CORPUS BIBLIOGRAPHIQUE ÉTAMPOIS
 
Bernard Métivier et Bernard Gineste
Cent trente-quatre remarques critiques sur l’édition récente
d’un carnet de guerre du docteur René de Saint-Périer
 
2017
 
Collection Retour aux Sources n°1 (2016)
 
Bernard Métivier et Bernard Gineste
Cent trente-quatre remarques critiques sur l’édition récente
d’un carnet de guerre du docteur René de Saint-Périer
 
recension, 2017



     Jacques GÉLIS, Un médecin dans la tourmente. Le carnet de guerre de René de Saint-Périer (1914-1916) [17 cm sur 23; 124 p.; 48 illustrations en couleurs; 301 notes de bas-de-page], Étampes, Association Étampes-Histoire [«Collection Retour aux Sources» n°1], décembre 2016 [14 €].



     Voilà une publication qui ne manque ni d’intérêt ni de qualités, et dont le but surtout est louable. Mais comme tout le monde peut les remarquer d’emblée, il nous a semblé plus productif d’y relever pour notre part ce qu’on pourrait trouver à y redire et à corriger, dans le même but, qui est de servir lhistoire.

      Voilà une bien meilleure publicité que des éloges convenus, et qui ne pourra qu’augmenter le nombre des lecteurs de cette suggestive édition princeps, avides de se faire leur propre idée.

     Allez donc l’acheter à l’espace culturel du magasin Leclerc d’Étampes, ou la commander votre libraire.


Bernard Métivier et Bernard Gineste
Collection Retour aux Sources n°1 (2017)
 
Veritas vos liberabit

Remarque n°1. — Pages 1 et 2 de couverture.

Pourquoi, en couverture d’un ouvrage consacré à un médecin français, mettre la photographie, empruntée à un site internet belge, d’un infirmier belge, alors que les clichés de l’auteur ne manquent pas, non plus que ceux de son hôpital pendant la guerre? 
Remarque n°2. — Page 2
Cliché non sourcé, localisé à Légé, sans que cette localisation soit davantage sourcée; c’est d’autant plus gênant qu’il faut relever ailleurs de nombreuses inexactitudes en la matière, et même plusieurs erreurs caractérisées.
Remarque n°3. — Page 5
«Ce carnet est certes celui d’un homme de l’art médical». Voilà un style un peu embarrassé.
Remarque n°4. — Page 6
«Une lecture attentive du carnet montre qu’en réalité il a rédigé son récit après la guerre, en s’appuyant assurément sur les notes détaillées qu’il avait prises jour après jour». Hypothèse des plus étonnante, qui surprendra toute personne ayant lu le texte du carnet avant d’en parcourir la préface, et qu’on s’étonnera aussi de voir répéter en conclusion sans qu’elle ait été démontrée en cours de route.
Remarque n°5. — Page 6.
«Dès les premières lignes du texte, il évoque en ces termes un voyage qu’il entreprend (…): ‘(…) Nous renonçons au séjour de quelques jours que nous devions faire (…)’. Tout le carnet a beau être rédigé au présent donnant ainsi le sentiment d’une écriture directe, le ‘que nous devions faire’ montre bien qu’il y a une réécriture en forme de bilan.»
Cette argumentation est extravagante. Le sens du texte est pourtant clair : Saint-Périer dit simplement que devant la menace de guerre il avait dès le départ réduit la durée du séjour qu’il devait faire aux Pays-Bas.
Et quand bien même on pourrait démontrer que l’auteur n’a pas commencé son carnet le jour même où remonte son récit, on en pourrait seulement conclure qu’il l’a commencé le lendemain ou le surlendemain, en commençant par revenir sur les circonstances où la guerre l’a surpris.
Remarque n°6. — Page 7
L’éditeur nous avertit que notre carnet «présente à la fois des faits précis appuyés sur les notes (…) qu’il retranscrit telles quelles, et des réflexions ajoutées plus tard qui reflètent en réalité son état d’esprit de l’immédiat après-guerre».
Cette hypothèse est en contradiction ne serait-ce qu’avec le titre lui-même du carnet, qui parle de «la guerre de 1914», et qui a donc clairement été porté à un moment où l’auteur croyait encore comme tout le monde à une guerre-éclair.
Remarque n°7. — Pages 7 et 9 «Le carnet s’interrompt définitivement par une évocation très pertinente des conséquences de la guerre: sort de l’Allemagne, affaiblissement de la France (…). Cette réflexion lucide accrédite un peu plus l’idée que sa rédaction date de l’après-guerre.» Argument extravagant. Ce serait non pas le 29 juin 1916, mais après 1918 que Saint-Périer aurait écrit: «Nous sommes un peuple définitivement abaissé et vaincu (…)» et «Finis Galliae»!
Remarque n°8 — Page 9
«Finis Galliae» Il aurait fallu indiquer au lecteur non latiniste que ces mots signifient en latin (et, disons-le, plutôt en latin de cuisine): «Terme de la Gaule», ou, si lon préfère, «Fin de la France».
Remarque n°9. — Page 8.
Cliché non sourcé, mal daté et titré de façon extravagante: «René de Saint-Périer et son père Jean Guy sur le perron d’entrée du château de Morigny, 1895 ou 1896». Ce cliché présente visiblement deux jeunes hommes de la même génération, en lesquels on reconnaît à droite René de Saint-Périer (tenant en bandoulière sa chère boîte à herboriser), et à gauche son frère cadet Urbain (avec un fusil de chasse). Il a pourtant d’ailleurs déjà été édité par les Archives départementales de l’Essonne (où il est conservé sous la cote 76J/17), dans le numéro 38 du Papyvore, avec un titre plus correct: «René et Urbain de Saint-Périer, 1897». La date est fausse aussi. Ce serait plutôt vers 1901 (d’après les photos analogues conservées aux Archives départementales de l’Essonne)
Remarque n°10. — Page 9
«Chasse aux corbeaux en hiver» etc . On aurait aimé connaître la source de ces affirmations si précises. On en est réduit aux hypothèses. S’agit-il par exemple des photographies que notre éditeur a pu consulter dans la collection de Mme Brinon?
Remarque n°11. — Page 10
«Cette adolescence heureuse fut brusquement interrompue (…). Leur père (…) mourut de tuberculose en 1895.»
En réalité Jean-Guy de Saint-Périer n’est pas mort à Morigny en 1895, mais à Pau dès 1885, et notre éditeur n’a visiblement pas pris la peine de consulter les autres récits autobiographiques du comte de Saint-Périer, où il raconte notamment le jour (22 décembre 1885) de la mort de son père lorsqu’il avait huit ans.
Remarque n°12. — Page 10.
«Dès cette époque [1903], en effet, il commença à éprouver de sérieux problèmes oculaires». C’est inexact, et, notre éditeur, manifestement, n’a pas jugé utile de consulter les autres carnets intimes de Saint-Périer conservés aux Archives départementales de l’Essonne, à Chamarande. On y trouve notamment une lettre-relique qu’il conservait précieusement depuis la mort tragique de sa mère en 1897, «Lettre de ma chère mère», où on lit notamment ceci: «Si tu négligeais cela, tu exposerais tes yeux à un grand danger et tu comprends trop maintenant tes propres intérêts pour qu’il soit nécessaire je crois, de t’en dire beaucoup plus». Cette lettre n’est pas datée mais l’on voit aux termes qu’elle emploie qu’elle s’adresse à quelqu’un qui sort à peine de l’enfance.
Remarque n°13. — Page 11
Cliché non sourcé, où l’éditeur propose d’identifier «sans doute l’ami très cher, Pierre d’Argenson», sans préciser ce qui pourrait appuyer cette identification.
Remarque n°14. — Page 12
«Adolescent il fut l’un des premiers dans la région à posséder une bicyclette». Affirmation non sourcée, mais surtout très peu crédible. Saint-Périer en effet, comme le rappelle notre éditeur, est né en 1877; or dès 1876 la ville d’Étampes organisait des concours cyclistes, dont une médaille est en ligne sur le site du Corpus Étampois depuis plusieurs années.
Remarque n°15. — Page 12
René de Saint-Périer, photographe, se serait constitué «une collection de centaines de clichés». Affirmation non sourcée. S’agit-il de la collection Brinon? Il aurait fallu dire au moins en note: «Conservés dans une collection particulière».
Remarque n°16. — Page 12
«Il s’intéressait aussi au monde politique, manifestant, à la différence de son grand-père royaliste légitimiste, une grande liberté d’esprit et des idées républicaines avancées (…).»
Affirmation non sourcée. Par ailleurs, on se demande quel est le critère objectif qui permet à notre éditeur de considérer que René de Saint-Périer jouissait d’une plus «grande liberté d’esprit» que son grand-père.
Remarque n°17. — Page 12
L’éditeur nous dit de Béatrix, première épouse de Saint-Périer: «Très vite la jeune femme eut de graves problèmes de santé.» On aimerait connaître sa source. Le carnet fait allusion à une crise en 1909, est-ce à quoi il est fait ici allusion? Ou bien notre éditeur a-t-il eu accès à une source qui puisse nous renseigner sur ce point pendant la période de 1903 à 1909, premières années de leur union?
Remarque n°18. — Page 12
L’éditeur nous parle de «la grande affection qui unissait les deux époux», et nous explique immédiatement après cela que «René demeurait très attaché à Morigny dont il s’échappait pour conduire ses premiers chantiers de fouilles, alors que Béatrix résidait volontiers à Paris et Fosseuse.» On a du mal à saisir la logique de ce paragraphe.
Remarque n°19. — Page 12, note 14
L’éditeur nous indique que le grand-père de Saint-Périer, maire de Morigny fut «destitué» de sa charge en 1882, «lors de l’expulsion des congrégations quand il refusa d’accueillir dans la commune un instituteur de la République». Il serait plus exact de dire qu’il présenta sa démission au préfet lorsque fut chassée de l’école communale une institutrice congréganiste qu’on voulait remplacer par une institutrice laïque.
Remarque n°20. — Page 13

