BHASE n°35 (décembre 2016)
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Le monde des Saint-Périer — tome 5 LE SUD-ESSONNE AU XVIIe SIÈCLE

Préface. — Bibliographie. — 01. Le XVIIe siècle. — 02. Un bourgeois d'Étampes au XVIe siècle. Ses biens et sa descendance. —

03. Autour d'une énigme généalogique. Les Paviot de Boisy-le-Sec et les Paviette de Lorraine. — 04. Le fief des Barbacanes aux Émondants. — 05. La litre seigneuriale de Bouville. — 06. Nicolas Glasson, vicaire de Saint-Germain-lès-Étampes, 1602-1637. — 07. Le sceau de Louis d'Archambault, abbé de Morigny. — 08. Les Mazarinades à l'époque du siège d'Étampes en 1652. — 09. Le graduel de la Congrégation de Notre-Dame d'Étampes, 1677. — 10. La Borne seigneuriale de Saclas. — 11. Borne seigneuriale de Saclas.

bhase n° 35—décembre 2016

Le Sud-Essonne au XVIIe siècle



ISSN 2272-0685

Publication du Corpus Étampois Directeur de publication : Bernard Gineste 12 rue des Glycines, 91150 Étampes redaction@corpusetampois. com

BHASE n°35

Bulletin historique et archéologique du Sud-Essonne


publié par le Corpus Étampois

décembre 2016

Le monde des Saint-Périer. Tome 5

Le Sud-Essonne

Edité par le Corpus Etampois


au XVIIe siècle

COMITÉ DE LECTURE

Bernard Gineste Bernard Métivier Bernard Minet f Bernard Paillasson

Préface

Voici le cinquième volume des Œuvres Locales Complètes du comte de Saint-Périer. Il regroupe toutes les études qu’il a consacrées, de 1912 à 1949, à l’histoire du XVIIe siècle dans l’ancien arrondissement d’Étampes, qui correspond grosso modo à la partie méridionale de l’actuel département de l’Essonne.

On trouvera donc ci-après, tout d’abord, le quatrième chapitre de la Grande Histoire d’une petite ville, que Saint-Périer a consacré en 1938 à l’étude du Grand Siècle, sous le titre « Le XVIIe siècle ».

On y trouvera ensuite neuf études particulières qu’il a dédiées à l’histoire du pays d’Étampes, et qui traitent pour l’essentiel de faits survenus pendant cette même période, même si, naturellement, l’auteur est souvent amené à déborder les limites du XVIIe siècle en amont ou en aval.

René de Saint-Périer (A1877-1950)

Bibliographie des articles ici réédités

A.    — Présentation générale

01.    René de Saint-Périer, « Le XVIIe siècle », in Id., La grande histoire d’une petite ville, Étampes, Étampes, Édition du Centenaire de la Caisse d’Épargne, 1938, pp. 51-69. — Réédition posthume (et surtout abrégée) in Étampes. Bulletin Officiel Municipal 4 (hiver 1964-1965), pp. 25-31.

B.    — Études de détail

02.    « Un bourgeois d’Étampes au XVIe siècle. Ses biens et sa descendance », in Conférence des Sociétés savantes de Seine-et-Oise 10 (1931), pp. 98-110. — Tiré à part : Rodez, P. Carrère, 1931.

03.    René et Raymonde-Suzanne de Saint-Périer, « Autour d’une énigme généalogique. Les Paviot de Boissy-le-Sec et les Paviette de Lorraine », in Annales de la Société historique et archéologique du Gâtinais 37 (1925), pp. 118-163. — Tiré à part (26 cm ; in-8° ; 48 p. ; figures ; 2 folios de planches illustrées), sans mention de lieu ni d’éditeur, 1925.

04.    René de Saint-Périer, « Le fief des Barbacanes aux Émondants », in L’Abeille d’Étampes 101/44 (1er novembre 1912), p. 2. — Tiré à part (in-12 ; 4 p.), Étampes, Lecesne, 1912.

05.    « La litre seigneuriale de Bouville », in Bulletin de la Société des Amis d’Étampes et de sa région 2 (1er semestre 1947), pp. 19-20.

06.    « Nicolas Glasson, vicaire de Saint-Germain-lès-Étampes, 1602-1637 », in L’Abeille d’Étampes (12 mars 1921), sous la rubrique « Variété historique ». — Tiré à part (in-16 ; 8 p.), Étampes, Terrier frères, 1921.

07.    « Le sceau de Louis d’Archambault, abbé de Morigny », in

Bulletin de la Société des Amis du Musée d’Étampes 4 (1921), pp. 29-31.

08.    « Les Mazarinades à l’époque du siège d’Étampes (1652) », in Bulletin de la Société Les Amis d’Étampes et de sa région 5 (décembre 1948 - janvier 1949), pp. 77-80.

09.    « Le graduel de la Congrégation de Notre-Dame d’Étampes, 1677 », in Bulletin de la Société Les Amis du Musée d’Étampes 3 (1919-1920), pp. 21-29.

10.    « La Borne seigneuriale de Saclas », in L’Abeille d’Étampes 109/35 (21 août 1920), p. 1.

11.    « Borne seigneuriale de Saclas », in Bulletin de la Commission des Antiquités et des Arts de Seine-et-Oise 41-42 (1924), pp. 133-134.

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01. Le xvne siècle 1

Gabrielle d’Estrées, duchesse d’Étampes.Les derniers possesseurs du duché.Passages de Louis XIII à Étampes.— La vie joyeuse. — La peste. — Encore la guerre civile. — Les frondeurs occupent Étampes. — Premier siège et batailles de rues. — Le second siège. — Ruines, épidémies et désolation. — La plus malheureuse ville du royaume. — Méfaits des garnisons. — Louvois contre le maire. — Passages de Louis XIV à Étampes. — Nos premiers historiens.

Nous avons vu que le duché d’Étampes avait été donné par Henri III, en 1582, à Marguerite de Valois, la femme du futur Henri IV. Simple usufruitière, elle ne joua aucun rôle politique dans son duché, n’y vint sans doute jamais et n’y a pas laissé de marques quelconques de son intérêt. Il en avait été ainsi, à des degrés divers, pour d’autres donataires du duché, ou même plus anciennement du comté, mais désormais ce sera la règle pour tous ceux qui seront honorés du titre de duc ou duchesse d’Etampes. Ils touchent les revenus du domaine, sans y résider, sous le contrôle du Parlement et de la Chambre des comptes, mais, en raison même de la puissance acquise par la monarchie, les pouvoirs politiques, administratifs, militaires, judiciaires, 1 appartiennent d’abord et tous au roi et à ses fonctionnaires, ensuite, et seulement pour quelques-uns, aux seigneurs laïcs et ecclésiastique du bailliage et à la municipalité.

En 1598, Marguerite de Valois, alors reine de France, céda son duché à Gabrielle d’ Estrées, marquise de Monceaux, duchesse de Beaufort, la maîtresse d’Henri IV depuis 1590. Cette donation peut être jugée quelque peu singulière, même si l’on tient compte de la |52 liberté des mœurs de l’époque, et du roi, en particulier. Mais elle s’explique aisément : le ménage royal était en désaccord complet, non pas seulement à cause des infidélités du Béarnais trop galant ; la reine, d’ ailleurs elle-même fort galante, s’était séparée de lui dès 1585 pour prendre le parti de ses pires ennemis et vivait maintenant recluse, presque prisonnière en raison de ses intrigues, au château d’Usson, près d’Issoire. Henri IV était décidé depuis l’année 1593 à faire annuler son mariage, mais il lui fallait le consentement écrit de Marguerite de Valois : elle le lui fit chèrement payer par des pensions, des règlements de dettes, des places, des abbayes. Ces marchandages durèrent des années. La donation à Gabrielle d’Estrées en est encore un, sous une forme déguisée : par des complaisances à l’égard de la favorite, un supplément d’avantages pouvait être obtenu du roi. Le duché d’Etampes dut faire l’objet de quelque transaction de ce genre.

À la mort prématurée de Gabrielle d’Estrées, en 1599, le duché d’Étampes fut transmis à son fils aîné, César, duc de Vendôme, qu’elle avait eu d’Henri IV en 1594. Légitimé par le roi, il avait, en outre, été mis en mesure de recevoir « toutes sortes de dons » et, en particulier, la succession éventuelle de sa mère, dès 15962, par des lettres patentes. La maison de Vendôme fut usufruitière du duché pendant plus d’un siècle Louis, duc de Mercœur, fils de César, le reçut en dot de son père lors de son mariage avec Laure Mancini, la nièce de Mazarin, en 1654. Mais leur fils, Louis-Joseph, à son tour duc d’Étampes, vaillant capitaine « qui faisait la guerre en héros, en grand homme et en honnête homme », mourut sans enfants en 1712. Il avait épousé la petite-fille du Grand Condé, Marie-Anne de Bourbon, fille d’ Henri, prince de Condé, qui garda le duché jusqu’à sa mort en 1718 ; sa mère, Marie-Anne de Bavière, douairière de Condé, en hérita et le laissa à son autre fille, Louise-Élisabeth de Bourbon.

Des Bourbon-Condé, le duché d’Étampes passa aux Bourbon-Conti par le mariage de cette Louise-Élisabeth de Bourbon-Condé avec son cousin Louis-Armand, prince de Conti, dont une fille, Louise-Henriette de Bourbon-Conti est duchesse d’Étampes au milieu du XVIIIe siècle.

Elle épousa, en 1752, le petit-fils du Régent, Louis-Philippe d’Orléans et ainsi le duché d’Étampes entrait dans la maison d’Orléans. Leur fils, Louis-Philippe-Joseph d’Orléans, plus connu sous le nom de Philippe-Égalité, qu’on lui donna après son élection comme député à la Convention, reçut les domaines d’Étampes et de la Ferté-Alais dans le partage, entre sa sœur et lui, de la succession de leur mère, en 1779. Ils lui étaient attribués pour la somme assez considérable de 480 000 livres. Philippe-Égalité fut le dernier duc d’Étampes.

Cette sèche énumération nous amène à l’aube de la Révolution sans que nous ayons participé à la vie de notre cité depuis la mort d’Henri IV, parce que, nous l’avons dit, sa vie s’écoule à l’écart |53 des princes qui portent son nom, entre autres titres, et elle ne les connaît guère que par leurs noms précisément, qui figurent en tête de tous les actes du bailliage.

Louis XIII, qui voyageait beaucoup, s’arrêta quelquefois à Étampes, mais non aussi souvent qu’il a été dit. Nous retiendrons seulement ses passages certains, attestés en particulier par le précieux journal d’Héroard, son médecin, qui ne le quitta guère jusqu’en 1628, séjours très courts, d’une journée ou d’une nuit, sans apparat et sans conséquences pour notre ville. Le premier a lieu le 6 et le 7 juillet 1614 ; le roi avait treize ans, il arrive en carrosse à quatre heures, la reine mère le rejoint le soir et il repart pour Angerville dès le lendemain matin, après avoir assisté à la messe à Notre-Dame. Le 9 mai 1615, allant en Touraine, il y passe toute la journée parce que c’est l’Ascension, et enfin, le 13 et le 14 mars 1631, alors qu’il se rend à Orléans pour combattre son frère, Gaston d’Orléans, toujours en rébellion. Le roi descendait tout simplement à l’ auberge, comme il le faisait dans toutes les petites villes ; le palais du Séjour n’était plus, depuis Claude de France, à l’usage des princes et nul d’entre eux n’avait songé à en édifier un nouveau, le temps étant loin où ils faisaient d’Étampes leur séjour préféré.

Il s’en fallait cependant de beaucoup que ce fût alors une ville triste et morne. Des mémoires inédits d’un gentilhomme étampois de l’ époque nous apprennent, au contraire, qu’ elle était fort vivante. Elle demeurait, en effet, un grand passage et une étape importante ; s’il y avait moins de pèlerins qu’au XIIe siècle, il y avait plus de voyageurs ; le développement de la culture et du commerce, les nécessités ou les menaces de la guerre, y entretenaient une activité incessante. On y comptait plus de cinquante auberges. La garnison, qui l’occupait alors presque constamment, était souvent renouvelée, ce qui contribuait à l’ animation de la cité et donnait lieu à de nombreuses réjouissances, bals, festins, parties de jeu qui se tenaient dans la rue des Tripots, aujourd’hui, la rue de la Plâtrerie. Il s’ensuivait, d’ailleurs, beaucoup d’intrigues et de désordres, des tapages nocturnes, des sérénades aux violons et autres instruments, qui se terminaient quelquefois par des coups d’épée ou même des duels. Si cette vie d’agitation satisfaisait la jeunesse, elle excitait parfois les murmures « des meilleurs habitants et des personnes de qualité passant ès-hotelleries » ; elle enlevait aussi du crédit aux plaintes formulées par la municipalité auprès des autorités sur les misères, pourtant si réelles, de leur ville. Aussi en vint-elle à défendre expressément dans les rues, la nuit et même le jour, tous violons et autres instruments à peine de quarante livres d’ amende et de prison.

Le duc d’Étampes, César de Vendôme, fils d’Henri IV et de Gabrielle d’ Estrées, ne demeura pas tout à fait un inconnu pour notre ville puisqu’il y vint le 24 février 1615 poser la première pierre de |54 l’église des Capucins, au faubourg Évezard. Ces moines, comme nous l’avons vu3, avaient obtenu, en 1580, de succéder à la commanderie de Saint-Jacques4, dont ils avaient reçu tous les bâtiments. Ils en ajoutèrent d’autres et leur monastère était un important ensemble au XVIIe siècle, comme le montre une gravure de l’époque. Ce sont eux qui, en 1621, détournèrent la rivière et lui firent faire ainsi ce coude accentué, derrière l’ abattoir, afin d’ enclore5 dans leur jardin un pré situé au delà et l’ ancien port de la commanderie, qui ne servait donc plus, ayant été peu à peu supplanté par le port communal, plus grand et mieux placé. Il reste du long séjour de ces moines à Étampes le nom du chemin qui longe la rivière, dit la sente des Capucins.

En 1630, un ordre enseignant de femmes, les religieuses de la Congrégation de Notre-Dame, nouvellement fondé par un curé de la Lorraine, Pierre Fourier, s’établit à Étampes, d’abord rue Saint-Jacques et rue de la Plâtrerie, dans des maisons louées ou achetées. Mais, au milieu du XVIe siècle, elles étaient installées au carrefour qui porte encore leur nom, à l’ extrémité de la rue des Cordeliers, dans un vaste monastère qu’ elles avaient fait bâtir, après maintes acquisitions successives de terrains. Il ne leur manquait qu’une église, pour laquelle elles obtinrent en 1663, de Louis de Vendôme, malgré l’opposition du corps de ville, un terrain joignant la place Saint-Gilles « qui était de temps immémorial un lieu public, de belle symétrie et grande décoration destiné tant aux exécutions qu’aux marchés et s’appelant de toute ancienneté le marché aux Porcs », ce qui justifiait la désapprobation des officiers de ville. Mais ils durent s’incliner : l’église fut construite et dédiée à Saint-Joseph. La congrégation était, en effet, puissante et fort riche, possédant, outre la ferme de Guinette et des prés à Étampes, de nombreuses terres à Étréchy, à Bois-Herpin, à la Montagne, à Dhuilet, à Bouville ; elle avait placé « chez le roi » plus de cent mille livres et prêtait même de l’argent aux particuliers. En 1695, elle comprenait plus de cinquante sœurs professes, qui donnaient gratuitement l’instruction aux jeunes filles6 externes, et il y avait aussi de nombreuses pensionnaires.

Après la Révolution, qui les avait chassées et dépossédées, elles purent racheter leur couvent et ce qui restait du monastère des Cordeliers. On sait qu’elles y demeurèrent jusqu’à une époque toute proche de nous7. Elles possédaient encore un graduel du XVIIe siècle, décoré pour elles, qui est un magnifique spécimen de l’art des miniaturistes et des calligraphes de l’époque, chef-d’œuvre de grâce et d’élégance. Il avait conservé toute la fraîcheur de son coloris lorsqu’ il nous fut donné de le voir plus tard chez un libraire, qui nous permit d’ en publier quelques reproductions.

Encore sous le règne de Louis XIII, un événement notable8 dont nous trouvons une mention est une épidémie de peste qui sévit sur |55 Étampes et les environs, en l’automne de 1631 et durait encore, semble-t-il, au début de 1632. Les habitants, tant ecclésiastiques qu’officiers et autres, sont convoqués le 26 septembre, à l’Hôtel de ville, pour aviser aux moyens d’enrayer le mal qui augmente de jour en jour et de secourir les pauvres qui en sont affligés. Le maire était alors Pierre Baron, seigneur de l’ Humery, une des belles figures de nos magistrats étampois. On procéda à la nomination d’un chirurgien, d’un confesseur et d’un « enterreur » et l’on interdit de recevoir des malades, qui étaient venus, avec des hardes, de Janville et autres lieux ; ces hardes devaient être confisquées et brûlées à l’instant. Le 6 février 1632, une autre assemblée se réunit pour décider de « l’achat et bâtiment d’ un lieu propre et particulier pour retirer et faire traiter les habitants qui se trouveront atteints de la peste ».

Vingt ans plus tard, une autre calamité, déjà trop connue, s’abat sur notre ville et cette fois lui infligera les pires ravages qu’elle ait eu jamais à subir : c’est encore la guerre civile. On sait que pendant la minorité de Louis XIV, la régente Anne d’ Autriche et son ministre Mazarin virent se dresser contre eux, et ainsi contre le jeune roi lui-même, le Parlement, les Princes, avec une partie de la noblesse et le peuple de Paris, qui s’unirent, en dépit de tout ce qui les séparait, et engagèrent une véritable guerre, qu’on appela la Fronde. Mazarin avait levé une petite armée à ses frais, que commandait Turenne tandis que Condé, le vainqueur de Rocroi, qui voulait la place de Mazarin, dirigeait l’ armée des Princes. Condé, ayant été mis en déroute par Turenne à Bléneau, près de Montargis, en avril 1652, voulut rapprocher ses troupes de la capitale, dont il craignait la défection. Il se rendit lui-même à Paris et son armée, qui commençait à manquer de pain, sinon de vin, puisqu’elle en avait bu toutes les réserves à Montargis, gagna Milly, Maisse, la Ferté-Alais, où elle se heurta à quelques éléments de l’ armée royale, qui était de l’ autre côté de la ville. Ne pouvant ainsi atteindre directement Paris par Corbeil, les lieutenants de Condé jetèrent leur dévolu sur Étampes, pour s’abriter derrière ses murs, qui subsistaient en partie malgré l’ autorisation de démantèlement d’ Henri IV, et pour se ravitailler en blé et en fourrage. Le seigneur de la Boulaye se fit fort d’obtenir l’ouverture des portes, déclarant qu’il était connu « de quelques-uns d’Étampes » et qu’il la demanderait de la part de Monsieur de Beaufort, le second fils de César de Vendôme, duc d’Étampes. Ce qui se réalisa, en effet : bien qu’il fût dix heures du soir, des paysans, qui en l’ absence bien malencontreuse du capitaine du corps de garde, gardaient la porte Saint Pierre, juste à l’endroit où vient aboutir la route actuelle de la Ferté, « aussitôt qu’ils ouïrent le sieur de la Boulaye parler de la part de Monsieur de Beaufort », ouvrirent tout simplement la porte. L’ennemi était dans la place. Il y eut bien une tentative de résistance de la part des autorités et notre ville doit être justifiée de |56 l’accusation, qui fut plus tard portée contre elle, d’avoir trahi son roi. Mais elle était fort mal informée, tant des intrigues complexes qui se nouaient à Paris que de la composition et des mouvements respectifs des deux armées adverses, au point que les responsables de l’ouverture de la porte Saint-Pierre jurèrent qu’ils croyaient que Monsieur de Beaufort était du parti du roi et qu’ainsi ils donnaient passage à des troupes royales. Cependant, dès cette nouvelle connue, les principaux habitants s’assemblent « tumultuairement » à l’Hôtel de ville. On leur annonce qu’il s’agit seulement de quelques centaines d’hommes9 : ils décident de refuser l’entrée, et aussitôt, sans perdre leur temps en vains discours, ils se transportent en corps au Perray. La rumeur y était extrême. Monsieur de la Boulaye et les commandants, le comte de Tavannes, le baron de Clinchamp, étaient déjà dans le faubourg et toute une armée, au lieu des six cents hommes annoncés, apparaissait sur les hauteurs, à la lumière des torches. Les pourparlers commencèrent : les chefs de l’armée des Princes feignirent de ne vouloir que passer la rivière, demandèrent l’entrée pour quarante officiers seulement, le reste devant rester dans les faubourgs, et promirent de lever le camp dès le lendemain, vers Paris. On hésitait encore lorsque tous les habitants du faubourg, mêlés aux gens de guerre, accoururent épouvantés, prétendant que les canons étaient déjà dans la rue et qu’ on allait tirer ; mille hurlements d’ enfants et de femmes fuyant à demi nues retentissaient dans la nuit. Il fallut bien céder, autant à l’affolement de la population qu’à la force de l’ennemi ; il n’y avait plus de garnison : elle avait été appelée en Guyenne contre Condé, et pas de nouvelles de l’ armée du roi. Le lendemain matin, 24 avril, à sept heures du matin, neuf mille hommes entraient dans la ville en conquérants, l’épée nue à la main « et la plupart se promettant le sac et le viol et s’installant en maîtres dans toutes les maisons ». Ils se répandirent dans les villages voisins jusqu’à trois lieues aux alentours.

L’armée du roi, aussitôt informée de l’occupation d’Étampes quitta la Ferté-Alais, vint camper à Châtres (Arpajon) pour barrer

la route de Paris aux rebelles10 et, de là, obtenir des renseignements sur les intentions ou les mouvements des troupes qui tenaient Étampes. C’est ainsi que Turenne apprit que Mademoiselle de Montpensier, la fille11 de Gaston d’Orléans, frondeuse acharnée, avait quitté Orléans pour se rendre à Paris, était arrivée à Étampes le 2 mai et y attendait un passeport qu’elle n’avait pas craint de demander au roi. Si singulier que cela nous paraisse, elle l’obtint et sortit d’Étampes, le matin du 4 mai. Les lieutenants généraux de l’armée rebelle, galants, mais fort malavisés, avaient résolu de faire à cette amazone « une galanterie guerrière », en mettant toute l’ armée hors des murs et sous les armes, pour lui faire honneur et l’escorter jusqu’aux Capucins, c’est à dire jusqu’à l’abattoir actuel. Turenne, en ayant été |57 instruit à temps, fit avancer ses régiments toute la nuit précédente par les chemins creux de Villeconin et la plaine de Boissy-le-Sec jusqu’au-dessus du faubourg Saint-Martin. À cette nouvelle, Mademoiselle, qui était en train « de faire distribuer quantité d’écharpes et de rubans » à ses gracieux officiers, les congédia vivement et le comte de Tavannes fit rentrer ses troupes en hâte dans la ville. Mais l’armée royale descendit « comme un foudre ». On se battit affreusement, de 9 heures du matin jusqu’à 4 heures du soir, de la rue de Chauffour à la rue de Saclas et jusqu’au Petit-Saint-Mard, autour de l’église et du cimetière Saint-Martin, dans les maisons et les jardins, à coups de pierre quand il n’y eut plus de munitions. Les troupes du roi étaient entièrement12 victorieuses. Elles se jetèrent dans les habitations pour les piller. Dès qu’il le sut, Turenne donna l’ordre d’en faire sortir les soldats, mais lorsqu’ils quittèrent la ville, ils n’en emmenaient pas moins de « très amples et riches dépouilles »13.

Ils partaient en bon ordre et ne furent aucunement harcelés jusqu’à Étréchy par les rebelles, comme il a été dit à tort. L’armée des Princes avait perdu 2.600 hommes, dont plus de 1.500 prisonniers et plusieurs de ses chefs. Le baron de Clinchamp, qui commandait le contingent des Allemands et des Espagnols, avait reçu un coup de mousquet, mais dont il n’eut aucun mal, « sauvé par l’argent de sa poche contre lequel la balle s’aplatit ».

Tout le faubourg Saint-Martin offrait des spectacles lamentables : sur le pont des moulins, des hommes, des chevaux et des chariots, amoncelés et à demi brûlés, fumaient encore ; partout l’on entendait gémir des mourants ; des femmes chargées d’ enfants avaient cherché un refuge dans la rivière, dont l’ eau leur montait jusqu’au cou.

Mais l’armée rebelle ne voulait ni reconnaître sa défaite, ni abandonner Étampes, qui assurait d’autant mieux son ravitaillement que depuis le début des troubles, on y avait apporté du blé « en grandissime et prodigieuse quantité », de toute la Beauce, dans l’illusion qu’il y serait plus en sûreté. Les lieutenants généraux des Princes en constituèrent un magasin dans le couvent des Cordeliers. Ils installèrent toute l’armée à l’intérieur de la ville, en délaissant les faubourgs. Toutes les maisons furent envahies d’ officiers, de gendarmes, de valets et de chevaux, tandis que les soldats campaient sur les places et dans les jardins. Beaucoup d’habitants, auxquels les vivres et le vin étaient enlevés en même temps que le gîte, se réunirent aux Cordeliers et dans l’ église Notre-Dame, « pour y faire feu et ménage ». Le pouvoir du maire et des échevins était entièrement aboli. Mais la ville ne suffisait point à l’avidité de cette soldatesque : tous les jours, des cavaliers armés parcouraient la campagne jusqu’à dix lieues aux alentours, pillant les maisons, les fermes, les châteaux et rapportant le soir des grains, de la paille, des moutons, des volailles, des vaches, des chevaux et même du linge, des couvertures, |58 de la literie. Des paysans qui résistaient furent massacrés, à Guillerval, en particulier. Mais parfois les pillards aussi disparaissaient.

D’autre part, en prévision d’un nouveau siège, que le roi, disait-on, avait résolu d’entreprendre, des munitions furent entassées dans l’église Sainte-Croix et divers points furent fortifiés. On construisit des palissades le long des fossés, des bastions dans le port, des ouvrages en demi-lune à la porte Dorée et aux portes Saint-Jacques, Saint-Pierre et Saint-Martin. À la porte Évezard l’ on éleva une forte barricade de tonneaux. Le roi étant venu de Saint-Germain à Melun pour être plus près d’Étampes, on ne douta « plus d’ une prompte et rude visite » et de nouveaux préparatifs commencèrent la dévastation que devait achever le siège. En effet, toutes les maisons voisines des murailles, au-dedans et au dehors, furent abattues ainsi que les clôtures des cimetières, les murs et les arbres des jardins pour assurer la liberté du passage. On n’épargna même pas la chapelle Saint-Jacques de Bédégond, dont les destructeurs furent d’ailleurs écrasés sous ses ruines. Enfin, le comte de Tavannes fit mettre deux fois le feu dans tous les faubourgs. De tels apprêts donnaient à penser que cette fois les rebelles étaient résolus à déployer toutes les ressources de la tactique et à demander à leurs troupes une farouche résistance. Les événements le confirmèrent. L’armée royale forte de 10 à 12.000 hommes apparut devant la ville le 27 mai, sous la conduite de Turenne. Le siège devait durer douze jours. Les assiégés exécutèrent vingt-deux sorties, dont plusieurs réussirent à repousser momentanément les assaillants. La demi-lune de la porte Saint-Martin fut prise et reprise trois fois dans la même nuit. Afin de se fortifier encore de ce côté, les rebelles renversèrent des murailles et des maisons pour en faire des retranchements ; la cavalerie portait des fascines, l’infanterie, de la terre et du fumier, et les habitants eux-mêmes étaient contraints de participer à ces travaux. Turenne somma par trois fois les assiégés de se rendre, sinon il donnerait l’assaut et ne ferait pas de quartier : ils refusèrent de se rendre, disant qu’ils étaient prêts à recevoir l’assaut et qu’eux-mêmes ne feraient pas de quartier. Et une brèche ayant été faite à la courtine, ils y mirent cinq cents cavaliers à pied, armés de faux emmanchées à l’envers. Le lendemain, des batteries royales, établies au milieu de la rue du faubourg Saint-Martin tirèrent plus de deux cents coups contre la porte, qui fut rompue. Les chaînes du pont-levis étant brisées, le pont s’abattit, mais aussitôt les assiégés y mirent le feu et barricadèrent la porte. Une autre sommation de se rendre reçut la même réponse. Le lendemain encore, bien qu’une autre brèche ait été faite à la courtine, l’armée royale renonça à donner l’assaut.

Le 29 mai, le roi qui était venu de Corbeil et logeait, comme Henri IV, au château de Brières, se rendit au camp. Le sieur de Sainte-Marie, |59 lieutenant des Cent-Suisses, fut envoyé aux assiégés pour avertir leurs chefs de la présence du roi afin qu’on cessât le tir, selon l’usage qui, par respect pour les souverains, interdisait de tirer le canon sur leur quartier. Mais le comte de Tavannes, pressentant ce dont il s’agissait, « fit le malade » et envoya un Allemand à Sainte-Marie : ils ne se comprirent pas et plusieurs volées de canons furent aussitôt tirées, dont une démonta un cavalier à cent pas derrière le roi. Cet incident scandalisa tout l’entourage royal : « crime capital, procédé honteux, dont toute l’ armée fut touchée d’ étonnement et d’ horreur » dit Jean Vallier, maître d’ hôtel du roi, dans son Journal, en rappelant que des Espagnols eux-mêmes, au siège de Perpignan, en 1642, avaient cessé leur feu chaque fois que Louis XIII était venu visiter son camp.

