-il l’entendre? Par ailleurs il accense deux
bâtiments bien distincts, à savoir une maison et ladite
masure, sans que soit que soit précisé
aucun lien spécial entre ces preneurs; or il n’est question que d’un
seul cens, et l’obligation qu’on vient de mentionner repose explicitement
sur chacun de ces deux tenanciers, de sorte que le lot semble bien donné
en indivision.
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3. Mise en contexte
Ces deux obscurités sont levées par d’autres documents de
la même époque.
Il s’agit d’une part d’un autre contrat
d’accensement, passé deux ans plus tôt par les chanoines,
et dont le texte nous a été conservé par une copie
contenue dans le cartulaire des chanoines. Relatif à certaines masures
qu’il possèdent à Guibeville, près d’Arpajon, il mentionne
pareillement que le preneur promet d’y faire bâtir une maison habitable,
à raison de quoi on lui consent un rabais de 50% pour une période
de six ans, à la condition que le lot retrouve ainsi sa valeur
théorique (3).
Les choses sont donc plus claires sur ce
point: il s’agit bien de reconstruire, dans les deux cas, des bâtiments
pour l’heure inhabitables. Le contrat dont nous éditons ici le texte
nous met donc bien en présence d’une bâtisse misérable
qui dépare le centre ville, vingt-trois ans encore après
la fin de la guerre de Cent Ans.
La ville est en train de se repeupler, comme
le reste du bailliage, mais on n’est alors probablement à Étampes
qu’à la moitié du chemin, comme on le voit aussi par les
censiers de Longchamp pour l’an 1482, qui ne comptent que 17 censitaires
en 1457, 82 en 1482, et 130 en 1498.
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(3) Cartulaire de Notre-Dame,
éd. Alliot 1888, n°LXXXI, pp. 93-94: “lequel de sa bonne volonté
sans aucune contrainte recongnut et confessa avoir prins, accepté
et retenu à touzjours [...] de vénérables et discrètes
personnes Messigneurs les chantre et chappitre Notre-Dame d’Estampes [...]
unes masures et appartenances dicelles [...]; et aultre a promis et sera
tenu le dit preneur de bastir ou faire bastir sur le dit héritage
une maison à demourer selon sa faculté, dedans ung an prochain
venant, et tellement tenir, soubtenir et maintenir les dits héritages
que le dit cens y soyt et puisse dorénavant estre prins et perceu
chacun an, sans auchun déchet ou diminution, par les dits chantre
et chappitre, et leurs successeurs en la dite esglise [...]”.
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Le deuxième
point d’obscurité est en partie levé par un document postérieur
de vingt ans, à savoir le censier de Notre-Dame pour l’an 1500.
Nous le connaissons par une copie qui en fut faite en 1519 par la prévôté,
aujourd’hui conservée aux Archives Nationales, et que je m’apprête
à éditer en ligne (4).
En 1500, ce même pâté
de maison est clairement divisé en trois lots. Celui de la veuve
et des héritiers de Simonnet Servau est passé à son
probable fils Ambroise Serveau, sergent.
L’autre est désormais clairement
divisé en deux. La maison du milieu est tenue par Lyon Boivin,
toujours vivant, mais désormais mentionné avec son fils Jean;
nous apprenons alors que tous deux sont cordonniers, ce qui n’est pas très
étonnant dans cette rue de la Cordonnerie (qui s’appelle aussi
en 1500, alternativement, rue de la Savaterie).
La maison qui fait l’angle de la rue du
Ronneau est accensée pour sa part à la veuve et aux héritiers
d’Hervy Sauvaige; nous apprenons au passage qu’il était en
son vivant poêlier, c’est-à-dire qu’il faisait commerce de
tous les ustensiles de terre, de tôle ou de fer-blanc qui servent à
chauffer ou à éclairer. Cependant la maison est désormais
habitée par un certain Jehan Touchard, boucher, soit qu’il s’agisse
de son gendre, ou bien d’un simple locataire.