L’éditeur paraît bien renseigné sur la vie du couple Saint-Périer de 1903 à 1914, puisqu’il nous dit que pendant cette période, Béatrix était «toujours malade», mais que René lui manifesta «toujours beaucoup de compassion», d’autant qu’elle «montra toujours un courage» que de son côté il «ne cessa jamais de souligner». On aimerait connaître les sources de notre éditeur sur ces points mais il semble qu’il ne fasse en réalité que broder des suppositions à partir de la situation au demeurant peu claire que reflète notre carnet à partir d’août 1914.
Remarque n°21. — Page 13
«Une consultation auprès d’un certain docteur Félix». On se demande pourquoi notre éditeur n’a pas cru devoir déterminer qui était ce personnage qui sans doute est Joseph Félix, de l’institut herniaire de Paris.
Remarque n°22. — Page 14.
L’éditeur nous dit que «René de Saint-Périer (…) n’est pas mobilisable (…)», et précise en note: «Il le sera fin août.» On ne voit pas clairement ce que peut vouloir dire devenir mobilisable.
Remarque n°23 — Page 14.
«Il a été réformé bien avant la déclaration de la guerre». C’est tout à fait inexact. Il aurait fallu consulter la fiche matricule de Saint-Périer, qui n’a pas été «réformé» mais classé en 1897 à Beauvais dans les services auxiliaires en conséquence de sa forte myopie. Il était donc tout à fait mobilisable.
Remarque n°24 — Page 14.
 «Mais conscient de la gravité du moment, par réflexe patriotique, il s’engage dans le service auxiliaire de santé militaire» C’est du roman. Il a un fascicule et se rend à l’endroit qu’il indique: «6 août Je pars à 6 h du matin pour rejoindre mon poste» «7 août Je me présente avant 9 heures au lycée, comme le porte mon livret»
Remarque n°25 — Page 14.
«Il a sans doute sollicité cette affectation». Supposition aussi invraisemblable qu’inutile. C’est à Beauvais qu’il était immatriculé depuis 1897, et c’est donc tout naturellement qu’il y est affecté lors de sa mobilisation Plus loin notre éditeur ira jusqu’à imaginer (page 61 note 75) que Saint-Périer se sera même fait pistonner en 1914 par son beau-père pour être affecté à Beauvais, sans remarquer, comme nous le verrons plus loin, que le dit beau-père était d’ailleurs à cette date décédé depuis plus de dix ans.
Remarque n°26. — Page 16
«Son fidèle ami Joxe». C’est en vain que le lecteur se demande ici de qui il s’agit, et à quand remonte cette belle amitié.
Remarque n°27. — Page 16
«Il dénonce le comportement de certains réfugiés qui avaient profité de l’exode de la population pour piller l’hôpital.» Pour justifier cette reconstitution des faits, l’éditeur cite ce passage du carnet: «Pillage dû aux Français restés à Beauvais après la fuite de la population», manifestement sans comprendre le dit passage, où Saint-Périer dit simplement que ces pillages ne sont pas le fait des Allemands, sans accuser spécialement personne en particulier, sinon évidemment ceux qui étaient restés sur place.
Remarque n°28. — Page 17
L’éditeur relève en note que Saint-Périer a écrit Châteaubriand au lieu de Châteaubriant. Cette faute d’orthographe méritait-elle tant d’honneur?
Remarque n°29. — Page 19
Pour preuve que l’hôpital provisoire où travaillait Saint-Périer «fonctionnait bien», notre éditeur allègue que «en 1916, une revue médicale lui consacra un article en vantant les mérites du médecin-chef Bilhaut». Il faut que notre éditeur n’ait pas lu l’article auquel il nous renvoie, car il ne s’agit là en réalité que d’un entrefilet félicitant Marceau Bihaut de son élévation au grade de chevalier de la légion d’honneur, entrefilet qui se contente de reprendre le seul texte du journal officiel du 14 janvier 1916, qui suit: «Bilhaut Marceau, médecin-major de 1re classe Territorial, médecin-chef d’un Hôpital temporaire, a pu malgré son grand âge, assurer depuis le début de la mobilisation, dans d’excellentes conditions, grâce à une activité de tous les instants, la direction d’un Hôpital de 500 lits, y a pratiqué avec un rare succès, toutes les opérations importantes.»
Remarque n°30. — Page 19 note 38.
«Le 10 avril (…) surmenage et problèmes oculaires». Or Saint-Périer parle seulement d’une «migraine atroce avec vomissements», sans faire mention ni de surmenage ni d’aucun problème oculaire. Notre éditeur propose-t-il ici un diagnostic de son cru?
Remarque n°31. — Page 20
Au sujet de la visite de l’hôpital où travaille Saint-Périer par l’évêque de Beauvais: «Le prélat a dû rencontrer les soignants et visiter quelques malades; en tout cas son passage ne suscite aucun commentaire de la part de l’auteur.» Mais notre éditeur oublie de préciser qu’à cette date le carnet s’étiole tellement  que les notices quotidiennes deviennent presque inexistantes: «5 octobre. L’évêque de Beauvais vient visiter l’hôpital. — 6 octobre. Rien à signaler. — 7 octobre. Je suis de garde.» Sur l’attitude et les dispositions de Saint-Périer relativement à la religion catholique, notre éditeur aurait trouvé à glaner dans d’autre récit autobiographiques de cet auteur, qu’il n’a pas cru devoir parcourir.
Remarque n°32. — Page 21  note 41.
On se demande pourquoi notre éditeur nous parle ici de la photographie aérienne en général. Il aurait été plus intéressant d’analyser l’intéressant document photographique de la même page et sa remarquable scénographie.
Remarque n°33. — Page 22.
Selon notre éditeur, l’auteur «n’est pas dupe du rôle qu’on lui fait jouer, celui d’un ‘réparateur’ de pauvres poilus.» On ne voit pas pour quelle raison le mot ‘réparateur’ est mis ici entre guillemets, ni en quel sens exact il est employé.
Remarque n°34. — Page 23
Notre éditeur semble supposer que l’apparition du tétanos serait simplement due à de «longues semaines» sans procéder «à aucune toilette de propreté ni à aucun changement de linge», ce qui n’est pourtant sûrement pas sa pensée.
Remarque n°35. — Page 24
S’il faut en croire notre éditeur, voilà quelque chose que semble prouver une lecture attentive du carnet de guerre de Saint Périer: «On peut être un médecin de l’arrière et avoir du respect pour ceux qui risquent chaque jour leur vie pour la défense du pays.»
Remarque n°36. — Page 25
On nous dit de l’auteur «qu’en 1916 il a déjà baissé la garde et qu’il ne note plus que peu de choses.» Aucun des dictionnaires que nous avons consulté ne nous a permis de comprendre ce que peut vouloir dire ici l’expression «baisser la garde».
Remarque n°37. — Page 25
Selon notre éditeur, Saint Périer «soutient (…) une initiative comme celle du comte Andrassy, ministre autrichien qui, en avril 1915, publie un mémorandum montrant l’inanité de la guerre suicidaire que s’infligent les Européens».
Tout d’abord, le verbe «soutenir» est ici d’un usage singulièrement inapproprié, concernant une opinion qui est portée dans un carnet intime, et non pas exprimée dans un débat public.