Enfin, le 7 juin, après une nouvelle sortie des assiégés sans grands résultats, l’on vit avec surprise le camp royal en feu et l’armée s’éloigner en bon ordre : le siège était levé. On donna comme raison de cette brusque décision la nécessité pour Turenne d’aller combattre le duc de Lorraine, qui venait d’entrer en France appelé par les Princes et cherchait à dégager Étampes. En réalité, la levée du siège paraît avoir été la condition d’un accord entre le duc de Lorraine et M. de Châteauneuf, pour le roi : le duc promettait de se retirer dès que le siège d’Étampes serait levé. Il fallut tout de même le chasser à coups de canon, mais, au moins, notre ville fut délivrée.

Ce douloureux siège, où tant de courage fut dépensé, ne valut cependant de gloire à personne. Turenne se retira mécontent, dit-on ; c’était, en effet, un échec assez surprenant chez ce grand homme de guerre. Il semble bien que, devant Étampes, il ait manqué tantôt d’ impétuosité, tantôt de ténacité, même au premier siège dont il n’exploita pas le succès : s’il eût fait donner vigoureusement l’assaut dès le début, le désordre était alors si grand dans l’armée des Princes qu’elle se serait enfuie par le faubourg Saint-Pierre, le second siège eût été épargné à notre malheureuse ville avec toutes ses conséquences et bien des morts eussent été évitées de part et d’autre. Mais peut-être faut-il penser que Turenne dirigeait à contre-cœur ces opérations de guerre civile, où des amis, des parents se reconnaissaient d’un camp à l’ autre, où des prisonniers se faisaient prendre pour mieux servir leur parti. Et sans doute bien des gens de cœur, officiers de Turenne, éprouvaient-ils ce sentiment qui suspendait leur élan et même leur fit discuter les ordres de leur chef, puisqu’on sait que plusieurs fois Turenne avait commandé de donner l’assaut et qu’il accepta de ne pas être obéi. Si les assiégés montrèrent bien plus de fougue et d’acharnement, c’est surtout à cause de l’ascendant qu’exerçait sur eux le héros de Rocroi et de Lens. Condé, cependant, ne vint pas à Étampes, mais il y était constamment attendu et annoncé. Les sorties meurtrières se renouvelaient avec la même ardeur, parce |60 qu’on croyait toujours aller au-devant de lui, accouru avec des troupes fraîches au secours des assiégés : le plus rustre des soldats voyait déjà son impérieuse figure au-delà des remparts et s’élançait vers ce fantôme. Étonnant prestige de la gloire ! Même absent, le jeune chef victorieux « donnait une âme guerrière à toute cette armée, qui se portait au combat comme aux noces ».

La levée du siège par Turenne fut évidemment transformée en un succès éclatant des Princes, comme en témoignent les nombreuses « mazarinades », pamphlets haineux parus dès l’époque, qui altèrent la vérité des faits. Mais forts de la victoire complète qu’ils s’attribuaient, les rebelles ne se hâtaient point de quitter Étampes.

Ils y restèrent jusqu’au 23 juin. Ils laissaient dans notre malheureuse ville un amas de ruines et un immense charnier. Des monceaux de cadavres d’hommes et de chevaux, mêlés d’ordures et de fumier, emplissaient les rues et s’entassaient contre les murailles. La population n’avait pas la force de les enlever, trop affaiblie par la rareté des vivres et les angoisses du siège. Il se forma des quantités « de vilaines mouches de grosseur prodigieuse » qui semèrent rapidement, sinon la peste, comme disent les contemporains, au moins diverses maladies contagieuses parmi ces malheureux déjà épuisés. Et presque tous les malades demeuraient sans soins, tandis que les morts étaient portés en brouette et sans bière, aux cimetières, où « croassaient des oiseaux sinistres et carnassiers, inconnus jusqu’alors au pays ». Cette tragique situation amena dans notre ville Vincent de Paul, qui multipliait ses bienfaits dans toute la région ravagée par la guerre. Il fit venir d’ abord, pour procéder aux travaux de nettoyage et d’assainissement, des hommes robustes, qu’on appelait des « aéreux », tandis que lui-même, bien qu’il eût plus de soixante-dix ans, soignait les malades, recueillait les orphelins et nourrissait les pauvres. Il avait appelé auprès de lui quelques membres des congrégations qu’ il avait fondées, les Pères de la

Mission et les Sœurs de la Charité, dont plusieurs moururent à la tâche. Leur dévouement hâta sans doute l’extinction de l’ épidémie ; elle dura des mois cependant et fut terriblement meurtrière. Il n’y eut guère qu’une vingtaine de maisons où la mort ne passa point et des familles entières disparurent. Le lieutenant particulier du bailliage, Bouttevillain, seigneur de la Coudraye, fut emporté, avec sa femme et ses six enfants, ainsi que le lieutenant de la prévôté, le procureur du roi et son substitut, six avocats du roi ; il ne restait plus de greffiers pour délivrer les actes. Et cependant, parmi ces fonctionnaires, comme parmi les nobles et les bourgeois, ceux qui étaient en mesure de fuir « le mauvais air d’Étampes » avaient cherché refuge ailleurs, à Dourdan, à Boissy-sous-Saint-Yon, ou dans la campagne, et la mort faucha davantage encore dans les rangs des artisans et des pauvres. En peu de temps, la ville fut toute changée « de nouveaux ecclésiastiques dans les bénéfices, de nouveaux |61 officiers dans les charges, nouveaux marchands, nouveaux artisans, quantité de successions remplies ou vacantes, quantité de scellés, tutelles, émancipation de jeunes gens et jamais tant de nouveaux mariages ». Les registres paroissiaux confirment ce tableau d’ un témoin.

La détresse de notre malheureuse ville suscita les plus grands dévouements chez les officiers de ville qui avaient la lourde charge de travailler à son relèvement. Au moment du siège, le maire était encore Pierre Baron, qui l’ était déjà lors de la peste de 1631. Il avait près de quatre-vingts ans, mais il avait conservé une étonnante vigueur, dont nous avons une preuve sous la forme d’un poème latin qui lui fut inspiré par les horreurs du siège et la désolation qui les suivit. Il les évoque avec autant d’émotion que d’exactitude, après avoir décrit, par antithèse, tous les charmes de notre petite cité14. Il y témoigne en même temps une vaste culture, qui ne lui était pas particulière, d’ ailleurs. Presque tous les officiers municipaux ou royaux de cette époque en possédaient une semblable, qui donne à leurs discours, que nous lisons encore avec intérêt, une force peu commune et qui contribuait certainement à la sagesse de leur administration, à la haute idée qu’ils se faisaient de leur tâche et à l’autorité qu’ils exerçaient autour d’eux.

Cependant, l’ ordre et la paix renaissaient dans le royaume, sinon la prospérité, et la guerre étrangère se terminait par le traité des Pyrénées, qui agrandissait la France. Notre ville, se détournant de ses propres misères, participa à la joie générale. Le 7 mars 1660, un Te Deum fut chanté à Notre-Dame, en présence du maire, des échevins, de tous les officiers du bailliage et de tous les notables. Puis, des feux de joie furent allumés, avec des flambeaux tenus par le maire et le lieutenant du bailliage, sur un bûcher dressé devant l’Hôtel de ville. Le surlendemain 9 mars, Turenne traversait Étampes pour aller à Paris assister au mariage du roi. Le maire et les échevins allèrent le saluer et lui offrir le présent de la ville. Cependant, toutes les souffrances que rappelaient le nom et la personne de Turenne étaient bien loin d’être effacées. La misère, les ruines dans les rues, la dévastation des champs d’ alentour, subsistèrent pendant des années et même, certaines traces de cette terrible épreuve ne disparurent jamais. Un intéressant témoignage sur l’aspect qu’offrait notre ville en 1663, nous est fourni par La Fontaine, le fabuliste, qui la traversa au mois d’août, allant en Limousin par « le carrosse de Poitiers ». Il écrivait à sa femme ses impressions de voyage et lui dit à propos d’Étampes : « Nous remarquâmes en entrant quelques monuments de nos guerres : ce ne sont pas les plus riches que j’aie vus, aussi est-ce l’ouvrage de Mars, méchant maçon s’il en fut jamais. Enfin, nous regardâmes avec pitié les faubourgs d’Étampes. Imaginez-vous une suite de maisons sans toits, sans fenêtres, percées |62 de tous les côtés ; il n’y a rien de plus laid et de plus hideux. Cela me remet en mémoire les ruines de Troie-la-grande ». Ainsi, onze ans après le siège, loin d’avoir été reconstruites, les maisons étaient encore en l’état où les avait mises l’effroyable tourmente. À cette époque, la misère avait même augmenté par suite de récoltes si insuffisantes en 1661 et 1662 que la famine régnait à Étampes et dans les environs. Les pauvres s’étaient multipliés au point que des femmes charitables étaient venues de Paris aider celles d’Étampes à organiser des « soupes » et des secours. Un peu plus tard, en 1668, le maire, René Hémard, écrit dans ses Mémoires : « Étampes est la plus malheureuse ville du royaume. Les trafics de blé et de laine, autrefois si célèbres, aussi bien que les transports de vin d’Orléans sur la rivière, y demeurent entièrement rompus15, tant par le nouvel établissement du canal de Briare et les fréquents logements des troupes que par la hauteur des tailles, lesquelles ont chassé la moitié du peuple que les maladies d’armée y avaient laissé de reste en 1652. » Il nous dit aussi que la grande enceinte est encore semée de trous où se réfugient des mendiants et de chétifs manœuvres, que de vastes logis sont quasi vides ou sans autres locataires que des jardiniers misérables.

Et plus tard encore, en 1677, le corps de ville sera réduit à deux échevins, en raison du petit nombre d’habitants de la ville.

L’appauvrissement universel, le ralentissement du commerce, la diminution de la population étaient des conséquences directes du siège. Mais la situation générale du royaume, l’état toujours lamentable des finances et la fréquence toujours renouvelée des guerres aggravaient encore ces funestes effets, empêchaient qu’ils s’effacent et, par surcroît, en ajoutaient d’autres, comme l’augmentation des impôts et les passages de troupes. Même en temps de paix, ces passages si redoutés des habitants devenaient des séjours : un régiment s’ installait en garnison pour des mois : « On n’ a guère vu, dans les autres siècles, de paix qui fût plus guerrière », dit René Hémard. En 1664, c’est la compagnie des chevau-légers du dauphin, dont le lieutenant général du bailliage et le fils de l’ancien maire Baron obtiennent à grand’peine le départ, mais peu après, elle est remplacée par les gendarmes écossais, qui restent tout l’hiver de 1665 ; en 1667, les chevau-légers, étant revenus, partent pour la guerre des Flandres sans payer leurs dettes. Tout l’automne de 1667 et les premiers mois de 1668 « fourmillent de passages de gens de guerre », qui surexcitent l’esprit des habitants, non seulement par la gêne et la dépense qu’ils occasionnent, mais aussi par leurs brutalités. Les officiers eux-mêmes donnent le mauvais exemple par l’arrogance de leur attitude à l’égard des autorités civiles, s’imaginant que « qui n’a point d’épée au côté n’a pas de cœur », et par le dérèglement de leur conduite. Un capitaine pris de boisson se fait dire avec justice par le maire « qu’il est |63 moins en état de commander que le dernier de ses goujats ». Ainsi, les plaintes se multiplient et des désordres éclatent : un habitant ayant été blessé d’un coup de hallebarde, on sonne le tocsin sans l’avis du maire, la foule s’amasse, court à travers les rues répandant le bruit que c’ est un échevin qui a été tué par un officier d’ un coup de pistolet.

Le maire était alors René Hémard, le gendre de l’ ancien maire, Pierre Baron. C’était un homme de valeur et de devoir, d’une intégrité absolue et pitoyable à toutes les misères qui l’ environnaient. Par ailleurs, un esprit puissant, nourri de lettres et de philosophie16. Il publia en 1653, à Paris, un recueil

d’épigrammes qu’il intitula Les Restes de la Guerre d’Étampes, bien qu’ elles n’ aient pas de rapport avec le siège, mais il explique dans son épitre liminaire que « ces pièces démanchées, ces lambeaux fantastiques » étaient bien tout ce qui pouvait naître de « l’état présent de la ville où il ne reste qu’infection » . Il est bien vrai que ces épigrammes sont dénuées de valeur. Mais René Hémard, les jugeant lui-même avec sévérité, montre qu’il était supérieur à cette œuvre médiocre de jeunesse. Sa vraie personnalité apparaît dans ses Mémoires, en grande partie inédits et dans une peinture, elle entièrement inédite, des vices et des abus de son temps, Le Carême prenant moral. Son style est lourd, parfois obscur, encombré d’érudition : c’est de son époque ; mais il est aussi vigoureux, imagé, incisif. Une haute et généreuse pensée, souvent hardie pour son temps, l’anime constamment et sa connaissance des hommes est profonde. En outre, ses Mémoires constituent, pour nous Étampois, un document historique aussi précieux qu’émouvant.

Dans sa charge municipale, il eut à se débattre au milieu de difficultés sans nombre. Il se rendit lui-même maintes fois à Paris pour « crier au Louvre » au sujet des affaires de la ville, presque toujours en vain, et à son retour, il se trouvait en butte aux reproches de ses concitoyens, mal informés de ses efforts et de l’ indifférence que rencontraient en haut lieu les plus justes des causes. Il valait mieux faire appel à la justice du roi « qui ne la refusait à personne », mais la difficulté était d’atteindre le roi, à travers la haie serrée des courtisans et des ministres, qui le séparait du meilleur de son peuple. Le pauvre Hémard l’apprit à ses dépens. En février 1669, le bruit courut qu’Étampes était menacée de recevoir encore des chevau-légers du dauphin, de si fâcheuse mémoire. Il retourne aussitôt à Paris : la nouvelle est bien vraie et il s’efforce, en vain, d’obtenir le changement de garnison. Il laisse un placet pour le roi, n’ayant pas réussi à le lui remettre lui-même, quand il est rappelé par les échevins d’Étampes. En effet, les chevau-légers y sont déjà installés et déjà les plaintes abondent, non seulement des habitants, mais encore des chevau-légers : ils se répandent en menaces et en blasphèmes et prétendent ne payer que le prix dérisoire de huit sols par jour pour |64 le logement et la nourriture d’un cavalier, de son valet et de deux chevaux. La réponse du roi au placet du maire arrive pourtant et c’est la promesse du prochain délogement. Mais elle ne reçoit pas d’exécution17. Alors excédé, après de longs et vains pourparlers avec le duc de La Vallière, le commandant de la compagnie, René Hémard repart pour Paris, avec un nouveau placet pour le roi. Mais il ne peut encore le lui remettre ; il tente de l’ approcher lors d’ une rencontre fortuite dans l’escalier que le roi descend pour aller à la messe : il veut se jeter à ses genoux et le supplier d’avoir égard à « sa ville désolée », mais la presse est si grande qu’il n’y parvient pas. Il ne se décourage pas encore : il revoit La Vallière qui l’amène à Louvois, le ministre de la Guerre. Mais là, son affaire se gâte de plus en plus : Louvois, avec sa violence habituelle, l’apostrophe brutalement, prétend que c’est lui, les échevins, les habitants qui ont une conduite blâmable envers la compagnie du dauphin. Il se défend avec un beau courage, assurant qu’il n’a fait et ne fera jamais18 que son devoir. Mais sur un ordre de Louvois, des suisses de service, la hallebarde en main, l’obligent à s’éloigner. Cette lutte vraiment pathétique n’ est pas terminée. On lui conseille de voir Le Tellier, le père de Louvois, dont les manières passent pour être plus courtoises. Mais Louvois l’avait prévenu contre le malheureux Hémard et c’est une nouvelle insulte qu’il reçoit ; Le Tellier déchire le placet qu’il venait de lui remettre sans même le lire. Cette fois, il est vaincu. Sa résistance aura du moins valu à sa pauvre ville une légère augmentation sur l’indemnité de huit sols offerte primitivement : d’abord fixée à quatorze sols, elle sera réduite à douze, par une dernière chicane des chevau-légers au moment de leur départ, le 9 décembre 1669.

Ce violent conflit n’ était pas un cas isolé. Le bailli de la Ferté, celui d’Arpajon, le lieutenant de la prévôté de Melun, avaient été l’objet d’injures semblables dans la défense d’une cause aussi juste. Le vrai service du roi, « qui n’avait pas moins d’intérêt à la conservation de ses villes qu’ à celui de ses troupes », était constamment méconnu. Mais l’ organisation même des régiments leur assurait alors des libertés et des privilèges qui, s’ajoutant pour certains à la gloire des combats, entraînaient fatalement tous ceux qui portaient l’épée à s’arroger des droits partout. Si l’on saisissait le ministre de la guerre, il prenait évidemment presque toujours le parti de ses officiers. C’est donc une erreur de voir dans l’injuste et brutale attitude de Louvois à l’égard du maire d’Étampes, comme l’a fait un historien moderne de notre ville, un effet lointain des coups de canon tirés au siège d’Étampes, dans la direction du roi, qui aurait fait épouser cette vieille rancune à son ministre. D’abord Louvois a montré en bien d’autres circonstances l’emportement de son caractère, son mépris de toute justice, même son inhumanité. Et si Louis XIV a certes donné des marques de la ténacité de ses ressentiments, |65 il n’ en a jamais manifesté aucun envers notre ville, ayant sans doute compris qu’ elle était bien étrangère à l’ incorrection du comte de Tavannes. Nous en avons une preuve dans la manière dont il reçut l’ accueil de la municipalité et des habitants lors de ses passages à Étampes.

Le premier eut lieu le 21 septembre 1668. Louis XIV et la reine se rendaient à Chambord avec une cour pompeuse et un tel déploiement de troupes, « qu’on eût cru plutôt à une marche d’ armée qu’ à un voyage ». Le maître des cérémonies avait dit à l’ émissaire envoyé par notre ville au-devant du roi, à Châtres, pour s’informer du caractère qu’il fallait donner à la réception, « qu’ il n’ y aurait à faire ni harangue, ni présent, en tout le voyage ». Malgré cela, René Hémard prépara un petit compliment où il célèbre la gloire du jeune roi, qui n’ avait alors connu que des victoires. Il le prononça entouré des échevins, sur la route, à la hauteur du couvent des Capucins, devant le carrosse royal, que le roi avait fait arrêter : c’est là, précisément, qu’il eût pu manifester la rancune qui lui a été attribuée, et d’autant plus aisément que les harangues avaient été en quelque sorte interdites. Mais il écouta Hémard jusqu’au bout et dit « avec un visage ouvert et satisfait », lorsque le maire lui présenta les clefs dorées de la ville dans une corbeille de gaze d’ argent : « Gardez-les : je vous les rends, elles sont en bonnes mains », ce qui, dit Hémard, « acheva de nous charmer ». Les Pères capucins offrirent quelque chose de plus substantiel : de beaux et bons fruits de leur jardin. Puis, après une autre harangue des officiers royaux, le roi et la reine entrèrent en ville par la porte Saint-Jacques, décorée de tapis et d’ armoiries, au son de toutes les cloches. Ils logèrent à l’hôtel des Trois Rois, rue Saint-Jacques, et partirent le lendemain, après avoir entendu la messe chez les Cordeliers. On renonça vite à leur offrir des présents, le maître des cérémonies en ayant dissuadé les échevins, parce que, dit-on, le roi s’était moqué19 de la façon dont il avait su faire observer la défense des harangues. Les cadeaux avaient plus d’inconvénients au milieu de la détresse financière de tout le pays. Le temps n’était plus des présents magnifiques offerts par notre ville à Gaston de Foix ou au grand maître de France20. Mais le bon Hémard avait espéré que ce serait peut-être une occasion d’attendrir la reine sur les misères d’Étampes, vraiment plus cruelles encore qu’ailleurs, et ainsi d’en recevoir quelque secours : il fallut y renoncer aussi.

Turenne accompagnait le roi et dès son arrivée, il était monté à cheval pour aller revoir les restes des demi-lunes de 1652 et les brèches de l’ enceinte : curiosité de stratège sans doute, mais aussi manque de tact, qui rouvrit des plaies mal fermées. Ce petit trait montre à lui seul quels sentiments différents et vite hostiles, à cette époque plus peut-être qu’ à aucune autre, animaient d’ une part les gens de guerre et d’ autre part, tout le reste de la population. |66

Le second passage du roi eut lieu le 19 octobre, à son retour de Chambord. Il fut reçu plus simplement et sans harangue, cette fois ; le corps de ville l’accueillit aux dernières maisons du faubourg Saint-Martin et, comme le maire lui présentait à nouveau les clefs d’ or, le roi lui dit en riant, avec un petit signe de la main : « Elles sont bien, je vous l’ai déjà dit ».

Ces passages du roi eussent été un divertissement salutaire pour la malheureuse population clairsemée de notre ville s’ils n’avaient été fatalement accompagnés d’un millier de soldats, qui, en une seule nuit, causaient tant de désordres, à réparer ensuite, « que les pauvres habitants n’ont plus de goût pour les véritables joies », nous dit Hémard, dans sa juste compréhension des choses.

La vie d’Étampes est désormais très ralentie, nous l’avons vu. L’état de ses finances s’améliora quelque peu par des remboursements de ses débiteurs ou par la condamnation de ses créanciers malhonnêtes qu’obtint à grand’peine le maire René Hémard. Malgré son dévouement, il fut l’objet d’une telle ingratitude de la part de ses concitoyens, après les difficultés causées par les chevau-légers, qu’il refusa de rester maire à l’expiration de son mandat en 1670. Les malheurs avaient aigri les esprits, faussé les jugements et partout, note un autre témoin de la même époque, la discorde éclate, entre les habitants et la municipalité, entre le clergé et les curés, entre les marguilliers et les officiers de ville ou du roi, qui sont même chassés de l’église. Les victoires des armées de Louis XIV et la paix qui les suit sont célébrées à Étampes par des Te Deum et des feux de joie en 1678, en 1679, mais elles sont trop chèrement achetées et la paix, si désirée, qu’on espère chaque fois définitive, est toujours rompue par une nouvelle guerre.

Un spectacle plus réconfortant nous est donné à cette même époque par ceux qui ont patiemment réuni tous les documents, les informations et les souvenirs qu’ils possédaient alors sur l’histoire de notre petite ville. C’est grâce à leur effort que nous connaissons son passé. Outre les Mémoires de René Hémard, nous avons un précieux ensemble de pièces disparates, relatives à l’ administration de la ville, et de réflexions personnelles sur les événements de l’époque, assemblées sous le titre aussi exact que pittoresque de Rapsodie, par un avocat du roi à Étampes au XVIIsiècle, Pierre Plisson, issu d’une famille étampoise21. Elle est contenue dans un gros volume manuscrit à la suite de quelques délibérations du corps de ville. Ce volume était resté soit à l’ Hôtel de ville, soit dans la famille de Plisson, à sa mort, mais il se trouva, par une destinée inexpliquée, dans la bibliothèque de la famille Geoffroy-Saint-Hilaire à la fin du XVIIIe siècle. Le neveu du grand naturaliste, Louis Geoffroy-Château, eut la généreuse pensée, en 1855, de le remettre aux Archives municipales où il est heureusement maintenant. Cette Rapsodie a été publiée par Forteau, |67 en 190922. En outre, Pierre Plisson avait écrit un autre ouvrage, qu’il avait déposé lui-même « au coffre de la ville ». L’original a disparu : il en existe à l’Hôtel de ville une copie du XVIIIe siècle intitulée : « Registres de notes et remarques ». Il contient encore de précieux détails sur des évènements historiques, mais aussi le Règlement des droits du bourreau d’Étampes et enfin, un important exposé de l’état de l’Hôtel-Dieu après le siège de 1652, avec l’inventaire de ses biens et des actes établis en sa faveur. Plisson fut aidé dans la recherche des titres dispersés et leur classement par l’ancien curé de Blandy, Michel Heurtault, qui, chassé de sa paroisse par la guerre civile, était venu chercher refuge à l’ Hôtel-Dieu d’Étampes et y resta jusqu’à sa mort en 1689 : il avait, en effet, passé un contrat en 1653 avec les officiers du roi et de la ville, administrateurs temporels de l’Hospice, par lequel il s’engageait à laisser à l’Hôtel-Dieu une rente annuelle de 200 livres à la condition qu’il y fût logé, nourri et entretenu sa vie durant. C’est aussi grâce à un don de Michel Heurtault, de 1.800 livres, que le moulin de l’Hospice, qui avait été détruit par les gens de guerre en 1652, put être réédifié, rue de Saclas, où il en reste encore quelques vestiges. Si le travail de Plisson offre pour nous un réel intérêt historique, il a été un exemple pour ses contemporains et une œuvre charitable pour les pauvres de son temps et de l’avenir, en rétablissant l’ordre dans la plus extrême confusion et en permettant à l’Hôtel-Dieu de réparer au moins une partie des atteintes portées à son fonds et à ses revenus. Que d’efforts auront été ainsi déployés par de modestes magistrats de notre ville pour reconstruire ce qu’avaient anéanti l’avidité et la fureur des autres hommes ! Pierre Plisson mourut en 1695 et fut inhumé dans l’église Saint-Gilles, comme l’avaient été son père et sa mère, tous deux morts durant l’épidémie de 1652, et dont la pierre tombale existe encore.

La figure du Père barnabite Dom Basile Fleureau est plus familière aux Étampois, sans doute parce qu’il a écrit une œuvre

considérable et qu’elle a été publiée quelques années seulement après sa mort, dès 1683. On sait qu’il naquit à Étampes dans la paroisse Saint-Basile, en 1612, d’une famille de magistrats, son père et son grand’père paternel ayant été procureurs au bailliage d’Étampes et son grand’père maternel, Alexandre Duquesnel, procureur à la Ferté-Alais. Il commença ses études à Étampes et les acheva à Paris, où il entra dans la congrégation des barnabites à 19 ans, en 1631. Il enseigna d’abord la philosophie au collège de Montargis, visita ensuite l’Italie, puis fut appelé à la direction du collège d’Étampes en 1662, qu’il conserva jusqu’en 166823 et mourut à Étampes en avril 1674. Il fut inhumé dans la chapelle du collège. Son œuvre, Les Antiquités de la ville et du duché d’Étampes, fut sans doute écrite tout entière à Étampes. Les innombrables pièces justificatives qu’il y a introduites |68 montrent quel soin il apportait à sa documentation24.

On sait que la municipalité lui communiqua tous les titres dont il avait besoin ; une délibération écrite par le maire, René Hémard, le 6 août 1670, signale que le trésorier de France ayant demandé les titres du barrage, « la plupart se sont trouvés perdus, enlevés par des particuliers, et qu’on n’a retrouvé qu’une petite liasse apostillée en 1664 ou 1665 par le Père Fleureau, auquel ces titres avaient été communiqués pour servir à l’histoire composée par lui », ce qui prouve au moins l’ honnêteté du bon Père barnabite. Sa connaissance profonde de tout ce qui concernait l’histoire de la ville, jointe aux informations orales et aux souvenirs qu’il était encore en mesure de recueillir, ont pu suppléer à l’absence déjà constatée de certaines pièces. Après lui, la Révolution ajouta son œuvre destructive à celle des troubles du XVIe et du XVIIe siècles et beaucoup de documents ont été ainsi sauvés par lui. Sa recherche a dépassé le cadre d’Étampes : il a consulté le Trésor des Chartes, les actes du Parlement et des Chambres, les cartulaires, les Historiens français. On sait aussi par des lettres de lui, retrouvées à la bibliothèque de l’Institut, qu’ il demandait des éclaircissements au célèbre géographe Adrien de Valois sur des points qui lui semblaient obscurs dans les titres anciens. Il y ajoute qu’ il se fait une grande joie de voir, à son premier voyage à Paris, de la monnaie battue à Étampes, montrant ainsi son amour pour sa petite patrie et son ardente curiosité de tout ce qui se rattachait à elle, double sentiment qui détermina la composition de son ouvrage et beaucoup de ses qualités. Ces diverses raisons font de son œuvre, pour nous Étampois, un monument auquel on ne saurait rendre assez hommage. Elle embrasse aussi bien l’histoire de la ville que celle des seigneuries et des fondations ecclésiastiques et dans ce vaste ensemble, le souci du détail exact ne l’abandonne jamais. Sa méthode est véritablement scientifique et digne d’un historien moderne. C’ est être trompé par sa langue archaïque que prétendre le contraire.