Le montant du cens dû par ces deux
nouveaux lots n’est pas précisé, mais il serait très
étonnant et inhabituel qu’il ait été modifié:
il a dû seulement être divisé entre les deux tenanciers
au prorata de la valeur de leur s lots respectifs.
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(4) Censier de Notre-Dame pour 1500,
éd. Gineste, n°76, n°77 et n°78: “Ambroise Serveau, sergent de monsieur
le conte d’Estampes, demourant en sa maison près l’Ostel Dieu Nostre
Dame d’Estampes, tenant d’une part à Lyon Bonnyn cordonnier, aboutissant
d’un bout à la rue de la Cordonnerie. [...] Lyon Bonnyn et Jehan
Bonnyn son filz, cordonniers demourant en leur maison assise en la rue de
la Cordonnerie, tenant d’une part à la vefve e[t] hoirs Hervy Sauvages,
poillier, aboutissant d’un bout à ladite rue de la Cordonnerie. [...]
La vefve et hoirs feu Hervy Sauvaige, poillier, où demeure à
present Jehan Touchard boucher, tenant icelle maison d’une part à
Lyon Bonnin, d’autre part à la rue du Ronneau, aboutissant d’un bout
à la dicte rue de la Savaterie”.
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4. Prosopographie administrative
Notre document contribue aussi modestement
à compléter notre connaissance de la série des officiers
du bailliage en cette fin du XVe siècle.
1) Le prévôt. En ce
20 juillet 1480, le prévôt est déjà Jean Laurent,
qui jusqu’alors n’était signalé comme tel que depuis le 27
février 1481 (5); il tiendra ce poste
au moins jusqu’en 1497 (6).
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(5) Paul Dupieux, Les Institutions
royales au pays d’Étampes, 1931, p. 91, note 1, alléguant
des pièces d’archives du Loiret depuis détruite en 1940.
(6) Pierre Plisson,
Rapsodie, éd. Forteau in Annales
du Gâtinais (1909), p. 246.
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2)
Le tabellion de la ville et du comté d’Étampes
est à la même date un certain Pierre Fontaine, qui jusqu’à
présent à ma connaissance n’était pas encore signalé,
en tout cas ni par Paul Dupieux, ni par moi-même.
Ce renseignement est bien embarrassant, car il vient
compliquer une situation embrouillée que nous avions déjà
du mal à cerner.
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a) Le 20 novembre
1473, Louis XI avait nommé à vie à la fois greffier
et tabellion Hervé de la Coste (7).
Nous le voyons encore clairement en fonction de tabellion le 19 août 1478, avec pour substitut Oudinet Lemort (8).
Cependant le comté d’Étampes avait
donné à Jean de Foix par des lettres patentes d’avril 1478
enregistrées le 27 mai de la même année. Celui-ci voulut
bientôt donner la charge de tabellion de la ville et du comté
à sa guise et en dépouilla Hervé de la Coste,
qui lui intenta un procès devant le prévôt, puis le bailli.
La procédure arriva en appel devant le parlement de Paris le 28 juillet
1486 (9). Il apparaît que ces procédures
furent vaines. En 1486, Hervé de la Coste mentionne comme ses adversaires,
outre le comte d’Étampes: “Louis Beloncle, Jehan le Tellier et
Pierre D[o]dier, interessez et defendeurs à la dite provision” (9). Ces trois personnages semblent donc s’être
succédés dans la charge de tabellion entre 1478 et 1486. Toutefois
ces données ne concordent pas avec celles que nous avons pu jusqu’ici
glaner par ailleurs.
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(7) Lettres patentes
enregistrées au Parlement le 7 mai 1474 (Archives nationales, Registre
du Parlement, X.1a 1486, fol. 165r°, cité par Dupieux, Les
Institutions royales, p. 95, note 2).
(8) Cartulaire de Notre-Dame, éd.
Alliot, n°LXXXI, p.92: “par devant Oudinet Lemort, clerc
substitut juré et commis pour et en l’absence de Hervy de la Coste,
tabellion d’iceluy lieu”.
(9) D’après une
pièce éditée par Dupieux, Institutions, pp.