Mais surtout, on se demande d’où notre éditeur sort ce «mémorandum » qui aurait été «publié » par le comte Andrassy. Nous verrons plus loin qu’il y a là une grave confusion historique. Pourquoi notre éditeur ne s’est-il donc même pas donné la peine de se reporter aux journaux auxquels nous renvoie Saint-Périer, ce qui ne demande de nos jours que quelques clics? Il aurait lu par exemple à la une du Journal du 20 juin 1915 qu’il s’agissait là non pas d’un mémorandum, mais, comme le dit Saint-Périer lui-même, d’une simple interview accordée à Budapest par ce ministre à un correspondant local du quotidien danois Berlingske Tidende.
Remarque n°38. — Page 26 note 61
Saint-Périer raconte la mort cruelle d’une fillette tombée et noyée dans un égout de Beauvais qu’il n’a pu ranimer. Et notre éditeur de commenter: «La destinée de cette petite fille innocente évoque forcément chez lui, mais sans qu’il en parle jamais, la faible constitution de sa propre fille Isabelle qui disparaîtra aussi prématurément.» Voilà un beau roman historique, et un bel exercice de divination psychologique.
Il aurait été plus intéressant de se demander pourquoi dans son carnet intime Saint-Périer ne fait pas la moindre allusion en deux ans à sa fille unique Isabelle; et pourquoi, parmi toutes les souffrances morales et les joies qu’il confie à son carnet, de juillet 1914 à juin 1916, il n’est absolument jamais question de cette fillette à laquelle il ne prête visiblement pas le moindre intérêt.
Au reste quelle source permet d’imaginer qu’Isabelle de Saint-Périer ait été dotée d’une faible constitution? Le seul argument que donne en ce sens notre éditeur est qu’elle serait morte jeune elle aussi. Pour autant il n’a pas jugé nécessaire de déterminer la date de sa naissance; et nous verrons plus loin qu’il la fait mourir dix ans avant sa mort.
Remarque n°39. — P. 29
L’expression «en liseré du texte» n’a pas de sens. Faut-il corriger «en lisière du texte»? Mais même alors le sens reste problématique.
Remarque n°40. — p. 29
«Il ne paraît pas avoir beaucoup exercé l’art médical avant la guerre». S’il s’était donné la peine de consulter les autres écrits autobiographiques de Saint-Périer, notre éditeur aurait dit plus exactement que Saint-Périer n’a jamais exercé la profession de médecin avant la guerre.
Remarque n°41. —P. 29
«Dès 1919, il déserte la carrière». Affirmation non sourcée. En réalité Saint-Périer n’a exercé la profession de médecin, comme il le dit lui-même dans un autre texte à caractère autobiographique publié après-guerre, que pendant la guerre, précisément durant trois années et demie, c’est-à-dire donc depuis août 1914 jusqu’aux tout premiers mois de 1917.
Remarque n°42. — p. 29
Pourquoi, après des études de médecine, avoir abandonné la carrière médicale (à la date supposée de 1919 qu’on vient de dire)? La cause en serait double. D’une part, la «mauvaise vue» de Saint-Périer. D’autre part «c’est aussi un homme désabusé, ébranlé au fond de lui-même par le décès brutal de ce frère bien-aimé, pour qui il avait tant tremblé pendant la guerre»; à quoi s’ajoute cette note de bas de page: «Urbain trouve la mort dans un accident d’automobile le 31 décembre 1923». Ainsi donc tout s’explique. Si Saint-Périer abandonne la carrière dès 1919, c’est qu’il a été profondément traumatisé par le décès de son frère en 1923. Et c’est pourquoi sans doute sa fille est muette.
Remarque n°43. — P. 29
Notre éditeur remarque que Saint-Périer est «capable d’évaluer la force militaire de l’Allemagne grâce à un article du Times de Londres» et précise en note qu’il s’agit en l’occurrence du «Times du 26 décembre 1914». Il y a là une faute d’inattention doublée d’une incohérence. En effet cette date du 26 décembre est en réalité celle où Saint-Périer parle dans son carnet de cet article du Times, et il est tout à fait invraisemblable en cette fin de 1914 que Saint-Périer puisse lire à Beauvais un article publié à Londres le même jour. Par ailleurs notre éditeur écrit tout autre chose en note au passage considéré (p. 72, note 116), à savoir qu’il «est plus que probable qu’il s’agit d’une traduction publiée dans l’un des journaux français qu’il consulte.» Et nous verrons que cette deuxième hypothèse est mieux fondée.
Remarque n°44 — P.30 note 85
Nouvelle allusion aux convictions politiques de Saint-Périer qui aurait été un républicain progressiste, pas davantage sourcée que la précédente.
Remarque n°45. — p.32
Le 25 octobre 1914, Saint-Périer revisite Fosseuse «qui, on le sait, appartenait à sa belle-famille.» Affirmation totalement inexacte. Il aurait fallu dire: «avait appartenu à sa belle-famille», car déjà le recensement de 1911 nous montre que ce château a changé de main et qu’il est entre celles du comte de Florian.
Remarque n°46. — p. 32
«Le château a été évacué.» Affirmation également inexacte, puisque Saint-Périer y retrouve Jules Faucard, garde particulier du comte de Florian après avoir été celui des Kergorlay. L’absence du maître de maison et de sa famille ne signifie pas que le château soit abandonné, dans un milieu social où l’on possède presque toujours plusieurs résidences à Paris et en province. Déjà le recensement de 1906 ne trouvait que ce garde particulier et sa famille à Fosseuse.
Remarque n°47. — Page 33
Cliché non sourcé, qui aurait été pris «au Ve congrès archéologique de Beauvais, 1908».
Or le congrès de Beauvais a eu lieu en 1905, tandis que 1908 a vu celui de Caen. Où donc et quand cette photographie a-t-elle été prise?
Remarque n°48. — Page 34
«Après chaque entretien ou chaque visite, il prolonge les découvertes qu’il vient de faire par la consultation des ouvrages qu’on lui conseille» Et sur quoi s’appuie notre éditeur pour ce dire? Sur ce seul exemple donné en note de bas de page: «Ainsi, le 20 février 1915, sans doute conseillé par le docteur Lamotte, il consulte les Mélanges Boissier.» Or rien n’est plus faux. À cette date Saint-Périer nous dit qu’il a parcouru cet ouvrage parce qu’il l’avait trouvé dans la salle de garde, ancien bureau du censeur du Lycée Félix-Faure, où il avait été oublié par un certain M. Fréchac, sur lequel nous devrons revenir plus loin, parce que ce passage pourtant parfaitement clair a inspiré à notre éditeur deux autres identifications totalement erronées.
Remarque n°49. — Pages 34 et 35
Passage des plus intéressant, où notre éditeur expose implicitement ses conceptions sur l’histoire locale, et où il suppose que c’étaient déjà celles du comte de Saint-Périer. «Ses connaissances l’autorisent à mettre en perspective ce qu’il découvre.» Et il conclut l’exemple qu’il en donne par ces mots: «Toujours le besoin de connaître, d’approfondir, de comparer: un vrai chercheur, quoi!» Pourtant à y bien regarder il manque dans ce processus de la recherche une étape essentielle que précisément illustre l’exemple donné: «Passé (…) près d’une chapelle de St-Mathurin (…). Chercher s’il s’agit du St Mathurin de Larchant. Voir A(annales de la) S(ocié)té archéol. du Gatinais vers 1890, etc.». Cette étape essentielle de la recherche scientifique, à laquelle ne songe pas notre éditeur, et qu’il ne reconnaît pas dans le texte qu’il édite, est celle de la vérification de l’hypothèse.
Remarque n°50. — Page 37