On lui a reproché son absence de sens critique et ses lacunes : cela ne nous paraît pas juste. Il a tout le sens critique qu’il pouvait avoir à son époque et dans son état de religieux ; son jugement, en certaines circonstances, est loin, au contraire, de manquer d’indépendance. Ses lacunes proviennent des mêmes causes : il passe sous silence la Saint-Barthélemy, le meurtre de Petau et d’ Audren par les Ligueurs et même saint Vincent de Paul, parce qu’il est barnabite. Il n’étudie pas toutes les institutions communales, sans doute parce qu’il croyait à l’immutabilité du régime sous lequel il vivait et qu’il s’adressait à des lecteurs qui en connaissaient comme lui tout le détail. Il ne perçoit pas les abus, les réformes à accomplir, l’ évolution qui commence à se faire jour dans certains esprits parce qu’il vit un peu à l’écart du monde extérieur, de même qu’il n’expose pas toutes les conséquences des guerres et des troubles de son époque il en a été |69 le témoin quelque peu abrité et non la victime, aussi n’ éveillent-elles pas chez lui le même écho que chez Plisson ou René Hémard25. Il ne pouvait ni juger, ni sentir autrement. S’il a des lacunes inévitables, il demeure une source incomparable de renseignements, où l’on peut puiser avec confiance, à cause de sa méthode et de sa conscience. Il ne faut pas s’étonner non plus qu’il manque de sens archéologique, personne n’en ayant à son époque, si ce n’est de très rares érudits, comme Gaignières ou Montfaucon.

Mais on peut regretter amèrement qu’ainsi, il n’ait pas songé à nous donner une description de tant de monuments, qu’il a connus et qui ont disparu : le château, les monastères, les églises, en particulier Sainte-Croix, dont la seule date de construction, 1183, et les rares vestiges que nous avons encore connus permettent de penser qu’elle était un des joyaux de notre ville. Enfin, on lui a reproché sa langue : elle est incontestablement ancienne et retarde même sur son époque ; on y sent une longue familiarité du latin, ce qui l’ alourdit, mais pour peu que l’ on s’y applique, elle cesse vite d’ être obscure, elle est extrêmement précise, montre un souci constant du terme exact, ce qui est capital dans un ouvrage de ce genre, et que de fois elle est, au contraire, pleine de saveur ou de naïveté charmante !26

Fleureau écrit dans les dernières pages de son manuscrit, à propos du bourg de Sermaises, « en cette présente année 1668 ». Il n’y a donc rien ajouté jusqu’à sa mort, en 1674. Comme nous savons par une note de sa main qu’il termina dans l’intervalle, en 1669, une « brève histoire de l’abbaye de Villiers, proche de la

Ferté-Alais » il y a lieu de penser qu’il considérait comme achevé son ouvrage sur Étampes.

Il mourut cependant sans en avoir commencé la publication, peut-être faute des ressources nécessaires. Mais après sa mort, les magistrats d’Étampes, donnant une nouvelle preuve de leur souci des choses de l’esprit, chargèrent un autre barnabite, Dom Rémy de Montmeslier, de revoir son manuscrit en vue de la publication27 ; les frais en furent assumés par sa sœur Élisabeth Fleureau, qui avait épousé Noël Joly, élu en l’élection d’Étampes, officier du duc d’Orléans, et qui mourut à Étampes seulement en 1704. Ainsi Les Antiquités de la ville et du duché d’Étampes parurent chez Jean-Baptiste Coignard en 1683, en un volume in-4° de 640 pages. On sait qu’il n’a jamais été réédité ; plusieurs tentatives, dont la première en 1870, ne purent aboutir, ce qui n’ est pas à la louange de notre époque. Les exemplaires de 1683 sont devenus fort rares nous n’en connaissons qu’une douzaine et le prix de ceux qui passent à intervalles éloignés, chez les libraires ou dans les ventes, est fort élevé, lointain hommage rendu au grand labeur de notre barnabite28. |70


Isaac Foudrier de Boisrevaux, Lieutenant-Général d’Artillerie. (Château de Morigny)


02. Un bourgeois d'Étampes au XVIe siècle. Ses biens et sa descendance 29

Un marchand de grains d’Étampes, Jehan Poudrier, laissait à sa mort, en 1605, des biens assez considérables dont nous possédons l’inventaire. Il appartenait à une famille bourgeoise : son père, Cantien, était marchand drapier à Étampes ; sa mère était |99 Perrine Poignard. Un membre de cette famille Poignard, Étienne, élu et conseiller pour le roi en l’élection d’Étampes, était, en 1593 un des « gardes jurés établis par justice pour régir, garder et gouverner les droits, statuts, franchises et libertés donnés et octroyés par les rois de France à défunt Eudes Le Maire de Chalo Saint-Mard et à ceux de sa postérité29 30. » Cantien Foudrier et Perrine Poignard n’eurent que deux enfants : Jehan et Cantienne, mariée à Jean Guerton, également marchand à Étampes.

Jehan Poudrier épousa Noëlle David qui prétendait se rattacher, comme tant d’ autres à cette époque, à la fameuse lignée des hoirs d’Eudes Le Maire. Son privilège de franchise, daté de 159331, établit que Noëlle, fille d’Emery David, marchand bourgeois d’Étampes, descend directement de Jehan Chartier, issu lui-même de la postérité d’Eudes Le Maire. Il suffisait de se rattacher à la famille Chartier pour obtenir les franchises concédées par les rois de France à tous les descendants d’ Eudes Le Maire. On sait que cette faveur était totalement injustifiée32, mais les avantages appréciables qu’elle procurait la faisaient âprement convoiter et les « hoirs Chalo » continuèrent d’en profiter jusqu’au XVIIIe siècle, en dépit des édits royaux qui tentaient de réprimer cet abus.

Jehan Poudrier était mort, ainsi que sa femme Noëlle David, en septembre 1605. Ils laissaient cinq enfants, dont deux mineurs. Les tuteurs et curateurs étaient noble homme messire Guy David, lieutenant assesseur au bailliage d’Étampes, oncle des enfants, Pierre Foudrier, le fils aîné, et Joachim Guerton, leur cousin. L’inventaire de leurs biens « meubles, grains, vins, deniers, ustensiles d’hôtel, dettes et crédits, lettres, titres et enseignements », commença le 18 octobre 1605 par devant Michel Larsonneur. Il devait comprendre plusieurs vacations dont nous ne donnerons ici qu’un résumé. L’estimation fut faite par Cantien Boudeaulx, sergent royal, maître priseur, vendeur de biens meubles au bailliage d’ Étampes.

Cet inventaire fait partie des archives de la famille de Poilloüe conservées aujourd’hui à Morigny par suite d’une alliance, au XVIIIe siècle, entre un Poilloüe de Bonnevaux et une Poudrier de Boisrevaux. Il s’agit d’une copie sur papier de 294 pages, collationnée « à l’ original étant en parchemin sain et entier », signée de Michel Larsonneur, notaire royal à Étampes en 160533.

Les époux Poudrier possédaient trois maisons, l’une où ils étaient décédés, une autre la joignant, dont nous ignorons l’emplacement, une troisième, située grande rue Saint-Jacques, paroisse St-Gilles, dite « la maison des Singes ».

Nous donnerons d’ abord un aperçu du mobilier, du linge, et des vêtements :

*

* *

En la chambre nommée la vieille salle34 a été trouvée une table |100 de bois de noyer qui se tire, garnie de ses deux marchepieds ; prisée et estimée par ledit Boudeaulx la somme de

12 livres tournois.

Item, six escabelles tournées de bois de noyer, prisées et estimées à 10 sols t. pièce. qui est pour les six ensemble la somme de

3 1. t.

It. quatre chaires carrées de bois de noyer, deux à piliers cannelés et les deux autres à bois uni, prisé et estimé le tout ensemble

16 l. t.

It. cinq autres chaires aussi de bois de noyer, faites à la façon moderne, prisées et estimées 20 sols t. pièce, qui est pour les cinq la somme de

100 s. t.

It. deux petits viels placets tapissés, prisés et estimés

15 s. t.

It. un autre placet de bois de noyer, avec une vieille Caquetoire tapissée, prisé et estimé 34

10 s. t.

It. un buffet de bois de noyer fermant à deux layettes et deux guichets faits à godrons, prisé et estimé

7 1. t.

It. un grand coffre de bois de noyer faict à panneaux et godrons, fermant à clef, prisé et estimé

101. t.

It. un grand bahut fermant à clef couvert de cuir noir et de fer blanc, garni de son soubassement, prisé et estimé

6 l. t.

It. une grande fontaine d’airain garnie de ses deux traultes, prisée et estimée

6 l. t.

It. un porte-plats de bois de noyer, servant à laver les mains, prisé et estimé

7 s. 6 d. t.

It. un jeu de tric-trac de bois, garni de ses dames, prisé et estimé

30 s. t.

It. une paire de grands chenêts de fer, garnis chacun de deux pommes de cuivre, prisée et estimée

6 l. t.

It. un miroir ayant l’enchassure peinte, prisé et estimé

3 1. t.

It. un vieil tableau prisé et estimé

10 s. t.

Dedans ledit grand coffre, a été trouvé deux nappes neuves de toile chanvre femelle, contenant chacune deux aulnes, avec une autre nappe de pareille longueur de toile femelle, prisées et estimées

4 l. 10 s. t.

It. deux nappes de toile de lin, l’une contenant deux aulnes et demie et l’autre neuf quartiers frangés, prisées et estimées

It. trois nappes de pareille toile et longueur que les trois premières ci-dessus, prisées et estimées

4 l. 10 s. t.

It. deux, serviettes de collation de toile de lin de chacune une aulne et demie, prisées et estimées

50 s. t.

It. neuf draps de lit de toile neuve de plusieurs façons, prisés et estimés

27 1. t.

It. cinq douzaines trois serviettes communes de toile de lin prisées et estimées, l’une portant l’autre, 100 s. t. la douzaine qui est pour le tout

26 1. 5 s. t.

It. un ciel de lit frangé, garni de trois pentes de toile de lin, garni de ses fonds de linge usé, prisé et estimé pour le tout

8 1. t.

It. un vieil corps de linge, servant de nuit à une femme, prisé et estimé

5    s. t.

It. deux aulnes un demi quart de drap noir, prisé et estimé

3 1. t.

Dedans le grand bahut, a été trouvé un tapis de drap vert figuré |101 à l’ entour de couleur jaune, contenant deux aulnes un quart et demi ou environ, appiécé en plusieurs endroits, prisé et estimé

6    l. t.

It. un tapis de couleur vert frangé, prisé et estimé

30 s. t.

It. cinq draps de lit de toile neuve de chanvre, de chacun quatre aulnes et demie, prisés et estimés

12 1. 10 s. t.

It. trois douzaines de serviettes neuves, en petit lay, prisées et estimées

6 1. t.

It. un vieil haut-de-chausse, à l’usage dudit deffunct couleur minime, prisé et estimé

6 l. t.

It. un chapeau noir, doublé de taffetas, garni, de son cordon, prisé et estimé

15 s. t.

It. un pourpoint et un haut et un bas de bas-de-chausse, à l’ usage du dit défunt de drap bure, prisé et estimé

12 l. t.

It. un encrier garni de ses jetons, prisé et estimé

5 s. t.

En une chambre de la maison acquise par ledict défunt de

feu Regné Benoit, a été trouvé une table de bois de noyer, portée sur un chassis, à quatre piliers tournés en pareil bois, avec une bancelle, prisée et estimée

40 s. t.

It. une chaire percée de bois de noyer, prisée et estimée

25 s. t.

Deux chenêts de fer, garnis de chacun deux pommes de cuivre prisés et estimés

3    l. t.

It. un buffet de bois de noyer, fermant à deux guichets et deux layettes, prisé et estimé

4    1. t.

It. un grand chaslit de bois de noyer faict à piliers tournés et à imageries, garni de ses enfonçures, chassis et verges de fer, prisé et estimé

9 l. t.

Sur led. chaslit, un lit garni de couette, coussins et couvertures de laine, couleur bleu céleste, une paillasse de toile, un ciel de linge, frangé, garni de custodes de linge tel quel, prisé et estimé

36 1. t.

It. un moyen chaslit, à piliers cannelés, garni de ses enfonçures, de deux verges de fer, prisé et estimé

6 1. t.

Sur ledit chaslit, un lit garni de couette et traversier, une paillasse, une couverture de laine blanche telle quelle, un petit ciel de linge et deux custodes, led. lit et custodes de linge, tel quel, prisé et estimé

20 l. t.

En une autre chambre basse dudit lieu étant sur ledit

jardin, a été seulement trouvé un chaslit neuf, de bois de noyer ferré à vis, garni de ses enfonçures, prisé et estimé

12 l. t.

En une petite chambre de la maison de défunt René Benoist, servant à faire la lessive et à laver, a été trouvé une table garnie de ses traultes telles quelles, prisées et estimées

20 s. t.

It. deux moyens pendules de fer, prisés et estimés

33 s. t.

Deux chenêts de fer, prisés et estimés

20 s. t.

Un garde-manger de toile, prisé et estimé

40 s. t.

Un marche-pied sans couvercle, tel quel

10 s. t.

Une chaudière de fonte servant à laver les écuelles, prisée et estimée

25 s. t.

Une moyenne marmite avec une petite marmite, garnies de leurs cuillers, prisées et estimées

10 s. t. |102

It. unpouaslois (?) d’airain, une moyenne et une petite cuiller de fer prisées et estimées

10 s. L

It. deux grands et un moyen bacte de fer, prisés et estimés

20 s. t.

It. une pouesle de fer, prisée et estimée

10 s. t.

En la chambre en laquelle est décédé ledit défunt, servant de cuisine ordinaire, a été trouvé une table de bois de chêne, garnie de ses traultes, prisée et estimée

30 s. t.

It. trois escabelles de bois de noyer, l’une desquelles est rompue, prisées et estimées

18 s. t

It. une caquetoire couverte de tapisserie rompue, prisée et estimée

5    s. t.

It. deux placets de bois de noyer tels quels, prisés et estimés

6    s. t.

It. une grande chaire à dossier où il y a pour portrait un crucifiement fermant à un guichet à clef, de bois de noyer, prisée et estimée

4 1. t.

Une autre chaire de bois de chêne, fermant à un guichet, prisée et estimée

30 s. t.

Un buffet de bois de chêne, fermé à deux guichets, n’ayant qu’ une layette, prisée et estimé

30 s. t.

Un moyen coffre fermant à clef, prisé et estimé

40 s. t.

Un chalit de bois de noyer à piliers tournés, garni de ses enfonçures, chassis et verges de fer, prisé et estimé

Sur le chalit, un lit de plumes garni de couettes et traversier avec la paillasse, prisé et estimé

12 l. t.

It. une couverture de laine blanche, prisée et estimée

15 l. t.

It. un ciel de lit de linge, garni de ses custodes et de son fond, prisé et estimé

6 1. t.

It. un chalit de couchette de bois de noyer, garni de ses enfonçures, prisé et estimé

3 l. t.

Sur ledit chalit de couchette, un lit de couchette, garni de son traversier, avec une petite couchette, garni de son traversier sous ledit lit, prisé et estimé

9 l. t.

It. une couverture de laine blanche, prisée et estimée

100 s. t.

Dix-neuf draps de lit, partie d’iceux neufs, autre partie à demi usés et l’autre partie telle quelle, compris quatre draps de couchette, compris aussi les draps qui sont dedans les dits et les salles, le tout rapporté, prisés et estimés

30 s. t.

It. quatorze chemises à usage dudit défunt, usées, prisées et estimées

14 1. t.

It. six nappes sales de gros linge, de longueur de deux aulnes, prisées et estimées

100 s. t.

Quinze serviettes communes, servant à tab1e, telles quelles, prisées et estimées

45 s. t.

It. six thouailles à mains de gros linge, prisés et estimés

It. une hallebarde, prisée et estimée

20 s. t.

It. huit vingt-six livres de vaisselle d’étain en plusieurs espèces, prisés et estimés, chacune livre portant l’autre, sans en rien excepter en quelque façon que ce soit 6 s. t. revenant le tout ensemble à

49 l. 16 s. t.

It. une grande chaudière d’airain, prisée et estimée

40 s. t. |103

It. une autre moyenne chaudière, prisée et estimée

30 s. t.

Trois petits chaudrons d’airain, prisés et estimés

20 s. t.

It. un pot et un coquemard de franc cuivre barré, iceluy pot garni de son couvercle, prisé et estimé

40 s. t.

It. un autre pot d’airain et un coquemard aussi d’airain, prisé et estimé

20 s. t.

It. une bassinoire d’airain, prisée et estimée

12 s. t.

It. une passoire aussi d’airain, garnie de sa queue de fer, prisée et estimée

12 s. t.

It. une grande poêle de fer, prisée et estimée

12 s. t.

It. un poueslon et un friquier d’airain, prisé et estimé

5 s. t.

It. cinq chandeliers de cuivre, grands et petits, prisés et estimés

25 s. t.

It. deux chenêts de fer, portant leurs réchauts, avec vingt-cinq petits chenêtons, prisés et estimés

40 s. t.

Une pelle de fer, une crémaillère, une petite paire de pincettes, prisées et estimées

17 s. t.

It. une petite marmite, garnie de son couvercle, prisée et estimée

8 s. t.

It. une corbeille d’osier servant à mettre le pain, prisée et estimée

5    s. t.

Une paire de bottes, avec les éperons, à l’usage dudit défunt, prisée et estimée

15 s. t.

En une petite chambre haute que l’on appelle garde-robe, a

été trouvé une couverture de laine, couleur pers, percée et mangée des teignes en plusieurs endroits, prisée et estimée

61. t.

It. une autre couverture de lit de laine blanche, prisée et estimée

10 l. t.

It. une vieille couverture de laine rouge, usée et percée, prisée et estimée

30 s. t.

It. un manteau couleur de rose sèche35, à l’usage dudit défunt, prisé et estimé

6    l. t.

It. un grand coffre de bois de chauffage, fermant à clef, prisé et estimé

30 s. t.

Dedans ledit coffre, a été trouvé un bas de robe à queue, de drap noir garance sans aucune doublure, prisé et estimé

8 l. t.

It. une cotte à l’usage de ladite défunte, de serge de couleur de pourpre, garnie de son corps de camelot changeant, ladite cotte doublée de drap, prisée et estimée

4 l. t.

It. un pourpoint de camelot turquie, à l’usage dudit défunt, usé, percé, prisé et estimé

40 s. t.

It. un haut-de-chausse noir, de serge Beauvais, galonné, à l’ usage du dit défunt, prisé et estimé

6 l. t.

It. un cotillon de drap baude, à l’usage de ladite défunte, prisé et estimé

6 1. t.

It. un pourpoint de velours noir plein à l’usage dudit défunt, prisé et estimé

6 1. t.

It. deux hauts-de-chausse de velours à ramages façon de gregues, à l’usage dudit défunt, prisé et estimé

6 l. t. |104

It. un pourpoint de satin noir, usé, à l’usage dud. défunt, prisé et estimé

60s. t.

It. un corps de serge d’Escaut, à l’usage de femme, prisé et estimé

20 s. t.

Un chaperon à l’ usage de ladite défunte, prisé et estimé

40 s. t.

It. une robe de drap noir, bandée de velours à l’usage de ladite défunte, prisée et estimée

10 s. t.

It. une petite quantité de ferraille, prisée et estimée

It. deux seaux ferrés et un autre seau de boissellerie, prisés et estimés    10 s. t.

En une chambre du corps de logis de derrière a été trouvé une huche de bois de chêne, prisée et estimée

20 s. t.

It. une vieille chaudière d’airain sans anse, un thucau36 à buée, une selle, un courroir, un charrouir37 de toile, servant le tout à faire la lessive, prisée et estimée

20 s. t.

It. les ais d’un vieil chalit, d’une couchette, prisés .et estimés

20 s. t.

It. une crémaillère et une paire de pincettes, prisées et estimées

8 s. t.

Une civière à bras, prisée et estimée    5 s. t.

En une autre chambre du corps de logis de derrière, dix poinçons futaille, prisées et estimées

4 1. t.

Un millier de tuiles qui a été délaissé pour réparer ladite maison quand besoin sera du consentement desdits tuteurs et curateurs, comme aussi a été délaissé mille deux cents carreaux, étant audit lieu, pour iceux employer quand besoin sera et partout.

Non a été prisé et estimé.

It. quarante sacs de toile servant à mettre grains, prisés et estimés 7 s. 6 d. t. pièce, soit

15 l. t.

It. huit balles de toiles faites de vieils sacs, servant à faire sécher du blé, prisées et estimées

8 l. t.

En un lieu de ladite maison nommé le grand ouvroir, où sont les cuves, a été trouvé une grande cuve, tenant environ 8 poinçons, prisée et estimée

9 l. t.

Un bassin de cuivre, prisé et estimé

5 s. t.

Un vieil et méchant buffet de bois de chêne, avec un verrier d’ osier, prisé et estimé

10 s. t.

Il y a dix-huit soliveaux de bois de chêne audit lieu, qui ont été délaissés pour être employés à icelle maison, quand métier sera ou bien ailleurs, ès logis desdits enfants en commun.

Au grenier au foin a été trouvé un cent de bottes de foin, prisées et estimées

100 s. t.

Audit grenier, ont été trouvé 12 chevrons qui ont été aussi délaissés sur led. lieu, en commun, pour réparer quand besoin sera.

En l’un des greniers de ladite maison a été trouvé une mine ferrée, un minot ferré mesure d’Étampes, prisée et estimée

40 s. t.

lt. un minot mesure de Chartres, un minot à l’avoine d’Étampes, tel quel, prisé et estimé

20 s. t.

Au premier grenier a été trouvé un tas de blé fourment qui a esté mesuré à la mesure d’Étampes, par laquelle mesure s’est trouvé six muys de blé, prisé et estimé chascun muy (eu égard que le mesureur a parlé tout net) à la somme de trente-trois l. t. qui est pour le tout la somme de

198 1. t. |105

En la chambre de derrière le corps de logis estans au-dessus

de la cave, a esté trouvé 15 set. d’avoyne, mesuré à l’avoyne d’Étampes, p. et e. à la raison de 18 1. t. chascun muy, qui est pour lesdicts 15 set. la somme de

22 1. 10 s. t.

En la maison des Singes, assize en la grande rue Saint-Jacques et appartenant ausdicts enfans :

A esté trouvé, dedans une chambre haulte, 12 muys de blé fourment viel, p. et e. à ladicte raison de 33 l. t. chascun muy, qui est pour lesdicts 12 muys ensemble la somme de

396 1. t.

Dedans le grenier d’haut de ladicte maison, a esté trouvé 6 set. de petit blé fourment, p. et .e. chascun septier 50 s. t ., qui est pour le tout revenant à la somme de

12 1. 10 s. t.

Item 3 setiers de blé mestail, mesure d’Estampes, prisés et e. chascun septier 35 s. t., qui est pour le tout revenant à la somme de    5 l. 6 s. t.

Au lieu où sont les cuves cy-dessus inventoriées, a esté trouvé 2 poinçons de vin nouvel p. et e. ensemble la somme de

16 1. t.

Item 2 aultres poinssons de vin viel repassé sur le mart, prisés et estimés ensemble la somme de

10 l. t.

Dedans la cave qui est soubs le corps de logis de derrière :

A esté trouvé 9 poinssons de vin viel, creu du pays, assavoir 8 poinssons de vin clair et creu du pays et 1 poinsson de vin blanc, prisés, l’ung portant l’aultre, 7 l. 10 s. t. chascun poinsson, qui est pour le tout somme de

67 l. 10 s. t.

Dedans l’estable, a esté trouvé 2 chevaulx, l’un à poil boyard allezan, nagé de 15 ans au plus, actendu qu’il a servy au dict deffunct Foudrier pendant le temps de 10 ans et demy, garny de sa scelle et briddon, prisé 36 l. t. ; et l’aultre à poil de souyn, aussy garny de scelle et bridde, aagé de 7 à huict ans, p. et e. 50 l. t., qui est pour les dicts 2 chevaulz

86 l. t.

Le 28e jour desdicts moys et an, a esté inventoryé 12 onces et demye d’argent et ung somier à enfans et la partye d’un demy scanutz (?) rompu et quelques pastenostres d’argent, estimé à la raison de 20 l. t. le marc, qui est pour le tout du tout la somme de

31 l. 5 s. t.

A esté réprésenté 10 cuillères d’argent qui n’ont esté prisées, ni poysées, actendu que chascun des dicts 5 enfans, du consentement de leurs dicts tutteurs et curateurs, en ont prins chascun 2.

It. ung chappelé de 50 pastenostres d’ambre, grosses et menues ou il y a ung ymage saint Jacques de Geesnour, enchassé en argent, prisé et estimé

15 s. t.

It. 2 chesnes d’or, 6 boutons d’or esmaillés, qui autrement servoient aux manches des femmes, 5 marques de pastenostres d’or, en poincte et gerbe, fassonnées sur estraincte d’or esmaillé, six anneaulx d’or, avec leurs pierres, telles qu’elles, poysant le tout 4 onces 6 gros p. et e. à la raison de 26 1. t. l’once, qui est pour le tout

123 1. 10 s. t.

It. ung diamant fin, enchassé d’or esmaillé, prisé et estimé la somme de

30 1. t.

It. ung aultre anneau ruby, enchassé en or esmaillé, prisé et estimé

6 1. t.

It. une croix d’or esmaillée, poysant 6 gros, prisée et e. à la raison de 20 1. l’once, revenant à la dicte raison à la somme de

18 1. 15 s. t. |106

It. 48 gerbes d’or, garnyes de coral, prisées ensemble la somme de

4 1. 10 s. t.

A esté rapporté et mis en appert et évidance la somme de 376 1. t. en espèces, d’escu d’or au solleil, poysant cy

378 1. t.

Plus a esté rapporté et mis en appert et évidance la somme de 1448 l. 8 s. t. en espèces, de doublons et quadruples d’or et poysant cy

1448 l. 8 s. t.

It. en doubles ducatz d’or a esté rapporté la somme de

30 1. t.

It. en aultres pièces d’or a esté raporté (sic).

It. en aultres pièces d’or, qui ont aussy esté rapportées, a esté trouvé la somme de

19 1. 10 s. t.

Plus en deux escus vielz et demy escus, qui ont aussy esté rapportés, a esté trouvé

16 1. 15 s. t.

It. a esté rapporté 85 l. 7 s. t. en escus et pistolles.

It. a esté rapporté et exibé en réalles dalles d’Espagne, ducatons et aultres pièces d’argent estrangères, la somme de

six vingts 10 1. 15 s. t.

It. a esté rapporté et mis en appert et évidance en plusieurs espèces de francs, demy francs, quarts d’escu, demy quarts et aultre monnoye menue, la somme de

70 1. t.

Plus a esté rapporté en pièces de 5 s. t. d’Espagne la somme de

15 1. t.

Ce faict, le dict Pierre Foudrier a déclaré avoir envoyé au dict Nicollas Foudrier, estant lors à Bourges pour obtenir ses licences, la somme de 100 l. t. en doubles pistolles depuys le déceds dudit deffunct leur père, ce que le dict Nicollas Foudrier a recongnu et présentement confessé.

Et dont tous les biens, meubles, grains, vins, bagues, or, argent, monnoye demouré en la garde dudict Pierre Foudrier, qui s’en est chargé et promis d’iceulz rendre compte jusques à ce que autrement ils en ayent advisé et ce que le présent inventaire soit parachevé.

Ledict Pierre Foudrier a aussy déclaré avoir payé les frais funéraulx du dict deffunct leur père, ensemble les habits de deuil qui leur a convenu avoir à eulx cinq enfants, comme aussy a payé les médecins, appotiqaires, cirrugiens, bouchers, les boullangers, les femmes qui ont gardé ledict deffunt et générallement tout ce qui estait par eulx deu tant auparavant la mort dudit deffunct que depuys et sera au plustost faict inventaire des debtes deues tant par le papier journal, obligations, ceddulles que aulttement et pareillement des tiltres concernant leur communeaulté, si comme etc... promectant etc... obligeant etc... Renonçant etc... Faict ès présences de Me Loys Pelletier, praticien, demourant audict Estampes et Jehan Martenot Fouillis demorant audict lieu, tesmoings qui ont avec lesdicts Pierre Jehan Nicollas Foudrier, Guerton David et Boudcauliz signé sur la minute des présentes : Larsonneur.

*

* *

Le reste de l’inventaire concerne d’abord les créances, sommes dues à la succession par les clients de Jehan Foudrier ou des emprunteurs.

Il s’agissait surtout de cultivateurs de Beauce, notamment de la région chartraine, et de gentilshommes du pays, comme les Camus de Saint-Bonnet, dont l’ un fut bailli et gouverneur d’Étampes, |107 les Paviot, seigneurs de Boissy-le-Sec38, les Thiboust, seigneurs de Thionville39, les des Mazis, seigneurs de Brières40, les Morainville, seigneurs de Guillerville41. Cependant son commerce s’étendait jusqu’à Paris où plusieurs boulangers du faubourg Saint-Jacques lui achetaient du blé. L’ensemble de ces créances s’élevaient à près de 15.000 livres. D’autre part, il avait constitué des rentes au profit de divers emprunteurs, quelques-uns même habitant une région fort éloignée de la nôtre, comme messire François de Boullier, évêque de Fréjus.