243-244, pièce justificative n°IV. Je corrige en Dodier
le nom de l’un de ces tabellions visiblement altéré en Didier
soit par Dupieux ou l’auteur de la copie qu’il a éditée.
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b)
Louis Beloncle est mentionné le 1er mai 1479
comme “tabellion à Estampes” (10);
il ne paraît plus l’être en 1482 où il est cité
seulement comme procureur des dames de Longchamp à Étampes
(11); il est encore cité comme notaire
juré le 31 mars 1488 (12) et il est
mort avant 1498 (13).
c) Pierre Fontaine, d’après le texte
du contrat que nous éditons ici, est tabellion le 20 juillet 1480
avec pour substitut François Gombault.
d) Oudin de Monnerville est signalé
tabellion le 25 juillet 1484, sans qu’on connaisse son substitut (14), et à nouveau
le 18 août 1485 (15).
e) Jean Letellier est documenté comme tabellion
le 8 mars 1490, avec pour substitut François Gombault (16); mais l’on voit qu’il l’a déjà
été nécessairement avant le 28 juillet 1486, où Hervé de la Coste le cite parmi ses rivaux qui
ont usurpé cette charge.
f) Pierre Dodier, de même, pareillement
cité par Hervé de la Coste, n’est pas encore documenté
à ma connaissance comme tabellion, mais il est mentionné en
1500 comme encore vivant et tenant une maison dans la censive des chanoines
de Notre-Dame. En 1519, ce sont sont probablement ses fils qui sont respectivement
tabellion et substitut du tabellion, Martin et Saincton Dodier (17). Il est donc à
peu près certain qu’il a bien été tabellion à
un moment difficile à déterminer entre 1480 et 1486.
L’apparition de ce tabellion jusqu’ici inconnu complique
donc bien une situation déjà embrouillée.
Il apparaît par là que, entre le 19 août 1478 et le 28 juillet 1486, soit en huit ans, cinq tabellions au moins se sont succédés à Étampes, ce qui
suppose une durée moyenne d’exercice inférieure à deux
ans.
Dans l’état actuel de notre documentation,
il semble donc bien que cette charge était affermé chaque
année par le comte au plus offrant, et que, par suite, on pouvait
l’exercer plusieurs fois, comme ce fut apparemment le cas de Jean Letellier,
tabellion au moins une fois avant ou en 1486, puis en 1490.
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(10) AD91 E. 3896.
Acte servant de couverture au censier de Longchamp pour 1482.
(11) Ibid.
(12) Inventaire de 1532,
f°112v° (signalé par Jean-Marc Warembourg)
(13) Censier de
Longchamp pour 1498, éd. Gineste, n°14, 19, 82, 90, 93,
112, 125.
(14) Cartulaire
de Notre-Dame, éd. Alliot, n°LXXVII, p. 84.
(15) Inventaire de
1532, f°113v° (signalé par Jean-MarcWarembourg)
(16) AD91 E. 3895.
Acte ayant servi de couverture au censier de Longchamp pour 1498.
(17) Censier de
Notre-Dame pour 1500, copie de 1519, éd. Gineste, n°0 et
n°42.
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3)
Le substitut du tabellion absent est alors un prêtre, Louis
Gombault. C’est clairement un Étampois.
A la génération précédente
en effet, on trouve parmi les censitaires du fief de Foresta à Étampes,
en 1457, une “Jehanne, vefve de feu Jehan Gombault” (16), et, en 1500 encore, parmi les censitaires de
Notre-Dame, un “Jehan Gombault, pour sa maison que faict le coing,
assise au carrefour de Darnatal, tenant d’une part à Jehan Paris,
aboutissant audict carrefour” (17). Il est
probable que Jean Gombault I a eu pour fils aîné Jean Gombault
II, héritiers de ses biens dans la paroisse de Notre-Dame, et pour
fils cadet notre François Gombault prêtre, qui fit office
de substitut pour les tabellions que nomma Jean de Foix, comte d’Étampes
de 1478 à 1500.
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(16) Censier de Longchamp pour 1457,
éd. Gineste, n°9 et n°12.