Intéressant portrait au pastel d’Urbain de Saint-Périer appartenant à une «collection privée», qui est apparemment celle de son descendant Amaury de Saint-Périer, troisième des quatre personnes que notre éditeur «remercie tout particulièrement», page 2 de couverture.
Remarque n°51. — Page 38
Notre éditeur pense pouvoir démontrer que ce que Saint-Périer n’apprécie pas chez l’ennemi ce sont ses côtés sombres, tandis qu’il continue d’admirer certaines de ses qualités. La belle affaire! mais n’est-ce pas jouer sur les mots et parler pour ne rien dire que d’y voir une «double appréciation contradictoire»?
Remarque n°52. — Page 39
 «L’intime est alors venu prendre une place importante dans sa réflexion.» Cette phrase énigmatique semble signifier tout simplement d’une manière un peu embarrassée que Saint-Périer, déçu par la continuation de la guerre et par ce qu’il découvre du caractère réel de son chef, cesse progressivement de tenir son carnet, et se consacre surtout à une liaison avec la plus jeune et jolie de ses infirmières, Raymonde-Suzanne François, qu’il finira par épouser après avoir divorcé de sa première épouse désormais infirme et aveugle.
Remarque n°53. — Page 40
Le 27 décembre 1914, en compagnie de sa belle infirmière il visite la cathédrale de Beauvais et «il y découvre les beaux vitraux qui font son renom». Si Saint-Périer a assisté au congrès archéologique de Beauvais comme l’affirme notre éditeur en légende à l’un des clichés qu’il édite, les vitraux de Beauvais ne sont plus pour lui une découverte, puisqu’il en a été abondamment traité lors de ce congrès, d’après les actes que nous en avons conservés, et qu’il aurait fallu consulter.
Remarque n°54. — Page 41
En conclusion à sa longue introduction, notre éditeur revient à son hypothèse extravagante selon laquelle «le récit laissé par René de Saint-Périer est un texte recomposé après coup (…) sans doute au cours de l’année 1924, après la mort d’Urbain (…) dans le confort de son bureau à Morigny après la tourmente». À aucun moment pourtant il n’a donné le moindre élément qui puisse la démontrer ni même la rendre seulement plausible.
Remarque n°55. —Page 43
Pourquoi l’éditeur n’a-t-il pas recherché qui était le docteur Félix, question importante pour déterminer la raison de ce voyage à La Haye sur lequel s’ouvre le journal du comte? C’est pourtant un personnage intéressant.
Remarque n°56. — Page 44
Notre éditeur consacre sa note 4 à une amie des Saint-Périer, l’artiste peintre Odette des Garets (note dont il emprunte la teneur semble-t-il, au moins en partie, à son descendant Philippe des Garets, dernière des quatre personnes qu’il «remercie tout particulièrement» à la page 2 de couverture). Il y rappelle qu’on lui doit «un portrait sensible d’Isabelle, leur fille unique, à l’âge de cinq ans».
Ajoutons que ce pastel était en vente tout récemment, mais que le Corpus Étampois n’est malheureusement pas parvenu à l’acquérir au bénéfice du musée d’Étampes, la chose étant d’autant plus déplorable qu’il s’est vendu pour une bouchée de pain.
Remarque n°57. — Page 44
«Le maire de Morigny organise intelligemment, avec décision et autorité, etc.». Pourquoi ne pas l’avoir identifié en note? On a du mal à le comprendre de la part de l’ancien président d’une association d’histoire locale qui précisément réside lui-même à Morigny.
Remarque n°58. — Page  44
«Retrouverai-je les miens et ma pauvre chère maison de Morigny».  Il aurait fallu noter la réminiscence de Du Bellay, Heureux qui comme Ulysse….
Remarque n°59. — Page 45
Saint-Périer cite deux modestes habitants de Morigny parmi ceux qui sont mobilisés et se demande s’il les reverra, Auguste Marin et Fernand Aubin. Notre éditeur note qu’il «ont sans doute sauvé leur vie puisqu’ils ne figurent pas sur le monument aux morts de Morigny». Mais pourquoi en reste-t-il aux simples suppositions? Ne sait-il pas ce que valent les arguments a silentio aux yeux de l’histoire? Il lui suffisait en quelques clics de consulter les fiches matricules des deux intéressés, et surtout celle d’Auguste Marin, qui était né en Seine-et-Marne, et dont le nom aurait donc pu être porté sur un autre monument aux morts que celui de Morigny. Il aurait ainsi trouvé en moins de deux minutes qu’Auguste Marin (classe 1895, numéro matricule à Versailles 4167) est mort à Étampes le 26 mars 1921, et que Fernand Aubin (même classe, matricule 4106) est mort quant à lui le 3 mars 1921 à Montlhéry.
Remarque n°60. — Page 46
Saint-Périer nous parle de son «cousin de Bray». Notre éditeur note «Sans doute Bray, commune de Rully dans l’Oise.» Mais il est bien invraisemblable que René de Saint-Périer qualifie l’un de ses cousins du nom de la commune où il résiderait. C’est là une supposition qui s’oppose tout à fait à son usage constant comme d’ailleurs à celui du milieu social où il évolue. Il s’agit beaucoup vraisemblablement de Fernand Louis Joseph Le Canu de La Jonquière, vicomte de Bray (1883-1971), bien que je n’ai pas réussi à déterminer à quel degré il pouvait être le cousin de Saint-Périer, sans doute à la mode de Bretagne et par alliance, qui en 1911 encore habitait à Paris avec sa mère.
Remarque n°61. — Page 46
«…avec le 11e… la 15e compagnie du 11e…». Il aurait fallu préciser qu’il s’agit ici du 11e régiment d’infanterie territoriale cantonné habituellement à Beauvais, plutôt que de porter ici d’inutiles généralités sur l’alcoolisme et les atrocités allemandes.
Remarque n°62. — Page 47
Le texte imprimé en caractères soulignés aurait dû l’être en caractères italiques, selon la convention typographique universellement admise suivant laquelle les mots soulignés dans les manuscrits sont portés en italiques à l’impression.
Remarque n°63 — Page 47 note 15
Saint-Périer dit être arrivé «aux Planches» où il déjeune, et nous parle aussitôt de sa belle-sœur Camille. Notre éditeur porte en note que «Le hameau des Planches (…) est alors connu pour son château et le pèlerinage à saint Mauxe et saint Vénérand», ce qui ne nous importe pas beaucoup. Le lecteur en revanche était en droit de savoir que le château des Planches était la résidence habituelle d’Urbain de Saint-Périer, ce qui semble voir échappé à notre éditeur.
Remarque n°64. — Page 47 note 16.
Saint-Périer parle de sa belle-sœur en l’appelant «la pauvre Camille», et notre éditeur y voit un «signe» de ce que notre carnet a été rédigé après la mort d’Urbain survenue en 1923. Que répondre à un argument aussi extravagant? Le contexte ne suffit-il pas largement à expliquer une telle expression, concernant une jeune femme qui doit désormais seule élever quatre enfants en bas-âge, tenir un château et une exploitation agricole, et commander à une dizaine de domestiques et d’employés, sans parler de la gestion des autres biens du couple, le tout sous la menace permanente d’apprendre qu’elle est veuve (sans parler de l’oppressante anxiété «perpétuelle» de son beau-frère à ce sujet)? Cela ne suffit-il pas à expliquer une expression aussi anodine que «cette pauvre Camille»?
Remarque n°65. — Page 48
On s’étonne que notre éditeur n’ait pas un mot concernant des personnes telles que Viry, Lecq et le Dr Yvon.
Remarque n°66. — Page 49 note 23
L’éditeur relève à nouveau en note (cf. p. 17 note 31) que Saint-Périer a écrit Châteaubriand au lieu de Châteaubriant. Il aurait été plus simple de corriger le texte, quitte à mentionner l’erreur d’orthographe en note.
Remarque n°67. —Page 50 note 24
Note sur les docteurs Paquet et Vignaud sans qu’ils soient identifiés.
Remarque n°68. — Page 50 note 32
Concernant le site dit de la Pierre Levée, l’éditeur donne une photographie contemporaine en couleur où l’on voit une deuxième pierre en premier plan et annote: «Il s’agit en fait de deux menhirs qui ont donné leur nom au château tout proche». Mais outre qu’on voit mal pourquoi en ce cas le dit château aurait été appelé le «château de la pierre levée», il est clair que cette deuxième pierre est moderne. Seule l’autre apparaît en tout cas sur les cartes postales du début du XXe siècle.
Remarque n°69. — Pages 51 et suivantes.
Plusieurs notes auraient dû être portées, et d’autres sont nettement oiseuses (e. g. les notes 57, 68, 70). Pour la suite nous relevons seulement celles des notes qui présentent des erreurs manifestes.
Remarque n°70. — Page 58 note 67