Enfin l’ inventaire comprend les loyers de ses terres sises à Morigny42 principalement, puis à Richarville43, au Préau-Saint-Lubin44, à Marolles-en-Beauce45, à Monnerville46, à Dhuilet47, à Rouvray-Saint-Denis48. Nous citerons également une de ses vignes située à Étampes, au-dessus de la Porte-Dorée. Les rentes et les loyers atteignaient environ 1.200 livres, ce qui représente, au denier vingt, un capital de 24.000 livres. Si l’on y ajoute les prisées de l’inventaire et les espèces, on arrive à une somme approximative de 44.000 livres, fortune assez considérable pour l’ époque, et il faudrait encore y ajouter la valeur, non indiquée dans notre inventaire, des trois maisons d’Étampes qui appartenaient aux époux Foudrier.

*

* *

Les enfants de Jehan Foudrier étaient : Pierre qui épousa Jeanne Bouter et ne laissa pas des descendants ; Jehan, né en 1581, qui va suivre ; Nicolas, né en 1587, qui avait, au moment de l’inventaire, « ses lettres de licence » ; Cantien, né en 1589, et Noëlle, née en 1594, qui, en 1615, était femme de René Foucault49. Nicolas et Cantien entrèrent en religion.

Jehan, chevaucheur de l’écurie du roi, puis lieutenant de la maréchaussée d’Étampes, prévôt des marchands et, en 1629, échevin50, épousa Marie Guisenet dont le frère Jean était conseiller du roi, élu et contrôleur à Étampes en 165051. Ils eurent neuf enfants. Nous citerons seulement André, qui mourut « au service du roi dans son armée de Picardie »52, Jean, qui devint religieux profès à l’abbaye de Morigny, Noëlle, femme de Jacques Petit, seigneur |108 de Mézières53, Marie, qui épouse, en 1650, Charles de Saint-Périer, seigneur de Durand54, capitaine d’infanterie.

Mais nous nous étendrons un peu sur Isaac qui devint seigneur de Boisrevaux55 et fit une brillante carrière militaire. Il était né à Étampes et fut baptisé en l’église Saint-Gilles le premier juillet 163456. Son parrain fut David Drouin, écuyer de Monsieur, frère du roi, sa marraine Marie de Fusée57, femme de Jacques du Plessis, seigneur d’Avrainville. À dix-huit ans, en 1652, il s’engagea dans le régiment de cavalerie de Genlis. Il est probable que ce fut la présence des armées à Étampes au moment des guerres de la Fronde qui décida de sa vocation militaire. Nous le voyons, en effet, prendre part au siège d’Étampes dès cette année 1652, puis au combat de la porte St-Antoine à Paris. Il devint cornette dans le même régiment ; mais il quitta bientôt la cavalerie pour entrer dans l’artillerie, où il devait servir durant toute sa carrière. En 1658, il est commissaire ordinaire de l’artillerie, dans l’armée de Flandre, commandée par Turenne. Il assiste à la bataille des Dunes, aux sièges de Dunkerque, Gravelines, Ypres, Marsal. En 1663, il occupe le même grade dans l’armée de Lorraine ; en 1667, il prend part aux sièges de Douai, Lille et Tournai ; en 1668, il est commis à Hesdin. L’année suivante, il fait partie de la fameuse expédition contre les Turcs, commandée par le duc de Beaufort. Au siège de Candie, il est blessé « en faisant faire une batterie de six pièces de canon sur une chapelle appelée Sainte-Pélagie ». Un certificat du duc de Navailles, délivré le 20 août 1669, à Candie, constate « qu’il a très bien et fidèlement servi dans les fonctions de commissaire ordinaire de l’artillerie et donné des marques de son expérience dans toutes les occasions ».

En 1670, il est lieutenant d’une compagnie de canonniers au fort de Saint-Sébastien à Douai. La même année, il devient commissaire provincial de l’artillerie à Orléans. Il y reste peu de temps puisque dès l’année 1671, il est commissaire provincial de l’artillerie à Philippeville. En 1672, il fait la campagne de Hollande, assiste aux sièges d’Orsoy, de Rimbergue, de Vezel et de Nimègue, où il est blessé dangereusement au bras et « nonobstant ladite blessure, ne laissa pas de faire continuer le service de l’artillerie comme s’il n’eût pas été blessé ».

En 1674, il est à Messine où il demeure trois ans commandant de l’artillerie. Nous ne savons rien de lui pendant la période de paix relative qui sépare le traité de Nimègue de la guerre de la ligue d’Augsbourg, sauf qu’il est présent au siège de Luxembourg en 1684. Mais nous le retrouvons en 1688 commissaire provincial de l’artillerie en Artois, en 1689 commandant l’artillerie à Bonn où, durant le siège, « il donne des marques de son courage et de sa capacité |109 au fait de la guerre ». En 1691, il est nommé lieutenant général en second à l’armée d’Allemagne, sous le marquis de la Frezelière, et commande l’équipage d’artillerie assemblé à Saverne. En 1693, il n’est plus à l’armée d’Allemagne, mais à Vitré, pour commander l’équipage d’artillerie de l’armée du roi sur les côtes de Bretagne, aux appointements de 400 livres par mois. Il y reste deux ans et en 1695 il est appelé au département d’Artois, qu’il quittera durant l’année 1697 pour commander à Mons. De retour à Arras en 1698, il y demeurera au moins jusqu’en 1703. À cette époque, le duc du Maine, grand maître de l’artillerie, lui propose le commandement de l’équipage d’artillerie de l’armée de la Moselle « sur la forte envie qu’il a marquée depuis longtemps de servir dans des postes plus avancés ». Nous ignorons s’il accepta ce poste. Nous savons seulement qu’en 1706, il commande l’école d’artillerie établie à Douai par le roi pour instruire les jeunes officiers pendant le semestre d’hiver. Son long commandement en Artois lui valut le titre de bourgeois d’Arras qui lui fut décerné, ainsi qu’à ses quatre fils, en décembre 1699, par le maire et les échevins.

En 1714, son état de santé ne lui permet plus de continuer son service ; il avait 80 ans. Il se retire à Étampes et reçoit une pension de 800 livres. En 1717, il obtient un brevet d’officier d’artillerie privilégié sur la cour des Aides, devenant ainsi « l’un des 111 », avec pension de mille livres, « en considération des longs et signalés services rendus par lui dans l’artillerie ». Nous ne connaissons pas la date de son décès. En 1719, il vivait encore, ainsi que sa femme, puisqu’ils font un testament olographe le 7 octobre de cette année. Ils habitaient la paroisse Saint-Basile d’Étampes.

Isaac Poudrier de Boisrevaux fut anobli par lettres patentes du roi données à Versailles en février 169 1 58, enregistrées par le Parlement le 10 décembre de la même année. Ses armes, enregistrées à l’Armorial général par Charles d’Hozier en 1698, étaient de gueules a la fasce d’argent chargée de trois feuilles de chêne de sinople. Il avait été fait chevalier de Saint-Louis antérieurement à 1699, c’est-à-dire peu de temps après la création de l’ordre. Un portrait de lui, que nous reproduisons, le montre avec une armure complète, comme il était d’usage alors. Il est peu probable qu’il soit ressemblant, tant il rappelle plutôt la physionomie et l’attitude de Louis XIV, conformément à la mode de l’époque.

Isaac Foudrier avait épousé Anne-Catherine Cordet, fille de François Cordet, conseiller du roi, élu pour le roi en l’élection d’Étampes, et de Catherine Greneux. Née à Étampes et baptisée à Notre-Dame, le 9 février 1659, elle avait eu pour parrain Charles de Paviot, seigneur de Boissy-le-Sec, et, pour marraine, Anne Bury, femme d’Etienne Poupardin, conseiller du roi et receveur des tailles en l’élection d’Étampes.

Nous avons vu que le seigneur de Boisrevaux eut quatre fils. Cependant, le nom de Foudrier semble avoir disparu avec lui. En 1719, dans son testament, il a pour unique héritière sa fille Marie-Catherine, née le 16 février 1698. Elle épousa, le 11 juin 1719, en l’église St-Martin d’Étampes, Jacques-Auguste de Poilloüe, seigneur |110 de Bonnevaux, capitaine au régiment d’Artagnan, et mourut à Étampes en 1782. Ses enfants assurèrent la descendance des Poilloüe de Bonnevaux, qui s’éteignirent en 1863, en la personne d’Auguste-Jean-Baptiste de Poilloüe, comte de Bonnevaux. C’est ainsi que les papiers des Foudrier furent transmis à la branche des Poilloüe de Saint-Périer, devenue l’aînée, et qu’il nous a été permis d’en publier quelques extraits. Ils nous ont paru offrir un certain intérêt par les renseignements qu’ils fournissent tant sur le mobilier et l’état de fortune d’un bourgeois d’Étampes au XVIe siècle que sur la vie mouvementée d’un officier sous Louis XIV.

Comte de Saint-Périer.

Blason des Paviot

03. Autour d’une énigme généalogique les Paviot de Boissy-ie-Sec et les Paviette de Lorraine 59

R. et S. de Saint-Périer

Sur le vaste et monotone plateau de Beauce, à huit kilomètres d’Étampes et non loin de la grande route de Chartres, le village de Boissy-le-Sec, qui compte aujourd’hui 500 habitants à peine, groupe ses maisons basses et ses fermes autour d’un château, en partie moderne, mais dont une tour d’angle et quelques bâtiments indiquent l’origine médiévale. L’église, de modeste apparence, remonte par certains détails de sa décoration aux dernières années du treizième siècle.

Au nord-ouest, deux hameaux, le Rotoir et Venant, qui comprennent seulement quelques feux, sont bâtis à l’origine de petites vallées creusées par des ruisseaux tributaires de l’Orge, qui entament en ce point la terre beauceronne. C’est dans le château, entouré d’un beau parc, |4119 seul refuge d’ombre de ce grand pays muet, qu’ a vécu pendant près de cinq cents ans la famille des Paviot dont nous voudrions retracer l’histoire.

Cette maison a compté quelques personnages d’une certaine importance et sa généalogie nous révélera un curieux problème de filiation.

*

* *

Il n’a pas existé moins de six familles nobles portant le nom de Paviot60 :

1° — Une famille originaire des environs de Rouen, qui portait : palé et contrepalé d’or et d’azur ;

2° — Une famille de Bourgogne, qui portait : d’or à trois têtes de pavot de sinople posées 2 et 1 ;

3° — Une famille du Dauphiné, qui portait : d’ azur à un griffon d’argent langué de gueules à la bande du même., chargée de trois étoiles d’or brochant sur le tout61 ;

4° — Une famille de Picardie, qui portait: d’azur au griffon d’argent à la bande de gueules chargée de deux étoiles d’or ;

5° — Les Paviot de Beauce, qui font l’objet de cette étude, portant : d’argent à l’aigle de sable, couronné et lampassé d’or, l ’aile dextre d’azur chargée de six annelets d’or posés 2, 2 et 2 ;

6° — Enfin, une sixième famille, originaire de |5120 Lorraine, nommée Paviette, puis Paviot dont nous aurons à parler plus loin. 60 61

La confusion a été faite parfois entre ces différentes familles, qu’il est cependant assez facile de distinguer. C’est ainsi que les armes des Paviot du Dauphiné ont été attribuées à des Paviot de Beauce, et qu’on a rattaché à la maison du Dauphiné des membres de la famille de Boissy-le-Sec62.

Le premier des Paviot de Beauce dont nous ayons connaissance est Jean Paviot ou de Paviot, chevalier, seigneur de Boissy-le-Sec, qui entra en foi et hommage de la terre et seigneurie de Boissy envers la comtesse d’Alençon, à cause de son château d’Étampes, en 134963.

Un terrier inédit de Souzy-la-Briche64, daté de 1685, nous donne la même indication, provenant également des titres de la famille de Paviot au XVIIe siècle.

Ce Jean Paviot était, d’après Montrond65, chevalier banneret ; c’est lui, dit cet auteur, lequel ne cite pas ses sources, qui aurait bâti le château de Boissy en 1339. Montrond ajoute que la forteresse de Boissy fut cédée aux Anglais par le traité de Brétigny en 1360, mais rachetée peu après par la ville de Paris, avec l’autorisation du régent (depuis Charles V). |6121

Nous ne connaissons pas le nom de la femme de Jean de Paviot. La généalogie dressée en 1695 par le notaire de Boissy, indique seulement qu’il fut tuteur des enfants de Luc de Varennes, écuyer, du temps de Charles-Quint (Charles V).

Son fils aîné, dit notre généalogie, fut Pierre, sur qui nous possédons plus de renseignements.

En 1395, en effet, nous trouvons Pierre Paviot, échanson de Louis duc d’Orléans, frère de Charles VI. Il est ainsi qualifié dans une lettre de rémission66, accordée à l’un de ses serviteurs, Raoulin Fouet, dit Paviot comme son maître, inquiété à cause d’ un meurtre commis aux portes d’ Étréchy67. Nous avons publié déjà une analyse de cette pièce68.

Au moment du meurtre (août 1395), Pierre Paviot résidait en « un ostel qu’il possédait à moins d’un quart d’une lieue d’icelle ville » (Étréchy). Il y a toute apparence qu’il s’agit du Roussay : en effet, nous trouvons, au XVe siècle, les Paviot seigneurs de ce fief, dont on voit des ruines aujourd’hui encore, à un kilomètre environ d’ Étréchy.

Mais Pierre Paviot possédait également des terres en Normandie. Le 4 mai 1400, « remise lui est faite de 300 livres d’or, dus au roi sur la coupe et vente de bois sis au Mesnil-Paviot à Périers69 » (Perriers-sur-Andelle, canton de Fleury-sur-Andelle, Eure). Sans doute, il voyageait fréquemment d’une |7122 de ses terres à l’autre et il emmenait avec lui ses serviteurs préférés, car Raoulin Fouet, qui était allé « besogner pour son maître à Étréchy le samedy avant la feste de Saint-Laurent » de l’année 1395, était originaire de la paroisse de Perriers-sur-Andelle.

En 1400 également, Pierre Paviot rend hommage au duc de Berry à cause de son comté d’Étampes70.

Le 12 juin 1402, il intervient avec Jean de Varennes, tous deux comme seigneurs de Boissy, dans un accord passé avec les marguilliers de l’église de Boissy71. Cette pièce nous apprend que la nièce de Pierre Paviot avait épousé messire Yon de Maintenon, dit le Borgne de la Queue, maître d’hôtel de Charles VI72.

Non loin de Boissy-le-Sec, à Richarville73, Pierre Paviot possédait un « ostel », où il se rendait quand il chassait (fig. 1).

Il semble avoir été un veneur déterminé. Le 2 mai 1394 et le24 août 1401, il rappelle ses droits de chasse dans la « forêt » de Montbardon (aujourd’hui réduite à un simple boqueteau) et son droit de suite dans la forêt de Dourdan, appartenant au comte d’Étampes74. «J’ay droit, dit-il dans cet hommage, et usage de chasser, vener à cor et à cry et laisser courre mes chiens et à toutes bestes et oyseaux... toutefois qu’il me plaist à ce faire ou faire faire par moy ou mes gens de moy advoués ». |8123

Il ne possédait pas le droit de justice sur les forêts de Montbardon et de Dourdan qui relevaient du comte d’Étampes. Aussi a-t-il soin de revendiquer le droit « de prendre ou de faire prendre, par mes gens: prisonniers toute manière de gens qui par moy et mes gens seront trouvés chassant ou tendant à beste ou oyseaux et de les mener prisonmers au chastel de mondit seigneur à Étampes pour estre pusnis par luy ou ses officiers de telle pugnition comme il est accoustumé de pugnir ceux qui chassent en garenne jurée ».

Fig. 1.L ’« ostel » de Pierre Paviot à Richarville.

L’hommage de 1401 nous donne à penser que la femme de Pierre Paviot possédait des biens dans cette région de Dourdan, car, en demandant le droit de suite en forêt de Dourdan pour toutes « bestes fortraites ou non fortraites venant des boys de Richarville ou de Montbardon », Pierre Paviot réclame |9124 le droit d’ entrer en forêt « le long des buissons de Guymprée de ma femme75 ».

Il faut ici mentionner un Perrinet Paviot, écuyer, qui donna quittance à Tours, le 7 septembre 1371, de 3o livres d’or sur ses gages et ceux de trois écuyers de sa compagnie en la compagnie et sous le gouvernement de M. de Blainville76. Peut-être s’agit-il d’un frère de Pierre Paviot qui était, dit Delimoges, l’aîné des enfants de Jean de Paviot.

Pierre Paviot, dont nous ne connaissons pas la femme, eut comme fils :

Jacques Paviot, échanson du roi Charles VI en 1401, seigneur du Mesnil et de Boissy77, qui épousa le 24 juillet 1401, Alix de Montagu, fille de Gérard de Montagu et de Biote Cassinel, suivant les uns78, de Jean de Montagu et de « Madame d’ Achère » et nièce de Jean de Montagu, évêque de Chartres, d’après les autres79. Selon Delimoges, Jean de Montagu était grand maître de France. |10125

De ce mariage, serait né Louis ou plutôt Loys Paviot qui joua un certain rôle dans les guerres de son temps et que plusieurs documents nous font connaître. Mais ici nous relevons quelques invraisemblances dans les dates que donnent nos généalogistes. En effet, Loys Paviot se serait marié avant l’âge de 14 ans, aurait donné quittance comme gouverneur de villes à 16 ans et aurait été tué à 21 ans après avoir occupé des charges importantes. Nous pensons qu’une erreur a dû être faite sur la date du mariage de son père, Jacques Paviot, et que l’union de celui-ci avec Alix de Montagu dut être antérieure à 1401, à moins que Loys Paviot eût été un frère et non un fils de Jacques Paviot.

Quoi qu’il en soit, nous savons que Loys Paviot, seigneur de Boissy-le-Sec, épousa le 15 avril 1415, Marie de Beaumont80, fille du comte de Beaumont, « laquelle était descendue en ligne directe d’ Éléonore de France, fille légitime de Philippe III de France et sœur de Philippe le Bel », dit le notaire de Boissy qui prend soin de nous informer qu’il a « collationné ces extraits à leurs originaux étant en papier sain et entier d’écriture qui pour ce faire lui ont été remis ès-mains par Messire Charles de Paviot, etc. ». Cette collation, nous venons de le voir, n’a pas empêché le bon notaire de commettre quelques erreurs. D’après Hubert, Jean de Beaumont était seulement chevalier, seigneur d’ Armeville.

En 1417, le 11 octobre, Loys Paviot est cité à l’occasion d’une montre, reçue à Yenville (Janville, |11126 arrondissement de

Chartres), par Pierre de Montizambert81. Ce dernier se rend à Janville « pour illec voir et recevoir la monstre de Loys Paviot, escuyer, et de vingt trois gentilzhommes du pays d’illec environ en sa compagnie pour servir mon dict seigneur le duc du dict pays (Orleans) partout où metier et requis... ».

Le 12 juin 1418, Loys Paviot, qui est alors « gouverneur et capitaine d’Étampes et de Peuthiviers », donne quittance au receveur général des finances du comte de Vertus, de quatre vingt neuf livres tournois « en recornpensacion des despens. en la garde de Peuthiviers. et aussi pour aider à soudoier les compaignons dudit lieu de Peuthiviers82 ».

Les archives municipales d’Orléans contiennent également des renseignements sur Loys Paviot, dans les registres des comptes de ville. On y voit notamment qu’il fut chargé de quérir quatre bombardes qui étaient à Pithiviers, que la ville d’Orléans lui offrit un cadeau de vin en 1421 et qu’il se rendit à Blois, par devers le chancelier d’ Orléans et son Conseil, pour leur exposer les maux que les gens du vicomte de Narbonne ont faits dans le duché (1422)83.

Enfin, nous savons que Loys Paviot trouva la mort dans les guerres contre les Anglais. Le dimanche 5 avril 1422, il s’était emparé du pont de Meulan, mais il ne put conserver longtemps |12/127 cette position : attaqué aussitôt par le comte de Salisbury, il fut contraint de rendre le pont le 15 avril84 et« s’en parti, dit Cousinot, avec ses biens».

Meulan devait lui être fatal, car au deuxième siège de cette ville, quelques mois plus tard, Loys Paviot, qui commandait la garnison, fut tué d’un coup de canon85. S’il faut en croire Cousinot86, Loys Paviot, qui « de tout le pays d’Orléans fut amé et tenu chier », avait été trahi par Tanneguy du Châtel, qui, au lieu de secourir la place de Meulan, dissipa « en achats de vaisselle comme de joyaux et pierreries » les deux mille écus que « ceulx d’Orléans » avaient donnés pour payer les troupes qui devaient délivrer Paviot.

Loys Paviot laissait de son mariage avec Marie de Beaumont :

Pierre IIe du nom ; et Alix, qui épousa Colinet de Prunelé, seigneur de Jodainville87.

Pierre Paviot, comme son père, fut mêlé aux évènements politiques de son époque. Nous le trouvons en 1464, maître d’hôtel du duc Charles de Berry, frère de Louis XI88, ainsi qu’ écuyer d’ écurie du roi, aux appointements de 240 livres comme maître d’ hôtel et de 400 livres comme écuyer. Il tenait du roi |13128 la charge des places d’Étampes et de Dourdan « les deux clefs de la Beauce » au moment de la bataille de Montlhéry (14 juillet 1465). « Ledit Paviot, dit une lettre du temps à Louis XI, est délibéré de vous bien loyalement servir et vous en assure.. Il veut estre à nous neuement89 ».

Ces relations de Pierre Paviot avec le parti royal lui ont fait même attribuer un rôle de pacificateur pendant la guerre du Bien public, comme négociateur entre le roi, le duc de Berry et Charles de Melun90.

Il possédait des biens assez considérables : seigneur de Boissy-le-Sec et du Roussay, comme son père, il était, en outre, seigneur de Jeurres91, fief dont il rendit foi et hommage à Jean de Foix, comte d’Étampes, le 21 juin 148192. Nous ignorons s’il avait conservé le Mesnil-Paviot à Perriers-sur-Andelle ; mais il avait d’autres terres en Normandie : en 1452 et en 1453, le roi lui accorde un délai pour le dénombrement d’un fief à Bléville-sur-la-mer93, au bailliage de Caux. Il vendit cette terre, qualifiée « noble fief entier de chevalier », le 18 décembre 145894.

Pierre Paviot avait épousé :

1° — Blanche de Baillolet, dont il eut une fille, Marguerite, mariée à Julien d’Ouzonville, écuyer95 ; |14129

2° — Jacqueline ou Jacquette de Bar, fille de Jean de Bar, chevalier, seigneur de Baugy et de Savigny (contrat de mariage passé par devant Laurent Balin, notaire en la prévôté de Bourges, le 1er septembre 145596).

Ce Jean de Bar, qui avait acheté en 1445 la terre de Baugy, près de Bourges, fut chambellan du roi, général des finances de 1444 à 1452, et plusieurs fois ambassadeur. Le duc de Berry, à la maison de qui était attaché Pierre Paviot, faisait des séjours à Baugy ; il y demeure 26 jours en 146097.

3° — Enfin, d’après Mondonville98, Pierre Paviot aurait épousé en troisièmes noces « damoyselle Jacqueline », veuve de Philippon d’Ouzonville, dont le fils Julien épouse le 27 avril 1463 la fille du premier mariage de Pierre Paviot avec Blanche de Baillolet.

Cette pièce nous apprend que Marguerite Paviot reçut en dot la terre de Forges, près de Montlhéry, qui lui venait de sa mère, et que Pierre Paviot, au mariage de sa fille, se qualifiait d’échanson du duc d’Orléans (Charles d’Orléans, le poète).

Du second mariage naquirent : Jean ; Renée, mariée à François de Marche, écuyer, seigneur de Veiny ; Louise, née en 1460, mariée en 1482 à Pierre Robé, écuyer, seigneur de Clermont.

Jean, IIe du nom, naquit à Boissy le 7 août 145099 ou le 7 août 1459100. Mondonville dit, en outre, |15130 qu’il fut baptisé à l’ église de Boissy et qu’ il eut pour parrains le comte d’Armagnac, l’abbé de Saint-Jean et Jeanne de Villequier « femme de Messire Loys de la Rochelle, seigneur de Bruières-le-Châtel101 ». Nous ne savons rien de plus sur lui, sinon qu’il épousa Marie de Villebresme, dont il eut de nombreux enfants :

Guillaume, né à Boissy-le-Sec le 16 septembre 1488, filleul de l’ archevêque de Bourges, de Jacques Chambellan, conseiller du roi, et de Marie de Refuge, dame du Roussay, « sa grande-mère » ; Louis, né vers 1492 ; Charles, né le 24 avril 1495 ; Pierre, né le 21 octobre 1496 ; Marie, baptisée le 13 février 1491 ; Gabrielle, baptisée le 21 novembre 1493.

Jusqu’ici nous avons suivi, en confrontant leurs renseignements, les quatre généalogies des Paviot : celle d’Hubert, celle de d’Hozier102, celle de Delimoges, celle de Mondonville et, à quelques détails près, nous avons pu accorder leurs indications. Mais, parmi les enfants de Jean II de Paviot, nous voyons le notaire de Boissy citer, après Guillaume et Louis, un certain Gérard qu’ il est seul à nommer. Ce Gérard « prit alliance en Lorraine », nous dit Delimoges, sans donner d’ ailleurs ni une seule date à son sujet, ni le nom de sa femme.

Notons, en passant, ce désaccord singulier entre deux de nos généalogistes qui puisent aux mêmes sources : Delimoges prend ses indications dans « les titres de MM. de Paviot », et Mondonville, lui aussi, |16131 annonce que « les tiltres cy-après extraictz sont chez Monsieur de Boissi-le-Sec ».Nous verrons plus loin les raisons qui ont déterminé Delimoges à introduire, parmi les enfants de Jean II de Paviot, cet hypothétique Gérard et nous reviendrons sur ce personnage après avoir suivi en ligne directe la filiation des seigneurs de Boissy-le-Sec.

Guillaume de Paviot, seigneur de Boissy, du Roussay et de Jeurres épousa le 24 juillet 1520 Anne d’Autry, fille de Ythier d’Autry, seigneur de la Brosse et de Châtillon-le-Roi, un des cent gentilshommes du roi, et de Anne-Philippe de Marafin103.

Nous ne savons rien de sa vie, il était mort avant 1535, comme le prouve un acte de souffrance concédé à sa veuve à cette date104.

Son frère Louis, qualifié de seigneur du Roussay105, était commissaire ordinaire des guerres en 1530. Nous possédons une pièce qui le concerne et dont nous extrayons quelques passages parce qu’elle offre certains traits bien caractéristiques des mœurs batailleuses des gentilshommes du XVIe siècle.

C’est une lettre de rémission106 donnée à Caderousse (Vaucluse), en septembre 1524, par François Ier à Louis de Paviot, « âgé de trente et ung ans ou environ », qui était à cette époque maître d’hôtel du comte de Saint-Pol (François II de Bourbon-Vendôme). |17132 « Certain jour du mois d’août passé », les gens de la maison du comte de Saint-Pol, qui était à la suite du roi, « étaient logez à la souppée en l’hostellerie où pend pour enseigne la Madeleine ès faulxbourgs de Vierron (Vierzon?) » et Louis de Paviot avait pris place à la table du comte de Saint- Pol « par son commandement » lorsqu’il voulut « pour le devoir de son estat prendre garde ès affaires de la maison et visiter la table des gentilzhommes et principaux serviteurs ». Son indignation fut grande lorsqu’il vit « au hault bout de la table et au-dessus des gentilzhommes sise une lavendière suivant l’ostel, qu’on disait estre entretenue en concubinaige par ung nommé de Kepregent, l’un des gentilzhommes dudict hostel ». Ce manquement à l’étiquette avait déjà attiré à Olivier de Kepregent des observations du comte de Saint-Pol et des « parolles » des autres gentilshommes.

Louis de Paviot, cependant, se contint et dit « paisiblement » à cette femme : « Madame la lavendière, esse à vous à vous mectre là ? Vous sçavez que le vous ay deffendu par deux ou troys foys. Ce n’est pas vostre estat de vous y mectre » . Mais Olivier de Kepregent, qui était assis en face de la lavandière, intervint et dit que c’était lui qui l’avait fait placer là. À quoi Paviot répondit : « Vous avez esté ès maisons des princes et grands seigneurs : où avez-vous veu qu’on face asseoir des lavendières aux tables des gentilzhommes ? » L’argument était juste ; aussi Kepregent s’en irrita et répondit « fort haultement » : « Baillez-luy sa provision et elle n’y sera plus ». Paviot, tout en protestant de son amitié pour Kepregent, |18133 lui dit : « Si feray-je, mais ce n’est pas à vous à me le commender ». Alors Olivier de Kepregent se leva de table « en grant collère » et dégaina son épée. Paviot, qui voulait en faire autant, fut saisi par deux ou trois gentilshommes : tandis que Kepregent quittait la salle. Paviot, s’adressant alors à la lavandière, lui dit : « Sang-Dieu, Madame, je vous chasseray ». Ainsi se serait peut-être terminé le débat, si Olivier de Kepregent n’avait eu la fâcheuse idée de rentrer dans la pièce. Il entendit les paroles de Paviot et lui jeta : « Par le sang-Dieu, vous ne sçauriez ». Paviot ne put supporter ce défi et après un nouvel échange de paroles vives, « dont bonnement le suppliant n’est recordé », il mit « soudainement la main à ung poignard qu’il avoit et d’icelluy 1ui donna un coup à l’endroit de l’estoumach, dont peu après qu’il eut confession et pris quelque disposition, il alla de vie à trépas ». Cependant, Louis de Paviot ne fut pas inquiété, il affirma qu’ il n’ avait eu contre le défunt « onc haine ne malveillance, mais toute amour », que « le cas est avenu par l’agression dudict deffunt » et, la grâce lui fut accordée. La vie humaine était de peu de prix au XVIe siècle.