(17) Censier de Notre-Dame pour 1500,
éd. Gineste n°177.
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En effet il
est encore mentionné le 8 mars 1490 comme substitut
de Jean Letellier, à l’occasion d’un acte qui nous a été
conservé par hasard, servant de couverture au censier de Longchamp
pour l’an 1498 (18).
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(18)
AD91 E. 3895.
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4)
Le garde du sceau de la prévôté est en ce
même 20 juillet 1480 un certain Étienne Lepiat, qui nous était
déjà connu dans cette fonction le 19 août 1478 (19).
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(19) Cartulaire de Notre-Dame,
édition Alliot, n° LXXXI, p. 95.
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5)
Un sergent de la prévôté nous était
déjà connu, Ambroise Serveau, cité comme sergent dès
1484 par une pièce du cartulaire de Notre-Dame (20), et comme tenant cette même maison en
1500 (4). Nous apprenons ici qu’il la tenait
de son père Simonet Serveau, décédé avant 1480.
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(20) Cartulaire de Notre-Dame, édition
Alliot, n° LXXXI, p. 95.
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5. Sur deux familles étampoises
Enfin notre document jette un jour intéressant
sur la vie de la paroisse et surtout du chapitre de Notre-Dame, qui paraît
complètement investi par les fils cadets des notables de la paroisse.
Nous voyons en effet que les proviseurs et marguilliers de la paroisse
se font représenter d’une part par l’un des chanoines, Jean Delaporte,
et d’autre part par un bourgeois du lieu, Jean Baudequin l’aîné.
1) Or nous savons par le censier de 1500
que la famille Delaporte tenait une maison toute proche
par derrière de l’église Notre-Dame, près de la rue
Mauconseil (21)
2) Quant à la famille Baudequin,
elle habitait devant la porte même de l’église, du côté
des halles, une maison que la veuve et les héritiers de Jean Baudequin
l’aîné tiennent encore en 1500 (22).
En 1482 puis 1498 sont signalées sur les franges de la censive
de Longchamp, près du chantier d’Antioche, du côté
de Villeneuve, des vignes appartenant à un Jean Baudequin qui doit
être notre homme, ou son fils aîné (23). Dès l’année suivant notre contrat,
à la mort du chantre Jean Olivier survenue le 2 décembre 1481,
les chanoines, en l’absence de Jean de Foix, s’empressérent d’élire
à sa place Simon Baudequin, probable fils de Jean Baudequin l’aîné,
malgré la fureur du comte qui voulait donner cette charge à
l’un de ses hommes, et qui n’y renonça qu’après des années
de vaines procédures (24).
Si l’on ajoute à cela que ce Simon
Brodequin, une foix chantre, ne craignit en 1484 de tenir tête à
l’archevêque de Sens (25), et qu’un Macé
Baudequin fut plus un peu plus tard, en 1516, l’un des tout premiers échevins
élus d’Etampes (25), nous avons dans
l’histoire de cette famille un tableau saisissant de l’ascension de la
bourgeoisie étampoise. Dès 1481 elle ne craint pas de résister
frontalement à l’autorité comtale, ni en 1484 à l’autorité
diocésaine. Bientôt elle triomphera également de la
résistance des officiers royaux en obtenant de la reine, puis du
Parlement de Paris, le droit de se constituer en véritable municipalité.
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(21) Censier de Notre-Dame pour 1500, éd.
Gineste n°95: “Simon de la Porte, pour sa maison assise en ladicte
rue de cul de sac pres le puis de Malconseil, tenant d’une part audict Boysquemin,
aboutissant à la rue de cul de sac”. On trouve dès 1323 un “Jehan
de la Porte” à Étampes censitaire des dames de Longchamp
(éd. Gineste n°131).
(22) Censier de
Notre-Dame pour 1500, éd. Gineste n°95: “Jacquecte vefve
et hoirs feu Jehan Baudequin l’aisné, demourans en leur maison assise
devant la porte de l’eglise Nostre Dame du costé de vers les Halles,
tenant d’une part aux hoirs feu Barthelemy Massue, aboutissant sur le
puis ou carrefour de ladicte eglise”.