Saint-Périer note que «Bunel a demandé à Béatrix de revenir à Morigny». Son éditeur note: «Une connaissance du couple Saint-Périer dont l’identité exacte est inconnue.» Il serait plus juste de dire qu’elle est inconnue de ceux qui ne prennent pas la peine de la rechercher. Il s’agit évidemment de Michel Bunel (1851-1924), agent d’assurances, 8 rue de la Cordonnerie à Étampes, membre comme Saint-Périer de la Société des Amis du Musée d’Etampes qui s’est réunie encore le 1er février 1914.
Remarques n°71 à 75. — Page 61 note 75
Quatre erreurs et une lacune dans cette note.
1) Contrairement à ce que nous dit notre éditeur, le château de Fosseuse n’appartenait plus alors aux «Kergorlay», mais depuis au moins 1911 au comte de Florian.
n°72
2) Le château n’était pas non plus «évacué», puisque le gardien y vit encore avec sa famille: ce n’est que l’une des résidences de son propriétaire et son absence ne signifie pas que les lieux soient à l’abandon.
n°73
3) Si Saint-Périer connaît les lieux ce n’est pas pour y avoir séjourné «avec sa jeune épouse dans les premières années du siècle»; il y a surtout souvent et longuement séjourné depuis la mort de son père en 1885; dès lors c’est surtout son oncle de Kergorlay, qui, étant aussi son tuteur, remplaçait la figure du père prématurément disparu.
n°74
4) «D’ailleurs il est possible qu’il ait été affecté à l’hôpital de Beauvais grâce à l’influence de son beau-père». Si notre éditeur avait pris la peine de consulter les pièces essentielles de l’état-civil de l’auteur, il saurait que le mariage de René de Saint-Périer avec Béatrix de Kergorlay avait été célébré en 1903 dans l’intimité parce qu’elle venait juste de perdre son père. Il n’est donc pas «possible» que Geoffroy de Kergorlay, mort en 1903, ait pistonné son gendre en 1914.
n°75
5) Enfin, concernant le garde particulier qui accueille Saint-Périer à Fosseuse, il aurait fallu, au lieu de paraphraser le texte en parlant de «Jules, un domestique de confiance», dire qu’il s’agissait de Jules Faucart, garde-particulier qui était déjà en fonctions lorsque le château était encore la propriété des Kergorlay.
Remarque n°76. — Page 63 note 82.
Les «Ostrea bellovacensis» se sont pas du tout une «variété d’huîtres», mais une espèce d’huîtres fossiles.
Remarque n°77. — Page 64 note 84
Il aurait fallu dire duquel des deux Paquet il s’agissait, du père ou du fils.
Remarque n°78. — Page 65 note 89
Il aurait fallu noter que le roman en question venait de paraître (Paris, Plon-Nourrit, 1914).
Remarque n°79. — Page 66
«(…) que restera t’il (…)». On se demande quel est l’intérêt de conserver dans cette édition une faute d’orthographe due à la seule inattention de l’auteur de notre carnet (qui s’explique d’ailleurs par la «fatigue» dont il dit alors souffrir).
Remarque n°80. — Page 66 note 93
«On serait tenté de saluer la lucidité de l’auteur si nous ne savions pas que le texte a été rédigé… après la guerre.» Tout d’abord on peut se demander de quelle «lucidité» il est ici question, concernant un passage où on ne trouve que des appréciations subjectives: «triomphe…écrasé… formidable... puissante… monstrueuse iniquité… espérer… infamie….». D’autre part, il faut rappeler que l’éditeur n’a toujours  pas fourni le moindre argument plausible en faveur de l’hypothèse qu’il considère ici comme démontrée.
Remarque n°81. — Page 67
Photographie d’une salle d’hôpital quelconque. Pourquoi ne pas avoir ici reproduit l’une des cartes postales disponibles représentant plus précisément l’intérieur de l’hôpital provisoire de Beauvais?
Remarque n°82. — Page 69
«Nous aurons bien peu de chances d’obtenir la victoire, etc.» L’éditeur se demande si la phrase qui commence par ces mots n’aurait pas été écrite après la guerre. N’est-elle pas au contraire l’une des nombreuses phrases qui auraient dû lui faire renoncer à cette hypothèse?
Remarque n°83. — Page 72 note 116
Saint-Périer alléguant le 26 décembre 1914 un article du Times, l’éditeur suppose en note avec raison qu’il ne doit connaître cet article que par sa traduction dans un journal français (hypothèse qu’il ne fait pas encore dans son introduction p. 29 où il écrit au contraire, note 81: «Times du 26 décembre 1914»). Mais pourquoi n’a-t-il pas consulté les journaux du jour considéré? Il aurait ainsi trouvé en deux ou trois clics qu’il s’agissait ici d’un article du lieutenant-colonel Charles Repington (1858-1925), dont Saint-Périer a lu une version française à la une du Journal du 26 décembre 1914.
Remarque n°84. — Page 73 note 122.
Paraphrase bien inutile.
Remarque n°85. — Page 73 note 123.
«alors que (…) leur union chancelle». C’est possible, mais nous n’avons aucune preuve en cette fin de 1914, le divorce n’ayant eu lieu qu’en 1920.
Remarque n°86. — Page 75 note 125.
Il aurait fallu noter ici que Saint-Périer a déjà fait allusion dans son carnet à ce poème de Du Bellay, Heureux qui comme Ulysse… (dès le 6 août), et que déjà il y renvoyait dans son journal de voyage de 1900.
Remarque n°87. — Page 80 note 144
«Mme de L.» serait pour notre éditeur une «personne impossible à identifier»; mais le milieu dans lequel évolue alors Saint-Périer à Beauvais n’est pas si vaste qu’il soit impossible avec un peu de recherches de déterminer de qui il est ici question. Il doit s’agir de la grosse, maladroite et arrogante infirmière qui dans le pamphlet de 1919 s’appelle «Mme de Sétal».
Remarque n°88. — Page 81 note 151
Saint-Périer dit qu’il a «vu Polak» et notre éditeur nous dit qu’il s’agit d’un «ophthalmologue parisien de sa connaissance»; il a sans doute raison, mais il n’a pas vérifié, car en 1913 il existe à Paris deux médecins quasi-homonymes tous deux diplômés de la faculté de Paris, le premier reçu le 22 juillet 1901 , Aaron Polak, 7 place d’Italie dans le 7e arrondissement; le deuxième reçu le 31 mai 1900, Aaron ou Aron Polack, 7 avenue de Villiers dans le 17e arrondissement . Malgré l’orthographe présentée par le carnet de Saint-Périer (Polak), il doit s’agir du second qui est ophtalmologue (Polack).
Remarque n°89. — Page 82 note note 152.
Saint-Périer parle d’un certain Bargmann que son éditeur déclare «non identifié». Pourtant il n’y a pas beaucoup de Bargmann dans l’Oise! C’est évidemment Louis Bargmann, engagé volontaire de 1870, titulaire de la médaille commémorative et de la médaille militaire de 1870, ancien administrateur des docks de Marseille, qui au moins de 1909 à 1920 avec son épouse Thérèse Cécile d’Avon de Collonge séjourne au château de Boulaines à Méru dans l’Oise, ainsi qu’à Compiègne, 4 boulevard Victor-Hugo et Paru, 21 rue de Londres (Dictionnaire des châteaux 23, 1909, p. 46; 34, 1920, p. 49), décédé en décembre 1930 (Comœdia 24/6544, 19 décembre 1930, p. 4).
Remarque n°90. —Page 82
Le texte édité est évidemment fautif lorsqu’il évoque «le bellovacum gallo-romaci», non-sens absolu en quelque langue que ce soit. Il est bien certain que le manuscrit de Saint-Périer porte «le bellovacum gallo-romain».
Remarque n°91. — Page 83 note 159
Saint-Périer parle d’une certaine rumeur qu’il qualifie «énorme stupidité». L’éditeur fait remarquer que pourtant cette rumeur «n’est pas infondée puisque peu après etc.» Et il a tout à fait raison mais il aurait dû observer aussi qu’on a là l’une des innombrables preuves que ce carnet a été rédigé au jour le jour et qu’il n’a jamais été retouché.
Remarque n°92. — Page 84 note 163
Dans cette note consacrée au docteur Lamotte, l’éditeur se contente de paraphraser les données du texte du carnet et, il en conclut vaguement que c’est «un médecin de Beauvais», alors qu’une recherche sommaire lui aurait montré que, primo, Louis Lamotte (1860-1923) était le chirurgien de l’Hôtel-Dieu de Beauvais; secundo, qu’il a donné des publications savantes dans un bulletin d’érudition locale; tertio qu’il a été chevalier de la légion d’honneur; quarto, qu’il a deux statues à Beauvais; et surtout, quinto, que c’est Saint-Périer lui-même qui a rédigé sa notice nécrologique en 1924, où il le présente comme son ami.
Remarque n°93. — Page 85, note 169