Nous ne savons presque rien des autres frères de Guillaume de Paviot.

Charles, né d’après Hubert en 1493, était tuteur de son neveu Jacques en 1544107. Il fait partie des seigneurs « prêts à servir par eux-mêmes ou plutôt en présentant un homme d’armes à leur place ». Il |19134 y a toute apparence que c’est de lui que parle Dom Fleureau108 qui le qualifie de « gentilhomme des plus considerables du païs » à propos du vol commis en 1557 par son voisin Joachim du Ruth, seigneur de Venant, aux dépens de l’abbaye de Morigny. Charles de Paviot informa l’abbé du refuge des voleurs et dirigea l’attaque de leur repaire, avec des hommes réunis dans la contrée.

Nous ignorons de qui était fils un Charles de Paviot, aumônier du roi, qui donna, le 18 décembre 1538, à Paris, une somme de 60 livres parisis et en reçut quittance, en paiement d’une amende prononcée contre 1ui par le Parlement de Paris109. Il doit s’agir cependant d’un Paviot de Beauce, car il est cité, comme aumônier du roi, en 1544, dans le bailliage d’Étampes et dispensé de la montre, en raison de sa fonction110.

Mondonville le cite également : d’après lui, ce Charles, « qui fut d’ Église », aurait été fils de Jean II et de Marie de Villebresme. Il faudrait alors admettre qu’il y eut deux frères nommés Charles, ce qui n’est guère vraisemblable. Nous trouvons bien deux Jacqueline à la génération suivante, mais la première pouvait être décédée quand naquit la seconde, tandis que nous savons par le ban et l’arrière-ban du bailliage que ces deux Paviot étaient vivants en 1544.

Guillaume de Paviot laissait comme enfants : |20 135 Jacques ; Philippe, mariée en Touraine, au seigneur de la Félonnerie ; et trois autres filles, Françoise, Perrette et Claude, dont nous ignorons les alliances.

Jacques II de Paviot, né en 1525, était archer, en 1544, dans la compagnie de Nicolas de Boussu, sieur de Longueval111. Encore mineur, il était alors, comme nous l’avons vu, sous la tutelle de son oncle, Charles de Paviot. Il est cité comme seigneur de Boissy-le-Sec et du Roussay dans la convocation aux États réunis pour la rédaction de la coutume d’Étampes, en 1556112.

Il épousa, en 1552, Jeanne, fille de François de Brisay, écuyer, seigneur de la Mothe-lès-Lorris, et de Marie de Hémard, dame de Denonville113, dont il eut :

Pierre ; Claude, dont nous reparlerons plus loin, qui est un garçon, contrairement à l’indication de Hubert, qui en fait une fille ; Suzanne, Louise, et deux autres filles nommées toutes deux Jacqueline, dont nous ne savons pas les destinées.

Jacques II de Paviot était mort avant 1577.

Son fils aîné, Pierre III, naquit en 1559. Il prit part aux guerres incessantes de la fin du XVIe siècle et nous le trouvons gouverneur de Dourdan114 à une date qui n’est pas donnée par Dom Morin ; ce serait en 1589, d’après Forteau115. Il fut tué au siège de |21136 Rouen (siège fait par Henri IV contre les Ligueurs en avril 1592) et enterré dans l’église de Boissy-le-Sec116.

Il avait épousé en secondes noces117, en 1519, Suzanne de Lisle, fille de Toussaint de Lisle, seigneur de Châlo-Saint-Mard118, et de Anne Plermé, dont il eut :

Charles II ; Marie ; Élisabeth ou Isabelle.

Charles II de Paviot, né en 1580, entra, lui aussi, dans les armes. Il fut lieutenant des chevau-légers du marquis d’Alluyes119 ; en 1610, il était capitaine de la compagnie du duc d’Orléans120.

Mais il ne semble pas avoir poursuivi une longue carrière. En 1602, il épousa Marie de Rochechouart, fille de François de Rochechouart, chevalier des ordres du roi, seigneur de Jars121 et de la Brosse, et de Anne de Bérulle.

Il mourut le 24 mars 1644 et sa femme le 29 mai 1651. Ils furent tous deux enterrés dans l’église de Boissy-le-Sec, où une plaque de marbre noir, qui existe encore, et dont l’inscription a été publiée intégralement par M. Maxime Legrand122, relate une fondation faite par Marie de Rochechouart à l’église de Boissy.

Ce Charles de Paviot, l’année même de son mariage, |22 137 le jeudi 13 juin 1602, reçut à Boissy-le-Sec, une visite bien singulière. Il vit arriver un étranger, qui, lui ayant dit se nommer Lestaleux et exercer la profession de notaire à Varennes123 dans le bailliage de Clermont, déclara qu’il s’était mis en route le 7 juin, soit six jours auparavant, pour venir voir exprès Charles de Paviot à Boissy, à la requête de Jacques et de Robert de Paviot, deux frères qui habitaient Varennes. Ses clients lui avaient « mis ès mains » plusieurs mémoires qui prouvaient leur filiation avec les Paviot de Beauce et l’avaient chargé de « reconnaître la maison dont ils sont sortis, de leur en apporter les armes, de savoir, enfin, si aucuns de ladite maison et race vivoient

124

encore124 ».

Charles de Paviot, bien qu’il fût sans doute meilleur officier de cavalerie que généalogiste, examina les mémoires et semble avoir reconnu sans difficultés, au moins d’après les dires de Lestaleux, que Jacques et Robert de Paviot étaient ses parents et « sortis de sa maison ». Il ajouta que cette maison « étoit ancienne de quatre à cinq cents ans » en quoi il exagérait quelque peu, « comme il fera voir par titres anciens quand il sera de besoin ». Puis, il fit conduire Letaleux dans l’église de Boissy-le-Sec, afin qu’il pût examiner les tombeaux de ses ancêtres. Le notaire vit sur les vitraux plusieurs Paviot « représentés comme priants », avec leurs armes, dont il fit une description minutieuse ; le cimier des Paviot, un ange « à la face ressemblante à un homme » |23 138 et les supports, « deux lions d’or qui ont la queue tortillée en haut jusque proche la tête » le frappèrent particulièrement. Il lut l’épitaphe du père de Charles, tué au siège de Rouen, puis, revenu au château, il demanda quels étaient les membres vivants de la famille. Charles répondit qu’il n’avait qu’un oncle, Claude de Paviot, et qu’ils étaient les seuls représentants de la maison. (Notons en passant que cette indication contredit Hubert : comme nous l’ avons dit, Claude, enfant de Jacques II de Paviot et de Jeanne de Brisay, était un garçon. Nous trouvons d’ailleurs Claude de Paviot seigneur de Jeurres en 1604125 et en 1605126.)

Le notaire Lestaleux avait donc obtenu tous les renseignements qu’ il désirait. Il prit le chemin du retour vers Varennes, où il était rentré le 21 juin.

Nous serions curieux de savoir ce que contenaient les mémoires communiqués par Lestaleux à Charles de Paviot. Malheureusement nous les trouvons plusieurs fois cités, sans qu’aucune analyse en soit faite. En tout cas, si Charles de Paviot reconnut devant Lestaleux que ces mémoire prouvaient sa parenté avec les clients du notaire de Varennes il ne semble pas, néanmoins, avoir eu grande confiance dans leurs indications, car deux ans après la venue de Lestaleux, il voulut, 1ui aussi, vérifier sa généalogie.

Et il ne se contenta pas d’affirmer l’ancienneté de sa famille, à un siècle près, mais il écrivit « de sa main, dans un petit livre couvert de veau noir, les |24 139 âges et généalogies de la maison de Paviot127 ». Or, ce travail, fort consciencieux et fort méritoire de la part d’ un ancien lieutenant de chevau-légers, ne fait aucune mention des clients de Lestaleux, ni de leur ascendance.

Qui étaient donc ces deux frères, Jacques et Robert de Paviot, qui revendiquaient une parenté avec les seigneurs de Boissy-le-Sec ? Pour comprendre leurs prétentions et connaître leur origine, il nous faut abandonner la Beauce pour la Lorraine et remonter à plus d’un siècle dans le passé.

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Le 20 décembre 1521, à Neufchâteau128 le duc Antoine de Lorraine et de Bar, anoblissait un secrétaire et écuyer des cuisines de son frère Louis de Lorraine, évêque, comte de Verdun. Cet écuyer de cuisine se nommait François Paviette. Il reçut pour armes : d’or et 3 losanges de gueules posés 2 et 1 au chef d’azur chargé de 3 étoiles d’argent128 129 130 131.

Le 19 août 1524, son frère Jacquot Paviette, habitant Bar-leDuc, fut également anobli par le duc de Lorraine, à la requête du cardinal de Lorraine130. Ses armes comportaient une brisure de cadet et s’énonçaient : d’or à 3 losanges de gueules au chef d’azur chargé de 3 cierges d’or allumés de gueules131. |25/140

Jacquot Paviette est l’origine d’une lignée que nous ne suivrons pas, car elle n’intéresse pas les seigneurs de Boissy-le-Sec.

Quant à François Paviette, il connut une certaine fortune. Il avait été « écuyer des cuisines »132, puis secrétaire de l’évêque de Verdun ; il devint contrôleur à l’hôtel du duc Antoine de Lorraine et mourut fort âgé, en 1583.

Il avait épousé, le 11 juillet 1525, Perrette de Vaux dont il eut un fils, Pierre, qui suit, et en secondes noces Jeanne du Hautois.

Pierre Paviette ou de Paviette, écuyer, épousa le 8 septembre 1549, Barbe Gratinot, fille d’un premier mariage de la seconde femme de son père. Nous ignorons s’il occupa une fonction publique, mais nous savons qu’ il eut deux fils, Jacques et Robert, et deux filles, Françoise, mariée à Didier Simonnin, et Jeanne, mariée à François de Mouzay.

Jacques et Robert s’établirent à Varennes-en-Argonne, où Jacques devint « capitaine de Varennes pour la garde et force de la prévôté ». Robert fut nommé capitaine-prévôt, gruyer et receveur, par lettres du 4 septembre 1607.

Un certain nombre de pièces, concernant les deux frères, mais dont nous n’avons pas lieu de donner la liste complète, ont été inventoriées par d’Hozier133.

Elles portent parfois des annotations singulières. C’est |26141 ainsi qu’en marge de la copie d’un partage du 5 août 1576, entre la veuve de François Paviette, sa belle-fille, veuve de Pierre Paviette et ses enfants, on lit, d’une écriture du XVIIIe siècle, la mention : « Partout où se trouve ce nom de Paviette, on en a voulu faire Paviotte ». Et dans un acte (accord en forme de partage) du 25 avril 1576, on lit de la même écriture du XVIIIsiècle, en marge : « Une autre main a fait un o de cet e partout où se trouve ce nom (Paviette) dans le titre ».

Cependant cette modification de Paviette en Paviotte n’ est pas constante. Le 22 mars 1596, Jacques est bien qualifié Paviette, écuyer, seigneur d’Ignor, etc. Il en est de même le 14 janvier 1602, dans une vente d’héritages consentie devant notaire à Luzy134 au profit de Jacques de Paviette, seigneur d’Ignor et de Luzy, capitaine de Varennes, y demeurant.

Moins de six mois après, le 7 juin 1602, les deux frères Jacques et Robert se faisaient nommer Jacques et Robert « de Paviot » et envoyaient, comme nous l’ avons vu, le notaire Lestaleux à Boissy-le-Sec.

Le voyage de Lestaleux devait porter ses fruits. Forts des indications de Charles de Paviot, les deux frères introduisirent aussitôt une demande de changement de leurs armes. Cette requête fut agréée et le 22 juin 1603, Jean, baron du Chastelet et de Thou, conseiller d’État de S. A. Maréchal de Lorraine, etc., rendait à Nancy, au nom du duc de Lorraine, un arrêt favorable. Il y est exposé que « depuis |27 142 quelque temps en ça, il est venu en notice aux deux frères être originaires de France du lieu de Boissy-le-Sec, proche d’Étampes, auquel lieu ayant envoyé un notaire du bailliage de Clermont, aurait apporté une attestation par laquelle il se reconnaît amplement leur ancienne noblesse et les armes de leurs prédécesseurs, par titres anciens en l’église, tant sur plusieurs épitaphes qu’aux vitres de ladite église ». Ces armes étaient inconnues aux deux frères « parce que leur père et mère avaient toujours fait séjour en Lorraine qui fut cause qu’ils eurent recours à Son Altesse leur vouloir donner armes ». Mais maintenant, ils supplient S. A. de leur laisser « reprendre leurs anciennes armes, en user partout sans aucune répréhension et quitter et laisser celles que ladite Altesse avait permis prendre à leur père et mère ». Ainsi en fut ordonné, sur le vu de la relation du voyage de Lestaleux : on reconnaîtra que c’était un peu insuffisant en matière de preuves de filiation.

À partir de ce moment, nous voyons le nom de « Paviot » remplacer dans toutes les pièces celui de « Paviette ». En 1604, ce sont les états de prévôt gruyer et receveur de Varennes donné à Jacques « de Paviot », pour en jouir conjointement avec l’état de capitaine ; en 1605, 1606, 1608, ce sont des ventes d’héritages et des procurations au même, toujours nommé Jacques « de Paviot ».

Nous n’analyserons pas toutes les pièces qui concernent les deux frères Jacques et Robert, notre seul but étant de chercher leurs rapports, véritables ou non, avec les seigneurs de Boissy-le-Sec. C’est |28 143 pourquoi nous ne suivrons pas la filiation de Robert, le cadet, qui eut trois enfants de sa femme Barbe Jacob.

Jacques, l’aîné épousa Élisabeth de Mouzay. Il était mort en 1612 (hommage de fief de sa veuve au duc de Lorraine) et laissait Pierre, François, Élisée et Charlotte, mariée plus tard à Charles de Régnier, seigneur du Bellair, et Jeanne.

C’est le second de ses fils, François, époux de Marie Dey, qui continue la lignée. Il eut deux fils, Robert II, dont nous allons poursuivre la descendance, et Jacques II, dont une fille entra par son mariage dans la maison des Ligniville, grands-chevaux de Lorraine. Les deux frères Robert II et Jacques II étaient en 1658 l’ un capitaine et l’ autre lieutenant d’ une compagnie d’ infanterie « au régiment de Mgr. De Bourlemont pour le service du Roy ». Le 5 août 1659, Robert de Paviot, chevalier, capitaine d’une compagnie de dragons au régiment de M. le Maréchal de la Ferté, gouverneur général du pays de Lorraine et Barrois, assisté de son frère Jacques, épousa Anne-Madeleine de Chirlé, fille d’Albert de Chirlé, « cidevant lieutenant-colonel ès armées de Bavière », et de Judith de Niedbruck. De ce mariage naquirent plusieurs enfants, dont l’aîné fut Jean-Albert que nous retrouverons plus loin, quand nous quitterons la Lorraine pour revenir à Boissy-le-Sec.

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Cependant, il y avait 70 ans que Lestaleux était venu interroger Charles de Paviot à Boissy et les Paviette portaient paisiblement le nom et les armes |29 144 de leurs cousins ? de Beauce, lorsque leur quiétude fut brusquement troublée. Au mois d’août 1672, le procureur général fiscal au comté de Clermont s’avisa de demander à Gérard de Paviot, fils de Robert et de Barbe Jacob, quelques précisions sur son nom de Paviot et d’ouvrir « une instance contre lui à ce sujet ». Nous savons, par des pièces postérieures, que le 5 août 1672, le lieutenant général civil et criminel rendit une sentence, qui malheureusement fait défaut dans les copies de d’Hozier. Mais le 11 août 1672, une enquête est faite par ledit lieutenant général à la requête de Gérard de Paviot, défendeur contre le procureur général fiscal, et les dépositions des témoins ont été conservées. Ce fut d’abord maître Claude Jacquet, greffier en la prévôté de Varennes, âgé de 80 ans environ, qui vint dire « qu’il avait connu Robert de Paviot, vivant père du défendeur, et avoir servi de greffier sous lui, dès l’an 1630 » : alors, Robert signait « Paviot » et non « Paviette ». Mais en 1608 , le témoin était clerc au greffe de Varennes et connaissait déjà Robert qui avait succédé à son frère Jacques dans la charge. Or, à cette date, tout le monde appelait Robert « Paviette » et l’on continua de le nommer ainsi, même lorsqu’il signa « Paviot ». Son frère signait Jacques de « Paviette », mais Robert, comme prévôt, signa toujours « Paviot ».

Comparut ensuite Jean Boureulle, tailleur d’habits à Varennes, âgé de 74 ans environ, qui déclara que Jacques, frère de Robert et prévôt avant lui, s’était toujours appelé « Paviette ». Le témoin ajouta que « dès son jeune âge, il avait ouï dire à divers particuliers |30 145 que le nommé Lestaleux avait été au lieu de Boissy et qu’il avait rapporté qu’il fallait que lesdits Paviette changeassent de nom et que même il y avait quelque chose à ajouter à leurs armes, ainsi que leurs parents dudit Boissy l’ avaient dit ».

Claude Périn, vigneron, âgé de 77 ans environ, a dit à peu près comme le précédent».

Nicolas Périn, serrurier, âgé de 72 ans environ, déclara que, fort jeune, il avait connu Jacques « qui ne s’appelait que Paviette ». Il ajouta « qu’ il avait été aux petites écoles avec les enfants desdits Jacques et Robert, qui s’appeloient aussi Paviette, mais environ de l’an 1610, ledit Robert qui s’appeloit auparavant Paviette, commença à s’appeler Paviot et à faire appeler ses enfants Paviot, quoique néanmoins ordinairement on les appelait toujours Paviette ».

Enfin Gauthier Gervaise, cordonnier, âgé de 71 ans environ, déclara avoir connu Jacques et « l’ avoir vu enterrer ». Il se nommait « Paviette ». Son frère Robert succédant à sa charge avait pris le nom de « Paviot », encore que bien des gens continuassent à le nommer « Paviette ». Son fils Jacques135 s’était appelé « Paviot » et avait succédé à son père dans la charge de prévôt.

En dépit de cette enquête, quelques années plus tard, on s’inquiète de savoir si vraiment les Paviette et les Paviot sont bien une même famille. Le 30 janvier 1678, deux experts, greffiers au bailliage de Clermont, sont chargés de confronter les signatures |31146 apposées sur deux actes : un partage du 29 janvier 1592 où signait « J. Paviette » et une déclaration d’immeubles du 1er mars 1606, signée « J. Paviot », et de dire s’il s’agit de la même personne. Après examen, les experts déclarent juger « en leur conscience, après avoir le tout exactement considéré, que celui qui a signé le partage a pareillement signé la déclaration d’ immeubles ».

À la suite de cette expertise, le 19 février 1678, Robert de Paviot obtenait un jugement confirmant sa noblesse et le renvoyant des fins et conclusions prises contre lui par le procureur général du bailliage de Clermont, sentence rendue sur le rapport des experts au sujet des signatures.

Ainsi se terminait la contestation qui portait sur les noms de Paviette et de Paviot, appliqués à une même famille, mais dont la solution n’apportait aucune preuve généalogique sur l’ ascendance commune des Paviette de Lorraine et des Paviot de Beauce.

La copie de ces actes, qui est au fonds d’Hozier, porte encore en marge, d’une écriture du XVIIIe siècle, la mention suivante assez suggestive : « De la lettre e on a fait habilement et nouvellement la lettre o. Il y avait dans l ’original Paviette ».

Nous pouvons maintenant examiner avec quelque précision la prétention des Paviette à descendre des Paviot de Beauce, bien

que nous ne possédions pas les fameux mémoires que Jacques et Robert Paviette avaient remis « ès mains » de Lestaleux, lorsqu’ils le dépêchèrent à Boissy auprès de Charles de Paviot.

S’il faut en croire la généalogie dressée par le notaire |32147 Delimoges, Jean II de Paviot, seigneur de Boissy, né en 1480, aurait eu un fils Gérard, « qui prit alliance en Lorraine ». Nous avons fait remarquer déjà que le notaire de Boissy était le seul à citer ce Gérard. De plus, la mention de cette alliance en Lorraine n’est appuyée d’aucune précision. Delimoges ajoute seulement que Gérard « eut pour fils François de Paviot, chevalier, qui prit alliance à la maison de Vaux en Champagne. Dudit mariage du dit François est issu Pierre de Paviot, chevalier, qui prit alliance à la maison de Poully ». Voilà donc l’écuyer de cuisine du duc de Lorraine, François Paviette, rattaché aux seigneurs de Boissy-le-Sec, comme petit-fils de Jean de Paviot, grâce à un intermédiaire, Gérard, inconnu de tous, sauf de Delimoges. Admettons un instant que ce Gérard ait bien été le père de François Paviette, anobli en 1520. Il faudrait supposer que François eût ignoré le nom de son père, Paviot et non Paviette, qu’il n’eût connu ni son pays d’origine, ni sa noblesse, ni non plus l’ illustration relative de sa famille, car les Paviot avaient occupé au XIVe et au XVe siècle des charges assez considérables en France pour que leur descendant méritât mieux qu’un poste aux foyers des cuisines de l’évêque de Verdun. Il faudrait admettre également que le Conseil du duc de Lorraine n’eût pris aucune information avant d’ anoblir ce Paviette qui était déjà noble, en France, et se nommait Paviot et non Paviette. Il est singulier que toutes ces invraisemblances n’aient pas attiré l’attention du baron du Châtelet et de Thou qui accorda si facilement, en 1603, aux deux |33 148 frères Paviette le changement de leur nom et de leurs armes. Aussi bien, il y eut dans les pièces des falsifications certaines. On a voulu transformer Paviette en Paviotte (nom qui n’est indiqué dans aucun titre original) parce qu’il est aisé de passer de Paviotte à Paviot, soit en laissant tomber la dernière syllabe, soit en faisant sonner la finale, comme dans la langue d’oc.

Nous pouvons donc conclure que la parenté des deux familles reste bien incertaine et qu’il fallut pour rattacher les Paviette aux Paviot de Beauce beaucoup d’indulgence ou de complaisance aux juges de Lorraine, beaucoup d’indifférence aux Paviot de Boissy-le-Sec, et un grand désir de se créer une lignée ancienne aux petits-fils de l’écuyer des cuisines de l’évêque de Verdun.

Mais des rapports plus étroits, et ceux-là bien réels, ne devaient pas tarder à s’établir entre les deux familles. Pour les connaître, il nous faut maintenant revenir en Beauce.

*

* *

Charles II de Paviot avait laissé de son mariage avec Marie de Rochechouart un seul fils, né en 1613136, nommé Charles, comme son père, et trois filles : Jacqueline, mariée en 1632, à Jacques de Courtenay, seigneur du Chêne, de Changy137 etc., Louise, |34 149 qui épouse François de Cugnac, baron d’Imonville, et Charlotte, dont nous ignorons le mariage.

Charles III de Paviot, seigneur de Boissy-le-Sec, Le Rotoir et autres lieux, est le membre de cette famille dont l’histoire nous est la mieux connue. Il vécut une longue existence à Boissy-le-Sec, entouré, comme nous le verrons, d’une famille nombreuse, de parents et d’amis et se mêla peu aux affaires publiques. Nous le trouvons en 1666 gentilhomme ordinaire de la Chambre du roi138, fonction peu absorbante qu’il ne conserva pas longtemps.

Il épousa:

1° — Le 16 mai 1633, Madeleine de Galteau, qui appartenait à la famille des seigneurs de Puiselet-le-Marais139 ; elle était morte avant 1666 ;

2° — Denise de Roques, de treize ans plus âgée que lui, qui mourut à Boissy-le-Sec le 14 octobre 1680140 ;

3° — Françoise de Lusignan, avant 1687141.

Il eut de sa première femme trois filles : Marie, Madeleine et Jacqueline, et de sa seconde femme deux fils, auxquels il donna des prénoms héroïques : Alexandre et César142.

Marie de Paviot fut mariée le 6 janvier 1673 à François Le Clerc de Fleurigny, seigneur baron de La Forêt-le-Roi. |35150

Nous ne suivrons pas les descendants de ce couple, mais nous devons noter qu’une fille de Marie de Paviot, nommée Marie-Denise, épousa le 16 janvier 1699 Charles de Cugnac, baron d’ Imonville, son cousin.

Nous parlerons plus loin du mariage de Madeleine de Paviot.

Quant à Jacqueline, elle ne contracta pas moins de quatre alliances. Née vers 1645, elle était déjà veuve le 27 mai 1663 de « noble homme, seigneur de Machault »143. Le 15 janvier 1664, elle épouse, à Boissy, Pierre des Mazis, chevalier, seigneur de la Varenne, fils de Henri des Mazis, seigneur de Brières-les-Scellés144. Elle se remarie, à Boissy-le-Sec encore, le 18 septembre 1684, avec Jean-Baptiste Cochon, seigneur de Bonneval , « de la paroisse de Sainte-Marie de Paris », qui meurt le 6 mai 1688. Enfin, toujours à Boissy, Jacqueline épouse son dernier mari, Jean-Baptiste Le Bastoury, seigneur de Mariville, « de la paroisse de Saint-Séverin de Paris », un des cent chevau-légers de la garde du roi, chevalier de Saint-Louis. En 1714, nous la trouvons marraine à La Forêt-le-Roi, veuve pour la dernière fois. Elle mourut le 27 décembre 1719, sans doute ailleurs qu’à Boissy, où elle ne devait plus avoir de demeure, mais elle fut enterrée dans l’ église, en la seule présence de sa nièce, « Madame de la Forêt-le-Roi », dernière représentante de sa famille.

Les deux fils de Charles de Paviot ne se marièrent |36151 pas et en eux s’éteignit la lignée mâle des Paviot de Boissy-le-Sec.

L’aîné, Alexandre, seigneur de Beaumont, figure rarement dans les registres paroissiaux. Il meurt le 2 mars 1687, à l’âge de 40 ans.

Son frère César est, au contraire, constamment parrain, à Boissy-le-Sec, où de nombreux César perpétuent pendant plusieurs générations son prénom impérial et aussi aux environs de Boissy, à Abbéville145 en 1668, à Corbreuse146 en 1662, où il tient sur les fonts baptismaux le fils de Charles de Saint-Périer, seigneur de Durant147 qu’il nomme César-Joachim. Ce prénom fut cette fois d’ un heureux augure, car le filleul de César de Paviot devint lieutenant-général des armées, commandant l’ artillerie des départements d’ Alsace et de Flandre, commandeur de Saint-Louis. César de Paviot mourut en 1677.

Madeleine de Paviot nous intéresse particulièrement. Née vers 1644, elle signe, comme marraine, en 1662, dans le plus ancien registre paroissial conservé aujourd’hui à Boissy-le-Sec. Pendant plusieurs années, nous retrouvons souvent sa signature à ce titre. Mais, le 2 février 1678, le parrain qui signe avec elle nous est connu déjà : c’est Jean-Albert de Paviot, seigneur de Nantillois148, fils de Robert de Paviot et de Anne-Madeleine de Chirlé, qui avait quitté la Lorraine et se trouvait chez ses « cousins » de Boissy-le-Sec. Jean-Albert avait dix-huit ans et Madeleine |37 152 au moins trente-quatre : malgré cette grande différence d’ âge, les jeunes gens étaient fiancés et le mariage fut célébré à Boissy-le-Sec, le 21 février 1678. Il avait été précédé d’un contrat (20 février 1678), passé devant Pierre Le Guay, notaire, commis sous Henri Pinguenet, notaire royal à Étampes149.

Ce contrat réunissait à Boissy-le-Sec un cortège de parents et d’ amis, où nous retrouvons des noms familiers de notre région. Madeleine était assistée « de Charles de Paviot et de sa belle-mère Denise de Roques, de François de Fleurigny, son beau-frère, d’ Alexandre de Paviot, son frère, de Jaqueline de Paviot, sa sœur, de Marie de Galteau, veuve de Paul de Vidal, seigneur d’ Argeville, sa tante, de Charles, André et Catherine de Vidal, ses cousins et cousine, d’Henri des Mazis, seigneur du Tronchet150, de Anne de Tiraquau, son épouse, de N. de Marolles, épouse de Louis d’ Allonville, seigneur du Plessis-Saint-Benoît151, son cousin issu de germain, de Madeleine et de Jacques d’ Allonville, ses cousins, de Charles de Laslier, seigneur de Noirsyman, son cousin issu de germain, de François de Fleurigny, son cousin, de Charles de La Barre, son cousin, de Marie-Louise de Fleurigny, son alliée, d’Anne Le Gras, sa cousine, de Charles de Saint-Périer, seigneur de Durant, son allié, de Marie de Saint-Périer, son amie, de Pierre d’Alègre et de Hélène des Fiefs son épouse, ses amis ». |38153

Jean-Albert était assisté de son père et de sa mère « étant alors au lieu de Boissy-le-Sec ».