(23) Censier
de Longchamp pour 1482, éd. Gineste, n°40; Censier de
Longchamp pour 1498, éd. Gineste, n°56, n°81 et n°98.
(24) Basile Fleureau,
Antiquitez d’Estampes, p. 352.
(25) Cartulaire
de Notre-Dame, éd. Alliot, n°LXXVII.
(26) Basile Fleureau, Antiquitez d’Estampes,
p. 216.
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* *
Ainsi donc, si modeste soit cette pièce
d’archives, on ne peut que se féliciter qu’elle ait échappé
au naufrage du chartrier de Notre-Dame d’Étampes. Il faut espérer
qu’on en trouvera encore ça et là quelques autres qui nous
permettront, par recoupement, de nous faire une idée toujours plus
précise de cette période aussi mal documentée que
passionnante.
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Secteur concerné sur un plan des environs de 1815
(Archives municipales d’Étampes)
A tous ceulx
qui ces presentes lectres verront, Jehan Laurens (1), escuier, prevost d’Estampes, salut.
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Pour les
justifications et références de ces notes, voyez notre Introduction.
(1) Première
mention à ma connaissance de ce prévôt.
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Savoir faisons
que par devant Françoys Gombault (2)
prebstre substitut juré pour et en l’absence de Pierre Fontaine
(3) tabellion de la ville et conté du
dict Estampes, vindrent et furent presens en leurs personnes Hervy Sauvaige
(4) et Lyon Bonnyn (5),
marchans demourans en la parroisse Nostre Dame d’Estampes, lesquelx et
chacun d’eulx recongnurent et confesserent sans aucune contraincte avoir
prins et retenu à tiltre de rente annuelle et perpetuelle à
tousjours et sans rappel de venerable et discrects les chantre (6) et chappitre de l’eglise collegial Nostre Dame
d’Estampes et des proviseurs et marregliers (7)
d’icelle eglise et fabricque, ce acceptant par venerable et discrecte
personne messire Jehan de la Porte (8) prebstre
chanoine et honnorable homme Jehan Baudequin l’esné (9) à present proviseurs de la dicte eglise
pour et au prouffit de l’euvre et fabricque (10)
d’icelle ou temps advenir,
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(2) Première mention connue. Encore
cité dans cette fonction 8 mars 1490.
(3) Successeur de
Louis Beloncle mentionné comme tabellion le 1er mai 1479, et
prédécesseur de Jehan Letellier cité tabellion le
8 mars 1490.
(4) Poêlier,
décédé avant 1500.
(5) Cordonnier
encore actif dans cette maison avec son fils Jean en 1500.
(6) Cette dignité,
la plus haute du chapitre, est alors tenue depuis au moins 1466 par Jean Olivier, qui mourra le 2 décembre 1481.
(7) Proviseurs
et marguilliers sont les administrateurs des biens temporels de la paroisse.
(8) La famille
Delaporte semble habiter du côté de la rue Mauconseil, derrière
la collégiale0
(9)
Habitant lui-même devant la porte de l’église, il paraît
être le père d’un chanoine, Simon Baudequin, qui va être
élu chantre l’année suivante, en l’absence et contre la volonté
du comte, abbé laïc, qui voulait donner ce poste à l’un
de ses hommes.
(10) L’Œuvre,
ou fabrique, c’est personne morale et raison sociale de la paroisse.