Saint-Périer dit avoir lu avec intérêt, le 20 février 1915, «quelques chapitres des Mélanges Boissier, ouvrage oublié par M. Fréchac à la salle de garde, ancien cabinet du censeur du lycée». Notre éditeur a bien vu qu’il s’agissait là d’un ouvrage d’érudition concernant «la littérature et les antiquités romaines» (note 85). N’importe quel lecteur attentif induirait de ce passage que le dit Fréchac est l’ancien censeur du lycée, et que le même personnage, avant d’avoir été censeur, avait probablement été professeur de lettres classiques, ou au moins un historien. Mais notre éditeur pense pour sa part que c’est «sans doute un collègue de Beauvais», c’est-à-dire un médecin. Plus loin, de plus il confondra d’autorité le dit «Fréchac» avec un certain «Fessart» qui vient voir Saint-Périer le 10 septembre 1915: «Il s’agit du collègue qui, quelques mois auparavant, avait oublié dans la salle de garde un ouvrage etc.» (page 112, note 269). On se rappelle qu’on a une troisième interprétation de cet épisode dans l’introduction, tout aussi indéfendable et contraire aux données du texte: «le 20 février 1915, sans doute conseillé par le docteur Lamotte, il consulte les Mélanges Boissier.» (p. 34, note 97).
Remarque n°94. — Page 90 note 179
Saint-Périer dîne avec une certaine «Yvonne des Roys» et se souvient: «que d’années depuis que je la voyais venir à Fosseuse!» Notre éditeur en tire la conclusion exacte que c’était «sans doute une amie proche des Kergorlay» qui l’invitaient à Fosseuse. Mais pourquoi ne pas avoir cherché plus loin et ne pas dire qu’il s’agit évidemment de Marie Charlotte Yvonne de Robin de Barbentanne, comtesse des Roys depuis qu’elle a épousé, en 1901, Étienne Jacques Lazare des Roys d’Eschandelys?
Remarque n°95. — Page 91
Saint-Périer porte «Nil novi» et son éditeur note justement «’Nihil novi’, rien de nouveau». Il aurait fallu rappeler que c’est une citation du livre biblique de l’Ecclésiaste, qui convoque l’idée d’une réflexion désabusée sur la vanité des choses humaines.
Remarque n°96. — Page 96
Belle photographie qu’il aurait fallu sourcer en donnant sa cote (aux Archives départementales de l’Oise, qui l’ont mise en ligne, d’ailleurs). Elle aurait mérité plus que d’être simplement reproduite en petit format sans commentaire ni encart, alors qu’elle présente au verso de très nombreuses informations à recouper avec celles du carnet, qui n’ont même pas été exploitées: c’est ce qui s’appelle gâcher de la matière.
Remarque n°97. — p 97 note 201
Saint-Périer écrit «3 brachiopodes (Terebratula?)». L’éditeur annote: «Mollusques marins bivalves du tertiaire.» C’est inexact: Les Brachiopodes, dont le genre Terebratula, ne sont pas des mollusques bivalves mais une classe distincte (Brachiopodes) d’animaux avec une coquille composée de 2 valves.
Remarque n°98. — p. 97 note 202.
Erreur: le terme «pélécypodes» est tout simplement un mot ancien pour désigner les bivalves.
Remarque n°99. — Page 98 note 212
Cette note nous fait comprendre sur quelle erreur repose un passage de l’introduction qui nous avait d’abord paru incompréhensible (page 25). Saint-Périer dit avoir lu dans les journaux du 20 avril 1915 une interview du comte Andrassy, diplomate autrichien. Comme nous l’avons dit plus haut, c’est à la une du Journal du 20 juin 1915 que Saint-Périer a lu le résumé de cette simple interview accordée à Budapest par ce ministre à un correspondant local du quotidien danois Berlingske Tidende. Mais notre éditeur pense qu’il s’agit ici d’un «mémorandum d’avril 1915» publié par «le comte Julius Andrassy, ministre autrichien». Il confond visiblement cet épisode avec une affaire remontant à la génération précédente, lors de la crise des Balkans. Il y a eu en effet deux comtes Gyula Andrássy, le père et le fils, tous deux diplomates austro-hongrois. Le fils est celui qui a donné une interview retentissante en avril 1915. Il ne faut pas le confondre avec son père qui, lui avait produit, à la fin de 1875, la célèbre «note Andrassy», d’où avait découlé, au début de 1876, le fameux «mémorandum de Berlin». Il semble donc bien que notre éditeur a été ici trahi par sa mémoire.
Remarque n°100. — p. 99 note 214.
Erreur: Le terme «lamellibranches» est un synonyme antérieur de bivalves, donc de la classe.
Remarque n°101. — Page 99 note 215
Au lieu de noter que «un butor et un imbécile» sont des «termes très vifs», notre éditeur aurait dû identifier le «Dr Whisman» que Saint-Périer nous présente comme «le nouvel inspecteur du service de santé de la IIe armée» en précisant qu’il a «le grade de général». Il n’était pourtant pas bien difficile de corriger ici l’orthographe du carnet, puisqu’il s’agit en réalité du docteur Maurice non pas Whisman, mais Wissemans (1850-1940).
Remarque n°102. — Page 100 note 222
«Le croiseur…. coulé… par un sous-marin… fit près de 700 morts.» N’est-ce pas plutôt le sous-marin?
Remarque n°103. — Page 101
On aurait aimé savoir d’où sort cette très intéressante affiche du concert du 2 mai 1915.
Remarque n°104. — Page 104
«Morigny, pauvre maison», nouvelle réminiscence de Du Bellay, qu’il aurait fallu noter, comme amusante, parlant du château du même nom.
Remarque n°105. — Page 105 note 240.
Note inutile.
Remarque n°106. — Page 106 note 243
Note inutile.
Remarque n°107. — Page 107 note 247
Note inutile.
Remarque n°108. — Page 109 note 255
L’éditeur note que «Yvart» est «un collègue pharmacien»; il tire apparemment cette information de la légende de la photo reproduite p. 96 de cette édition, et qui porte plus précisément: «Yvard, pharmacien à Beaumont-sur-Oise».
Remarque n°109. — Page 109
Pourquoi conserver l’orthographe aberrante «sera t’elle» au lieu de sera-t-elle»?
Remarque n°110. — page 110 note 262
Inutile
Remarque n°111. — Page 111 (4 septembre 1915)
«Comme me le disait le Dr Douriez». Il aurait fallu noter que c’était le 22 décembre de l’année précédente (p. 69 de cette édition).
Remarque n°112. — Page 111 (7 sept.)
«Vilaine conduite de l’amb(ulancier?) C. A. 7 vis-à-vis du chef.» Le fait d’interpréter «amb.» par «ambulancier» semble indiquer que l’éditeur ne comprend pas que C. A. veut dire «corps d’armée». Il s’agit ici de la septième ambulance du deuxième corps d’armée; le numéro du corps n’est pas exprimé parce qu’il est évident. Autrement Saint-Périer aurait écrit «l’ambulance 7/2».
Remarque n°113. — Page 112 note 269
On ne comprend pas pourquoi l’éditeur propose de confondre ce «Fessart» avec le «Fréchac» dont il a été question antérieurement comme ayant oublié un livre dans la salle de garde. Le premier est clairement identifiable à un docteur en médecine, Gaston Fessart, qui a passé sa thèse en 1903 comme Saint-Périer, tandis que le second est un spécialiste du littérateur, philosophe et homme politique romain Senèque, qui a d’ailleurs édité plusieurs de ses œuvres dans la fameuse collection bilingue Guillaume Budé, à savoir François Fréchac. Ni l’un ni l’autre n’ont par ailleurs aucun rapport avec le docteur Lamotte que notre éditeur évoque aussi en introduction, sans raison claire, comme ayant peut être conseillé à Saint-Périer la lecture de ce livre oublié par Fréchac-Fessart.
Remarque n°114. — Page 113 note 274
Note inutile.
Remarque n°115. — Page 114
Saint-Périer nous dit le 9 octobre 1915 que son ami «Estienne est nommé médecin-chef au dépôt des éclopés». Notre éditeur annote: «Sans doute un service de rééducation pour blessés des membres inférieurs». Dans le doute il fallait ouvrir un dictionnaire, par exemple celui d’Alain Rey: «Éclopé s’emploie comme nom au propre (‘soldat’ et par extension ‘personne légèrement blessé(e)’»).
Un fait divers rapporté par le Petit Journal du 19 octobre 1915, soit quelques jours seulement après la nomination d’Estienne au dépôt des éclopés de Beauvais, montre bien que ces derniers ne sont que des blessés légers: «Un militaire de l’hôpital de Beauvais tue sa maîtresse — Beauvais, 18 octobre. — À Beauvais, un drame vient de se dérouler dans des circonstances particulièrement tragiques. — Blessé en Artois et soigné au dépôt des éclopés de la ville, le soldat G... de la classe 1912, avait fait venir son amie, Mlle C... femme de chambre à Paris. — La jeune fille était depuis quelques jours auprès de son ami quand les parents de ce dernier arrivèrent. Le père, honnête fabricant de Paris, fit quelques reproches à son fils et le pria de congédier immédiatement la jeune fille. Le soldat s’y refusa. — Les parents partis, les deux jeunes gens décidèrent d’en finir avec la vie. Après une nuit passée dans un hôtel de notre ville, ils se dirigèrent vers la campagne. Arrivés à la carrière de Sénéfontaine, le jeune homme abattit son amie d’une balle dans la tête, puis s’enfuit non sans avoir tiré encore six balles sur la malheureuse victime. En route, rencontrant des passants, il demanda où il pourrait trouver une rivière pour y pêcher. On lui indiqua le chemin de l’Avelon. Arrivé sur la rive, il déposa son képi, son couteau et son porte-monnaie sur la berge, puis se jeta à l’eau. Mais la rivière étant peu profonde, il ne réussit pas à mettre son projet à exécution et il alla se réfugier piteusement chez un cafetier du voisinage à qui il raconta son extraordinaire aventure. — La malheureuse victime fut retrouvée dans la carrière elle était déjà raidie par la mort. — L’assassin, ramené à la caserne Watrin a été évacué par l’autorité militaire.»