La future épouse apportait ce qui lui revenait de la succession de sa mère, « montant à la somme de 6.000 livres ». Jean-Albert était reconnu par ses parents fils aîné et principal héritier. Il recevait la jouissance des terres de Lucher, Farcheviller et Ancheviller, sises au pays de Lorraine, bailliage d’Allemagne, et « encore la jouissance de la maison en fief de Boulay, située dans ledit bailliage d’ Allemagne ». Ses parents lui promettaient enfin le logement dans la maison et seigneurie de Nantillois, « si mieux n’aimait faire son habitation dans la maison de Chespy, sise au même pays ».

Ainsi, par ce singulier mariage, se trouvait réalisée la fusion des deux familles Paviette et Paviot, et les descendants du nouveau ménage pourraient prétendre, enfin à juste titre, sortir de la « maison et race » des seigneurs de Boissy.

Jean-Albert se préoccupa d’ailleurs de fournir à ses enfants une généalogie qui les fit entièrement Paviot. C’est lui qui requit Julien Delimoges, le 18 janvier 1695, de lui délivrer, « pour lui servir et valoir ce que de raison », un extrait des titres de famille de son beau-père. C’est dans cet « extrait » que nous trouvons introduit l’ hypothétique, mais indispensable Gérard, qui assure le passage des Paviette aux Paviot. Nous avons vu ce qu’il fallait penser de cette filiation.

Cependant cette fusion difficile des Paviot de Beauce avec les Paviette de Lorraine n’était pas acceptée officiellement partout. Nous trouvons, dans des preuves |39 154 faites pour l’admission à l’école militaire du fils de Jean-Albert152 une généalogie qui ne remonte qu’à François Paviot, en 1520 : les Paviette sont oubliés, mais leurs descendants ne sont pas rattachés aux anciens seigneurs de Boissy-le-Sec.

Jean-Albert et Madeleine de Paviot vécurent d’abord à Boissy-le-Sec avec Charles de Paviot. Ils figurent avec lui à de nombreux actes d’état civil. Ils semblent ensuite avoir habité La Forêt-le-Roi, chez les Fleurigny, car c’est là que naissent leurs enfants, Charlotte, Claude-Louis et Jean-Baptiste-François, baptisé le 8 septembre 1687153.

Puis, ils quittèrent définitivement la Beauce pour s’installer en Lorraine, à Nantillois. Ils n’intéressent plus désormais l’histoire de notre région. Nous savons que leur fils Jean-François épousa Marie-Françoise de Ryan, dont il eut des descendants mâles154.

En 1789, nous trouvons cités, au bailliage de Clermont-en-Argonne, François-Henri de Paviot, chevalier, seigneur en partie de Cunel, capitaine commandant au régiment de Neustrie, et Henri de Paviot, chevalier, seigneur en partie de Cunel etc., demeurant en son château de Nantillois155. Nous savons, par un extrait des registres de Nantillois, que le premier, tout au moins, était le petit-fils de Jean-Albert et de Madeleine de Paviot. |40155

Le départ de sa fille et de son gendre ne laissait plus à Charles de Paviot l’espoir de transmettre après lui la seigneurie de Boissy-le-Sec à un Paviot. Ses deux fils étant morts, il devait être le dernier de cette longue lignée qui avait vécu à Boissy depuis le début du XIVe siècle.

Nous savons de lui ce qu’apprennent seulement les actes officiels. Cependant, on en garde l’impression qu’il fut particulièrement estimé de ceux qui l’entouraient. De 1662, date à laquelle débutent les registres paroissiaux de Boissy jusqu’à sa mort, nous le trouvons constamment mêlé à la vie des habitants de son pays, à titre de parrain et surtout de témoin aux mariages. Sa signature, où l’initiale de son prénom est redoublée en forme d’X manuscrit, est souvent accompagnée de celle de son fils César, de sa femme ou d’un seigneur voisin. Car il y avait alors à Boissy-le-Sec et dans les environs beaucoup de « personnes de qualité », suivant l’expression du temps. Nous voyons paraître dans les actes, outre la nombreuse famille des Paviot, dont quelques membres signent fort jeunes (Charles signa le 5 avril 1680 pour Henri de Fleurigny, âgé de moins de sept ans, en portant la mention : « pour mon petit-fils »), les d’Alègre , les Saint-Étienne, les Sabrevois, les des Mazis ; les Saint-Périer, dont tous les enfants sont filleuls des Paviot, les Poilloüe, enfin. Deux membres de cette famille, Alexandre et Françoise, habitaient Boissy, et Françoise de Poilloüe mourut au château le 1er mars 1670. |41/156

Charles de Paviot s’occupait également de ses terres et passait, pour des locations fort peu importantes, des actes compliqués, devant Julien Delimoges, avec la minutie que l’on apportait alors aux moindres transactions. Il ne négligeait pas non plus de faire observer ses droits féodaux. Il possédait « justice haute, moyenne et basse en titre de prévosté sur ses hostes audit Boissy et sur ceux du Rotoüer »156.

Nous le voyons demander foi et hommage à son gendre Jean-Albert de Paviot à cause de « la maison et fief de Vaucouleurs et terres en dépendant... assis audit lieu et terroir de Boissy »157. Ce fief appartenait à Jacqueline de Paviot et à son troisième mari, Jean-Baptiste Cochon, seigneur de Bonneval, qui en avaient fait donation entre vifs à Jean-Albert et à Madeleine de Paviot, le 1er juin 1695 ; il était mouvant et relevant en plein fief, foi et hommage du seigneur de Boissy, à cause de son château de Boissy. Donc le 20 juillet 1695, Albert de Paviot, venu exprès de Nantillois à Boissy, se présente devant la demeure de son beau-père, « en devoir de vassal, sans ceinturon, espées, dagues, ny esperons, teste nue, a mis un genouil en terre, demandé à haulte et intelligible voix par trois diverses fois sy le dit seigneur de Boissy ou aultres ayant pour luy pouvoir de recevoir ses vassaulx en foy estaient audit lieu et chasteau..., et a ledit sieur de

Nantilloy, en signe d’humilité, baisé l’un des jambages de la |42 157 principale porte dudit chasteau ». Ainsi s’observait encore avec fidélité la coutume d’ Étampes, en matière de droit féodal, à l’ aurore du XVIIIe siècle.

Charles de Paviot vécut fort âgé ; en 1695, on note que sa signature s’altère et que sa main a tremblé. En 1697, le 27 mars, il n’ assiste pas au quatrième mariage de sa fille Jacqueline. Il était très malade sans doute, car il meurt quatre jours après, âgé de 84 ans.

Il fut enterré dans l’ église de Boissy, où reposaient tous les siens, par le vieux Le Brys, prieur-curé de Boissy-le-Sec, qui avait inhumé déjà ses deux fils, marié ses filles Madeleine et Marie et trois fois sa fille Jacqueline, ayant dressé tous les actes de la paroisse pendant près d’un demi-siècle, de 1662 à 1710.

Charles de Paviot laissait une situation de fortune fort embarrassée. Depuis Pierre, échanson du duc Louis d’Orléans, qui possédait des terres de Dourdan jusqu’à Morigny et même en Normandie, le domaine des Paviot s’était réduit à Boissy-le-Sec et au hameau voisin du Rotoir. En outre, le bon Charles, dernier des Paviot de Boissy, ne semble pas avoir géré sa fortune avec beaucoup d’ordre. En 1690, la succession de Madeleine de Galteau, sa première femme, morte plus de trente ans auparavant, n’était pas encore réglée, et nous voyons sa fille, Marie de Paviot, veuve de François de Fleurigny, imputer sur cette succession à venir une somme de quatre cent trente-six livres qu’elle devait « de toute la marchandise de viande à elle fournye » |43 158 par la veuve Louis Le Floq, marchande bouchère à Dourdan.158

La mort de Charles de Paviot entraîna une liquidation difficile. Jacqueline et son quatrième mari, d’abord héritiers bénéficiaires, renoncent à la succession, « les effets mobiliers d’icelle succession ayant été consommés et vendus en justice pour le paiement des officiers du bailliage d’Etampes qui en avaient fait le scellé et ensuite l’inventaire ». Cependant la terre de Boissy-le-Sec ne sortit pas immédiatement de la famille, elle dut être rachetée par Charles de Cugnac, baron d’Imonville, mari de la petite fille de Charles de Pvniot, qui est seigneur de Boissy-le-Sec dans un acte du 30 décembre 1701159.

Mais Charles de Cugnac ne conserva pas longtemps la seigneurie qui était depuis plus de quatre cents ans dans la famille de sa femme : le 20 décembre 1710, nous apprenons par un acte de foi et hommage au duc de Vendôme, à cause de son duché d’Étampes, que Charles Boyetet, seigneur de Merouville, conseiller secrétaire du Roi, demeurant ordinairement à Orléans, avait acquis le 2 décembre de la même année, la terre et seigneurie de Boissy, de dame Madeleine Le Cellier, épouse non commune en biens de messire Jean Longueau, sieur de Launay160.

Le nouveau seigneur de Boissy ne paraît pas avoir joui dans ce paisible village de la popularité qu’y connurent Charles de Paviot et les siens. Les |44 159 registres paroissiaux contiennent très rarement des actes portant sa signature ; nous ne trouvons plus les familles amies des Paviot qui assistaient avec eux aux baptêmes et aux mariages des villageois. Charles Boyetet était en fort mauvais termes avec le curé de Boissy, Roger, qui, en 1710, avait remplacé le vieux Le Brys. Au milieu de quelques pages restées blanches dans le premier registre de 1661-1670, Roger exhale sa rancœur et se répand en plaintes amères. Après avoir rappelé ses droits méconnus au sujet des dîmes navales, il ajoute : « Ce seigneur, qui fait le dévôt et véritable hippocrite, Charles Boyetet, plein d’ambition, m’a fait tout le mal qui se peut imaginer. Il m’a fait un procès pour les droits honorifiques ; il prétendait que je lui donnerais de l’ eau bénite par présentation et à tous ceux qui se voient dans son banc, jusqu’à ses servantes. Il veut se rendre le maitre de tout ; il s’est emparé des lettres et papiers de l’église depuis l’année 1712 sans vouloir les rendre. »

Nous ne suivrons pas la filiation des Boyetet qui conservèrent Boissy-le-Sec durant tout le XVIIIe siècle. En 1789, nous trouvons cité à Boissy Charles-Hector-François Boyetet de Boissy, lieutenant au régiment de Royal-Guyenne161. Puis, ce sont les temps modernes dont il n’ y a pas lieu de nous occuper ici.

* * *

Il ne demeure aujourd’hui des Paviot et de leur seigneurie que des documents d’archives et quelques |45 160 rares vestiges monumentaux. Boissy est un village agricole où l’aisance des habitants permet la reconstruction des maisons, qui efface les souvenirs du passé.

Cependant, le nom du fief de Vaucouleurs est conservé. La rue où s’élève la modeste mairie se nomme rue de Vaucouleurs et une ferme, en bordure de cette rue, est connue encore comme ayant appartenu « au sire de Vaucouleurs »162. C’est là, sans doute, le fief dont Jean-Albert de Paviot rendit foi et hommage à son beau-père en 1695. Cette ferme montre encore une porte basse (fig. 2), certainement antérieure au XVIe siècle, qui s’ouvre dans un grand bâtiment, aujourd’hui une étable, mais qui conservait il y a une trentaine d’ années, nous a dit M. Sagot, des restes d’une décoration fort ancienne.

L’église de Boissy contient, nous l’avons vu, une plaque relative à une fondation de Marie de Rochechouart, en 1652. La dernière verrière du collatéral droit est ornée de quelques débris de vitraux du XVIe siècle, assemblés sans art ; on y reconnaît un moine, une Samaritaine, et une Nativité, mais il ne reste plus trace des « Paviot représentés comme priants, avec leurs armoiries », qu’y vit Lestaleux en 1602.

Devant le banc d’œuvre, quatre pierres tombales sont encastrées dans le carrelage du sol, mais le passage des fidèles en a effacé les inscriptions et les effigies. C’est à peine si l’on distingue encore, sur l’une d’elles, la silhouette d’une femme à larges |46161 manches, dont le costume paraît remonter à la fin du XVIe siècle. Les cloches datent seulement de 1838.

Le château seul a conservé quelques souvenirs de ses anciens possesseurs. La grosse tour d’angle ainsi que la tour de l’ enceinte, du côté du village, sont anciennes, malgré des remaniements, mais elles n’offrent pas de détails d’une décoration bien artistique. La cave du château paraît remonter au XIVe siècle163 ; tous les autres bâtiments ont été modifiés au XVIIIe siècle. |47/162

Fig. 2. - Une porte du fief de Vaucouleurs à Boissy-le-Sec.

Nous connaissons cependant un objet qui rappelle plus immédiatement la famille de Boissy. C’est un livre qui appartint

jadis à une Paviot. Il a fait partie de la bibliothèque du vicomte de Janzé, qui passa en vente à Paris du 20 au 24 avril 1909164.

164 Catalogue de la bibliothèque de feu M. le vicomte de Janzé. Paris, Henri Leclerc, 1909, in-8°, n°21.

Cet ouvrage est un bréviaire latin pour les religieuses de l’ordre de Fontevrault, publié à Paris chez Jérôme de Marnef et la veuve de Guillaume Cavellat, en 1587. C’est la reliure qui doit attirer notre attention. Elle est en maroquin vert ; les plats et le dos sont entièrement ornés de compartiments, de filets, de palmettes et de petits médaillons de feuillages dont chacun renferme une grande fleur, un gland ou l’emblème du Saint-Esprit. Cette jolie reliure est du style de celle qui sortirent à la fin du XVIe siècle des ateliers de Nicolas et de Clovis Ève. On sait que cette décoration en compartiments, avec des fleurs de soucis et de marguerites et l’emblème du Saint-Esprit, a été attribuée aux livres reliés pour Marguerite de Navarre, sœur de Henri III et première femme de Henri IV. Mais on doute aujourd’hui que ces reliures aient été exécutées uniquement et spécialement pour elle, car les fers de reliure étaient conservés longtemps dans les ateliers et servaient postérieurement à leur composition. Il est donc probable que les motifs imaginés d’abord pour Marguerite, avec ses fleurs préférées et l’emblème de l’ordre créé par son frère, ont servi ensuite à décorer des reliures qui ne lui étaient pas |48163 destinées. Ainsi s’explique la présence du nom poussé aux petits fers dans la réserve centrale des plats de ce livre : Iacqueline de Paviot.

Nous pouvons en conclure que ce livre n’ a pas appartenu d’abord à la « Reine Margot », puis, à Jacqueline de Paviot, mais que celle-ci a fait mettre son nom sur un livre relié dans le style des reliures primitivement exécutées pour la sœur de Henri III.

Rien ne nous permet de savoir quelle Jacqueline de Paviot posséda ce beau livre. Peut-être, d’après la forme Jacqueline, s’agit-il de la femme de Jacques de Courtenay, mariée en 1632, car la fille de Charles III de Paviot, qui se maria quatre fois, signe toujours Jacqueline.

Nous terminerons, avec la description de ce livre, cet aperçu rapide sur la maison de Paviot. C’est cette reliure qui suscita notre curiosité et nous conduisit à rechercher à quelle génération pouvait appartenir Jacqueline de Paviot, dont le nom de famille est connu de tous ceux qu’intéresse l’histoire des environs d’Étampes. Et c’est ainsi que nous prîmes connaissance des Paviette et des efforts qu’ils firent pour se rattacher à une maison de Beauce, beaucoup plus ancienne et plus illustre que la leur. Il nous a paru que cette tentative, qui fut couronnée de succès, méritait une publication, et qu’il n’était pas sans intérêt de faire revivre en même temps les ombres d’une famille qui joua un certain rôle dans notre région.

R. et S. de Saint-Périer.

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Je Bois Fourgon


04. Le fief des Barbacanes aux Emondants

Grâce à l’obligeance de M. G. Courty, qui a bien voulu nous les signaler, il nous a été possible d’acquérir, récemment, deux écussons sculptés provenant de la ferme dite « des Barbacanes » [située au lieu-dit des]164 165 Émondants, commune de Souzy-la-Briche, qui intéressent notre histoire locale.

Assez frustes, mais cependant bien reconnaissables encore, ces écussons sculptés sur deux blocs de grès, mesurent 25 centimètres environ sur 20 et portent les armes, en écu plein, de la famille de St Paul : d’argent à un sautoir engrêlé de sable. Les engrêlures du sautoir sont indiquées bien nettement ; les émaux, cependant, ne sont pas figurés par les traits conventionnels qui étaient d’usage dans l’art héraldique (quadrillé pour le sable), mais ce fait s’observe fréquemment sur les écussons anciens, d’une exécution souvent assez peu poussée.

C’est parmi des matériaux de démolition provenant d’anciens bâtiments de la ferme, que ces écussons étaient relégués ;

primitivement, nous pensons que l’un d’entre eux devait orner le cintre de la grande porte d’entrée ; l’autre surmontait, peut-être la porte d’accès du principal corps de logis.

Cette ferme est, en effet, construite aux dépens d’un ancien château, dont les fossés, presque complètement comblés, quelques pans de murs, quelques restes de tourelles indiquent l’existence, au milieu des constructions modernes. Le nom seul qu’elle porte encore indique, d’ailleurs, que son origine doit être reportée à une époque assez reculée.

On sait, en effet, que le mot barbacane qui désignait, au Moyen-Âge, un ouvrage de fortification avancé, destiné à protéger un passage, une porte ou une poterne, n’était plus employé dès la fin du XVe siècle, où il fut remplacé par celui de boulevard, ouvrage militaire d’une conception un peu différente, rendu nécessaire par l’emploi de l’artillerie.

On pourrait donc, d’après le sens étymologique, attribuer à la ferme des Émondants une origine très ancienne ; les écussons, que nous venons de retrouver, ne datent pas, cependant, de cette époque, car ce n’est qu’à la fin du XVIe siècle que les Saint-Pol devinrent seigneurs des Émondants.

Étienne de Saint-Pol, premier seigneurs de Lemondans (sic), de la branche cadette des seigneurs de la Briche, épousa en 1571 Gabrielle Le Prince de la Bretonnière, et son second fils, Pierre, lui succéda dans cette seigneurie ; ses descendants conservèrent ce fief jusqu’à la fin du XVIIIe siècle.

Dans son excellent ouvrage, M. Maxime Legrand nous apprend qu’en 1789 l’on assigne, en ce lieu, madame Anne-Charlotte de Saint-Pol du Ris, qui devrait être la dernière représentante de cette branche des Saint-Pol. Fille unique de Pierre de Saint-Pol,

VIe du nom, seigneur de Lemondans, elle est qualifiée de dame de Lemondans et fut mariée à N... Duris, seigneur de Vieuvy, lieutenant des maréchaux de France à Étampes.


C’est, à notre avis, du début de la possession du fief des Barbacanes par les Saint-Pol que datent nos écussons, bien qu’il soit difficile de leur assigner un âge certain, en l’absence de tout fragment d’ornementation, autour de l’ écu ; cependant, leur apparence rustique, pour ainsi dire, leur simplicité, font penser qu’ils ne sont pas postérieurs aux premières années du XVIIe siècle. Ils furent placés, sans doute, sur une construction antérieure, par les nouveaux possesseurs du château, dont l’origine, comme nous l’avons dit, pouvait être beaucoup plus ancienne.

Ainsi se trouve fixée, d’une manière certaine, l’emplacement du fief où résidait, aux Émondants, cette branche des seigneurs de la Briche, dont un membre fut un des plus vaillants officiers de marine du XVIIe siècle. Marc-Antoine, fils de Pierre de Saint-Pol, seigneur de Hécourt et petit-fils de Pierre de Saint-Pol, seigneur des Émondants, capitaine de vaisseau en 1698, se distingua en maintes occasions. Il prit à l’abordage, en 1699, un vaisseau de guerre hollandais de 50 canons, en 1703, le Ludlow, vaisseau anglais, défit une flotte hollandaise la même année, enleva en 1705 une autre flotte qui fut conduite à Brest, et fut tué le 31 octobre 1705 d’un coup de mousquet, à l’attaque de plusieurs vaisseaux ennemis, qui furent pris à l’abordage, sur les côtes de Hollande.

Blason du corsaire Marc-Antoine de Saint-Pol (1665-1705)

Il nous a semblé intéressant, pour l’histoire de notre région, de ne pas laisser anéantir ces vestiges d’une habitation aujourd’hui détruite, et ces écussons, destinés au Musée d’Étampes, évoqueront l’origine, que nous avons essayé de rappeler en quelques mots, de la seigneurie de Saint-Pol, aux Émondants.

Comte de Saint-Périer.

Victoire et mort du chevalier de Saint-Pol, par Gudin (1704)

Tableau portant en bas à droite les armes des Jappin

05. La litre seigneuriale de Bouviile «

Par le comte de Saint-Périer

On sait que la litre, du bas latin litra ou listra, lisière, était une bande d’étoffe noire placée dans les églises et portant de place en place les armoiries du seigneur du lieu lorsqu’on célébrait son service funèbre. Par extension de cette coutume, le droit de peindre une bande noire à l’ intérieur et à l’extérieur de l’église, entrecoupée çà et là d’armoiries peintes ou sculptées, fut accordé au seigneur dit prééminencier, qui n’était pas forcément le seigneur haut justicier. La largeur de cette litre devait être d’un pied et demi et de deux pieds au plus. En outre, les héritiers des gentilshommes qui décédaient dans la paroisse avaient le droit de faire placer une litre au-dessous de celle du prééminencier, mais exclusivement à l’intérieur de l’église. Comme on pouvait s’y attendre, les deux formes de ce privilège de la litre ont donné lieu à d’innombrables discussions, procès, voies de faits même, entre les seigneurs pendant tout l’ancien régime. À l’époque de la Révolution, les litres furent effacées pour la plupart en tant que « symbole de la féodalité », mais quelques-unes ont subsisté jusqu’ici, soit dans des chapelles privées, soit dans des églises rurales éloignées des villes. Les litres sculptées ont été moins aisées à détruire. Malheureusement, elles étaient fort rares en 166 raison de leurs difficultés d’exécution. Cependant, nous en connaissons un bel exemple dans le Lot, à Assier, où la ceinture funèbre sculptée sur le mur extérieur de l’église porte les armes et les insignes de Galiot de Genouillac, le grand Maître de l’Artillerie de France sous François Ier.


Dans l’église de Bouville, nous avons découvert, il y a quelques années, dans l’ancienne chapelle seigneuriale devenue aujourd’hui une annexe de la sacristie, un fragment de litre peinte de 80 centimètres environ de longueur et d’une largeur atteignant les deux pieds rituels. Elle porte comme armoiries de sable à une tour d’argent couverte, maçonnée et crénelée de sable, surmontée d’une flamme de gueules. L’écu est accosté de deux tenants, à dextre une licorne, à senestre un animal peu distinct à cause de la dégradation de la peinture, mais qui pourrait être également une licorne. L’ écu est timbré d’ une couronne de marquis à demi-effacée. Ces armoiries peuvent être identifiées avec certitude : ce sont celles des Jappin. |20 Maximilien Jappin, conseiller et secrétaire du roi, maison et couronne de France et de ses finances, avait acheté en 1637 la seigneurie de Bouville et de Farcheville aux héritiers de la famille    de Châtillon,    qui

descendaient directement des Bouville, constructeurs    de

Farcheville au XIIIe siècle.

D’autre part, les armes des Jappin se retrouvent sur un tableau de l’église, qu’une tradition attribue à une copie de Breughel et qui représente le miracle de Saint Hubert : il a été restauré, nous apprend une inscription au dos, par le frère d’un curé de Bouville à la fin du XIXe siècle, restaurateur mieux intentionné qu’habile. Mais il a heureusement respecté l’ écu qui indique certainement que ce tableau a été donné par un Jappin à l’église de sa seigneurie.

D’autres litres seigneuriales demeurent probablement dans quelques églises de notre région. Une note parue en 1915 dans le Bulletin de la Commission des Antiquités et des Arts de Seine-et-Oise167 en signalait à Mennecy, à Fontenay-le-Vicomte, à Ormoy, à Champcueil. Dans l’église de Guigneville, nous en avons nous-même relevé une, dont les armoiries sont du style du XVIIIe siècle.

Si altérées ou fragmentées qu’elles soient, ces litres seigneuriales offrent beaucoup d’intérêt et méritent grandement d’être préservées. Elles nous apportent une documentation sûre et précise sur les seigneuries du lieu et constituent un vestige gracieux, parfois artistique, d’un passé à jamais aboli.

Plan de 1785 (AD91, cliché Jousset et Gatineau)

06. Nicolas Glasson vicaire de Saint-Germain-lès-Étampes, 1602-1637 ^

La paroisse de Saint-Germain-lès-Etampes, qui groupait quelques maisons autour d’une église aujourd’hui détruite, près de l’emplacement du cimetière actuel de Morigny, a possédé, au début du XVIIe siècle, un vicaire, nommé Nicolas Glasson, dont la piété et les vertus singulières, totalement ignorées de nos jours, ont été à l’origine d’un culte particulier. Aujourd’hui encore, certaines âmes pieuses de notre région croient aux guérisons merveilleuses qui s’accomplissent, dit-on, sur la tombe de cet homme excellent. Mais ceux qui invoquent son intercession ignorent son histoire et il m’a semblé intéressant d’en rappeler quelques traits, grâce à un manuscrit dont je dois la communication à l’aimable obligeance de M. l’abbé Oury, curé de Morigny.

Il s’agit d’une copie, d’une main féminine du milieu du XIXe siècle probablement, faite sur un original aujourd’hui disparu. Cette copie est certainement fautive par endroit et incomplète. Cependant elle nous donne des renseignements intéressants, dans une langue naïve, souvent incorrecte, mais dont la grâce un peu puérile et le charme poétique rappelle, en certains passages, les récits de la Légende dorée. Ce document est intitulé : 168

Copie de ce qui reste d’un ancien manuscrit de Valentin Piché, vigneron, demeurant à Morigny, contenant partie de la vie et mœurs de feu M. Nicolas Glasson, etc.

Nous apprenons d’abord que Nicolas Glasson était le fils d’André Glasson, et qu’il vécut à Puiselet-le-Marais, avec son père, avant d’être appelé à la paroisse de Saint-Germain-lès-Étampes. Il semble avoir fort vénéré son père. Cependant il n’avouait pas à ce digne homme toutes les mortifications qu’il s’imposait, car, « après avoir soupé, faisant feinte d’aller reposer, au plus grand froid de l’hiver, il se mettait tout nu, sans aucun vêtement, et montait la montagne dudit Puiselet, non par le chemin craignant d’être vu de quelqu’un, mais allait par les confins169 épineux, pierreux et raboteux jusqu’au sommet de la montagne dudit Puiselet, jusqu’au lieu où était la croix paroissiale et là faisait oraison l’espace de deux heures ou plus. » Alors seulement il « s’en venait un peu se reposer. » Mais il ne couchait point sur « le lit mollet ; il était vêtu d’une dure haire et il mettait des ronces et épines sous sa couche afin de châtier davantage son corps. »

De pareilles macérations avaient imprimé leurs traces sur le corps du saint homme. « Comme un autre saint Jacques qui, dit l’écriture, dans sa vie avait les genoux durs comme chameau, ainsi lui, après sa mort, aux genoux et principalement au genou droit avait une loupe ou enflure de la grosseur d’un pain d’une livre. » Nous pouvons conclure de ce passage de notre manuscrit que Nicolas Glasson était atteint d’hygroma du genou ou inflammation de la bourse séreuse prérotulienne. Cette affection se rencontre chez les sujets qui soumettent leurs genoux à des pressions répétées et prolongées : moines, religieuses, frotteurs de parquets. Je l’ai observée chez des jardiniers qui passaient de longues heures à genoux devant leurs châssis, occupés au repiquage ou au sarclage des plants. S’il est vrai que l’hygroma de Nicolas Glasson atteignait le volume d’un pain d’une livre, il dut endurer, pendant ses prières, de cruelles souffrances.