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c’est assavoir
une maison contenant une ferme entre deux quignons (11) avec une masure et ung petit jardin, le lieu
ainsi qu’il se poursuit et comporte, assis en la rue de la Cordonnerie (12) du dict Estampes en la dicte parroisse Nostre
Dame, tenant d’une part au pavé de la dicte rue, d’autre part à
la veufve et heritiers feu Symonnet Serveau (13),
aboutissant d’un bout aus dicts veufve et heritiers, et d’autre bout à
la ruelle par laquelle on va au Ronneau (14);
ceste presente
prinse faicte moyennant et parmy la somme de quatre livres tournois de rente
annuelle et perpetuelle à tousjours, que pour ce les dicts Sauvaige
et Lion preneurs et chacun d’eulx par soy et pour le tout en ont promis,
promectent et seront tenuz d’en rendre et paier par eulx, leurs hoirs et
ceulx qui de eulx aurons cause ou temps advenir, aus dicts proviseurs ou
leurs successeurs au prouffit de la dicte euvre et fabricque doresenavant
par chacun an à deux termes esgaulx, c’est assavoir Pasques et saint
Remy (15) chacun par moictié, premier
terme et paiement commencent au jour et feste de Pasques prochain venant,
le second au jour de saint Remy prouchain venans après ensuivent
et ainsi en continuant d’an en an et de terme en terme à tousjours,
|
(11) Une ferme
est en termes de charpenterie un “assemblage de pièces sur lesquelles
posent d’autres pièces qui portent un comble”. Il s’agit donc évidemment
d’une maison à colombage. Je n’ai pas trouvé d’explication
pour le mot quignon qui semble devoir êre compris au sens de “pignon”;
un quignon, étymologiquement coignon,
est un morceau en forme de coin, spécialement de pain, d’où
peut-être une confusion locale de ces deux mots, par analogie.
(12) C’est le haut
de la rue de la République, à partir de Notre-Dame jusqu’à
Saint-Basile.
(13) Parmi ces héritiers,
Ambroise Serveau, cité comme sergent en 1484, et comme tenant cette
même maison en 1500.
(14) Aujourd’hui
encore dénommée rue du Ronneau.
(15) Date traditionnelle
de versement du cens, le 1er octobre, alors que les tenanciers avaient
pu vendre le produit de leurs moissons et de leurs vendanges.
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et si ont promis
et seront tenuz les dicts preneurs et l’un pour pour le tout ediffier
la dicte masure de bon ediffice et convenable selon le dict lieu
(16)
et
icelle ediffice ensemble la dicte maison et tout le dict lieu et heritaige
tenir, entretenir et soutenir en en bon estat et valleur, tellement
que la dicte rente de quatre livres tournois y puisse à tousjours
estre prinse, receue et perceue par chacun an sans aucun dechiet ou diminucion,
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(16) Il apparaît ici que
l’état de cette masure délabrée n’était plus
tolérable à quelques pas de la collégiale Notre-Dame,
dans ce qui était en train de devenir le quartier le plus huppé
de la ville en reconstruction.
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si comme tout ce
les dicts Sauvaige et Lyon disoient, et dont ils furent et se tindrent
pour contents par devant et en la main du dict juré et laquel ilz
promisdrent, par la foy et serment de leurs corps pour ce baillée
corporellement, tenir, entretenir et avoir pour agreable tout le contenu
de ses presentes et soubz l’obligacion de tous leurs biens et de chacun
d’eulx par soy et pour le tout, et de leurs hers, meubles et immeubles,
presens et advenir, tenir, entretenir, enterigner, acomplir, garder et avoir
pour agreable, ferme et estable à tousjours ceste presente prinse
et tout le contenu de ces presentes avecques ce la dicte rente de quatre
livres tournois rendre et paier la dicte rente de quatre livres tournois
rendre et paier chacun an par la maniere dessus dicte sans jamais contrevenir, sur peine de rendre et paier
touts coust, coustz, fraiz, misez, interest, dommaiges et despens qui fais
seroient en ce pourchassent, dont ilz voudrent la porteur de ces presentes
estre cru par son simple serment sans autre preuve faire, renonçans
quant ad ce les dicts preneurs à toutes choses à ces lectres
contraires.
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En tesmoing de
ce nous, Estienne Lepiat (17), licencié
en loix, garde du scel de la dicte prevosté, à la rellacion
du dict juré, avons mis à ces lectres le dict scel. Donné
le vingtiesme jour de juillet l’an mil CCCC et quatre vingts.
[Signé:]
F. Gombault [paraphe]
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(17) Déjà cité
dans ces fonctions le 19 août 1478.
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