On voit que notre homme n’avait pas besoin de rééducation des membres inférieurs.
Remarque n°116. — Page 116 note 289
Note inutile.
Remarque n°117. — Page 118 note 295
Saint Périer: «été à Paris… sous prétexte de l’emprunt.» Note de l’éditeur: «René de Saint-Périer a sans doute prétexté la souscription pour se rendre à Paris.»
Remarque n°118. — Page 119 note 297
Note inutile.
Remarque n°119 — Page 120 note 301
Reprise en conclusion d’une thèse développée en introduction mais qui n’a jamais été démontrée en cours de route, selon laquelle notre carnet aurait été retouché en 1924.
Remarque n°120. — Page 121
«Publier un témoignage est une aventure car tout document a besoin d’être analysé, éclairé par un commentaire et l’on redoute alors d’en trahir le sens et par là de trahir l’auteur». Nous ajouterons pour notre part que l’on ne s’improvise pas éditeur intellectuel de sources primaires: il y faut beaucoup de recherches et de vérifications méticuleuses, qui ne peuvent être menées qu’avec un savoir-faire qui s’acquiert par de longues années de pratique. C’est un autre savoir-faire que celui d’historien.
Remarque n°121. — Page 121
«Une personne d’une grande rectitude, un sage». Voilà une appréciation toute subjective. Saint-Périer était certes une belle âme. Mais on ne peut que remarquer l’absence totale d’intérêt qu’il montre dans ce carnet pour sa fille, et l’intérêt croissant qu’il y montre pour une jeune et jolie infirmière pour laquelle il finira par divorcer de sa femme malade et infirme. L’historien, sans doute, n’a pas à juger de ce genre de choses: mais il n’a pas non plus à donner dans la légende dorée.
Remarque n°122. — Page 122
Magnifique cliché dont on aurait aimé connaître l’origine.
Remarque n°123. — Page 123
«Il a perdu son père alors qu’il venait d’avoir vingt ans.» C’est tout à fait inexact: il n’avait que huit ans à la mort de son père, comme il le raconte lui-même ailleurs.
Remarque n°124. — Page 123
«… puis sa mère, deux ans plus tard». Corrigez: douze ans plus tard.
Remarque n°125 — p. 123
«Jeter sur le papier les mots évoquant un passé d’angoisses et d’interrogations a sans doute aidé cet homme à surmonter la disparition de ce frère tant aimé, tout en lui rendant hommage». À force de répéter indéfiniment l’hypothèse selon laquelle Saint-Périer aurait remanié son carnet de guerre en 1924, notre éditeur a visiblement fini par se persuader qu’il l’avait démontrée. Aussi fastidieux que cela soit, il nous faut donc relever ici encore, au hasard, quelques échantillons de ce carnet qui en démontrent le caractère absolument invraisemblable.
20/11/1914: «je n’ai plus le courage de rédiger ce carnet» — 12/09/1915: «chapelle St Mathurin… Chercher s’il s’agit du St Mathurin de Larchant. Voir A. Sté archéol. Du Gâtinais vers 1890 une note détaillée sur ce Mathurin». Si Saint-Périer avait mis au propre ses notes il aurait fait alors la recherche pour avoir la réponse et ne les aurait pas recopiées bêtement. — 23/08/1915: «recueilli un coléoptère qui me paraît être un longicorne. À déterminer exactement s’il m’est jamais donné de pouvoir, un jour m’occuper d’entomologie» — 19/09/14, p.51: «…Pièce extrêmement intéressante (bibliog. à consulter ultérieurement) — 4/10/14 p 54 «Granit à contexture grossière,… contient-il du fer? Point à rechercher.» — p. 68, du 9 au 15 décembre: «Toujours énormément de travail; …, le soir venu, je n’ai plus le courage de rédiger ce carnet…» — p.  99: «Voir si Gautrelet, qui est agrégé de physiologie, a quelque opinion intéressante sur la question.» — p. 103 17/07/1915: «Rien écrit depuis deux mois. Beaucoup de travail.» — p. 117 29/10/1915: «par les mauvaises nouvelles que Camille (la femme d’Urbain) me donne de Béatrix? Cette journée eut été si belle sans la tristesse de cet état que je devine malgré les réticences de Camille» — p. 118 2/11 au 16/11: «Mauvaises nouvelles de la pauvre Béatrix. Je suis très triste et découragé. Que faire? devant cette situation sans issue.» — p. 118 16/11 au 31/12: «Toujours attristé et inquiet de Béatrix. Eté à Paris le 15 Xbre sous prétexte de l’emprunt. B. est mal et je ne peux rien pour elle…» — p. 119 25/06/1916: «Béatrix semble être un peu mieux. Peut-on encore espérer?» — p. 120 29/06/1916: «quelle que soit l’issue de cette guerre lamentable», «nous puissions profiter même d’une victoire, au cas peu vraisemblable où nous l’obtenions.».
Remarque n°126. — Page 123
«…Isabelle, sa fille. Elle mourut jeune, autour de vingt ans, en 1926.» C’est tout à fait inexact: elle est morte en 1936. Cette erreur est d’autant plus étonnante que la fille unique des Saint-Périer a sa tombe au cimetière de Morigny, commune de notre éditeur, où tout le monde peut lire qu’elle était née à Paris le 6 mai 1906 et qu’elle y décéda le 21 mai 1936, âgée donc de 30 ans.
Remarque n°127. — Page 123
«Qu’il n’en parle jamais [d’Isabelle] dans son carnet est pour le moins étonnant;  mais elle n’en fut sans doute pas moins plus tard une douleur secrète.» Il n’y a rien de secret dans le scandale épouvantable dont Isabelle de Saint-Périer et ses parents furent les victimes en 1931.
Remarque n°128. — Page 124
«Divorcé de Béatrix immédiatement après la guerre…» C’est inexact, le divorce n’a été prononcé qu’en 1920.
Remarque n°129. — Page 124
«Suzanne Raymonde». Il fallait dire: «Raymonde Suzanne».
Remarque n°130. — Page 124
L’éditeur évoque le second divorce de Saint-Périer, cette fois d’avec Raymonde Suzanne François en 1948, si étrangement suivi comme on sait d’un remariage presque immédiat avec la même. Il n’ébauche aucun élément d’explication de cet ultime rebondissement de la vie de Saint-Périer. Que faut-il penser de cette énigme? Nous ferons remarquer pour notre part que si le second mariage entre Saint-Périer et Raymonde Suzanne François a fait l’objet d’un contrat devant notaire, comme le note notre éditeur, en revanche l’acte du premier mariage de 1920, qu’il ne paraît pas avoir consulté, mentionne qu’il n’avait pas été fait alors de contrat de mariage.
Remarque n°131. — Page 3 de couverture
Il est peut-être, sinon exagéré, du moins aventuré de dire que tous les ouvrages listés dans cette page, à savoir ceux qui ont été publiés par l’association Étampes-Histoire, ou au moins sous son égide, «font désormais référence». Les éloges en effet ne valent que lorsqu’on les reçoit d’autrui.
Remarque n°132. — Page 4 de couverture
«Cette guerre totale frappe René de Saint-Périer dans ce qu’il a de plus intime: le frère, Urbain, qui combat en première ligne, la famille qui subit le contrecoup du conflit etc.» On voit mal en quoi Urbain est spécialement «frappé». Il s’en tire plutôt bien, à ce qu’il ressort de sa fiche matricule, qu’il aurait fallu consulter. Quant à «la famille», il faut bien dire qu’elle brille par son absence dans le carnet.
Remarque n°133, et avant-dernière.
On reste étonné de la liberté avec laquelle notre éditeur imagine, d’une manière d’ailleurs assez vague, la suite de la vie de Saint-Périer après le 29 juin 1916, date à laquelle il arrête de tenir son carnet.
Il n’a pas cherché à savoir ce qu’est concrètement devenu le comte depuis cette date jusqu’à la fin de la guerre, et n’a pas cru devoir explorer les sources primaires les plus importantes comme les autres œuvres autobiographiques de l’auteur, ni même les simples pièces d’état civil les plus élémentaires, qui lui auraient évité plusieurs erreurs chronologiques majeures, ainsi que bien des «peut-être» et des «sans doute».