Nous ne savons combien de temps Nicolas Glasson vécut à Puiselet, mais nous apprenons qu’il devint vicaire à Saint-Germain-lès-Étampes, alors que le sieur Bréchenier y était curé. Peu de temps après, le sieur Bréchenier devint prieur de l’abbaye de Morigny, distante de 1.500 mètres de Saint-Germain, et il fut remplacé à la cure de Saint-Germain par un jeune religieux de l’abbaye, nommé frère Hochereau. Le nouveau curé et son vicaire devaient être du même âge et une vive sympathie dut les unir bien vite car « ledit Messire Nicolas Glasson se voyant en compagnie selon son cœur, et ainsi comme deux tourterelles d’une même volante, fut joyeux et rendit grâces à Dieu. »

À Saint-Germain, Nicolas Glasson déploya un zèle extrême et fit preuve d’une grande charité : « Il n’avait rien à lui et si on lui donnait quelque chose il le portait lui-même aux capucins de l’Hôtel-Dieu ou autres pauvres honteux nécessiteux qu’il connaissait au village. » Il visitait les malades « les consolant en leur maladie. » Il s’occupait des enfants : « Il avait tellement instruit la jeunesse que c’était une chose admirable de voir le silence qu’il était tenu dans l’église. » Et passait « presque toute la nuit, à l’église, en prières et oraisons, le tout à l’édification de l’église de Dieu et de tout le peuple. »

Cependant de semblables travaux ne suffisaient point à occuper son activité et il entreprit de décorer l’autel de la Vierge « comme peinture et tableaux, bouquets de fleurs et menuiserie, le tout de ses propres mains. » Enfin il alla à Notre-Dame-de-Lorette « afin de massacrer son corps par le pèlerinage. »

Enclin, dit le manuscrit « à la vie solitaire », Nicolas Glasson connut les épreuves qui affligeaient la vie érémitique. Le grand Antoine, dans le désert, avait dû résister aux tentations dont Flaubert nous a dépeint la magnifique splendeur et Paphnuce, abbé d’Antinoé, avait cédé aux embûches de l’Esprit malin quand il voulut sauver du siècle la belle Thaïs, pécheresse d’Alexandrie... Comme eux, Nicolas Glasson fut tenté par le diable qui lui fit voir « des choses épouvantables et dangereuses. » Mais il résista victorieusement à la tentation, « la repoussant par le signe de la croix. »

Le bruit des vertus de Nicolas Glasson s’était répandu dans la région et lui valut des offres séduisantes qu’il repoussa : « À cause de ses rares vertus et bonne renommée le bruit en est couru bien loin qui (fut) cause que lui fut offert plusieurs cures et bénéfices dont il fit refus. » Et l’estime des prêtres d’Étampes l’appelait à officier dans les grandes cérémonies. « À la fête des saints Cant, Cantien et Cantienne, Messire le Curé de Notre-Dame d’Étampes lui donnait son étole avec commission d’administrer à son autel. »

Mais une vie aussi rude avait épuisé ses forces et Nicolas Glasson tomba malade à l’âge de 35 ans. « Il fut saisi d’une fièvre qui lui fit tenir le lit le vendredi, premier jour de mai et dépouiller sa haire et prendre une chemise blanche, sachant bien qu’il serait visité de tout le peuple, comme aussi le fut et principalement de Messire le R. P. abbé de Morigny et de tous ses religieux, des Pères Capucins, des Pères Cordeliers, de Messire170 du Chapitre de Notre-Dame d’Étampes, de M. le Doyen de Sainte-Croix, des

Pères Barnabites et de tous ceux de la paroisse de Saint-Germain et de ses écoliers auxquels il fit une belle remontrance.

Il fut inhumé et « posé avec toutes les cérémonies dues et requises en l’église Saint-Germain devant Notre-Dame le 11 mai 1637. »

J’ai voulu vérifier quelques-unes des dates de notre manuscrit par l’examen des registres paroissiaux. J’ai consulté, à cet effet, à Puiselet-le-Marais, le registre des baptêmes de l’année 1602, mis obligeamment à ma disposition par M. Moullé, secrétaire de la Mairie. Je n’y ai point trouvé l’acte de baptême de Nicolas Glasson. Sans doute n’est-il pas né dans cette paroisse.

Signature du 27 décembre 1633: « N. Glasson pbr. ind. (paraphe) »

Mais les registres paroissiaux de Saint-Germain-lès-Étampes, conservés à la mairie de Morigny, m’ont permis de retrouver la signature de Nicolas Glasson, vicaire, pour la première fois, le 29171 décembre 1633. Depuis cette date, tous les actes, sauf un, sont de son écriture et suivis de sa griffe : N. Glasson, prêtre indigne. Un seul, le 2 août 1635 est signé de Hochereau. Le dernier acte de Nicolas Glasson est du 1er mai 1637, le jour même où, dit notre document, « la fièvre le prit ». Je n’ai pu retrouver son acte de décès, car le premier registre des actes de décès de Saint-Germain ne commence qu’en 1640. Mais la concordance entre les dates données par notre manuscrit et celles des actes officiels nous permet d’ajouter foi au récit de la vie de Nicolas Glasson, quant à la matérialité des faits tout au moins.

La réputation de sainteté de Nicolas Glasson ne périt point avec lui. Vivant, il était aimé de tous ; mort, il fit des miracles. Nous ne savons rien de la période qui s’étend de la mort de Nicolas Glasson à la Révolution. Il est probable que déjà il possédait la réputation de guérir les malades.

En 1797, l’église de Saint-Germain-lès-Étampes fut démolie et la paroisse réunie peu après à celle de Morigny. L’abbaye de Morigny avait été vendue comme bien national en 1791 et l’église du monastère était devenue église paroissiale. On y transporta le corps de Nicolas Glasson. Il fut inhumé à l’ origine de la troisième travée du bas-côté droit de la nef, près du pilier. Par suite d’une erreur singulière, sa tombe fut recouverte par la pierre tombale d’ André Hurault, ambassadeur sous Henri III et Henri IV, mort en 1607, oncle de Jean Hurault, abbé de Morigny. L’épitaphe latine, reproduite en 1683 dans l’ouvrage de Dom Fleureau, était cependant bien lisible.

Et la « pierre du saint » devint le lieu d’un pèlerinage fort suivi. Sans doute parce que Nicolas Glasson avait aimé et instruit les enfants, on lui supposa la vertu de guérir leurs infirmités et il fut admis qu’il faisait marcher les petits enfants dont l’allure était encore hésitante. Des habitants de Morigny, âgés aujourd’hui, ont connu ce pèlerinage alors qu’il attirait encore de nombreux fidèles. On devait amener les enfants trois jeudis consécutifs et les faire asseoir sur la dalle d’André Hurault, considéré à tort comme la pierre tombale de Nicolas Glasson, mais qui, en fait, couvrait le corps du vicaire de Saint-Germain. Ils demeuraient là pendant la messe pendant laquelle on faisait bruler un cierge à Nicolas Glasson. Le troisième jeudi on faisait lire un évangile sur la tête de l’ enfant et la cure était terminée. Alors les enfants jusque-là inertes, disaient les fidèles, se mettaient à marcher. De fort loin les pèlerins affluaient, venant à Morigny dans ces hautes carrioles à ressorts qui sont encore en usage dans nos campagnes, mais dont le nombre diminue chaque jour. Et ainsi s’était institué un culte singulier puisqu’aucune reconnaissance officielle n’en avait été faite. M. l’abbé Oury a bien voulu, en effet, sur ma demande, s’assurer auprès de l’archevêché de Sens, dont dépendait la paroisse de Saint-Germain-lès-Étampes, qu’aucun procès de béatification concernant Nicolas Glasson n’avait été introduit auprès des autorités ecclésiastiques.

En 1876, on s’aperçut que le passage sur la dalle d’André Hurault et les stations prolongées des fidèles effaçaient son inscription. La dalle fut relevée, restaurée et placée verticalement à la base du troisième pilier, au-dessus de la tombe du « saint ». Le squelette de Nicolas Glasson fut mis en bière et inhumé à la même place. Mais le culte demeura attaché à la dalle d’André Hurault et celle-ci, entourée à sa partie supérieure d’une rampe destinée à supporter les cierges, resta dans la croyance populaire, la dalle du vénérable Glasson.

Ainsi depuis trois siècles s’est perpétué dans le petit pays de Morigny le culte d’un homme dont l’ardeur mystique, la charité et le dévouement avaient si vivement excité l’admiration et la reconnaissance de ses contemporains. Mais il est curieux de remarquer que le souvenir de ce personnage n’a point été conservé et que le rite se continue sans que l’histoire de son origine soit connue.

Aujourd’hui encore, de loin en loin, on amène de petits enfants pour toucher la « pierre du saint ». le souvenir est perdu des actes de bonté de Nicolas Glasson, on ignore ce qu’il fut et on ne se le demande pas. On sait seulement que la pierre supposée de sa tombe guérit les enfants malades. Une légende n’a même pas remplacé l’histoire.

Dans la Grèce antique, un mythe gracieux eût expliqué l’origine du mystère. Comme tant de sources sacrées, d’antres divins, de sanctuaires vénérés, la pierre de Nicolas Glasson eût été divinisée et rattachée au panthéon des dieux innombrables qui peuplaient la terre, les bois et les eaux.

Dans notre pays, chez un peuple plus austère et qui n’a pas l’ imagination féconde de l’ Orient, l’ oubli a lentement effacé la personnalité qui est à l’origine du culte. Seul le document qu’il nous a été donné d’analyser a permis de retrouver quelques traits de la physionomie de cet homme, dont la bonté et l’abnégation méritent d’être rappelées.

R. de Saint-Périer.

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07. Sceau de Louis d’Archambault, abbé de Morigny ™


Le sceau figuré ci-dessous, a été donné récemment au Musée d’Étampes par M. Maxime Legrand. Il est en cuivre et mesure 28 millimètres de diamètre ; au centre, un écu, surmonté de la mitre et de la crosse, porte : écartelé d’une croix dentelée de ... accompagnée au 1 et 4 de trois bandes de ... et au 2 et 3 d’une étoile de ... La légende qui entoure l’écu est ainsi conçue :    LVDO.

DAVCHAMBAULT. ABB.

MORIGN.

Il s’agit évidemment du sceau abbatial de Louis d’Archambault (et non Dauchambault) qui fut 43e abbé de Morigny, au XVIIe siècle et dont les armes sont données par Dom Fleureau172 173 avec l’indication des émaux qui |30 n’est pas figurée sur le sceau. Dom Fleureau dit que Louis d’Archambault « eut l’abbaie de Morigny par permutation de la Trésorerie de l’Église

Cathédrale de Beauvais qu’il fit avec Messire André de Berzeau, l’an....., il mourut l’an 1644, le treizième jour d’octobre. »

L’examen des registres paroissiaux de la paroisse de Saint-Germain-lès-Etampes, conservés à la Mairie de Morigny, m’ a permis de préciser, dans une certaine mesure la date de l’arrivée de Louis d’ Archambault à Morigny, date que Dom Fleureau n’ a pas connue.

Je trouve, en effet, Louis d’ Archambault, parrain à Saint-Germain-lès-Etampes, le 5 septembre 1633, le 6 avril 1634 et le 10 juin 1634. Dans ce dernier acte, il est qualifié de Messire Louis d’ Archambault, Conseiller du Roy, plus abbé de Morigny, la marraine est Françoise Guionnet de la paroisse de Notre-Dame d’Étampes. L’acte est signé N. Glasson, prêtre indigne, Françoise Guionnet et Darchambault.

En 1633, Louis d’Archambault était donc déjà abbé de Morigny. Il mourut, dit Dom Fleureau, le 13 octobre 1644 et fut enterré « dans le chœur, devant l’Autel, sous une tombe de marbre noir que la piété de sa mère y a fait mettre ». Rien ne subsiste plus de ce monument.

Il n’est pas inutile de rappeler que la famille d’Archambault a possédé un fief à Pussay jusqu’à la Révolution.

Un acte de partage du 5 mai 1703, signalé par M. Maxime Legrand174, fait mention, en effet, de René-François d’Archambault, grand bailli de Châtillon-sur-Indre, marié à Charlotte de Languedoüe et seigneur en partie de Pussay.

En 1789, Jacques François de Languedoüe d’ Archambault est convoqué aux États Généraux comme seigneur en partie de

Pussay. |31

Le sceau de l’abbé de Morigny intéresse donc à un double titre, l’histoire de notre région et le don de M. Maxime Legrand à notre Musée permet de conserver ce souvenir digne d’attention de notre passé.

R. de Saint-Périer

LA LEVEE

SIEGE

iDE LA VILLE

DESTAMPES

Aucc la défaite des troupes commandées


par le Marelchal de Turenne dans le faux


Dourgde ladite ville; 6c la more du fieur de


Baradas Condu&eur des volontaires.


& Lieutenam, tant François que Poüonnois qui y


Fenfcignc S. lerémc, pics Saint Hilaire.


"Enfemlle la Itjle des noms des Colonels, Capitaines


font demeure^,.


A PARIS,

I * cçy es le Gentil* rue d’EfcofTe, à


M. DC. UI.


08. Les Mazarinades à l’époque du siège d’Étampes (1652) ™

Par le comte de Saint-Périer

On donne le nom général de mazarinades aux pamphlets et satires politiques publiés en France entre 1648 et 1653, pendant les troubles des deux Frondes.

On sait que cette guerre civile, qui faillit devenir une véritable révolution, représentait la réaction de toutes les classes sociales contre l’autorité qu’avait exercée le Cardinal de Richelieu durant les dix-huit années de son ministère.

Richelieu, qui fut peut-être le plus grand de tous les ministres qu’eut la France, avait rendu à celle-ci son rang en Europe et ramené l’ ordre à l’ intérieur en luttant à la fois contre les protestants et contre les empiétements des grands seigneurs. Il n’y avait réussi qu’en déployant une autorité souveraine, une sévérité intraitable et un désintéressement qui lui faisait confondre les intérêts de sa propre personne avec ceux du pays. « Je n’ai jamais eu d’autres ennemis, disait-il en mourant à son confesseur, que les ennemis de l’État ». C’est ainsi qu’après sa mort tous ceux qu’il avait contenus poussèrent un soupir de 175 soulagement et s’efforcèrent de regagner ce qu’il leur avait fait perdre.

Le roi était âgé de cinq ans, sa mère régente, était une Espagnole, dévouée aux intérêts de son fils et du royaume, mais étrangère, comme son premier ministre, Mazarin, Sicilien d’origine ; que Richelieu avait fait naturaliser Français, en même temps qu’il lui faisait donner le chapeau de cardinal, bien que Mazarin ne fut pas prêtre, ce qui pouvait se faire encore à cette

époque. |78

Mazarin, aussi souple et conciliant en apparence que Richelieu était hautain et cassant, en outre, avide, dissimulé et menteur, n’en était pas moins un grand politique et son gouvernement, en fin de compte, continua l’œuvre de Richelieu qu’elle affermit, mais après bien des difficultés et des déboires.

Les attaques contre Mazarin venaient de toutes parts, du peuple qui, excité par des meneurs, cherchait à pêcher en eau trouble et se hâtait de dresser des barricades dans Paris à la moindre occasion, du Parlement qui cherchait à substituer à son rôle purement judiciaire une action politique qui ne lui avait jamais appartenu, des princes du sang et des grands seigneurs, enfin, qui ne demandaient qu’à reprendre les domaines et les privilèges que Richelieu leur avait enlevés.

Ces attaques se répandaient à profusion dans les mazarinades qui remplaçaient ce que nous appelons aujourd’hui la presse d’opposition.

On connaît plus de 4.000 de ces libellés et il est probable que beaucoup d’entre eux ont été perdus, car il s’agit de petites brochures sans couverture, imprimées sur un mauvais papier, de 4 à 8 feuilles, rarement plus. On les vendait au coin des rues, sur les places publiques, pour deux liards ou six deniers ou un « sou tapsé » de six liards. Ils étaient imprimés par des imprimeurs particuliers et clandestins. Le Prince de Condé lui-même, chef du parti des Princes, opposé à Mazarin, entretenait dans son hôtel de Paris, près du Luxembourg, à l’emplacement actuel de la rue Monsieur-le-Prince et de la rue de Condé, une imprimerie privée avec un libelliste et un imprimeur pour la confection des mazarinades. Le coadjuteur de l’archevêque de Paris, Paul de Gondi, plus tard Cardinal de Retz, que l’on s’attendait à voir jouer un autre rôle, avait cinquante colporteurs à ses gages, chargés de crier et de vendre les mazarinades dans les rues.

Le siège d’Étampes, de 1652, ne pouvait manquer d’être un sujet de mazarinades, d’autant plus qu’il ne fut pas un succès pour l’armée royale, commandée par Turenne. L’armée rebelle, dite des Princes, c’est-à-dire de Gaston d’Orléans, oncle du Roi, du Prince de Condé et du Duc de Beaufort, petit-fils d’ Henri IV et de Gabrielle d’Estrées, avait été battue par Turenne, à Bléneau. Voulant ensuite gagner Paris, elle était passée par Montargis, dont elle avait pillé toutes les réserves de vin, par Milly et par Maisse, mais elle était venue se heurter à La Ferté-Alais à des éléments avancés de l’ armée royale, qui l’ avaient rejetée vers Étampes. Elle entra dans notre ville par surprise le 23 avril ; la porte Saint-Pierre, située à l’extrémité de l’actuelle rue Sadi-Carnot, lui fut bénévolement ouverte sur l’affirmation mensongère qu’elle venait occuper notre ville par ordre du Duc de Beaufort, fils de César de Vendôme duc d’Étampes.

Le 4 mai, Turenne, arrivant par Villeconin et Boissy-le-Sec, surprit l’armée occupante et la battit en d’affreux combats de rues à travers toute la ville. Mais il se retira et l’armée des Princes, loin d’abandonner Étampes, bien qu’elle eût subi de lourdes pertes, plus de 2.500 hommes, s’y installa, organisa son ravitaillement et se fortifia. Le 27 mai, Turenne revint mettre le siège devant Étampes et l’on se battit furieusement pendant douze jours. La victoire passait alternativement de l’un à l’autre camp. Mais, bien entendu, si l’on en croit les mazarinades, elle demeurait toujours aux assiégés. Il faut constater, d’ailleurs, que Turenne mena ces opérations avec mollesse, manquant soit d’élan, soit de persévérance.

De même qu’il n’avait pas su profiter du succès de son premier siège, le 7 juin, il se retirait de nouveau, après avoir incendié son camp, mais les rebelles restèrent jusqu’au 23 juin dans notre malheureuse |79 ville, où ils laissaient des amas de ruines, des monceaux de cadavres d’hommes et de chevaux et une population si affaiblie qu’elle fut décimée par les maladies qui s’ensuivirent.

Mais l’esprit de parti, bien indifférent aux misères qu’il engendre, se garde de les évoquer dans les mazarinades concernant la levée du siège d’Étampes, présentée comme un triomphe éclatant des rebelles, sans aucun souci des contradictions qui existent entre elles, ce qui ne facilite pas la tâche des historiens.

On ne compte pas moins de vingt-huit mazarinades relatives au siège d’Étampes. La liste en est donnée par Moreau176, qui a fait le relevé à peu près complet de toutes les mazarinades. Nous en citerons seulement quelques-unes, dont les titres tendancieux montrent bien l’esprit qui animait ces pamphlets.

Lettre de M. le comte de Tavannes à Mgr le duc d’Orléans sur la trahison des Allemans découverte par les habitans de la ville d’Étampes le 27e jour de may 1652, avec la punition exemplaire qui en a esté faite en ladite ville.

Cette mazarinade nous dit que la trahison fut découverte par un vigneron d’Étampes nommé Pierre Le Clerc, chez lequel était logé un capitaine allemand qui appartenait à l’armée des Princes : le vigneron, « vieux routier », comprenait l’ allemand et, ainsi, avait pu démêler le complot. Six capitaines allemands furent saisis, convaincus, en effet, de trahison, étranglés, écartelés, et les tronçons de leurs corps jetés pardessus les murailles dans les fossés de la ville.

Avertissement aux bons Français sur ce qui doit arriver devant la ville d’Étampes, prédit par Michel Nostradamus, huitième partie.

L’armée du roi devait être battue dans la forêt de Torfou, le commentateur de Nostradamus n’avait pas voulu le dire trop tôt, de peur de nuire au stratagème imaginé par le Duc de Beaufort pour amener la bataille et déterminer la victoire.

Le torche-barbe du Mazarin et du maréchal de Turenne à l’arrivée du duc de Lorraine et leurs espérances perdues, en vers burlesques.

Véritables particularités de ce qui s’est passé à l’assaut général donné à la ville d’Étampes par l’armée mazarine, où il est demeuré plus de six cents des ennemis sur la place.

Récit fait pour Paris par la Fronde : 2.000 paysans auraient défendu une brèche avec des faulx et des fléaux, et les mariniers d’Orléans ravitaillent Étampes, ce qui paraît au moins invraisemblable.

La levée du siège de la ville d’Étampes par le maréchal de Turenne ou la défaite de son arrière garde poursuivie jusques à Étréchy par l’armée de son Altesse royale, la nuit du 7 juin 1652.

Il nous reste à dire un mot de la manière dont les mazarinades étaient accueillies par le gouvernement. Leur publication était, naturellement, interdite : un arrêt du Parlement déférait à la juridiction du Châtelet le pouvoir de poursuivre tout écrit calomnieux répandu dans le public « à peine de la vie » pour l’auteur et l’imprimeur. Mais si quelques-uns furent mis en prison, aucun ne subit la peine capitale édictée par la loi.

L’un d’eux marchait déjà au supplice lorsqu’il fut délivré par les garçons imprimeurs auxquels s’étaient joints les « escholiers », qui l’arrachèrent aux mains de ses gardiens et lui rendirent la liberté. |80

Ceci prouve que les sanctions exagérées, en France tout au moins, dépassent le but qui leur est assigné et sont moins efficaces qu’une peine modérée et raisonnable.

141

GRADUEL m RO MAI NJ

I


L’USAGE igS DES RELIGIEUSES

[de LA CONGREGATION,

j^DE NOSTRE DAME

D’ESTAMPES

Contenant les MelFes des principales Feltes de l’année

w ESCRIT PAR

^7L.P. D.J. B. P.C.D. P.

C- LAN N EL M.DC.LXXVII

09. Le graduel de la Congrégation de Notre-Dame d’Étampes, 1677 ™

Le bel antiphonaire du XVIIe siècle qui fait l’objet de cette note nous a été signalé par M. Lucien Dorbon, libraire, rue de Seine, à Paris, au printemps de l’année 1914.

Nous aurions désiré pouvoir offrir au Musée d’Étampes cette pièce si intéressante pour notre histoire locale ; malheureusement, le prix très élevé de ce manuscrit et les ressources encore modiques de notre Société ne nous ont pas permis de réaliser ce vœu. Il nous a semblé alors intéressant de conserver à Étampes au moins un souvenir de ce remarquable ouvrage et nous avons demandé à M. Dorbon l’autorisation d’en reproduire certaines miniatures. M. Dorbon y a consenti avec une bonne grâce à laquelle nous sommes heureux de rendre hommage et seules, les circonstances nous ont empêché jusqu’ici de faire connaître à la Société ce souvenir du passé d’Étampes.

Dans le catalogue de la librairie Dorbon (année 1914), l’antiphonaire qui nous intéresse est ainsi décrit :

« Magnifique manuscrit de l’école de Nicolas Jarry, formant l’une des plus belles pièces qu’il soit possible de rencontrer de 177 l’art des calligraphes et des miniaturistes au XVIIe siècle. Ce graduel dont les dimensions extérieures sont de 83 c/m sur 64 c/m est intérieurement calligraphié et peint sur peau de vélin, chaque feuille étant d’une seule pièce, et comporte 6 et 254 pages. Le nombre des enluminures et lettres ornées |22 est tel qu’on a peine à concevoir qu’un homme seul soit arrivé à terminer ce travail de bénédictin.


« En effet, la décoration comprend : un titre avec encadrement floral, 25 lettres de dimensions 18 cm sur 18 cm environ, dont 18 avec décorations florales, les autres avec paysage, instruments de la Passion, Saint-Esprit, autel et calice, sujets macabres... (Une entre autres est ornée d’un magnifique    portrait178

miniature du Père Pierre Fourrier). 130 lettres ornées, de dimensions 7 cm sur 73 mm, 9 de dimensions 8 cm sur 8 cm dont une avec fort joli paysage, 9 lettres dorées à 4 en-têtes de 40 cm sur 15 cm de haut avec décor ornemental, un d’ entre eux a en médaillon un paysage d’une exécution remarquable ;    8 culs-de-

lampe, fin de ligne de décoration florale, d’ une dimension minimum de 25 cm sur 10 cm. Soit en tout 186 miniatures. La reliure de cet antiphonaire est d’époque, en pleine peau de porc ; elle est ornée à chaque plat de 4 angles et motif central en cuivre repoussé et buriné très finement ; l’ornementation des pièces angulaires est florale, avec têtes d’ange, le motif central représente la Vierge et l’enfant Jésus, avec deux anges en support et le Saint-Esprit au-dessous. État de conservation parfait, seul le dos de la reliure a été renforcé. »

Nous donnons ici une reproduction du titre. L’auteur ne s’est fait connaître que par les initiales L. P. D. J. B. P. C. D. P., ce qui signifie évidemment : le Père Dom Jean-Baptiste P..., chanoine de P. Nous ignorons qui était ce chanoine : suivant la tradition des miniatures d’autrefois, il n’a pas signé son ouvrage. Il semble bien, comme le remarque justement M. Dorbon, s’être inspiré de l’école de Nicolas Jarry, le fameux calligraphe qui écrivit La Guirlande de Julie (1641), enrichie de miniatures peintes par Robert, et qui avait reçu de Louis XIV le brevet d’écrivain et noteur de la musique du roi. Nicolas Jarry, né à Paris vers 1620, était mort avant 1674. Il écrivit des livres religieux : Missale solemne (1641) ; Heures de Nostre Dame escrites à la main (1647). Le père Dom Jean-Baptiste P. a pu être son élève.

La composition florale du titre est un chef-d’œuvre de grâce et d’élégance. La planche ci-jointe en donne quelque idée, mais elle ne peut rendre malheureusement l’éclat des |23-25 couleurs, admirablement conservées sur l’original. L’artiste a joint au souci de la décoration un sens du réalisme digne des miniaturistes du moyen-âge.

En haut et à gauche de la composition, on reconnaît une renoncule ; au-dessous, un lis, qui appartient certainement à la section des lys à périanthe enroulé, tels que le lilicem Martagon, indigène dans nos montagnes et cultivé, depuis une époque très reculée, dans nos jardins. Le style de cette fleur se prolonge en deux appendices foliacés dus à l’imagination de l’artiste, qui a

cherché ainsi à encadrer, avec un appendice semblable à droite, la ligne de texte d Estampes, plus courte que les autres lignes.

Nous ne nous attarderons pas à décrire toutes les fleurs de cette décoration ; elles révèlent une observation exacte de la nature et la connaissance d’une grande variété de formes végétales.

* *

*

Nous reproduisons également une en-tête de page qui comprend un paysage, encadré d’un décor dans le style de |26 Bérain. Ce paysage est d’une finesse admirable au premier plan et le fond se perd dans des lointains brumeux qui témoignent d’une connaissance parfaite des lois de la perspective. Il est manifestement inspiré de Poussin et de son école.

En-tête de chapitre

*

* *

La troisième gravure représente un cul-de-lampe, formé d’un bouquet qui est une merveille de souplesse et d’harmonie. Les fleurs qui le composent, dont les tiges sont réunies à la base par un ruban d’un bleu d’azur, s’étagent les unes au-dessus des autres sans raideur. L’air circule dans toute la composition et chaque fleur se montre sous son aspect le plus gracieux et le plus naturel. Nous trouvons ici une fritillaire (fritillaria meteagris, L.), plante indigène en France, en Italie, en Suisse, en Autriche, dans les pâturages humides des montagnes, encore fréquemment cultivée dans nos jardins. L’exactitude du dessin de cette fleur est digne d’un traité de botanique. Mais la feuille est tout à fait fantaisiste : elle montre des divisions que n’offre pas la feuille lancéolée de la fritillaire.

Cul de Lampe.

À droite, un œillet rouge dont le calice est nettement reconnaissable : on ne voit sur la figure que quatre sépales sur les cinq qui le composent normalement, le dernier se trouvant en arrière de la fleur. On peut même se rendre compte que le calice est fendu ainsi que cela se produit souvent chez les œillets doubles des fleuristes dont la fleur crève, suivant l’expression des horticulteurs. Au-dessous de cet œillet on voit une centaurée double dont l’involucre à écailles est très exactement figuré. Des roses, d’autres œillets, une fleur plus difficilement déterminable (dahlia ou anémone fulgens double ?) complètent l’ensemble de ce bouquet dont la régularité presque systématique, bien caractéristique du XVIIe siècle, n’exclut pas le naturel et la grâce.

Nous avons dû nous borner à la reproduction de ces trois miniatures, mais toutes offrent un égal intérêt. Nous avons pu nous assurer cependant, en examinant le manuscrit, que les paysages représentés sont conventionnels, inspirés des peintres italiens du XVIIe siècle et qu’aucun ne représente une vue des environs d’Étampes. Sans doute, Dom Jean-Baptiste P... n’appartenait-il pas au clergé de notre ville. Peut-être aussi les miniatures et le texte ne sont-ils pas du |27-29 même auteur. Les peintures sont dignes de Nicolas Robert, qui orna de miniatures la Guirlande de Julie et qui peignit, à Blois, sur la demande de Gaston d’Orléans, des plantes et des animaux pour le magnifique ouvrage connu sous le nom de Recueil des Vélins.

Quoi qu’il en soit, ce graduel a bien été fait, ainsi qu’en témoigne le titre, pour la congrégation des religieuses d’Étampes. Le portrait du Père Fourier, que l’on retrouve dans ce manuscrit, montre qu’il était destiné à des religieuses de la Congrégation de Notre-Dame. On sait, en effet, que le Père Fourier, de Mattaincourt, fonda cet Ordre pour l’instruction des jeunes filles, Ordre qui fut approuvé par le Pape Paul V, en 1616.

Enfin, il est intéressant de remarquer que la musique de cet antiphonaire est écrite en notation neumatique. Les religieuses de Notre-Dame d’Étampes étaient donc restées fidèles à la tradition grégorienne, tandis que les « messes royales » de

Dumont commençaient alors à remplacer la belle musique liturgique du moyen-âge.