Remarque n°134 et dernière
Qui a jamais réécrit son journal intime, sauf à vouloir le publier? Cette hypothèse d’un remaniement, daté de plus on ne sait pourquoi de 1924, est invraisemblable en elle-même.
Elle ne serait d’ailleurs même pas venue à l’esprit de notre éditeur, s’il avait pris la peine de lire l’amusant pamphlet que Saint-Périer a publié dès 1919 sous le titre d’Hippocrate chez les Pingouins, avec une préface d’Anatole France. Tout y est dit d’une manière autrement plus plaisante que dans son journal.

En conclusion, souhaitons longue vie à la nouvelle collection «Retour aux sources» inaugurée par cet ouvrage si intéressant et joliment illustré en couleurs.
 


BIBLIOGRAPHIE

Édition
     Jacques GÉLIS, Un médecin dans la tourmente, le carnet de guerre de René de Saint-Périer (1914-1916) [17 cm sur 23; 124 p.; 48 illustrations en couleurs; 301 notes de bas-de-page], Étampes, Association Étampes-Histoire [«Collection Retour aux Sources» n°1], décembre 2016 [14 €].

Recension

     Bernard MÉTIVIER et Bernard GINESTE, «Cent trente-quatre remarques critiques sur l’édition récente d’un carnet de guerre du docteur René de Saint-Périer (décembre 2016)», in Corpus Étampois, www.corpusetampois.com/cbe-21-2017remarques134.html, 2017.

 
  Toute critique, correction ou contribution sera la bienvenue. Any criticism or contribution welcome.
Source: L’ouvrage considéré.
   
Explicit
  
SommaireNouveautésBeaux-ArtsHistoireLittératureTextes latinsMoyen Age NumismatiqueLiensRemerciementsAssociationNous écrire - Mail