L’importance de ce manuscrit atteste la prospérité ancienne de la congrégation de Notre-Dame d’Étampes. On sait d’ailleurs que ces religieuses prêtaient souvent des sommes d’argent aux habitants de la ville. Nous avons trouvé nous-même l’indication d’un prêt de ce genre, au XVIIIe siècle, dans le livre de comptes du chevalier de Poilloüe, de Bonnevaux179.

L’histoire de la congrégation de Notre-Dame d’Étampes nous est connue. Ces religieuses vinrent s’installer dans notre ville, nous dit M. Maxime Legrand180, au commencement de l’année 1630. Elles y demeurèrent jusqu’au 3 septembre 1792, date à laquelle les trente religieuses qui habitaient le couvent furent chassées ; leur argenterie fut confisquée et leur maison vendue ».

C’est peut-être à ce moment que le bel antiphonaire quitta notre ville. Il ne devait malheureusement plus y revenir.

R. de Saint-Périer

La borne de la Pièce-à-la-Calande

10. La borne seigneuriale de Saclas ^

L’Abeille d’Étampes a annoncé, le 3 juillet dernier, que la Commission des Monuments historiques avait proposé le classement de la borne, située à Saclas, au lieu-dit la Borne-de-la-Pièce-à-la-Calande.

Ce petit monument offre, en effet, un certain intérêt pour notre histoire locale et je suis heureux que les rapports que j’avais adressés, en 1919, à la Commission des Antiquités et des Arts de Seine-et-Oise et au Ministère des Beaux-Arts, aient abouti à cette proposition de classement.

La borne de Saclas est un bloc quadrangulaire, en grès stampien, de 1 m. 30 de hauteur, situé à l’intersection de l’ancienne route d’Étampes à Saclas et du chemin qui descend à Bierville. Deux de ses faces, celle qui regarde la vallée de la Juine et celle qui est orientée à l’ouest, portent un écu, timbré d’un casque qui est taré de profil, à trois barreaux, la visière et la mentonnière abaissées, ce qui indique une famille d’ancienne noblesse. L’écu porte : d’azur à trois fusées d’or rangées en fasces. Ce sont là les armes de la famille de Fusée ou Fuzée qui posséda la seigneurie de Bierville et plusieurs fiefs à Saclas, et dont nous trouvons mention dans les registres paroissiaux de cette commune, de la fin du XVIe siècle au XVIIIe siècle. En 181 1603, Guillaume de Fuzée est qualifié de seigneur de Garlandres et de Bierville. Le nom de ce fief de Garlandres a donné sans doute, par déformation, son nom au champtier actuel de la Pièce-à-la-Calande. Les Fuzée sont signalés plusieurs fois, dans des actes d’état-civil, jusqu’au milieu du XVIIIe siècle. En 1768, ils n’habitaient plus Bierville, dont Jean-Baptiste Poilloüe de Saint-Mars se rendit acquéreur.

La borne de Saclas a donc servi à indiquer la limite d’un fief de cette famille ; de semblables bornes sont employées depuis une date fort reculée.

Les Romains possédaient déjà cette coutume et, comme nous le faisons encore, employaient deux sortes de bornes. Les unes, placées au bord des routes militaires, indiquaient la distance de mille en mille pas. La distance initiale était comptée à partir du mille d’or, monument élevé au centre du forum de Rome. Sur le territoire de la commune de Saclas, une de ces bornes milliaires182 a été trouvée en 1843, pendant les travaux d’établissement de la ligne de chemin de fer de Paris à Orléans. Elle est aujourd’hui conservée au Musée archéologique d’Orléans ; l’inscription qu’elle porte indique qu’elle fut élevée sous l’empereur Aurélien (270-275 ap. J.-C.).

Les bornes des champs, chez les Romains, étaient plantées, comme les nôtres, avec des témoins, c’est-à-dire avec des petites pierres, des objets divers à leur base, afin de reconnaître leur légitimité, en cas de contestation de limites. On les plantait solennellement, après avoir consacré leur emplacement par des libations et des sacrifices aux dieux.

Le Moyen-Âge conserva l’ usage des bornes ; des poteaux aux armes des seigneurs indiquaient les limites des juridictions féodales. Mais ces bornes armoriées, dont la borne de Saclas nous conserve un souvenir, ont disparu peu à peu. Leur rareté est actuellement extrême et c’est à ce titre que le petit monument qui porte les armes des anciens seigneurs de Bierville, constitue un objet digne d’intérêt pour la région d’Étampes. Il y a donc lieu de se réjouir que la mesure prise par la Commission des Monuments historiques en assure la conservation.

R. de Saint-Périer.

183


11. Borne seigneuriale de Saclas '»

La borne seigneuriale, qui fait l’objet de cette petite note, se trouve sur le terroir de la commune de Saclas, arrondissement d’Étampes, au lieu-dit « La pièce de la Borne-à-la-Calende », section A, n° 1302 partie.

C’est un bloc de grès, quadrangulaire, de 1m50 environ de hauteur, qui porte plusieurs fractures à ses angles. Sur deux de ses faces, à l’Est, regardant la vallée de la Juine, et à l’Ouest, du côté de la plaine, sont gravés assez grossièrement, deux écussons timbrés d’un casque dépourvu de lambrequins. Il semble que ces écus, dont la gravure, ancienne, est sans doute contemporaine de l’érection de la borne, aient été tracés à nouveau sur la pierre, à une époque postérieure. En effet, le contour des écussons est d’une teinte plus vive que le fond de la figure héraldique. Le grès n’a plus, sur ce contour, la patine grise qui caractérise les autres parties de la borne.

Les armés que figurent ces blasons sont celles des Fuzée ou Fusée, qui portent : « d’azur, à trois fusées d’or, rangées en fasce »183 184.

On sait, en effet, que les Fusée étaient seigneurs de Bierville, aujourd’hui commune de Boissy-la-Rivière, près de Saclas.

Cette famille, qui paraît originaire du Gâtinais, dont la noblesse fut confirmée par arrêt de la cour des Aydes, en date du 10 août 1600185, habitait Bierville au début du XVIIe siècle.

En 1603, Guillaume de Fusée est cité, dans les Registres paroissiaux de Boissy-la-Rivière et qualifié de « seigneur de Garlandres et de Bierville ». Ce nom du fief de Garlandres doit être l’origine du nom de « Pierre-à-la-Calende » sous lequel on connaît maintenant la borne seigneuriale de Saclas.

Toutefois, les Fusée ne paraissent pas avoir vécu longtemps à Bierville. En 1633, un baptême les montre mêlés aux Poilloüe186, mais, en 1768, le domaine de Bierville fut .acquis par Jean-Baptiste de Poilloüe de Saint-Mars.

Nous pouvons ainsi dater approximativement la borne de Saclas. Elle doit avoir été placée, sans doute pour limiter la seigneurie de Bierville, au début du XVIIe siècle, mais certainement avant le XVIIIe siècle, date à laquelle les mentions concernant les Fusée s’espacent dans les registres paroissiaux de Boissy-la-Rivière.

Le style des écussons ne nous renseigne guère à cet égard ; assez frustes et sans ornements, ces figures sont sans âge précis et peuvent avoir été gravées aussi bien au XVIe siècle qu’au XVIIIe siècle. C’est l’œuvre, sans doute, d’un ouvrier local et non pas d’un artiste éminent.

Quoi qu’il en soit, cette borne seigneuriale nous paraît digne de quelque intérêt, à cause de la rareté de ces monuments dans notre région.

Signalée par M. Dujardin187, elle n’a pas été figurée, à notre connaissance, et nous estimons que son classement, comme monument historique, serait nécessaire, pour sauvegarder ce témoin modeste mais néanmoins intéressant de notre histoire locale.

R. de Saint-Périer, Membre de la Commission.

CREDITS PHOTOGRAPHIQUES

Logo du Corpus Étampois dessiné par Gaëtan Ader. — Ex-libris du comte de Saint-Périer, p. 1. — Archives des Saint-Périer aux AD91, cote 76J 17 (cliché de Bernard Métivier), p. 6 — Gravure de Jules Lepoint-Duclos (1938), p. 8. — Illustrations reprises des éditions originales, pp. 8, 39, 70, 105, 106, 107, 131, 142, 144, 146, 147, 150 et 154a. — Wikicommons, pp. 64 (dessin de Spedona), 114 (dessin de Mathieu Chaine) et 154b. — Dessins de Bernard Gineste, pp. 110a, 114. — Site internet de l’IGN, retravaillé, p. 110b. — Détail d’un cliché du Musée national de la Marine, p. 115. — Base de données inédite Exona Sancta de Frédéric Gatineau, pp. 116, 118, 120b. — Cliché de François Jousset aux AD91, p. 120b. — Site internet des AD91, pp. 120a et 125. — Cliché de Bernard Gineste, p. 130 grâce à la courtoisie du personnel du Musée intercommunal de l’Étampois. — Scan Googlebooks d’un ouvrage conservé à la Bibliothèque municipale de Lyon.

Table des Matières

Préface

Bibliographie

Le XVIIe siècle (1938)

Un bourgeois d’Étampes au XVIe siècle. Ses biens et sa descendance (1931)

Autour d’une énigme généalogique. Les Paviot de Boisy-le-Sec et les Paviette de Lorraine (1925)

Le fief des Barbacanes aux Émondants (1912)

La litre seigneuriale de Bouville (1947)

Nicolas Glasson, vicaire de Saint-Germain-lès-Étampes, 1602-1637 (1921)

Le sceau de Louis d’Archambault, abbé de Morigny (1921)

Les Mazarinades à l’époque du siège d’Étampes en 1652 (1948)

Le graduel de la Congrégation de Notre-Dame d’Étampes, 1677 (1920)

La Borne seigneuriale de Saclas (1920) Borne seigneuriale de Saclas (1924) Crédits Table

Le monde des Saint-Périer — tome 5 LE SUD-ESSONNE AU XVIIe SIÈCLE

Préface. — Bibliographie. — 01. Le XVIIe siècle. — 02. Un bourgeois d'Étampes au XVIe siècle. Ses biens et sa descendance. — 03. Autour d'une énigme généalogique. Les Paviot de Boisy-le-Sec et les Paviette de Lorraine. — 04. Le fief des Barbacanes aux Émondants. — 05. La litre seigneuriale de Bouville. — 06. Nicolas Glasson, vicaire de Saint-Germain-lès-Étampes, 1602-1637. — 07. Le sceau de Louis d'Archambault, abbé de Morigny. — 08. Les Mazarinades à l'époque du siège d'Étampes en 1652. — 09. Le graduel de la Congrégation de Notre-Dame d'Étampes, 1677. — 10. La Borne seigneuriale de Saclas. — 11. Borne seigneuriale de Saclas.

1

On reproduit ici le chapitre IV de La grande histoire d’une petite ville, Étampes, Étampes, Édition du Centenaire de la Caisse d’Épargne, 1938, pp. 51-69. — Réédition (audacieusement signée « Comtesse de Saint-Périer, bien que marquée surtout par des abréviations) in Étampes. Bulletin Officiel Municipal 4 (hiver 1964-1965), pp. 25-31, avec ce sous-titre : « La plus douloureuse période de l’histoire d’Étampes » et suppression du sous-titre « Les derniers possesseurs du duché », ainsi que des premiers mots « Nous avons vu que ».

2

La fin de ce paragraphe et les trois suivants sont abrégés dans la réédition de 1965, de la manière inepte qui suit : « dès 1596. Pendant plus d’un siècle, la maison de Vendôme conserva l’usufruit de notre duché.

« Mais depuis longtemps, la vie de la Cité s’écoule à l’écart de celle des princes qui portent son nom. Elle ne les connaît guère que par leurs noms précisément, qui figurent en tête de tous les actes du Bailliage. Ce sont les rois qui semblent garder quelque attachement pour elle, comme un souvenir de sa grandeur aux siècles passés.

« Louis XIII, etc.»

3

   La réédition de 1965 supprime « comme nous l’avons vu ».

4

   La réédition de 1965 supprime la suite jusqu’à « et leur monastère... ».

5

   La réédition de 1965 abrège la suite : « un pré dans leur jardin. Il reste. »

6

La réédition de 1965 supprime la fin de la phrase.

7

   La réédition de 1965 supprime toute la suite de ce paragraphe.

8

   La réédition de 1965 supprime les cinq mots qui suivent.

9

La réédition de 1965 précise : « seulement de cinq à six cents hommes : ils décidèrent etc. »

10

   La réédition de 1965 supprime bien à tort la fin de la phrase.

11

   Nous suivons ici la réédition de 1965 qui corrige le texte de 1938 qui écrivait erronément « la sœur .

12

   La réédition de 1965 supprime « entièrement ».

13

   La réédition de 1965 supprime toute la fin de ce paragraphe.

14

La réédition de 1965 supprime toute la fin de ce paragraphe.

15

La réédition de 1965 supprime tout la fin de ce paragraphe et le premier mot du suivant.

16

La réédition de 1965 sabre la suite de ce paragraphe comme suit : « Sa personnalité apparaît dans ses Mémoires, en grande partie inédits qui constituent etc. »

17

   La réédition de 1965 met ici un point d’exclamation.

18

   La réédition de 1965 supprime ici « jamais ».

19

   La réédition de 1965 porte ici : « le roi avait fort ri de la manière dont il avait su faire observer “la défense des harangues. »

20

   La réédition de 1965 précise : « à Gouffier, le grand maître de France ».

21

   La réédition de 1965 abrège : « Contenu dans un gros volume manuscrit il se trouva, etc. »

22

   La réédition de 1965 supprime toute la fin de ce long paragraphe.

23

   La réédition de 1965 reformule : « ...en 1668. Il mourut à Étampes en 1674 et fut inhumé. »

24

   La réédition de 1965 supprime tout le paragraphe suivant.

25

   La réédition de 1965 supprime toute la suite de ce paragraphe.

26

   La réédition de 1965 supprime le paragraphe qui suit.

27

   La réédition de 1965 supprime la fin de cette phrase.

28

   La réédition de 1965 ajoute fort mal à propos : « et à notre ville elle-même par ce témoignage de l’intérêt qu’inspire son histoire. »

29

   Conférence des Sociétés savantes de Seine-et-Oise 10 (1931), pp. 98110. — Tiré à part : Rodez, P. Carrère, 1931.

30

   Archives personnelles à Morigny.

31

   Id.

32

   Noël Valois, Le privilège de Chalo St-Mard, Annales-Bulletin de la Société de l’Histoire de France, XXIII, 1886, p. 185.

33

   Un Michel Larsonneur, sans doute le même personnage, était bailli de Guillerval et commissaire du domaine d’Étampes en 1614. (Maxime Legrand, Étampes pittoresque, p. 530.)

34

Nous mettons dans cette édition en caractère gras les indications de lieu qui subdivisent cet inventaire (B. G., 2013).

35

Cf. dans L ’Avare de Molière (acte II, scène 1) : « une bonne serge d’Aumale rose sèche ».

36

   II faut sans nul doute corriger ici en « thueau » et comprendre « tuyau » (B.G.)

37

   Il faut sans doute lire « charroir » (B. G.)

38

   Cant. d’Étampes. Sur les Paviot, cf. R. et S. de St-Périer, Ann. de la Soc. Hist. et arch. du Gâtinais, t. XXXVII, 1925, p. 118.

39

   Cant. de Méréville, arr. de Rambouillet.

40

   Cant. d’Étampes.

41

   Ham. de St-Escobille, cant. de Dourdan, arr. de Rambouillet.

42

   Cant. d’Étampes.

43

   Cant. de Dourdan, arr. de Rambouillet.

44

   Ham. de Richarville.

45

   Cant. de Méréville, arr. de Rambouillet.

46

   Cant. de Méréville, arr. de Rambouillet.

47

   Ham. d’Ormoy-la-Rivière, cant. d’Étampes.

48

   Cant. de Janville, arr. de Chartres.

49

   Fiches Forteau, Musée d’Étampes.

50

   Idem.

51

   Archives personnelles à Morigny.

52

   Idem.

53

   Ham. de Puiselet-le-Marais, cant. de Milly, arr. de Corbeil.

54

   Ham. de Corbreuse, cant. de Dourdan, arr. de Rambouillet.

55

   Nous n'avons pu retrouver l'emplacement de ce fief. [Mais ne faut-il pas lire plutôt « Boisrenaux » ? D’autant qu’il existe bien un hameau de ce nom à Étampes même ? (B. G.)]

56

   Reg[istre] par[oissial] de St-Gilles à Étampes.

57

   Les Fusée étaient seigneurs de Bierville (comm. de Boissy-la-Rivière, cant. de Méréville, arr. de Rambouillet). Une borne seigneuriale à leurs armes existe encore à la limite des communes de Boissy-la-Rivière et de Saclas, au lieu-dit la Pierre-à-la-Calande.

58

C. Dictionnaires des anoblis, Paris, 1875, 1ère partie, p. 161.

59

Annales de la Société historique et archéologique du Gâtinais 37 (1925), pp. 118-163. Dont un tiré à part paginé 1-48.

60

   Biblioth. nat., ms. français, dossiers bleus, n°513.

61

   Alias : ... à lafasce de ... chargés de trois croisettes de gueules. Biblioth. nat., ms. français, Pièces originales 2217.

62

   Gaudeffroy-Penelle, Métais et du Temple de Rougemont. Armorial chartrain. Chartres, 1909, in-8°, t. III, p. 142.

63

   Généalogie de MM. de Paviot, etc., dressée sur les titres qui en restent aujourd’hui par Julien Delimoges, notaire royal à Boissy-le-Sec, le 18 janvier 1695. (Biblioth. nat., ms. français. Carrés d’Hozier, n°484.)

64

   Minutes de Delimoges, notaire royal à Boissy-le-Sec. — Souzy-la-Briche, canton d’Étampes.

65

   Maxime de Montrond, Essais historiques sur la ville d’Étampes. Étampes, Fortin, 1887 ; in-8°, t. II, p. 169.

66

   Archives nationales, JJ 148, fol. 74, pièce 132.

67

   Canton et à 8 kil. d’Étampes.

68

   L'Abeille d’Étampes, n° du 31 mai 1924.

69

   Pièces originales, 2217.

70

   Généalogie de Delimoges, loc. cit.

71

   Archives nationales, X 1 c 87 b, pièce 197.

72

   Sur ce personnage, cf. J. Pichon et G. Vicaire, Le Viandier de Guillaume Tirel dit Taillevent (Paris, Techener, 1892), pp. 143 et 149.

73

   Canton de Dourdan.

74

   Archives du Loiret, A 1217.

75

   Le droit de chasse dans Montbardon et Dourdan demeura attaché à « l’ostel » de Richarville alors que ce fief n’appartenait plus aux Paviot. C’est ainsi que les Cugnac-Dampierre, qui furent seigneurs de Richarville du XVIe au XVIIIe siècle, le revendiquent en 1539, dans les termes mêmes de l’hommage de Pierre Paviot (Dom Fleureau, Les Antiquités de la Ville d’Estampes, Paris, Coignard, 1683, in-4°, p. 59). On voit aujourd’hui encore, à Richarville, un logis à demi ruiné dont la construction peut remonter au temps de Pierre Paviot. La décoration intérieure, fort délabrée, est en grande partie du XVIIIe siècle, mais deux hautes cheminées, à larges hottes en pierre, ont pu abriter le foyer où l’échanson du duc d’Orléans venait se chauffer, au retour de ses courses derrière ses « chiens et lévriers ».

76

   Dossiers bleus, n° 513.

77

   Le P. Anselme, Histoire généal. et chronol. de la maison royale de France, etc. Paris, 1733, VI, 378 B.

78

   Ibid.

79

   Chanoine Hubert (Bibliothèque d’Orléans, ms. 608, fol. 226).

80

   Généalogie de Delimoges, loc. cit.

81

   Archives du Loiret, A 2191.

82

   Bibl. nation., ms. franç. nouv. acquis. 3641, n°723.

83

   Nous devons ces indications ainsi que les cotes des deux pièces précédentes à l’aimable obligeance de M. Devaux.

84

   Chronique de la Pucelle, publ. par Vallet de Viriville. Paris, Delahaye, 1859, in-8°, p. 184.

Journal d’un bourgeois de Paris (1405-1449), éd. Tuetey. Paris, Champion, 1881, in-8°, p. 168.

85

   Chronique de la Pucelle, p.190.

86

   Sur la valeur historique de la Geste des nobles de Cousinot, d’où est extraite la Chronique de la Pucelle, cf. Anatole France, Vie de Jeanne d’Arc, pp. IX-X.

87

   Hubert, loc. cit.

88

   Henri Stein, Charles de France. Paris, Picard, 1911, pp. 32 et 516.

89

   Henri Stein, op. cit., p. 109.

90

   Léon Marquis, Étréchy et les fiefs environnants. Étampes, 1896, p. 20.

91

   Commune de Morigny, canton d’Étampes.

92

   Pièces originales, 2217.

93

   Canton du Havre.

94

   Pièces origin., 2217.

95

   Hubert, loc. cit.

96

   Le Prieur de Mondonville (Bibliothèque nationale, ms. franç. 34127, p. 287).

97

   Henri Stein, op. cit., p. 17.

98

   Le Prieur de Mondonville. loc . cit.

99

   Hubert, loc. cit. ; Pièces origin., 2217. Mondonville, loc. cit.

100

   Généalogie de Delimoges.

101

   Canton d’Arpajon (Seine-et-Oise).

102

   Pièces originales, 2217.

103

   La famille d’Autry était originaire d’Auvergne ; la tante d’Anne, femme de Guillaume de Paviot, avait elle-même épousé un seigneur de Beauce, Simon II d’Allonville, seigneur d’Oysonville (cf. Oysonville; son château, ses seigneurs. Chartres, Garnier, 1892, in-4°, p. 13).

104

   Archives du Loiret, A 1195.

105

   Pièces origin., 2217.

106

   Archives nationales, JJ 237, fol. 43 v°, pièce 88.

107

   Henri Stein, Le ban et l’arrière ban du bailliage d’Étampes en 1541. Ann. de la Soc. hist. et archéol. du Gâtinais, t. XII, 1894, p. 28).

108

   Dom Basile Fleureau, op. cit., p. 549.

109

   Catalogue des actes de François Ier, Paris, Imp. nation., 1889, in-4° ; t. III, p. 604.

110

   Henri Stein, op. cit., p. 30.

111

   Henri Stein, loc. cit.

112

   Marc-Antoine Lamy, Coutumes du Duché d’Étampes. Paris, Charpentier, 1720, in-8°, p. 491.

113

   Canton d’Auneau (Eure-et-Loir).

114

   Dom Morin, Histoire du Gastinois. Paris, Champion, 1883, in-4°, t. II,

p. 818.

115

   Charles Forteau, Fiches inédites (Musée d’Étampes).

116

   Carrés d’Hozier, 484.

117

   Hubert, loc. cit.

118

   Canton d’Étampes.

119

   Dom Morin, loc. cit.

120

   Pièces originales, 2217.

121

   Arrondissement de Sancerre (Cher).

122

   Maxime Legrand , Étampes pittoresque. Étampes, Humbert-Droz, 1902, in-8°; t. II, p. 61.

123

   Varennes-en-Argonne (arrond. de Verdun, Meuse).

124

   Carrés d’Hozier, 484.

125

   Transaction du 13 mars 1604, devant Amoïs, notaire à Étampes, citée par Hubert (loc. cit. ).

126

   Archives du Loiret, A 1195 ; Pièces originales 2217.

127

   Le prieur de Mondonville, loc. cit.

128

   Neufchâteau (Vosges).

129

   Carré d’Hozier, 484.

130

   Carré d’Hozier, 484.

131

   Dom Pelletier, Nobiliaire de la Lorraine et du Barrois, Nancy, Thomas, 1758; in-fol., p. 618.

132

   Sur ce titre et ces fonctions, voir : Piganiol de la Force, Introduction à la description de la France, Paris, 1752, 2 vol. in-12, t. 1 , p. 287 ; et Ann. de la Société du Gâtinais, XII, pp. 192-193.

133

   Carrés d’Hozier, 484.

134

Canton de Stenay (Meuse).

135

Jacques, marié à Comélie d’Est.

136

   C’est par erreur qu’Hubert (loc. cit.) fait naître Charles de Paviot en 1603 : l’acte de décès de ce Charles, que nous citons plus loin, donne d’après l’âge du défunt, la date de 1613.

137

   Le P. Anselme, op. cit., I, 524 E.

138

   Minutes de Delimoges, notaire royal à Boissy.

139

   Dom Fleureau. op. cit., p. 59. Puiselet-le-Marais, canton de Milly, arrondissement d’Étampes.

140

   Registres paroissiaux de Boissy-le-Sec.

141

   Registres paroissiaux de La Forêt-le-Roi, commune voisine de Boissy, canton de Dourdan.

142

   Carrés d’Hozier, 484; et Registres paroissiaux de Boissy.

143

   Registres paroissiaux de Boissy-le-Sec.

144

   Brières-les-Scellés, canton d’Étampes.

145

   Canton de Méréville, arrondissement d’Étampes.

146

   Canton de Dourdan.

147

   Commune de Corbreuse.

148

   Arrondissement de Montmédy (Meuse).

149

   Carrés d’Hozier, 484.

150

   Commune de Châlo-St-Mard, canton d’Étampes.

151

   Canton de Dourdan.

152

   D’Hozier, Pièces originales 2217.

153

   Registres paroissiaux de La Forêt-le-Roi.

154

   Carrés d’Hozier, 484.

155

   L. de La Roque et E. de Barthélemy, Catalogue des Gentilshommes en 1789. Paris, Dentu, l866 ; 2e livraison, p. 34.

156

   Dom Basile Fleureau, op. cit., p. 40.

157

   Minutes de Delimoges.

158

Minutes de Delimoges.

159

Ibid.

160

Archives du Loiret, A 1195.

161

   Maxime Legrand et Léon Marquis, Les trois États du bailliage d’Étampes. Étampes, Brière, 1892, in-8° ; pp. 94 et 114.

162

   Renseignements dus à l’obligeance de M. Sagot, ancien maire de Boissy-le-Sec.

163

Maxime Legrand, op. cit., p. 59.

164

   Abeille d’Étampes 101/44 (1er novembre 1912), p. 2, précédé de l’introduction suivante : « M. le Comte de Saint-Périer qui, on le sait, a entrepris de savantes et passionnantes recherches dans les sous-sols de la vallée de Souzy-la-Briche, veut bien nous communiquer la note suivante sur deux écussons sculptés provenant de la région voisine ; nous le remercions de bien vouloir faire profiter nos lecteurs de cette intéressante communication. ».

165

   Il manque ici, visiblement, une ligne de six ou sept mots, qui a disparu lors de la mise en page de cet article de l’Abeille d’Étampes.

166

Bulletin de la Société Les Amis d’Etampes et de sa région 2 (1er trimestre 1947), pp. 19-20.

167

Vol. XXXV, p. 33.

168

Abeille d’Étampes 101/44 (12 mars 1921), p.l, sous la rubrique : « Variété historique ».

169

Le texte édité par Saint-Périer porte : « consins » (B. G., 2013).

170

Il faut lire ici, évidemment « de Messires du Chapitre », ou peut-être plutôt « de Messieurs de chapitre », c’est-à-dire des chanoines de Notre-Dame d’Étampes, selon le titre qu’on leur donnait alors (B.G.).

171

Corrigez : le 27 (B. G.)

172

   Bulletin de la Société des Amis du Musée d’Étampes 4 (1921), pp. 2728 (saisie de Bernard Gineste, 2013).

173

   Fleureau (R. P. Dom Basile). Les Antiquitez de la ville et du Duché d’Estampes, etc. À Paris, chez J.-B. Coignard, 1683, in-4°, p. 553.

174

Maxime Legrand. Étampes pittoresque. L Arrondissement, p. 373.

175

Bulletin de l’association Les Amis d’Étampes et de sa région 5 (décembre 1948-janvier 1949), pp. 77-80 (B. G. 2013).

176

Bibliographie Générale des Mazarinades, Paris, S. Renouard, 1850, 3 volumes in-8° (S.-P. 1949).

177

Bulletin de la Société des Amis du Musée d’Étampes 3 (1919-1920), pp. 21-29.

178

Le texte porte ici « portail », qui doit constituer une coquille (B. G., 2013).

179

   Dr de Saint-Périer, L Abeille d’Étampes, 3 mai 1919.

180

   Max. Legrand, Étampes pittoresque. Étampes, Humbert-Droz, 1902, page 80.

181

L’Abeille d’Étampes 109/35 (21 août 1920), p. 1.

182

Le texte de L’Abeille porte erronément : militaires (B. G.)

183

   Bulletin de la Commission des Antiquités et des Arts de Seine-et-Oise XLI-XLII (1924), pp. 133-134 (saisie de B. G., 2017).

184

   Dictionn. généal. hist., etc., par M. D. I. C. D. B. à Paris, chez Duchesne, 1757, in-8°, t. II, p. 156.

185

   Ibid., Supplément, t. IV, 1765, p. 221.

186

   Max. Legrand, Étampes pittoresque, 2e partie, p. 748.

187

Ch. Forteau, Les Registres paroissiaux du canton de Méréville, p. 107.


BHASE n°35 (décembre 2016)
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